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membrane intérieure de l'écorce de certains arbres ; cette membrane s'apèle en latin liber, d'où vient livre; ou sur de petites tabletes faites de l'arbrisseau papirus, ou sur de la toile, etc. Ils écrivoient alors avec de petits roseaux, et dans la suite ils se servirent aussi de plumes

come nous.

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L'autre manière d'écrire des anciens, étoit incidendo, en gravant les lettres sur des lames de plomb ou de cuivre, ou bien sur des tablètes de bois enduites de cire. Or pour graver les lettres sur ces lames ou sur ces tablètes, ils se servoient d'un poinçon, qui étoit pointu par un bout et aplati par l'autre la pointe servoit à graver, et l'extrémité aplatie servoit à éfacer; et c'est pour cela qu'Horace a Lib. 1, sat. dit stylum vértere, tourner le style, pour dire, X, V. 72. éfacer, coriger, retoucher à un ouvrage. Ce De súos poinçon s'apeloit stylus, style, tel est le sens Columna, propre de ce mot; dans le sens figuré, il signifie petite colone. la manière d'exprimer les pensées. C'est en ce sens que l'on dit, le style sublime, le style simple, le style médiocre, le style soutenu, le style grave, le style comique, le style poë tique, le style de la conversation, etc.

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columella "

Outre toutes ces manières diférentes d'exprimer les pensées, manières qui doivent convenir aux sujets dont on parle, et que pour cela on apèle style de convenance, il y a encore le style personel c'est la manière particulière dont chacun exprime ses pensées. On dit d'un auteur que son style est clair et facile, ou, au contraire, que son style est obscur, embarassé, etc.: on reconoît un auteur à son style,

c'est-à-dire, à sa manière d'écrire, come on reconoît un home à sa voix, à ses gestes et à sa démarche.

Style se prend encore pour les diférentes manières de faire les procédures selon les diférens usages établis en chaque jurisdiction: le style du palais, le style du conseil, le style des notaires, etc. Ce mot a encore plusieurs autres usages qui viènent par extension de ceux dont nous venons de parler.

Pinceau, outre son sens propre, se dit aussi quelquefois par métonymie, come plume et style: on dit d'un habile peintre, que c'est un savant pinceau.

Voici encore quelques exemples tirés de l'écriture sainte, où la cause est prise pour l'éfet.

Levit. c.

XIX, v. 13.

Si peccaverit ánima portabit iniquitátem Levit.c. V, suam, elle portera son iniquité, c'est-à-dire, v. I. la peine de son iniquité. Iram Dómini portabo Mich. c. quóniam peccávi, où vous voyez que par la co- VII, v. 9. lère du seigneur, il faut entendre la peine qui est une suite de la colère. Non morábitur opus mercenárii tui apud te usque mane, opus, l'ouvrage, c'est-à-dire, le salaire, la récompense qui est due à l'ouvrier à cause de son travail. Tobie a dit la même chose à son fils tout simplement: Quicúmque tibi áliquid Tob. c. IV, operátus fuerit, statim ei mercédem restitue, et merces mercenárii tui apud te omninò non remaneat. Le prophète Osée dit, que les prêtres mangeront les péchés du peuple, peccáta Osée, c. pópuli mei cómedent, c'est-à-dire, les vic- Iv, v. 8. times ofertes pour les péchés.

2o. L'ÉFET POUR LA CAUSE: Come lorsque Ovide dit que le mont Pélion n'a point d'om

v. 15.

Metam. L.72

OE U VRES

XII, v. 513 bres, nec habet Pélion umbras ; c'est-à-dire, qu'il n'a point d'arbres, qui sont la cause de l'ombre; l'ombre, qui est l'éfet des arbres, est prise ici pour les arbres mêmes.

Perse. Prol.

que

Dans la Genèse, il est dit de Rébecca deux nations étoient en elle (1); c'est-à-dire, Esau et Jacob, les pères des deux nations; Jacob des Juifs, Esau des Iduméens.

Les poëtes disent la pale mort, les páles maladies, la mort et les maladies rendent pâle. Pallidámque Pyrénen, la pâle fontaine de Pyrène c'étoit une fontaine consacrée aux Muses. L'aplication à la poësie rend pâle come toute autre application violente. Par la même En. L. vi, raison, Virgile a dit la triste vieillesse.

v. 275.

