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Français dans trois mois fe ferviront de l'inoculation par fantaisie, fi les Anglais s'en dégoûtent par inconftance. (b)

J'apprends que depuis cent ans les Chinois font dans cet ufage; c'eft un grand préjugé que l'exemple d'une nation qui paffe pour être la plus fage & la mieux policée de l'univers. Il est vrai que les Chinois s'y prennent d'une façon différente : ils ne font point d'incifion, ils font prendre la petite vérole par le nez comme du tabac en poudre; cette façon eft plus agréable, mais elle revient au même, & fert également à confirmer que fi on avait pratiqué l'inoculation en France, on aurait fauvé la vie à des milliers d'hommes.

Il y a quelques années qu'un miffionnaire jéfuite ayant lu ce chapitre, & fe trouvant dans un canton de l'Amérique où la petite vérole exerçait des ravages affreux, s'avifa de faire inoculer tous les petits fauvages qu'il baptifait; ils lui dûrent ainfi la vie présente & la vie éternelle. Quels dons pour des fauvages!

Un évêque de Worcester a depuis peu prêché à Londres l'inoculation; il a démontré en citoyen combien cette pratique avait confervé de fujets à l'Etat; il l'a recommandée en pafteur charitable. On prêcherait à Paris contre cette invention falutaire comme on a écrit vingt ans contre les expériences de Newton tout prouve que les Anglais font plus philofophes & plus hardis que nous. Il faut bien du

(b) Jufqu'ici ce chapitre eft tiré d'une lettre écrite en 1727. Le refte a été ajouté depuis.

temps pour qu'une certaine raison & un certain cou rage d'efprit franchiffent le pas de Calais..

Il ne faut pourtant pas s'imaginer, que depuis Douvres jufqu'aux îles Orcades on ne trouve que des philofophes ; l'espèce contraire compose toujours legrand nombre. L'inoculation fut d'abord combattue à Londres : & long-temps avant que l'évêque de Worcester annonçât cet évangile en chaire, un curé s'était avisé de prêcher contre; il dit que Job avait été inoculé par le diable. Ce prédicateur était fait pour être capucin; il n'était guère digne d'être né en Angleterre. Le préjugé monta donc en chaire le premier, & la raison n'y monta qu'enfuite : c'est la marche ordinaire de l'efprit humain. (1)

(1) Depuis le temps où cet article a été écrit, on a disputé beaucoup en Fiance fur l'inoculation. Voici quels font à peu près les points de la queflion qu'on peut regarder comme bien éclaircis. 1°. La petite vérole naturelle attaque l'homme à tous les âges, & il eft très-rare d'y échapper dans une longue carrière. 2°. la petite vérole naturelle eft beaucoup plus dangereuse que l'inoculation; & les progrès que la médecine a faits en cinquante ans, dans l'art d'inoculer fans danger, font plus certains & plus grands à proportion que ceux qu'elle a pu faire dans l'art de traiter la petite vérole naturelle. 3°. Il est très-rare pour le moins d'avoir deux fois la petite vérole naturelle; il eft auffi rare de l'avoir après l'inoculation, lorfque l'inoculation a véritablement fait contra&er la maladie. 4°. L'établissement général de l'inoculation serait très-avantageux à une nation; il conferverait des hommes, & en préserverait d'autres des infirmités qui font trop fouvent la fuite de la petite vérole naturelle. 5°. L'inoculation eft en général avantageuse à chaque particulier; mais comme celui qui fe fait inoculer s'expose à un danger certain & prochain pour se soustraire à un danger incertain & éloigné, chacun doit fe déterminer d'après fon courage & les circonftances où il se trouve.

INONDATION.

INONDATION.

Ya-t-il eu un temps où le globe ait été entièrement

inondé? Cela eft phyfiquement impoffible. Il se peut que fucceffivement la mer ait couvert tous les terrains l'un après l'autre ; & cela ne peut être arrivé que par une gradation lente, dans une multitude prodigieuse de fiècles. La mer en cinq cents années de temps s'eft retirée d'Aigues-Mortes, de Fréjus, de Ravenne qui étaient de grands ports, & a laiffé environ deux lieues de terrain à fec. Par cette progreffion il est évident qu'il lui faudrait deux millions deux cents cinquante mille ans pour faire le tour de notre globe. Ce qui eft très-remarquable, c'eft que cette période approche fort de celle qu'il faut à l'axe de la terre pour se relever & pour coïncider avec l'équateur; mouvement très-vraisemblable, qu'on commence depuis cinquante ans à foupçonner, & qui ne peut s'effectuer que dans l'efpace de deux millions & plus de trois cents mille années.

