Mais les dénominateurs sont égaux, puisque ce sont les rayons du même cercle. Ainsi My= N (h-y); donc y: hy: N: M. Leibnitz, qui ne publia son calcul différentiel que deux ans après, 1684, n'exécute point l'opération, il donne seulement le résultat. «On voit la chose, dit-il, au premier coup d'œil et presque sans aucun calcul, par ma méthode des maxima et des minima, qui, plus que toutes les autres connues jusqu'à ce jour, abrège merveilleusement (1). » Il a bien raison. Huyghens et Newton prouvent la loi de la réfraction, l'un par les ondulations de l'éther, l'autre par l'attraction, ou plutôt par l'impulsion, qu'il donne pour cause à l'attraction. Ces moyens sont aujourd'hui trop connus pour que nous en parlions. Fermat et Huyghens supposent ́ naturellement que la lumière se propage moins vite dans le milieu le plus dense; Descartes, Leibnitz et Newton, qu'elle s'y propage plus vite. La raison de Descartes, c'est que les corps les plus denses ayant ordinairement leurs parties plus dures, elles amortissent moins la pression de la matière subtile, de même qu'une balle roule plus aisément sur une (1) « Ex mea methodo de maximis et minimis, quæ super omnes hactenus notas calculum mirifice contrahit, primo statim obtutu, sine ullo propemodum calculo patet. » Ibid., p. 146. table nue que sur un tapis (1). La lumière, selon Leibnitz, pénètre moins intimement les corps denses, c'est-à-dire qu'elle pénètre en eux de moins petites parties, et par conséquent un moins grand nombre de leurs parties; d'où il suit qu'elle agit contre chacune avec plus de force et se transmet avec plus de vitesse (2). Newton l'attribue à ce que l'éther est plus rare dans les milieux les plus denses (3). En se plaçant dans son système, cette explication est plus plausible, quoiqu'elle soit aussi peu fondée. En 1663, Vossius accuse Descartes d'avoir pris de Snellius ou Snell la loi de la réfraction. «La mesure de Descartes, dit-il, ne diffère point de celle qu'adoptent en général les opticiens, mais sa manière de la démontrer n'est pas la même. Il est assez connu que, dans son séjour en Hollande, il entendit parler de la méthode de Snell pour mesurer les réfractions, d'autant que déjà plusieurs personnes la connaissaient assez, et que Hortensius l'avait exposée en public et en particulier. Donc en avançant que les différentes réfractions ne doivent point être mesurées par les angles, mais par les lignes, il aurait dû présenter cette vérité comme reçue de (1) OEuv., t. V, p. 27. (2) Op., t. III, p. 149. (3) Opt. quest. 19, 20. Snell, dont, suivant son habitude, il passe le nom sous silence (1). » Vossius dit avoir vu le livre manuscrit de Snell, où était consignée cette loi : « Parmi plusieurs autre's monuments remarquables qu'il a laissés, il y a trois livres d'optique, que son fils m'a prêtés l'hiver dernier (2). D'après Huyghens, Descartes avait vu l'ouvrage inédit de Snellius, où il pouvait avoir puisé la loi « Toutes ces recherches de Snell sur la réfraction, remplissant un volume entier, étaient restées inédites. J'ai vu moi-même un jour cet ouvrage, et j'ai appris que Descartes l'avait vu également. C'est de là peut-être qu'il a tiré sa mesure qui consiste dans l'emploi des sinus (3). (1) « Mensura porro Cartesii non discrepat a communi opticorum mensura, sed demonstrationis ratio diversa est. Postquam quippe in Hollendiam venit, satis liquet et ipsum quoque non nihil intellexisse de Snellii methodo ad mensurandas refractiones, utpote quam multi satis norant, quamque Hortensius et publice et privatim exposuerat. Quod itaque habet refractionum momenta non exigenda esse ad angulos, sed ad lineas, istud Snellio acceptum ferre debuerat, cujus nomen more solito dissimulavit. » Responsio ad objecta Joh. de Bruyn., p. 32. (2) << Inter alia vero præclara quæ reliquit monumenta, supersunt quoque tres libri optici, quorum usuram superiori hyeme concessit mihi filius ejus. » De natura et proprietate lucis, p. 36, an. 1662. (3) « Hæc autem omnia, quæ de refractionis inquisitione volumine integro Snellius exposuerat, inedita mansere; quæ et nos vidimus aliquando, et Cartesium quoque vidisse accepimus, ut hinc fortasse mensuram illam, quæ in sinibus consistit, elicuerit » Deoptrica, p. 3. Opuscula posthum 1703. Il est plus affirmatif dans un jugement manuscrit sur les principes de Descartes, et que M. Cousin vient de publier. « Les lois de la réfraction, dit-il, ne sont point de l'invention de Descartes, selon toutes les apparences; car il est certain qu'il a vu le livre de Snellius, que j'ai vu aussi, qui était écrit exprès touchant la nature de la réfraction, et qui finissait par cette règle, dont il remerciait Dieu (1). » Mais Descartes ne pourrait-il avoir vu le manuscrit de Snell, et avoir trouvé la loi? Telle est l'opinion de Leibnitz, d'autant moins suspecte qu'il semble n'être occupé qu'à frustrer Descartes de tou!. « Isaac Vossius a établi que Snell est le premier qui ait trouvé la loi de la réfraction; mais je ne voudrais pas nier pour cela que Descartes n'ait pu le faire de son côté (2).» Puisque, suivant Vossius, Hortensius avait exposé cette loi, que beaucoup de gens la connaissaient, quel front aurait-il fallu à Descartes, si lui-même ne l'avait pas trouvée, pour venir la publier à leur face, sans la rapporter à celui qui jusque-là en était supposé l'auteur? S'il n'eût pas été reconnu qu'il l'avait aussi découverte, pense-t-on que personne (1) Fragm. phil., t. II, p. 162. (2) «Legem refractionis primum invenisse Willebrordum Snellium, Isaac Vossius patefecit, quamquam non ideo negare ausim, Cartesium in eadem incidere potuisse de suo. » Op., t. V, p. 394. |