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1° CALVIN (1509-1564) se convertit au protestantisme et se réfugie à Nérac, puis à Bâle, et de là s'établit à Genève. Chassé d'abord par le parti des libertins, il y rentre en 1541, et jusqu'à sa mort il y exerce une véritable dictature. Il publie en latin, puis traduit en français l'Institution chrétienne (1541), dédiée à François Ier, ouvrage remarquable par sa méthode et la sévérité hautaine de son style.

A côté de Calvin, il faut nommer, parmi les écrivains protestants, GUILLAUME FAREL, THÉODORE DE BÈZE, DUPLESSIS-MORNAY.

2° SAINT FRANÇOIS DE SALES (1568-1622) fut évêque de Genève, résidant à Annecy. Il vint à Paris, où il prêcha avec grand succès, puis retourna en Savoie. Il ne publia que l'Introduction à la vie dévote (1608), ouvrage formé de la réunion de lettres écrites à Mme de Charmoisy, et le Traité de l'amour de Dieu (1616), plus théologique. Il est original à la fois par la largeur de son christianisme et la douceur poétique de son style.

3. Les plus célèbres auteurs de mémoires sont: LE LOYAL SERVITEUR, auteur de la Vie de Bayard (1524), FRANÇOIS DE LA NOUE, protestant, dont les Discours politiques et militaires sont un code de bravoure et de solide piété, BLAISE DE MONTLUC, catholique, qui publie le récit de ses campagnes dans ses vivants et pittoresques Commentaires (1574), AGRIPPA D'AUBIGNÉ protestant, dont les principaux ouvrages en prose sont une Histoire universelle (1616-20) et sa Vie à ses enfants.

4' LES ÉCRIVAINS POLITIQUES.

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LA BOETIE, a laissé un Discours sur la servitude volontaire, publié en 1576, après sa mort, et qui est une éloquente protestation contre la tyrannie; il faut citer encore MICHEL DE L'HOSPITAL, et JEAN BODIN.

5. LA SATYRE MÉNIPPÉE, parue en 1594, est un pamphlet écrit en collabora

tion par plusieurs magistrats et lettrés, en faveur de Henri IV, au temps de la Ligue. L'ouvrage commence par une sorte de parade dans la cour du Louvre, continue par une procession des ligueurs, par des discours des députés aux États Généraux (le plus célèbre est celui de Daubray au nom du Tiers-État), et s'achève par des pièces de vers burlesques. C'est un chef-d'œuvre de bon sens et d'esprit.

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a Vie. Jean Chauvin, qui latinisa son nom en Calvinus, d'où sortit à son tour la nouvelle forme française Calvin (cf. Tourneur, Turnebus, Turnèbe), était né à Noyon, en Picardie, le 10 juillet 1509. De bonne heure destiné à l'Église, il fit ses études à Paris, au collège de Montaigu et fut, à l'âge de dix-neuf ans, pourvu d'une cure; mais il n'était pas prètre,et n'avait reçu que la tonsure. Il se rendit pour étudier le droit, à Orléans, où il eut pour maître Pierre de l'Étoile; il suivit à Bourges les leçons du célèbre Alciat, et il y étudia le grec sous Melchior Wolmar. Quand il revint à Paris, en 1532, son premier ouvrage fut un commentaire latin de la Clémence de Sénèque; il était dès lors tout acquis à la Réforme. Cette année-là mème, Calvin fut obligé de se soustraire par la fuite aux poursuites édictées contre les protestants, à la suite de la harangue de Nicolas Cop, recteur de l'Université de Paris, harangue qu'il avait lui-même inspirée.

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LETTRE ORNÉE du xvi siècle.

