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L'Ouie. J'entends la Sonnette.

Le Toucher. Je touche la Sonnette.

La M. Ah! vous êtes des joueurs trop habiles, il n'y a rien à gagner avec vous. Eh bien! Voyons, Monsieur le Goût, pourquoi êtes-vous resté assis?

La Goût. C'est que la Sonnette n'a pas de Goût.

La M. C'est vrai. Et vous, Monsieur l'Odorat, rendez raison de votre conduite, et ditesnous pourquoi vous ne vous êtes pas levé non plus.

L'Odo. C'est parcequ'une Sonnette ne sent rien du tout. A-t-on jamais entendu parler de

l'odeur d'une Sonnette.

La M. Ah! Messieurs les Cinq Sens, à ce qu'il me paraît, vous en savez déjà autant que moi. Mais nous verrons si, à la prochaine fois, vous vous tirerez aussi bien d'affaire. Vous n'aurez qu'à vous tenir fermes, car je ferai de mon mieux pour vous faire bien des gages. payer Les Enf. Ah! maman, jouons encore un peu ; nommez nous une autre chose, s'il vous plaît.

La M. Faut-il donc que je fasse toujours votre petite volonté ? Eh bien! soit. Je nomme une chose qui est maintenant dans la chambre. Je nomme la Fumée.

(La Vue, l'Odorat, le Toucher se lèvent, l'Ouie reste assise, et le Goût paraît moitié assis, moitié debout.)

La M. Ah! Monsieur le Goût, vous êtes

did you remain seated? rendez raison de, account for; pro

embarassé, à ce qu'il paraît; cependant il faut prendre le parti, ou de vous lever, ou de vous asseoir.

Le Goût. Eh bien! puisque cela est ainsi, je me lève moi. Ai-je bien fait, maman?

La M. Nous allons voir cela tout-à-l'heure. Je ne puis rien dire à présent. Et vous, Mademoiselle la Vue, pourquoi vous êtes-vous levée, quand j'ai nommé la fumée ?

La Vue. Parce que la fumée est une chose qu'on voit.

La M. Fort bien. Et vous, Monsieur de l'Odorat, pourquoi vous êtes-vous levé ?

L'Odo. Parce que la fumée est une chose qu'on sent par le nez.

La M. Surement; c'est par l'Odorat que l'on distingue si c'est la fumée ou de bois, ou de charbon, ou de paille, ou de papier brûlé; mais vous, Monsieur le Toucher, pour. quoi, vous êtes-vous levé? Est-ce qu'on touche la fumée?

Le Tou. Moi, je me suis levé, parce qu'il me semble que l'on peut sentir la fumée par le toucher.

La M. Comment cela?

Le Tou. Mais, maman, si l'on met la main sur une caffetière ou sur une marmite qui bout, on sent bien la fumée; elle fait même venir quelquefois des cloches à la main.

La M. C'est très vrai; et il faut convenir, sans doute, que si nous ne touchons pas propre

let us play a little longer; embarassé, perplexed; prendre le parti, decide; ou, either; ou, or; paille, straw; l'on met la main, a hand is held over; marinite, saucepan; sent,

ment la fumée, il y a des cas où elle nous touche de manière à se faire sentir. Ainsi, Monsieur le Toucher, je n'ai pas réussi à vous embarasser. Et vous, Mademoiselle de l'Ouie, pourquoi ne vous êtes-vous pas levée ?

L'Ouie. C'est que la fumée ne fait point de bruit, et qu'on ne peut pas entendre la fumée par les oreilles.

La M. Vous avez raison, il faut en convenir. Et vous, Monsieur le Goût, pourquoi, après avoir long-temps hésité, vous êtes-vous levé?

Le Goût. Maman, c'est que la fumée a un goût. On ne peut pas, il est vrai, la manger toute seule; cependant on dit: ce plat sent la fumée, cette soupe a un goût de fumée. Ainsi, n'est-ce pas que la fumée appartient au goût?

La M. Je ne veux pas disputer avec vous; il pourrait pourtant se faire qu'elle n'appartînt qu'à l'odorat; le nez est bien près de la bouche. Au reste, mon ami, vous vous êtes très-bien tiré d'affaire. En voilà assez pour aujourd'hui.

Les Enf. Oh! maman, nommez nous encore quelque chose, nous vous le demandons en grace.

La M. Mes amis, je suis charmée que ce petit jeu vous amuse, et je suis sûre qu'il peut vous être fort utile. Mais, je crains, avec raison, que si nous continuons à le jouer, quelque temps encore, vous n'en soyez fatigués dès le premier jour. A votre âge on veut jouir trop long-temps de ce qui est nouveau, et l'on finit presque toujours par se dégouter de ce qui est utile. Allons,

feel; cloches, blisters; nous vous le demandons en grace, we entreat you to; encore, longer; dès le premier, the very

mes enfans, remettons la partie à demain. Peutêtre même que votre papa sera des nôtres.

O!

c'est lui qui nous nommera des choses bien difficiles, et je crains que nous ne lui payions beaucoup de gages. En attendant, croyez moi, restons en là.

Les Enf. Comme vous voudrez, maman.

La M. Ah! vous êtes mes charmans enfans.

first; remettons, let us put off; la partie, the play; des nôtres, of our party,

DEUXIÈME PARTIE.

TRAITS HISTORIQUES.

CHAP. I.

HISTOIRE DE JOSEPH.

JACOB avait douze enfans, dont Joseph et Benjamin étaient les plus jeunes.

L'amour particulier que Jacob témoignait à Joseph; la liberté que celui-ci prit d'accuser, devant lui, ses frères d'un crime que l'Ecriture ne nomme point, et le récit qu'il leur fit des songes qui marquaient sa future grandeur, excitèrent leur jalousie et leur haine. Un jour qu'ils le virent venir à eux dans la campagne où ils paissaient leurs troupeaux, ils se dirent l'un à l'autre, "Voici notre songeur qui vient; allons, "tuons le; et le jétons dans une vieille citerne." Sur la remontrance de Ruben, ils se contentèrent de le jeter dans la citerne, après lui avoir ôté la robe bigarrée que lui avait donnée son père. Bientôt même ils le retirèrent pour le

Traits, anecdotes; particulier, partial; témoignait, manifested; devant lui, in his presence; songes, dreams; marquaient, indicated; venir à eux, coming towards them; ils paissaient leurs troupeaux, their flocks and herds were grazing; songeur, dreamer; tuons le, let us kill him; bigarrée, of many colours; que lui avait donné son père, which his father

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