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M. Saumaise a été un fameux critique dans le dixseptième siècle; c'est ce qui a donné lieu à ce vers de Boileau:

Aux Saumaises futurs préparer des tortures;

c'est-à-dire, aux critiques, aux commentateurs à

venir.

Xantippe, femme du philosophe Socrate, était d'une humeur fâcheuse et incominode: on a donné son nom à plusieurs femmes de ce caractère.

Pénélope et Lucrèce se sont distinguées par leur vertu, telle est du moins leur commune réputation : on a donné leur nom aux femmes qui leur ont ressemblé; au contraire, les femmes débauchées ont été appelées des Phrynés ou des Laïs: ce sont les noms de deux fameuses courtisanes de l'ancienne Grèce :

Aux temps les plus féconds en Phrynés, en Laïs,
Plus d'une Pénélope honora son pays.

Typhis fut le pilote des Argonautes; Automédon fut l'écuyer d'Achille, c'était lui qui menait son char: de là on a donné les noms de Typhis et d'Automédon à un homme qui, par des préceptes, mène et conduit à quelque science ou à quelque art. C'est ainsi qu'Ovide a dit qu'il était le Typhis et l'Automédon de l'art d'aimer :

Typhis et Automedon dicar amoris ego.

Sous le règne de Philippe de Valois, le Dauphiné fut réuni à la couronne. (i) Humbert, Dauphin du

(1) Termes de la confirmation du dernier acte de transport du Dauphiné, en faveur de Charles, fils de Jean, duc de Normandie. Cet acte est du 16 Juillet 1349. Voyez les preuves de l'histoire du Dauphiné de M. de Valbonnay, et ses Mémoires pour servir à l'histoire du Dauphiné. A Paris, chez de Bats, 1711.

. On s'est persuadé que la condition en faveur du pre

Viennois, qui se fit ensuite religieux de l'ordre de S. Dominique, se dessaisit et devestit du Dalphiné et de ses autres terres, et en saisit réellement corporellement et de fait Charles, petit-fils du roi, présent et acceptant pour li et ses hoirs et successeurs, et plus bas, transporte audit Charles, ses hoirs et successeurs, et ceux qui auront cause de li perpétuellement et héritablement et en saisine en propriété pleine ledit Dalphiné.

Charles devint roi de France, cinquième du nom ét dans la suite, « il a été arrêté que le fils « aîné de France porterait seul le nom de Dau« phin. »

On fait allusion au Dauphin lorsque, dans les familles des particuliers, on appelle Dauphin le fils aîné de la maison, ou celui qui est le plus aimé : on dit que c'est le Dauphin, par antonomase, par allusion, par métaphore, ou par ironie. On dit aussi un Benjamin, faisant allusion au fils bienaimé de Jacob.

V I.

LA COMMUNICATION DANS LES PAROLES.

LES rhéteurs parlent d'une figure appelée simplement communication; c'est lorsque l'orateur, s'a

<mier-né de nos rois, était tacitement renfermée dans ces << paroles, quoiqu'elle n'y soit pas littéralement expri«mée, » comme on le croit communément. Hist. du Dauphiné. pag. 603, édit. de 1722.

Dans le temps de cette donation faite à Charles, Jean père de Charles, était le fils aîné du roi Philippe de Valois, et fut son successeur; c'est Jean II. Après la mort du roi JeanII, Charles son fils, qui était déjà dauphin, lui succéda au royaume; c'est Charles V, dit le Sage. Ainsi ce ne fut pas le fils aîné du roi qui fut le premier dauphin ; ce fut Charles, fils de l'aîné.

dressant à ceux à qui il parle, paraît se communiquer, s'ouvrir à eux, les prendre eux-mêmes pour juges; par exemple: En quoi vous ai-je donné lieu de vous plaindre? Répondez-moi, que pouvais-je faire de plus? Qu'auriez-vous fait à ma place, etc. En ce sens la communication est une figure de pensée, et par conséquent elle n'est pas de mon sujet.

