Page images
PDF
EPUB

2. Les contractions, l'excitation immédiate des contractions, la liaison de ces contractions en mouvemens d'ensemble, la coordination de ces mouvemens en saut, vol, marche, ou station, ou préhension, etc., la volition de ces mouvemens, les sensations, tous ces phénomènes sont donc des phénomènes indépendans; les organes d'où ils dérivent, distincts; leur isolement, manifeste; leur localisation, démontrée.

3. Le système nerveux n'est point un système homogène. Les lobes cérébraux n'agissent point comme le cervelet, ni le cervelet comme la moelle épinière, ni la moelle épinière absolument comme les nerfs.

4. Mais il est un système unique.

Toutes ses parties concourent, conspirent, consentent. Ce qui les distingue, c'est une manière d'agir propre et déterminée; ce qui les unit, c'est une action réciproque sur leur énergie commune.

5. La suppression des lobes cérébraux diminue l'énergie du cervelet; la suppression du cervelet diminue l'énergie de la moelle épinière ; celle de la moelle épinière, l'énergie des nerfs.

6. On a déjà vu combien cette énervation immédiate est plus marquée chez les mammifères que chez les oiseaux, et chez les oiseaux

que chez les reptiles. On a vu aussi qu'elle ne se manifeste point de même chez tous.

Par exemple, le retranchement d'un lobe cérébral, dans les mammifères, ou dans les oiseaux, est suivi d'une faiblesse plus prononcée du côté opposé. Ce croisement n'a point lieu, ou du moins n'a pas lieu d'une manière sensible, chez les reptiles.

7. Un second mémoire aura pour objet d'indiquer la cause de cet effet croisé, de montrer à quelles parties il se borne, et à quelles il est remplacé par l'effet direct.

Ce mémoire aura pour objet encore de démêler l'influence propre de chaque partie du système nerveux sur l'énergie totale de ce système; de poser les limites respectives des propriétés des diverses parties nerveuses, et d'assigner, enfin, la part de ces diverses propriétés dans les mouvemens dits involontaires.

8. Dans celui-ci, après avoir rigoureusement déterminé le sens précis des mots excitabilité et sensibilité, j'ai montré que les deux propriétés qu'ils désignent sont deux propriétés nerveuses, et pourtant toutes deux distinctes.

Puis, expérimentant séparément chaque partie du système nerveux, j'ai séparé les propriétés de chacune d'elles; j'ai tour à tour reconnu et

assigné le rôle du nerf, celui de la moelle épinière, celui du cervelet, des tubercules quadrijumeaux, et des lobes cérébraux.

9. Ce rôle présentement connu et assigné, tout le monde conçoit la possibilité de déduire l'altération des parties de l'altération des propriétés, et, réciproquement, la lésion des propriétés de la lésion des parties; ce qui est le but et la fin de toute physiologie et de toute pathologie.

Par exemple, qu'une blessure de la masse cérébrale détermine la perte de la marche et de la station, et j'en conclus la lésion du cervelet; qu'elle détermine des convulsions générales et universelles, et j'en conclus la lésion de la moelle alongée; qu'elle produise simplement ou la stupeur, ou la perte des sensations, et j'en conclus la lésion des lobes cérébraux.

10. J'enfonçai un poinçon dans la boîte crânienne d'un cochon-d'inde : l'animal perdit toutà-coup la faculté de marcher et de se tenir debout. J'ouvris le crâne, et je trouvai le cervelet profondément altéré.

11. J'enfonçai un poinçon très fin dans le crâne d'une grenouille : l'animal tourna longtems sur le côté gauche; le tubercule quadrijumeau gauche avait seul été compromis.

12. Je perçai le crâne d'un pigeon: il mourut dans des convulsions universelles; la moelle alongée se trouva déchirée.

13. On pourra donc enfin soumettre à des règles fixes et positives l'observation encore si embrouillée des lésions cérébrales.

On pourra concilier tant de résultats opposés, ou contradictoires, ou inconcevables en apparence, de tant d'expériences célèbres.

On verra pourquoi Rédi, et Zinn, et Haller, et Lorry, et les autres, ont observé des phénomènes si confus sur les animaux qu'ils mutilaient si aveuglément, et sans savoir sur quelles parties portaient leurs mutilations, et surtout sans avoir, par une analyse expérimentale préalable, déterminé l'expression propre de chacune de ces parties.

On concevra comment les effets des apoplexies varient selon que varie le siége de l'épanche

ment.

Et l'on comprendra, enfin, comment il peut se manifester des paralysies distinctes du sentiment et du mouvement.

14. Je ne pousserai pas plus loin ces conséquences; je laisse aux esprits judicieux le soin de les développer et de les étendre.

RAPPORT

FAIT A L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES
DE L'INSTITUT,

SUR

LE MÉMOIRE LU A CETTE ACADÉMIE

DANS SES SÉANCES DES 4, 11, 25, 31 MARS, ET 29 AVRIL 1822;

AYANT POUR OBJET

LA DÉTERMINATION DES PROPRIÉTÉS DU SYSTÈME NERVEUX, ET DU RÔLE QUE JOUENT LES DIVERSES PARTIES DE CE SYSTÈME DANS LES MOUVEMENS DITS VOLONTAIRES, OU DE LOCOMOTION ET DE PRÉHENSION,

Le secrétaire perpétuel de l'Académie pour les sciences physiques certifie que ce qui suit est extrait du procèsverbal de la séance du lundi 22 juillet 1822.

L'Académie nous a chargés, MM. Portal, le comte Berthollet, Pinel, Duméril et moi, de lui rendre compte d'un mémoire de M. Flourens, intitulé: Détermination des propriétés du système nerveux, ou Recherches physiques sur l'irritabilité et la sensibilité.

« PreviousContinue »