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tations. Selon Niewentyt, « la méthode du calcul différentiel et intégral est sujette à la même difficulté que les autres; c'est que l'on y supprime des quantités infiniment petites, comme si elles étaient nulles (1), » ou qu'on regarde comme égales des quantités qui ne le sont point; car, dit-il, « les seules quantités égales sont celles dont la différence est nulle, ou égale à zéro (2). »

Leibnitz répond qu'il juge égales, non-seulement des quantités dont la différence est nulle, mais celles dont la différence est tellement petite, qu'elle ne peut être comparée avec aucune d'elles, ce qu'il explique ainsi : « Il faut concevoir, par exemple, (1) le diamètre d'un petit élément d'un grain de sable, (2) le diamètre du grain de sable même, (3) celui du globe de la terre, (4) la distance d'une fixe de nous, (s) la grandeur de tout le système des fixes, comme (1) une différentielle du second degré, (2) une différentielle du premier degré, (3) une ligne ordinaire assignable, (4) une ligne infinie, (5) une ligne infiniment infinie (3). » « Car au lieu de l'infini ou de l'infiniment petit, on

(1) « Methodum calculi differentialis et summatorii, laborare communi cum aliis difficultate, quod scilicet quantitates infinite parvæ abjiciantur quasi essent nihil. » Leibnitzii oper., t. III, p. 327

(2) « Solæ eæ quantitates æquales sunt, quarum differentia nulla est, seu nihilo æqualis. » Ibid.

(3) T. III, p. 501.

prend des quantités aussi grandes et aussi petites qu'il faut pour que l'erreur soit moindre que l'erreur donnée (1). » On voit qu'il ne satisfait nullement à la difficulté de Niewentyt. Dans la courbe NMB, la sécante RS ne devient réellemen

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la tangente TP que lorsque le point M coïncide avec le point N, autour duquel elle tourne, et par conséquent que la différence MO des deux coordonnées, et la différence NO des deux abscisses sont rigoureusement nulles. Newton les suppose telles « Par dernière raison des quantités évanouissantes, dit-il, il faut entendre celle qu'ont entre elles des quantités qui diminuent, non pas avant de s'évanouir, ni après qu'elles sont évanouies, mais celle qu'elles ont dans le moment même qu'elles s'évanouissent (2). » Il est clair que la raison ou le rapport de quantités qui s'évanouissent, s'évanouit avec elles.

Voilà une alternative d'où il ne paraît pas aisé

(1) Ibid., p. 370.

(2) Princ. math., liv. I, sect. 1, lem. xi, scol.

de sortir. Si, comme Newton, l'on s'oblige d'anéantir les différentielles, il ne reste rien à considérer; si, avec Leibnitz, on leur attribue une valeur, on ruine l'exactitude du calcul.

Comme dans le développement d'une fonction en séries, par rapport aux puissances ascendantes de l'accroissement donné à la variable, le coefficient du second terme est le coefficient différentiel du premier ordre, et qu'abstraction faite des dénominateurs, les coefficients des termes suivants sont les coefficients différentiels des autres ordres, Lagrange s'est avisé de considérer les propriétés de ces termes, sans s'inquiéter comment ils les ont (2). C'est ce qu'il appelle avoir dégagé le calcul différentiel de la considération de l'infini, et c'est ce qu'il faut appeler l'avoir détruit. Précisément on ne peut connaître les propriétés de ces termes, auxquels il donne le nom de fonctions dérivées, que par la considération de l'infini. N'est-ce pas par cette considération seule que je sais, par exemple, que ce qu'il désigne par fonction prime représente dans une courbe la tangente trigonométrique de l'angle que la tangente à la courbe fait avec l'axe des abscisses, et, dans le mouvement accéléré, la vitesse? Il paraît que Laplace tombait dans une semblable méprise (2). Rédui

(1) Fonctions analytiques et Leçons sur le calcul des fonctions. (2) Essai phil. sur les probabilités, p. 56.

sant ainsi les principes du calcul différentiel à un grossier mécanisme, on conçoit qu'ils en attribuassent l'invention à Fermat. Cependant les fonctions dérivées ont conduit Lagrange à étudier les fonctions en elles-mêmes, indépendamment de toute application, ce qui n'avait point été fait avant lui, du moins comme théorie expresse.

Carnot croit qu'en négligeant les quantités différentielles on commet une erreur, mais que cette erreur est ensuite compensée. Qu'il s'agisse, par exemple, de trouver la sous-tangente TP, il raisonne ainsi «< Par un point R, pris arbitrairement à une distance quelconque du point M, soit menée la ligne RS parallèle à MP, et par les points Ret M soit tirée la sécante RT'; nous aurons

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MN
RN

T'Pou TPTT=MP Cela posé, si nous ima

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ginons que RS se meuve parallèlement à ellemême en s'approchant continuellement de MP, il

est visible que le point T' s'approchera en même temps de plus en plus du point T, et qu'on pourra par conséquent rendre la ligne TT aussi petite qu'on voudra, sans que la proportion établie cidessus cesse d'avoir lieu. Si donc je néglige cette quantité TT dans l'équation que je viens de trouver, il en résultera à la vérité une erreur dans

MN

l'équation TP= MP à laquelle la première sera

RN

alors réduite; mais cette erreur pourra être atténuée autant qu'on le voudra, en faisant approcher autant qu'il sera nécessaire RS de MP: c'est-àdire que le rapport des deux membres de cette équation différera aussi peu qu'on voudra du rapport d'égalité.

Pareillement, d'après l'équation du cercle y2 =

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cette équation est parfaitement exacte, quelle que soit la position du pont R, c'est-à-dire quelles que soient les valeurs de MN et de RN. Mais plus RS approchera de MP, plus ces lignes MN et RN seront petites; et partant, si on les néglige dans le second membre de cette équation, l'erreur qui en résultera

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réduite alors, pourra, comme la première, être

rendue aussi petite qu'on le jugera à propos.

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