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INTRODUCTION.

LA Médecine est-elle susceptible de former un ensemble régulier de doctrine, et peut-on lui appliquer une méthode d'enseignement analogue à celle des autres sciences physiques? Quelque opinion qu'on ait déjà adoptée sur ces objets, on doit au moins quelque attention aux résultats heureux d'une expérience tentée avec tous les moyens que la prudence peut suggérer, surtout une longue habitude de l'enseignement public de cette science, et une immensité de faits recueillis dans les hôpitaux, en donnant des leçons de Clinique interne.

Pour éviter toute confusion et ne s'en tenir qu'à des idées claires et précises, il a été nécessaire de circonscrire l'objet proposé et de ne point mener de front trois branches de la Médecine très-distinctes: 1o. les descriptions purement historiques du cours entier des maladies; 2°. les notions abstraites de la Pathologie générale; 3°. les détails minutieux et quel

à égarer dans des cas très-compliqués, et alors il faut savoir les rejeter et leur en substituer de nouveaux. Combien alors sont nécessaires un grand discernement et une sage retenue!

Une distribution méthodique et régulière suppose dans son objet un ordre permanent et assujetti à certaines lois générales; or, les maladies, qu'on regarderoit à tort comme des écarts ou des déviations de la nature, n'ont-elles point ce caractère de stabilité, puisque leurs histoires recueillies par les Anciens et les Modernes sont si conformes, lorsqu'on ne trouble point la marche de la nature? Une observation attentive et constamment répétée ne porte-t-elle point à les faire envisager comme des changemens passagers, plus ou moins durables, dans les fonctions de la vie, et manifestés par des signes extérieurs avec une constante uniformité pour les traits principaux, et des variétés innombrables pour les traits accessoires? Ces signes extérieurs, pris de l'état du pouls, de la chaleur, de la respiration, des fonctions de l'entendement, de l'altération des traits du visage, des affections nerveuses ou spasmodiques, de la lésion des ap

petits naturels, etc., forment, par leurs diverses combinaisons, des tableaux détachés, plus ou moins distincts ou fortement prononcés, suivant qu'on a la vue plus ou moins exercée, et qu'on a fait des études profondes ou superficielles. Ces changemens internes, connus par leur 'opposition avec l'état de santé, et liés intimement avec des signes sensibles, se dessinent avec tant de régularité, quoique avec des formes variées, se sont si souvent reproduits, et ont été décrits avec tant d'exactitude, que, dans l'exercice de la Médecine, on peut à peine trouver une maladie qu'un homme instruit et judicieux ne puisse déterminer, et dont une maladie analogue ne soit consignée dans quelque ouvrage. Sous ce point de vue, la maladie doit être considérée, non comme un tableau sans cesse mobile, comme un assemblage incohérent d'affections renaissantes qu'il faut sans cesse combattre par des remèdes, mais comme un tout indivisible depuis son début jusqu'à sa terminaison, un ensemble régulier de symptômes caractéristiques et une succession de périodes, avec une tendance de la nature,

quentation assidue des hôpitaux, pour prendre des notes régulières sur le cours naturel des maladies et leurs caractères distinctifs. On a dû ensuite être appelé par des circonstances heureuses à remplir de grandes places, soit dans l'enseignement public de la Médecine, soit dans la direction médicale de quelque grand hôpital, et encore mieux avoir été porté à faire plusieurs années des leçons de Clinique interne en présence d'un grand nombre d'élèves. On offre alors un sûr garant que les maladies ont été étudiées avec un grand soin durant leur cours entier, qu'elles ont été comparées entre elles pour en saisir les analogies et les différences, que les plus compliquées ont été analysées; qu'enfin on a tâché de ne rien laisser échapper dans leurs diverses périodes pour en prévoir l'issue, favorable ou funeste.

Mais j'ai senti vivement en tout temps, et je sens chaque jour davantage combien il importe, à l'exemple des Naturalistes, de cultiver la science des signes, de se former sans cesse à bien saisir les caractères extérieurs des maladies internes, et d'être toujours en garde dans les cas difficiles contre l'illusion et l'erreur.

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