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la plus courte, Leibnitz la voie la plus facile; Maupertuis prétend qu'elle emploie le moins possible d'action, ce qui revient au même (1). Ces quatre aperçus développés ont formé les quatre grandes lois du mouvement d'un système de corps, savoir: la conservation du centre de gravité, la conservation de la force vive, la conservation des aires, la moindre action, lois qui ont leur application naturelle aux astres, dont elles régissent les mouvements dans leur ensemble. Le principe de moindre action se trouve dans Descartes. Les règles de la communication des mouvements « ne dépendent que d'un seul principe, qui est que lorsque deux corps se rencontrent qui ont en eux des modes incompatibles, il se doit véritablement faire quelque changement en ces modes, pour les rendre compatibles, mais que ce changement est toujours le moindre qui puisse être, c'est-à-dire que, si certaine quantité de ces modes étant changée, ils peuvent devenir compatibles, il ne s'en changera point une plus grande quantité. Et il faut considérer dans le mouvement deux divers modes, l'un est la motion seule ou la vitesse, et l'autre est la détermination de cette motion vers certain côté (2). » N'estpas clair que le changement le moindre possible

il

(1) Mémoire de l'Acad. 1744.

(2) OEuv., t. IX, p. 197.

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de vitesse et de direction dans le choc enferme le

principe de moindre action?

Si donc, contre l'opinion de Descartes, il ne se conserve pas la même quantité absolue de mouvement dans l'univers, il s'en conserve la même quantité dans le même sens. Il se conserve la même quantité de force vive dans les mouvements astronomiques, c'est-à-dire dans les mouvements majeurs de la nature. Car il est aujourd'hui reconnu qu'emporté dans l'espace, notre système planétaire fait partie d'un système plus vaste, tournant avec d'autres systèmes solaires autour de leur centre commun de gravité. Celui-ci de même fait sans doute partie d'un autre, ainsi successivement, et tout se ramène à un système unique, qui embrasse la création entière. La force vive varie, il est vrai, mais périodiquement, et pour reprendre la même valeur, lorsque les systèmes repassent par la même position. Au reste, cette variation de la force vive ou du carré de la vitesse, prouve que la force ellemême ne varie pas, mais qu'elle se déploie plus ou moins, selon les besoins de la nature. Autrement d'où viendraient une pareille destruction et une renaissance pareille? Il se conserve la quantité moyenne de ces mouvements majeurs; cela ressort de la périodicité de la force vive, dont on vient de parler, et puis de la conservation des aires. La somme des produits des masses par les aires étant

proportionnelle au temps et à la moyenne distance, la vitesse est constante et le mouvement aussi. Enfin il s'y conserve la même économie d'action.

Voilà ce que portait l'idée d'égale quantité de mouvement dans l'univers, ou, pour aller au fond, l'idée que, sous cette infinité de phénomènes particuliers qui semblent se succéder au hasard, ré– gnent des lois générales et immuables que saisit la géométrie.

Par la théorie du pendule (1) et par celle des forces centrales appliquée au cercle (2), Huyghens soumet au calcul le mouvement curviligne. Nous passons les attaques sans fondement de l'abbé Catalan contre sa détermination du centre d'oscillation. Newton, qui paraît aussi de son côté, dès 1665 ou 1666, avoir calculé le mouvement dans le cercle, l'étend en 1682 à une courbe quelconque (3). En 1689, Leibnitz, au moyen du calcul différentiel, le détermine dans les sections coniques (4). Lagrange (5) a remarqué qu'il prend la force centripète ou centrale sur la courbe polygone, et

(1) De horologio oscillatorio, 1673.

(2) De vi centrifuga, 1673, imprimé à la suite de l'ouvrage précédent. (3) Princ. math., liv. I. An. 1687.

(4) « Tentamen de motuum cœlestium causis. » Op., t. III, p. 213.

(5) Manuscrits déposés à la bibliothèque de l'Institut, t. III, lettre E, analyse des forces centrales.

la force centrifuge sur la courbe rigoureuse. A en juger par le soin que d'Alembert se donne au commencement de sa dynamique, 1743, pour signaler la méprise que l'on peut commettre à cet égard, on doit croire qu'elle était alors assez commune. Cependant Leibnitz s'explique plus tard, 1706, peut-être d'après quelque observation qui lui a été faite. Il paraîtrait qu'il avait aussi mesuré la force centrifuge sur la courbe polygone. Par le double de l'effort centrifuge qu'il opposait à l'action de la gravité, il entendait l'effort centrifuge considéré dans la courbe polygone, et qui, en effet, est double du même effort considéré dans la courbe rigoureuse, puisqu'ici il répond au sinusverse, et que là il répond à une ligne deux fois. plus grande. Il resterait à voir s'il est permis d'évaluer, avec la courbe polygone, les forces centrales qui agissent d'une manière continue, et si d'ailleurs ce n'est pas tomber dans la chimère des infiniment petits. Mais cette discussion nous entraînerait trop loin (1).

(1) « Et si nihil in ipsa re, tamen aliquid in enunciatione nostra in melius mutari debere, quo veritatum concentus appareat absolutius. Nempe dicendum est, impressionem novam parentricam planetæ harmonice circulantis, simulque ad solem, vel ad aliud centrum gravitantis, constare ex conflictu gravitationis, et conatus centrifugi, simplici scilicet; non duplici, qui mihi ex incommoda Termini acceptione emerserat, cujus emendationem utilem puto, ut verba rebus quam optime consentiant. Certe gravitatio novam sollicitationem accedendi ad centrum, at conatus centrifu

Peu de temps après, Jean Bernoulli trouve qu'un corps poussé ou sollicité par des forces, dont la résultante ne passe point par le centre de gravité, reçoit un mouvement de translation et un mouvement de rotation (1). Maclaurin s'avise, 1742, de décomposer les forces parallèlement aux axes coordonnés. Dans la recherché du centre d'oscillation, Jacques Bernoulli s'était servi d'un principe que d'Alembert généralisa, 1743, et qui porte son nom. Euler détermina les moments d'inertie et les axes principaux de rotation. Mais ce fut Lagrange (2) qui donna l'expression analytique du mouvement d'un système de corps. Ce

gus circulantis novam sollicitationem recedendi a centro censtituit, variantibus ambabus pro distantia a centro: et ipse conatus totalis inde resultans, in horum conatuum differentia consistit, sequiturque directionem prævalentis. Porro conatus centrifugus circulantis dupliciter accipi potest: vel pro eo, quem mobile exercet, si motus proxime præcedens concipiatur in tangente circuli, vel pro eo, quem mobile exercet, si motus proxime præcedens concipiatur in ipso arcu circulari. Hoc loco enim, ubi ad infinities infinite parva descenditur, angulus contactu negligi non debet. Prior conatus centrifugus locum revera habet initio circulationis, adeoque initialis quidem est, sed non durans; posterior vero persistit, locumque habet in progressu circulationis. Illum vero, qui initialis est, dicemus tangentialem, hunc qui perdurat, arcualem : et posito æquali utrobique circulationis impetu, arcualis est duplus ipsius tangentialis; cum hic representetur per sinum versum, ille per ejus duplum. Simpliciter autem nomine conatus centrifigi, arcualem accipere præstat, cum de circulatione planetæ (quippe dudum cœpta) agitur, et ita enim elegantior et rotundior enunciatio erit. » Op., t. III, p. 400.

(1) « De collisione corporum irregularium. » Op., t. IV, p. 27. (2) Mécanique analytique, 1788.

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