D'abord réfugié à Orléans, puis à Poitiers, puis à Nérac, Calvin gagne Båle, d'où il adresse au roi François 1er (1535) une lettre de protestation contre les supplices infligés aux hérétiques. C'est à Bâle qu'il publie la première édition, en latin, de l'Institutio religionis christianæ. De Bâle, il va faire un séjour à Ferrare, auprès de Renée de France; enfin, en août 1536, il s'établit à Genève, que Guillaume Farel avait convertie à la Réforme. Il y fait sentir si despotiquement son autorité théologique et politique, que les libertins (partisans de la liberté) le bannissent, ainsi que Farel, en 1538. Calvin se réfugie à Strasbourg, où il se marie. Il revient en 1541 à Genève, rappelé par son parti. Et jusqu'à sa mort (1564) il y règne en maître, avec autant d'intolérance que de dévouement.

L'institution de la religion chrétienne. Calvin remania le texte latin qu'il avait donné en 1536 et 1539, pour en faire une édition française qui parut à

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Strasbourg en 1541 (1). L'ouvrage est précédé d'une Dédicace au roi de France, François Ier, morceau plein de verve, de logique et d'éloquence, malgré quelques disparates, et dans lequel Calvin défend la Réforme, au nom de la vraie tradition chrétienne; il réfute également les attaques de ceux qui prétendaient que les Réformés étaient les ennemis de l'autorité royale. L'ouvrage même se divise en quatre parties: I. De connaître Dieu en titre et qualité de créateur et souve

rain gouverneur du monde.

II. De la connaissance de Dieu en tant qu'il s'est montré rédempteur en Jésus-Christ.

III. De la manière de participer à la grâce de JésusChrist, des fruits qui nous en reviennent et des grâces qui s'ensuivent.-IV. Des moyens extérieurs ou aides dont Dieu se sert pour nous convier à Jésus-Christ, son fils, et nous retenir à lui.

On remarquera sans peine la savante gradation de ce plan. Or, chaque partie n'est pas moins logiquement ordonnée. Si bien que l'Institution chrétienne passe à bon droit pour le premier livre vraiment composé que l'on ait écrit en français. - D'autre part, Calvin rendait à notre langue cet immense service d'y verser, en quelque sorte, tout le trésor biblique et théologique. Ces matières,

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réservées jusqu'alors à la dignité du latin, étaient pour la première fois exposées en langue vulgaire, plus de cent ans avant les Provinciales de Pascal. Le style de Calvin est grave, serré, logique, parfois trivial, souvent éloquent; il manque essentiellement de couleur, et Bossuet le juge triste. Le vocabulaire a peu vieilli; et les idées sont si fortement enchaînées qu'on lit Calvin beaucoup plus facilement que Montaigne (2).

(1) Une édition latine augmentée, parut à Genève en 159, et, d'après cette nouvelle édition latine, parut une nouvelle version française en 1560, dont le texte doit être adopté de préférence à celui de 1541. Morceaux choisis, 2 cycle, p. 237

(2) De Calvin, on a publié récemment l'Excuse de noble Seigneur Jacques de Bourgogne (Paris,

Autres écrivains de la Réforme. A côté de Calvin, on peut citer : Guillaume Farel (1489-1565), célèbre par ses sermons; - Théodore de Bèze (15191605) qui écrivit d'abord des vers, puis un grand nombre d'ouvrages en latin, pour la défense de la Réforme. En français, il donna une Vie de Calvin, une Histoire des Églises réformées au royaume de France, et une tragédie biblique, Abraham sacrifiant, jouée à l'Université de Lausanne; - Pierre Viret (1511-1571) a laissé plusieurs dialogues et ouvrages moraux, d'une verve satirique inégale, mais souvent piquante; Duplessis-Mornay (1549-1623) fut surnommé le « Pape des Huguenots », à cause de sa science théologique, et dirigea jusqu'à sa mort les Églises réformées de France. Son Traité de la vérité de la religion chrétienne (1581), composé plutôt contre les « libertins » que contre les catholiques, est un des meilleurs ouvrages théologiques du seizième siècle.

II.

SAINT FRANÇOIS DE SALES (1568–1622).

