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aller faire autant aux extrémités de l'Orient pour la plus grande gloire de DIEU?

S'il était poffible qu'il y eût des diables déchaînés de l'enfer pour venir ravager la terre, s'y prendraientils autrement? Eft-ce donc là le commentaire du contrains-les d'entrer? eft-ce ainfi que la douceur chrétienne fe manifefte? eft-ce là le chemin de la vie éternelle ?

Lecteur, joignez cette aventure à tant d'autres ; réfléchiffez & jugez.

FEOVA,

JE O VA.

EOVA, ancien nom de DIEU. Aucun peuple n'a jamais prononcé Geova, comme font les feuls Français, ils difaient levo; c'eft ainfi que vous le trouvez écrit dans Sanchoniathon cité par Eufebe, prep. liv. X; dans Diodore, liv. II; dans Macrobe, fat. liv. I, &c. toutes les nations ont prononcé e & non pas g. C'eft du nom des quatre voyelles, i, e, o, u, que fe forma ce nom facré dans l'Orient. Les uns prononçaient ï e oh, en aspirant, ï, e, o, va; les autres yeaou. Il fallait toujours quatre lettres, quoique nous en mettions ici cinq, faute de pouvoir exprimer ces quatre

caractères.

Nous avons déjà obfervé que felon Clément d'Alexandrie, en faififfant la vraie prononciation de ce nom, on pouvait donner la mort à un homme. Clement en rapporte un exemple.

Long-temps avant Moïfe, Seth avait prononcé le nom de Jeova, comme il eft dit dans la Genèfe,

chap. IV; & même felon l'hébreu, Seth s'appela Jeova. Abraham fit ferment au roi de Sodome par Jeova, chap. XIV, v. 22.

Du mot ova les latins firent iov, Jovis, Jovifpiter, Jupiter. Dans le buiffon l'Eternel dit à Moïfe: Mon nom eft Ioua. Dans les ordres qu'il lui donna pour la cour de Pharaon, il lui dit : J'apparus à Abraham, Ifaac &Jacob dans le Dieu puiffant, & je ne leur révélai point mon nom Adonaï, & je fis un pacle avec eux. (a)

Les Juifs ne prononcent point ce nom depuis longtemps. Il était commun aux Phéniciens & aux Egyptiens. Il fignifiait ce qui eft ; & de-là vient probablement l'infcription d'Ifis: Je fuis tout ce qui eft.

JEPH TÉ.

SECTION PREMIERE.

Left

IL eft évident par le texte du livre des Juges que Jephté promit de facrifier la première personne qui fortirait de fa maifon pour venir le féliciter de fa victoire contre les Ammonites. Sa fille unique vint au-devant de lui; il déchira fes vêtemens, & il l'immola après lui avoir permis d'aller pleurer fur les montagnes le malheur de mourir vierge. Les filles juives célébrèrent long-temps cette aventure, en pleurant la fille de Jephté pendant quatre jours. (b)

En quelque temps que cette hiftoire ait été écrite, qu'elle foit imitée de l'histoire grecque d'Agamemnon

(a) Exode, chap. VI, v. 3.
(b) Voyez chap. XII des Juges.

& d'Idoménée, ou qu'elle en foit le modèle, qu'elle foit antérieure ou poftérieure à de pareilles hiftoires affyriennes, ce n'eft pas ce que j'examine; je m'en tiens au texte Jephte voua fa fille en holocauste, & accomplit fon vœu.

Il était expreffément ordonné par la loi juive, d'immoler les hommes voués au Seigneur. Tout homme voué ne fera point racheté, mais fera mis à mort fans rémiffion. La Vulgate traduit: Non redimetur, fed morte morietur. (c)

C'eft en vertu de cette loi que Samuel coupa en morceaux le roi Agag, à qui, comme nous l'avons déjà dit, Saul avait pardonné; & c'eft même pour avoir épargné Agag que Saül fut réprouvé du Seigneur, & perdit fon royaume.

