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ces deux mots, qui signifient également, un fruit | ravines humides sont ceux que le cou-jaune hapropre à être semé et à produire une plante telle bite de préférence. » ID. que celle dont il est sorti.

Graine se dit de toute sorte de semences, et grais seulement des graines qu'on sème pour ne recueillir qu'elles, et qu'on fait servir à un usage particulier, celui de nourrir l'homme ou les animaux. De sorte que la graine est le genre, et le grain l'espèce, et que tout grain est graine, sans que toute graine soit grain. On sème des graines pour avoir des melons, des fleurs, des herbages, des arbres; on sème des grains pour avoir de ces mêmes grains. Il y a des graines sauvages (BUFF.); il n'y a pas de grains sauvages. Les rolliers ramassent dans les champs labourés les petites graines, les racines et les vers, et même les grains nouvellement semés. » BUFF. D'ailleurs le grain a encore cela de tout à fait spécial, qu'il se considère par rapport à l'usage que nous en faisons plutôt que comme semence; en sorte que le grain même a sa graine. Pour avoir de bon grain, de belles fleurs, etc., il faut en échanger les graines, et ne jamais les semer dans le même terrain qui les a produits.» BUFF. De toutes manières donc grain spécifie davantage. Ce qui le prouve encore, c'est qu'on dit, un grain de millet ou de moutarde, au lieu qu'on doit dire, de la graine de millet, de la graine de moutarde, comme on dit de la graine de pavots, de la graine de niais. Au figuré, on dit d'une manière générale : la bonne graine, qui tombe sur la pierre, y périt desséchée; mais on n'emploie grain que dans des locutions où il est parfaitement déterminé : un grain de bon sens, de jugement, de coquetterie, d'amour-propre, de folie, etc.

RAVINE, RAVIN. Excavations produites dans les campagnes par les eaux de pluie qui s'écoulent violemment.

Le ravin est plus petit que la ravine: ce n'est guère qu'un sillon ou un fossé creusé par les eaux et qu'on peut sauter, tant il est peu large; c'est une espèce de rigole naturelle. Mais la ravine est toujours grande, profonde, difficile et dangereuse à traverser c'est un précipice. Ce n'est pas seulement (pour Condé) des hommes à combattre : c'est des montagnes inaccessibles; c'est des ravines et des précipices, d'un côté; c'est, de l'autre, un bois impénétrable. » Boss. Le ravín a été fait par un courant d'eau dans une plaine qu'il sert quelquefois à embellir; la rarine a été creusée par un torrent entre des montagnes. On se fait mal en tombant dans un rarin; on se tue quand on tombe dans une ratine. Les eaux d'une montagne coulent d'abord par des ravins et se précipitent toutes ensuite dans une ravine par laquelle elles se rendent dans une rivière ou dans un fleuve. Du reste, ratin est plus précis: il désigne uniquement le lit ou le canal des eaux; au lieu que ravine y ajoute l'idée de plusieurs objets accessoires, des rochers, des arbres, des broussailles qui se trouvent sur les bords. « La lave a coulé en grandes masses par les ravins l'espace de 7 ou 8 mille toises. » BUFF. « Les bords des ruisseaux, les lieux frais et retirés près des sources et des

MONTAGNE, MONT. Ces deux mots annoncent également l'idée d'une masse considérable de terre ou de roche fort élevée au-dessus de la plaine. L'Académie, Bouhours, Beauzée et Roubaud conviennent que le mot de montagne ne forme qu'une dénomination vague, désignant seulement l'espèce de corps ou de masse, sans aucune distinction individuelle, tandis que celui de mont exprime une masse détachée de toute autre pareille, soit physiquement, soit idéalement. La montagne, de l'aveu de tous, est donc une suite continue d'élévations; et le mont, une élévation une, simple, isolée qui s'aperçoit ou est supposée s'apercevoir d'un seul coup d'oeil, c'est une partie de la montagne, ou c'est une montagne, que l'esprit se représente comme arrondie, comme délimitée, comme ayant une étendue bornée ou quelque chose qui l'individualise et la distingue. « Bientôt nous vîmes le sommet du mont Ida qui s'élève audessus des autres montagnes de la Crète. » FEN. Un rocher, quelque mont pendant en précipices, C'est où ces dames (les chèvres) vont promener

(leurs caprices. LAF.