Lib. 1. Od.

En. I, v.

743.

Pallentes hábitant morbi tristisque Senéctus. Et Horace, pallida mors. La mort, la maladie. et les fontaines consacrées aux Muses, ne sont point pâles, mais elles produisent la pâleur: ainsi, on done à la cause une épithète qui ne convient qu'à l'éfet.

3°. LE CONTENANT POUR LE CONTENU: come quand on dit, il aime la bouteille, c'est-à-dire, il aime le vin. Virgile dit que Didon ayant présenté à Bitias une coupe d'or pleine de vin, Bitias la prit et se lava, s'arosa de cet or plein; c'est-à-dire, de la liqueur contenue dans cette coupe d'or.

ille impiger ausit Spumantem páteram, et pleno se próluit auro. Auro est pris pour la coupe, c'est la matière

(1) Duæ gentes sunt in útero tuo, et duo pópuli ex ventre tuo dividéntur.

GEN. c. XXV, v. 23.

1

pour la chose qui en est faite; nous parlerons bientôt de cette espèce de figure, ensuite la coupe est prise pour le vin.

Le ciel, où les anges et les saints jouissent de la présence de Dieu, se prend souvent pour Dieu même Implorer le secours du ciel; Pater, pergrace au ciel: j'ai péché contre le ciel et lum et cccontre vous, dit l'enfant prodigue à son père. ram te. Luc. Le ciel se prend aussi pour les dieux du

nisme.

paga

cávi in ca

c. XV, v. 18. Siluit terra in conspec

c. I, v. 3.

La terre se tut devant Alexandre; c'est-à- tu ejus. dire, les peuples de la terre se soumirent à Macab. L.x, lui: Rome désaprouva la conduite d'Appius, c'est-à-dire, les Romains désaprouvèrent : Toute l'Europe s'est réjouie à la naissance du dauphin; c'est-à-dire, tous les peuples de l'Europe se sont réjouis.

Lucrèce a dit que les chiens de chasse mettoient une forêt en mouvement (1); où l'on voit qu'il prend la forêt pour les animaux qui sont dans la forêt.

Un nid se prend aussi pour les petits oiseaux qui sont encore au nid.

Carcer, prison, se dit en latin d'un home qui mérite la prison.

4°. LE NOM DU LIEU, où une chose se fait, se prend POUR LA CHOSE MESME on dit un Caudebec, au lieu de dire, un chapeau fait à Caudebec, ville de Normandie.

On dit de certaines étofes, c'est une Marseille, c'est-à-dire, une étofe de la manufacture

(1) Sepire plagis saltum canibúsque ciére.

LUCR. L. v, V. 1250.

de Marseille c'est une Perse, c'est-à-dire une toile peinte qui vient de Perse.

A propos de ces sortes de noms, j'observerai ici une méprise de M. Ménage, qui a été suivie par les auteurs du dictionaire universel, apelé comunément dictionaire de Trévoux ; c'est au sujet d'une sorte de lame d'épée qu'on apèle olinde : les olindes nous viènent d'Alemagne, et sur-tout de la ville de Solingen, dans le cercle de Westphalie: on prononce Solingue. Il y a aparence que c'est du nom de cette ville que les épées dont je parle ont été apelées des olindes par abus. Le nom d'olinde, nom romanesque, étoit déja conu, come le nom de Silvie; ces sortes d'abus sont assez ordinaires en fait d'étymologie. Quoi qu'il en soit, M. Ménage et les auteurs du dictionaire de Trévoux n'ont point rencontré heureusement, quand ils ont dit que les olindes ont été ainsi apelées de la ville d'Olinde dans le Brésil, d'où ils nous disent que ces sortes de lames sont venues. Les ouvrages de fer ne viènent point de ce pays-là: il nous vient du Brésil une sorte de bois que nous apelons brésil, il en vient aussi du sucre, du tabac, du baume, de l'or, de l'argent, etc.; mais on y porte le fer de l'Europe, et sur-tout le fer travaillé.

La ville de Damas, en Syrie, au pié du mont Liban, a doné son nom à une sorte de sabres ou de coûteaux qu'on y fait : il a un vrai damas, c'est-à-dire, un sabre ou un coûteau qui a été fait à Damas.

On done aussi le nom de damas à une sorte d'étofe de soie, qui a été fabriquée originairement dans la ville de Damas; on a depuis

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