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«Supposons, dit Fontenelle, qu'il n'y ait « jamais eu nul commerce entre Paris et Saint« Denis, et qu'un bourgeois de Paris qui ne «< sera jamais sorti de sa ville soit sur les tours « de Notre-Dame et voie Saint-Denis de loin; << on lui demandera s'il croit que Saint-Denis «< soit habité comme Paris, il répondra hardi« ment que non; car, dira-t-il, je vois bien les << habitants de Paris, mais ceux de Saint-Denis « je ne les vois point, et on n'en a jamais en<< tendu parler; il y aura quelqu'un qui lui re«présentera qu'à la vérité, quand on est sur « les tours de Notre-Dame, on ne voit pas les habitants de Saint-Denis, mais que l'éloigne«ment en est cause; que tout ce qu'on peut « voir de Saint-Denis ressemble fort à Paris; << que Saint-Denis a des clochers, des maisons, « des murailles, et qu'il pourroit bien encore « ressembler à Paris pour ce qui est d'être ha« bité. Tout cela ne gagnera rien sur notre << bourgeois ; il s'obstinera toujours à soutenir << que Saint-Denis n'est point habité, puisqu'il " n'y voit personne. Notre Saint-Denis c'est la « lune, et chacun de nous est ce bourgeois de << Paris qui n'est jamais sorti de sa ville. »

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Nous voyons sept planètes autour du soleil,

la terre est la troisième; elles tournent toutes les sept dans des orbites elliptiques; elles ont un mouvement de rotation comme la terre; elles ont comme elle des taches, des inégalités, des montagnes; et il y en a quatre qui ont des satellites, et la terre en est une; Jupiter est aplati comme la terre; enfin il n'y a pas un seul caractère visible de ressemblance qui ne s'observe réellement entre les planètes et la terre: est-il naturel de supposer que l'existence des êtres vivants et pensants soit restreinte à la terre? Sur quoi seroit fondé ce privilège, si ce n'est peut-être sur l'imagination superstitieuse et timide de ceux qui ne peuvent s'élever au-delà des objets de leurs

sensations immédiates?

Aussi Buffon ne fait aucune difficulté de calculer l'époque à laquelle les planètes ont dû commencer d'être habitées, lorsque, après une longue incandescence, elles ont commencé à s'éteindre et à se refroidir; il trouve qu'il a fallu trente-quatre mille ans à la terre pour devenir habitable; qu'elle a pu l'être depuis quarante un mille ans, et que dans quatre-vingt-treize mille le refroidissement sera tel que la terre congelée sera incapable d'en

tretenir aucune organisation ni aucune végétation.

Il n'en est pas de même, suivant Buffon, de Jupiter, qui, beaucoup plus gros que la terre, conserve aussi bien plus long-temps sa chaleur; il ne commencera que dans trente-quatre mille ans à pouvoir être habité, mais il conservera une chaleur suffisante pendant trois cent soixante et quatorze mille ans.

Ceux qui sont accoutumés à regarder le soleil comme la cause de la chaleur que nous éprouvons sur la terre auront de la peine à concevoir ce refroidissement total; mais M. de Buffon, ainsi que Mairan, ont donné de fortes raisons pour croire que la chaleur de la terre vient du centre même de notre globe, et que celle du soleil n'est qu'une très petite partie de la chaleur que nous éprouvons, et dont nous avons besoin pour subsister. En effet, la chaleur du soleil pénétre si peu la terre que, dans les caves comme celles de l'Observatoire, on ne s'aperçoit pas de la chaleur de l'été ni du froid de l'hiver: le thermomètre y est toujours à 10 degrés.

Mais le système de la pluralité des mondes part d'un principe que d'autres philosophes

n'admettent point; c'est que la terre a été faite pour être habitée, ou du moins que ses habitants en font la première utilité et le mérite principal; d'où la plupart des philosophes concluent que les planètes ne serviroient à rien si elles n'étoient pas habitées; idée peut-être trop étroite et trop présomptueuse. Que sommesnous, peut-on leur dire, en comparaison de l'univers? en connoissons-nous l'étendue, les propriétés, la destination, les rapports? et quelques atomes d'une si frêle existence peuventils intéresser l'immensité de ce grand tout, ou ajouter quelque chose à la perfection, à la grandeur, et au mérite de l'univers? Aussi d'Alembert, traitant cette question dans l'Encyclopédie, finit par dire: « On n'en sait rien. »

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La cause des marées étant purement astronomique, il est naturel d'en faire ici un article. Le flux et le reflux de la mer est un des phénomènes les plus frappants de l'attraction. Tous les jours, au passage de la lune par le méridien, ou quelque temps après, on voit les eaux de l'Océan s'élever sur nos rivages: on a vu à Saint-Malo cette élévation aller jusqu'à cinquante pieds. Parvenues à cette hauteur, les eaux se retirent peu-à-peu; et environ six heures après leur plus grande élévation, elles sont à leur plus grand abaissement; après quoi elles remontent de nouveau lorsque la lune passe à la partie inférieure du méridien, en sorte que la haute mer et la basse mer, le flot et le jusant, s'observent deux fois le jour, et retardent chaque jour de quarante-huit minutes, plus ou moins, comme le passage de la lune au méridien.

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