Dans le discours, les monts sont traités comme des individus; ils reçoivent des noms propres : le mont Sinai, le mont Parnasse. On donne bien aussi des noms propres aux montagnes; mais, afin de conserver à ce dernier mot son sens général, on le fait suivre de la préposition de la montagne du Parnasse, les montagnes des Alpes. D'ordinaire même on désigne les montagnes, non par des noms propres, mais par les noms des pays où elles se trouvent. « La montagne de Reims n'est pas de craie; il en est de même du mont Aimé, qui est isolé au milieu de ces plaines de craie. » BUFF. - On considère même quelquefois la montagne comme une femelle (la montagne en travail enfante une souris), mais jamais le mont : Didon, reprochant à Enée sa dureté, lui dit, dans Scarron, qu'il est le fils d'un roc (elle aurait pu dire tout aussi bien d'un mont), et qu'une montagne est sa mère. Un mont serait plutôt pris pour un homme, ou un homme pour un mont. « A la vue de Polyphème,

SCARR.

Chacun de nous crut voir marcher Quelque mont ou quelque rocher. La différence est analogue entre montagneux et montueux. Un pays montagneux est élevé; on l'oppose à un pays bas, voisin de la mer, aux côtes. « On ne trouve des nègres que sur les côtes et dans les pays bas, voisins de la mer; mais dans l'intérieur, où les terres sont élevées et montagneuses, tous les hommes sont blancs. » BUFF. « Il y a des terres arides et montagneuses; et d'autres qui, dans un terrain bas, sont arrosées de plusieurs ruisseaux. » MONTESQ. Un pays montueur est entrecoupé d'élévations isolées, inégal; on l'oppose à un pays de plaines. « On se sert peu de chevaux en Crète, à cause de la trop grande aspérité du terrain, qui est presque partout fort inégal et fort montueux. » BUFF. « Prenait-on le chemin de. l'Arménie, on trouvait un pays montueur et difficile, où l'on ne pouvait mener de convois. » MONTESQ.

CÔTE, COTEAU. Penchant d'une grande éléva- | la mère des affligés et des malheureux; si on subtion de terre, ou cette élévation elle-même en tant qu'inclinée.

Côte est le mot générique et marque quelque chose de plus étendu; coteau est un terme spécial, et il est diminutif, il exprime une petite côte. La côte est le penchant d'une montagne, et le coteau le penchant d'une colline. De la mer on aperçoit la côte, la côte d'Espagne, la côte d'Afrique; une rivière passe au pied d'un coteau. Côte fait concevoir une pente longue et continue, comme le mot montagne, et le coteau, comme le mont, est quelque chose d'isolé, qu'on embrasse aisément d'un seul coup d'œil, parce que l'étendue en est bornée. - D'ailleurs, la côte comprend quelquefois plusieurs coteaux, comme la forteresse plusieurs forts: une côte paraît de loin nue et décharnée; mais à mesure qu'on en approche, on y découvre des coteaux verdoyants et fertiles. TOMBE, TOMBEAU. Lieux où l'on dépose les

morts.

La tombe est proprement la table de pierre, de marbre ou de toute autre matière, placée audessus de la fosse qui a reçu les ossements ou qui contient les cendres des morts. Le tombeau est la tombe devenue un monument, particularisée par quelque chose d'élevé qui la distingue des autres tombes. La tombe est, au contraire, un tombeau plat et sans ornements. « La tombe plate du cardinal Portocarrero est sans nul ornement. » S. S. Tombeau dans cet exemple serait tout à fait déplacé. Ou bien encore la tombe est la partie basse du tombeau, la fosse. « Zadig alla au tombeau de son époux, et le trouva tout étendu dans la tombe.» VOLT. On prie ou on danse sur une tombe (VOLT.), et autour d'un tombeau (VOLT.). On dit être sur le bord de sa tombe (VOLT.) ou de sa fosse, avoir déjà un pied dans la tombe (LAH.) ou dans la fosse, creuser la tombe (MARM.) ou la fosse de quelqu'un. Tous les hommes doivent avoir une tombe ou descendre dans la tombe.

