point le dégoût & l'ennui d'une conftante uniformité. C'est déja beaucoup

en n'offrant que des chofes neuves & piquantes: mais je ne crois pas encore que quand une main habile releveroit le fond des chofes par les agrémens de la diction elle pût attacher avec · fruit le Lecteur. Lorfque les principes d'une fcience ont été fuffisamment développés, des répétitions ne forment plus qu'un embarras qui fatigue.

Mon attention a dû donc fe porter à bien connoître les objets de la Morale & de la Législation, & de examiner avec foin quels ont été ceux d'entre les Moraliftes & les Légiflateurs modernes, qui ont affez approfondi ces objets. Cet examen a fixé mon choix, convenablement justifié; ce femble, dans le Difcours prélminaire qui fuit. Je fuis fincèrement fâ¬

ché que les autres Moraliftes n'ayent fait qu'ébaucher les fujets qu'ils s'étoient propofés de traiter > ou qu'ils foient venus trop tard, en écrivant fur des matières déja fuffisamment éclaircies. Le premier de ces Moraliftes a été néanmoins fort estimé dans fon temps. Son Livre intitulé: La Galatie de Jean de la Cafe, avoit acquis une telle célébrité, qu'il étoit passé en maxime de dire à un homme qui ne favoit pas vivre, qu'il n'avoit pas lu la Galatie , comme on lui auroit dit à Athènes qu'il n'avoit point facrifié aux Graces. Cela n'empêche pas que tout ce qu'a écrit cet Auteur fur les coutumes & les difcours, ne foit très-peu de chofe; & ce qu'il enfeigne fur les contenances & fur les geftes, ne regarde nullement la Morale.

Les Maximes générales pour

vivre heureusement dans le monde, & pour former un honnête homme; La Philofophie & les fentimens de l'honnête homme; Les Entretiens de Balfac; L'Ecole du Sage; L'Ariftipe du Sage, &c. ne renferment que des préceptes généraux, qui n'ont aucun but déterminé. Celui de tous les Moraliftes qui a peutêtre le plus approché de ceux qui entrent dans ce volume, eft le Père Balthazar Gracian, Jéfuite. Ses principaux Ouvrages font Le Difcret & L'Homme de Cour. Ce dernier eft tout en maximes, dont la plupart font excellentes.

J'avois annoncé qu'on trouveroit ici Milord Bolinbroke, & j'avois fait les recherches convenables pour, rendre fon hiftoire intéressante ( a ); (a) Voici le titre des principaux Ouvrages que j'avois confultés : Mémoirs of

mais après avoir lu avec attention ses Principes innés de la Morale, je n'y ai rien trouvé que Wollafton

Shaftesbury n'ayent mieux dit. Cependant il faut avouer que ce Seigneur, à ces écarts près, étoit véritablement Philofophe. Il connoiffoit la nature & les bornes de l'entendement humain. Livré pendant fes premières années à des affaires tumultueuses & aux plaifirs des fens, parcourut en planète excentrique une variété furprenante de fcènes. Ses paffions fe calmèrent par l'âge &

il

the Life an Minifterial, With fonce remarcks on the political Writings; of the late Lord Vife, Bolinbroke 1752. A Letter to fir William Windam, II. Some Reflections on the prefent ftate of the nation III. A Letter to, M. Pope, The Works of the late Right honorable Henri S. John Lord Viscount, Bolinbroke, en cinq vol. in-4°. 1754. &c. &c.

par les revers. Des études & des réflexions plus ferieufes perfectionnèrent fes facultés. Il brilla dans fa retraite avec un éclat tout particulier. Le politique libertin devint un fage extrêmement aimable. Les réflexions de Seneque, la dignité & les graces de Pline, l'efprit & la fineffe d'Horace, parurent également dans fes Ecrits & dans fa converfation (a). Ce qu'il y a de fâcheux, c'est que M. Leland a mis avec quelque raifon Milord Bolinbroke au nombre des Déiftes; car on ne peut difconvenir qu'il n'ait donné lieu à ce reproche, & qu'on ne trouve dans fes œuvres des chofes très-repréhenfibles.

On fera peut-être étonné de ne pas

(a) Voyez les Remarcks on the Life and Writings of Dr Jonathan Swift, Dean of S. Patricks, &c.