Voilà donc les facrifices de fang humain clairement établis ; il n'y a aucun point d'hiftoire mieux conftaté, on ne peut juger d'une nation que par fes archives, & par ce qu'elle rapporte d'elle-même.

SECTION I I.

Il y a donc des gens à qui rien ne coûte, qui

L

falfifient un paffage de l'Ecriture auffi hardiment que s'ils en rapportaient les propres mots; & qui fur leur menfonge qu'ils ne peuvent méconnaître, espèrent qu'ils tromperont les hommes. Et s'il y a aujourd'hui de tels fripons, il eft à préfumer qu'avant l'invention de l'imprimerie il y en avait cent fois davantage.

Un des plus impudens falfificateurs a été l'auteur (c) Lévitique, chap. XXVII, v. 29.

d'un infame libelle intitulé: Dictionnaire anti-philofophique, & juftement intitulé. Les lecteurs me diront: Ne te fâche pas tant, que t'importe un mauvais livre? Meffieurs, il s'agit de Jephté; il s'agit de victimes humaines, c'est du fang des hommes facrifiés à DIEU que je veux vous entretenir.

L'auteur, quel qu'il foit, traduit ainfi le trenteneuvième verf. du ch. II de l'histoire de Jephté:

Elle retourna dans la maifon de fon père qui fit la confecration qu'il avait promife par fon vau, & fa fille refta dans l'état de virginité.

Oui, falfificateur de Bible, j'en fuis fâché; mais vous avez menti au St Efprit, & vous devez favoir que cela ne fe pardonne pas.

Il y a dans la Vulgate : Et reverfa eft ad patrem fuum, & fecit ei ficut voverat quæ ignorabat virum. Exinde mos increbuit in Ifraël & confuetudo fervata eft ut poft anni circulum conveniant in unum filia Ifraël, & plangant filiam Jephte Galaadita.

Elle revint à fon père, & il lui fit comme il avait voué, à elle qui n'avait point connu d'homme; & de-là est venu l'ufage, & la coutume s'eft confervée, que les filles d'Ifraël s'affemblent tous les ans pour pleurer la fille de Jephte le Galaadite, pendant quatre jours.

Or, dites-nous, homme anti-philofophe, fi on pleure tous, les ans pendant quatre jours une fille pour avoir été confacrée ?

Dites-nous s'il y avait des religieufes chez un peuple qui regardait la virginité comme un opprobre?

Dites-nous ce que fignifie: Il lui fit comme il avait voué, fecit ei ficut voverat? Qu'avait voué Jephté;

qu'avait-il promis par ferment? d'égorger fa fille, de l'immoler en holocaufte; & il l'égorgea.

Lifez la differtation de Calmet fur la témérité du vœu de Jephté & fur fon accompliffement; lifez la loi qu'il cite, cette loi terrible du Lévitique au chapitre XXVII, qui ordonne que tout ce qui fera dévoué au Seigneur ne fera point racheté, mais mourra de mort; non redimetur, fed morte morietur.

Voyez les exemples en foule attefter cette vérité épouvantable; voyez les Amalécites & les Cananéens; voyez le roi d'Arad & tous les fiens foumis à ce dévouement; voyez le prêtre Samuel égorger de fes mains le roi Agag, & le couper en morceaux comme un boucher débite un boeuf dans fa boucherie. Et puis corrompez, falfifiez, niez l'écriture fainte pour foutenir votre paradoxe; infultez à ceux qui la révèrent, quelque chofe étonnante qu'ils y trouvent. Donnez un démenti à l'hiftorien Jofephe qui la tranfcrit, & qui dit pofitivement que Jephté immola sa fille. Entassez injure fur menfonge, & calomnie fur ignorance ; les fages en riront; & ils font aujourd'hui en grand nombre ces fages. Oh! fi vous faviez comme ils. méprifent les Routh quand ils corrompent la fainte écriture, & qu'ils fe vantent d'avoir difputé avec le président de Montefquieu à fa dernière heure, & de l'avoir convaincu qu'il faut penfer comme les frères Jéfuites!

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