amèneront la catastrophe. Cela ne veut pas dire que vous ferez bien de vous enfler: non, soyez naturel. 8. Nenni. Non. C'est familier, et souvent plein de charme. On dit beaucoup nenni da, et oh! que nenni! Voici et voilà sont très-bien employés ici. On dit voici de ce qu'on va dire ou faire, et voilà de ce qu'on vient de dire ou de faire. La première fois, quand sa sœur a dit nenni, la grenouille répond m'y voici, c'est-à-dire, regardez, je vais être grosse comme le bœuf, et puis elle fait un grand effort. Après, quand sa sœur a répliqué point du tout, elle fait un nouvel effort, et, cet effort fait, elle s'écrie: m'y voilà. Vous comprenez que y signifie ici au point qu'elle s'efforce d'atteindre, c'est-à-dire, à égaler le bœuf en grosseur. 9. Point. C'est bien le cas d'employer la négation forte; pas serait absolument impropre ici (voir i, 15). Pécore. Bête. Au figuré, personne stupide. Du latin PECORA pluriel de PECUS, bête de troupeau. Chétif. De peu d'importance ou de peu de force. Ce mot est étymologiquement le même que captif, car chétif et captif viennent également de CAPTIVUS, prisonnier. Le passage d'une idée à l'autre est naturel: captif, impuissant, misérable et faible. Le lion de La Fontaine dit au moucheron : Va-t'en, chétif insecte, excrément de la terre ! Et il appelle le cerf chétif hôte des bois, parce qu'il a ri aux obsèques de la lionne. 10. Creva. Employé ici au sens propre et primitif du mot: se rompre par excès de gonflement. Un sac crève quand on l'em plit trop. Voir la fable étudiée dans les Causeries avec mes élèves. IV. LE LOUP ET LE CHIEN (1, 5). Grâce aux filles de mémoire, Peut-être d'autres héros M'auraient acquis moins de gloire. Parle au chien dans mes ouvrages. La Fontaine. La liberté consiste, non pas à avoir un bon maître, mais à n'en avoir aucun. Cicéron. La liberté n'est pas un de ces biens qui ne coûtent rien: si vous l'estimez beaucoup, il faut estimer peu tout le reste. Sénèque. On ne peut être libre et gourmand. Martial. Mon verre n'est pas grand, mais je bois dans mon verre. A. de Musset. Oh! l'avenir est magnifique ! L'irrésistible liberté ! Victor Hugo. Un loup n'avait que les os et la peau, Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau, 5 Gras, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde. L'attaquer, le mettre en quartiers, Sire loup l'eût fait volontiers: Mais il fallait livrer bataille; Le loup donc l'aborde humblement, Il ne tiendra qu'à vous, beau sire, 10 15 D'être aussi gras que moi, lui repartit le chien. 20 Suivez-moi, vous aurez un bien meilleur destin. Le loup reprit: Que me faudra-t-il faire ?Presque rien, dit le chien: donner la chasse aux gens Portants bâtons, et mendiants; Flatter ceux du logis, à son maître complaire; 25 Moyennant quoi votre salaire Sera force reliefs de toutes les façons, Le loup déjà se forge une félicité 30 Qui le fait pleurer de tendresse. 35 -Mais encor?-Le collier dont je suis attaché De ce que vous voyez est peut-être la cause.Attaché! dit le loup: vous ne courez donc pas Où vous voulez ?-Pas toujours; mais qu'importe? Il importe si bien que de tous vos repas Je ne veux en aucune sorte, Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. 40 Cela dit, maître loup s'enfuit, et court encor. 1, 2. A wolf who was but skin and bone, So watchful had the sheep-dogs grown. 3. Dogue. Gros chien de garde; il a le nez écrasé et les lèvres pendantes. L'étymologie de ce mot est l'anglais dog. 4. Poli. Il ne s'agit pas de sa politesse, mais de son poil qui est poli, c'est-à-dire, luisant. La santé et la bonne nourriture donnent ce poli au poil des animaux. Se fourvoyer. C'est perdre le bon chemin, se tromper de chemin. Vient du latin FORIS hors et VIA voie : être hors de la voie. Par mégarde. n'avait pas pris garde au chemin dans lequel il était entré. Mégarde est un substantif qui n'est usité que dans cette locution par mégarde. Il est formé de mes et garde. Mes est un préfixe qui a un sens privatif ou péjoratif. Il est dérivé du latin MINUS, moins. Garde mesgarde, compts mescompte, connaître mesconnaître, allier mesallier, etc. Mes du vieux français est devenue mé dans la langue moderne: mégarde, mécompte, méconnaître, etc. 5. Le mettre en quartiers. C'est-à-dire en quatre morceaux QUARTER HIM, comme dit l'anglais. 8. Mátin (voir xxvi, 47). Taille (voir iii, 2). 10. L'aborde humblement. C'est l'exacte expression. On aborde un grand, un fort ou un maître, avec plus ou moins de courage, de décision; ou avec respect, humblement. Mais on accoste familièrement. Vous accostez en route un voyageur, et vous entrez en conversation. L'étymologie n'indique pas de différence entre les deux termes. Aborder vient de bord, et accoster de COSTA, qui est aussi le bord, le rivage. 12. Embonpoint. Formé de en bon point. Il est étrange qu'on n'écrive pas embompoint. C'est parce qu'autrefois on écrivait en trois mots en bon point. Mais alors, pourquoi ne pas écrire enbonpoint, ou plutôt l'écrire en trois mots comme anciennement? La personne qui a de l'embonpoint est un peu grasse. Est-ce l'anglais PLUMPNESS? 13. Il ne tiendra qu'à vous. Il dépendra de vous uniquement. 14. Repartit est le terme propre. Le seigneur Dogue sourit en appelant l'autre beau sire; il est prompt à la réplique, se moque des bois, et traite sans façon les loups de cancres et de pauvres diables. Tout cela est d'accord avec le sens de repartir. Répondre ne conviendrait guère ici. On répond simplement, avec clarté, avec justesse. Vous m'éclairez par votre réponse. La repartie montre de l'esprit, de la finesse; elle est prompte et à-propos, vive ou spirituelle.-Vous savez que répliquer, c'est répondre à une réponse. 17. Cancre. C'est d'abord un détestable avare; puis, comme ici, un individu sans ressources, qui va mourir de faim. Ce mot a la même origine que chancre, une ulcère disposée à s'étendre, et qui ronge; c'est le latin CANCER. Hère. Terme de mépris: le hère n'est pas considéré. Vient probablement du latin HERUS maître, peut-être de l'allemand HERR, qui signifie aussi maître. En tout cas, le français a donné à ce mot un sens péjoratif, ce qui arrive souvent dans les langues. Ainsi ROSS, le cheval de guerre en allemand, nous ■ donné ROSSE, mauvais cheval, qui n'a plus de force. |