Vie. D'une illustre famille de la Savoie, François de Sales étudia à Paris, au collège de Clermont et à la Sorbonne. Puis, il fit son droit à l'Université de Padoue et fut nommé, tout jeune encore, conseiller au Sénat de Chambéry Mais une vocation sérieuse le poussait vers l'état ecclésiastique. Aussitôt prêtre, il fut chargé de missions dans les pays protestants, et il réussit, par son éloquence simple et persuasive; par la douceur toute chrétienne de son caractère, à opérer de nombreuses conversions dans le Chablais (pays de Thonon, HauteSavoie). En 1596, l'évêque de Genève le prend pour coadjuteur. François de Sales fait ensuite un voyage à Paris, et charme la cour, devant laquelle il prêche le carème (1602). Mais Henri IV voulut en vain le retenir. Nommé évèque de Genève, et résidant à Annecy, François de Sales publia en 1608 son Introduction à la vie dévote. Cependant, la composition de cet ouvrage, dont le succès fut immédiat et s'est prolongé jusqu'à nos jours, n'était qu'un accident dans une existence toute consacrée à la prédication et à l'administration. En 1616, parut son Traité de l'amour de Dieu. François de Sales fit, en 1618, un nouveau voyage à Paris; il fonda, en 1620, l'ordre de la Visitation avec Mme de Chantal; et il mourut subitement à Lyon, en 1622.

Ses ouvrages.

L'œuvre très considérable de saint François de Sales comprend : des ouvrages de controverse contre les protestants, des Sermons (dont nous n'avons probablement pas le texte original), des Entretiens spirituels (recueillis par les religieuses de la Visitation d'Annecy, et d'une authenticité souvent discutable), des Lettres, dont le texte n'offre pas non plus des enfin ses deux plus célèbres ouvrages, les sculs

garanties suffisantes (1),

Lemerre, 1904). C'est un mémoire justificatif, dans lequel Calvin comme les logographes d'Athènes, fait parler son client lui-même. La logique y est nerveuse et pressante; le protestantisme y est défendu avec mesure et éloquence.

(1) Tous ces ouvrages ont été publiés après la mort de saint François de Sales (622).

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qu'il ait publiés lui-même : l'Introduction à la vie dévote (1608) et le Traité de l'amour de Dieu (1616).

L'Introduction à la vie dévote est un de ces livres qui se sont faits d'eux-mêmes, au jour le jour, et qui tirent une partie de leur prix de ce qu'ils ne sont pas proprement un livre. C'est

tout simplement la réunion d'une série de lettres de direction adressées, pendant le carème de 1607, à Mme de Charmoisy, d'Annecy. L'intérêt de ces lettres vient de l'intention même de l'auteur, qui dit dans sa préface: << Ceux qui ont traité de la dévotion ont presque tous regardé l'instruction des personnes fort retirées du commerce du monde, ou au moins ont enseigné une sorte

de dévotion qui conduit à cette entière retraite. Mon intention est d'instruire ceux qui vivent en ville, ès ménage, en la cour, et qui par leur condition sont obligés de faire une vie commune...>> De là, l'immense succès de cet ouvrage; chacun voulut faire son profit de cette dévotion pratique, et devenir, comme la Philothée à laquelle sont dédiées les lettres, une âme d'élection, sans renoncer au monde. On n'était pas moins séduit par le charme du style, d'une exquise dou

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PORTRAIT DE SAINT FRANÇOIS DE SALES

D'après l'estampe de Leonard Gaultier (1561- vers 1630)

ceur, abondant en figures aimables, en images pittoresques, non sans une pointe de préciosité. L'Introduction se compose de cinq parties: dans la première, l'auteur définit la vraie dévotion et les moyens de la désirer, dans la seconde, il donne divers avis pour l'élévation de l'âme à Dieu par l'oraison et les sacrements, dans la troisième, divers avis touchant l'exercice des vertus (c'est la plus considérable et la plus pratique; il n'y a pas dans ces avis moins d'esprit que

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