La figure dont je veux parler est un Trope, par lequel on fait tomber sur soi-même ou sur les autres, une partie de ce qu'on dit par exemple, un maître dit quelquefois à ses disciples, nous perdons tout notre temps, au lieu de dire, vous ne faites que vous amuser. Qu'avons-nous fait ? veut dire en ces occasions qu'avez-vous fait? Ainsi nous, dans ces exemples, n' pas le sens propre, il ne renferme point celui qui parle. On ménage par ces expressions l'amour-propre de ceux à qui on adresse la parole, en paraissant partager avec eux le blâme de ce qu'on leur reproche; la remontrance étant moins personnelle, et paraissant comprendre celui qui la fait, en est moins aigre, et devient souvent plus utile.

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Les louanges qu'on se donne blessent toujours l'amour-propre de ceux à qui l'on parle. Il y a plus de modestie à s'énoncer d'une manière qui fasse retomber sur d'autres une partie du bien qu'on veut dire de soi : ainsi un capitaine dit quelquefois que sa compagnie a fait telle ou telle action, plutôt que d'en faire retomber la gloire sur sa seule personne. On peut regarder cette figure comme une espèce particulière de synecdoque, puisqu'on dit le plus pour tourner l'attention au moins.

VII.

LA LITOTE.

La litote ou diminution est un Trope par lequel on se sert de mots qui, à la lettre, paraissent affaiblir une pensée dont on sait bien que les idées accessoires feront sentir toute la force: on dit le moins par modestie ou par égard; mais on sait bien que ce moins réveillera l'idée du plus.

Quand Chimène dit à Rodrigue, vā, je ne te hais point, elle lui fait entendre bien plus que ces motslà ne signifient dans leur sens propre.

Il en est de même de ces façons de parler, je ne puis vous louer, c'est-à-dire, je blâme votre conduite je ne méprise pas vos présens, signifie que j'en fais beaucoup de cas : il n'est pas sot, veut dire qu'il a plus d'esprit que vous ne croyez : il n'est pas poltron, fait entendre qu'il a du courage: Pythagore n'est pas un auteur méprisable (1), c'est-àdire, que Pythagore est un auteur qui mérite d'être estimé. Je ne suis pas si difforme (2), veut dire modestement qu'on est bien fait, ou du moins qu'on le croit ainsi.

:

On appelle aussi cette figure exténuation elle est opposée à l'hyperbole.

(1) Non sordidus auctor naturæ verique. Hor. I. 1,od. 28. (2) Nec sum adeò informis. Virg. Ecl. 2, v. 25.

C

VIII.

L'HYPERBOLE.

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pour

LORSQUE JORSQUE nous sommes vivement frappés de quelque idée que nous voulons représenter, et que termes ordinaires nous paraissent trop faibles exprimer ce que nous voulons dire, nous nous servons de mots qui, à les prendre à la lettre, vont au-delà de la vérité, et représentent le plus ou le moins pour faire entendre quelque excès en grand ou en petit. Ceux qui nous entendent rabattent de notre expression ce qu'il en faut rabattre, et il se forme dans leur esprit une idée plus conforme à celle que nous voulons y exciter, que si nous nous étions servis de mots propres : par exemple, si nous voulons faire comprendre la légèreté d'un cheval qui court extrêmement vîte, nous disons qu'il va plus víte que le vent. Cette figure s'appelle hyperbole, mot grec qui signifie excès.

Julius Solinus dit qu'un certain Lada était d'une si grande légèreté, qu'il ne laissait sur le sable aucuns vestiges de ses pieds (1).

Virgile dit de la princesse Camille, qu'elle surpassait les vents à la course; et qu'elle eût couru sur des épis de blé sans les faire plier, ou sur les flots de la mer sans y enfoncer, même sans se mouiller la plante des pieds (2).

(2) Primam palmam velocitatis, Ladas quidam adeptus est, qui ità supra cavum pulverem cursilavit, ut arenis pendentibus nulla indicia relinqueret vestigiorum. Jul. Solin.

(2) Illa vel intactæ segetis per summa volaret
Gramina, nec teneras cursu læsisset aristas,
Vel mare per medium fluctu suspensa tumenti
Ferret iter, celeres nec tingeret æquore plantas.

Æn. I. VII, v. 8ʊ8

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