Les lits, les couches de coquilles qu'on a découverts à quelques lieues de la mer, font une preuve inconteftable qu'elle a dépofé peu à peu ces productions maritimes fur des terrains qui étaient autrefois les rivages de l'Océan; mais que l'eau ait couvert entièrement tout le globe à la fois, c'est une chimère abfurde en phyfique, démontrée impoffible par les lois de la gravitation, par les lois des fluides, par l'infuffifance de la quantité d'eau. Ce n'eft pas qu'on prétende donner la moindre atteinte à la grande vérité du Dictionn. philofoph. Tome V.

Y

déluge univerfel rapporté dans le Pentateuque; au contraire, c'eft un miracle, donc il le faut croire; c'est un miracle, donc il n'a pu être exécuté par les lois phyfiques.

Tout eft miracle dans l'hiftoire du déluge. Miracle que quarante jours de pluie aient inondé les quatre parties du monde, & que l'eau fe foit élevée de quinze coudées au-deffus de toutes les plus hautes montagnes; miracle qu'il y ait eu des cataractes, des portes, des ouvertures dans le ciel; miracle que tous les animaux fe foient rendus dans l'arche de toutes les parties du monde; miracle que Noé ait trouvé de quoi les nourrir pendant dix mois; miracle que tous les animaux aient tenu dans l'arche avec leurs provisions ; miracle que la plupart n'y foient pas morts; miracle qu'ils aient trouvé de quoi fe nourrir en fortant de l'arche; miracle encore, mais d'une autre espèce, qu'un nommé Palletier ait cru expliquer comment tous les animaux ont pu tenir & fe nourrir naturellement dans l'arche de Noé.

Or l'hiftoire du déluge étant la chose la plus miraculeufe dont on ait jamais entendu parler, il ferait infenfé de l'expliquer ; ce font de ces myftères qu'on croit par la foi, & la foi confifte à croire ce que la raifon ne croit pas, ce qui eft encore un autre miracle.

Ainfi l'hiftoire du déluge univerfel eft comme celle de la tour de Babel, de l'âneffe de Balaam, de la chute de Jéricho au fon des trompettes, des eaux changées en fang, du paffage de la mer Rouge, & de tous les prodiges que DIEU daigna faire en faveur des élus de fon peuple. Ce font des profondeurs que T'efprit humain ne peut fonder.

INQUISITION.

SECTION

PREMIERE.

C'EST

une jurifdiction eccléfiaftique érigée par le fiége de Rome en Italie, en Espagne, en Portugal, aux Indes même, pour rechercher & extirper les infidelles, les juifs & les hérétiques.

Afin de n'être point foupçonnés de chercher dans le menfonge de quoi rendre ce tribunal odieux, donnons ici le précis d'un ouvrage latin fur l'origine & le progrès de l'office de la fainte inquifition, que Louis de Paramo inquifiteur dans le royaume de Sicile fit imprimer l'an 1589 à l'imprimerie royale de

Madrid.

Sans remonter à l'origine de l'inquifition que Paramo prétend découvrir dans la manière dont il eft dit que DIEU procéda contre Adam & Eve, bornons-nous à la loi nouvelle, dont JESUS-CHRIST, felon lui, fut le premier inquifiteur. Il en exerça les fonctions dès le treizième jour de fa naiffance en fefant annoncer à la ville de Jérufalem par les trois rois mages qu'il était venu au monde, & depuis en fefant mourir Hérode rongé de vers, en chaffant les vendeurs du temple, & enfin en livrant la Judée à des tyrans qui la pillèrent en punition de fon infidélité.

Après JESUS-CHRIST, St Pierre, St Paul, & les autres apôtres ont exercé l'office d'inquifiteur, qu'ils ont tranfmis aux papes & aux évêques leurs fucceffeurs.

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