Aux plus infortunés la tombe sert d'asile. LAF. Tous les hommes n'auront pas un tombeau. Il n'y a que les grands et les riches qui puissent prétendre l'honneur du tombeau, si ce n'est en poésie, où l'on emploie d'une manière générale un mot particulier, uniquement parce qu'il exprime quelque chose de noble et de distingué. Si le terme tombeau n'était pas spécial et déterminé, pourquoi dirait-on plutôt, un tombeau qu'une tombe de fa mille, et, être enterré dans le tombeau, plutôt que dans la tombe de ses pères? - Tombeau désignant seul quelque chose d'élevé et de grand, se prend seul dans un sens tout figuré pour signifier fin, destruction. « Le tombeau du diacre Pâris fut le tombeau du jansénisme. » VOLT.

ESPÉRANCE, ESPOIR. Désir de quelque chose conçu comme possible.

L'espérance fait que l'on désire sans trop connaître l'objet de ses désirs et sans concevoir la possibilité de leur réalisation. Dans l'état le plus voisin du désespoir, on conserve encore quelque espérance. Mais l'espoir, au lieu d'indiquer ainsi un futur incertain et éloigné, exprime un désir qui porte sur un objet bien précis et doit se réaliser prochainement. Dans cette phrase: L'espérance est

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stitue espoir à espérance, on ôte à la pensée sa justesse; car ce qu'espèrent les affligés et les malheureux n'est ni certain, ni précis, ni prochain. Ft tel est le sens d'espoir. Ce mot est moins vague et plus particulier, plus déterminé, plus fixe que celui d'espérance. D'ailleurs, et Roubaud l'a bien senti, l'espérance désigne plutôt un long espoir, une disposition habituelle, un état ou une modification plus ou moins constante, et l'espoir, une espérance particulière, un sentiment passager, une disposition actuelle: c'est l'espérance, et non l'espoir, qu'on a personnifiée, qu'on a mise au rang des vertus théologales. Enfin, comme l'espoir porte sur quelque chose de précis, il est plus ardent, et la privation du bien sur lequel il fait compter doit causer un grand désappointement : « L'espoir, tout détruit, dit Roubaud, mènerait au désespoir. L'espérance trompée ne nous laisse souvent dans le cœur qu'un sentiment de peine. »

DISCORDE, DISCORD. État où se trouvent des personnes indisposées, ou opposées les unes aux autres.

Discord a presque disparu de la langue. Voltaire, Marmontel et Roubaud le regrettent beaucoup, et c'est avec raison, car il exprime une idée étrangère au mot discorde, dont il diffère comme l'espoir de l'espérance. Écoutons Roubaud : « Vous ne personnifierez pas le discord comme la discorde, parce que ce mot-là n'exprime pas, comme celui-ci, un caractère de force, de consistance, de durée, d'empire, qui semble constituer une puissance. La discorde est un grand et long discord. La pomme jetée devant les déesses rivales excite entre elles un discord, elles se la disputent. Adjugée à l'une des trois, elles brûlent du feu de la discorde. On voit souvent figurer la discorde dans les familles, les communautés, entre les peuples, parmi les nations. » Ainsi le discord est un fait particulier de discorde; il naît, s'élève la discorde est un état de discord, ou le discord devenu général, durable; elle règne. « L'amitié passe sur de petits discords. » MOL. « Ne devrait-on pas dire les discords qui troublent le monde? » MARM.

Et nous verrons bientôt votre amour le plus fort Par un heureux hymen étouffer ce discord.

(L'infante à Chimène dans le Cid.) CORN. COURSE, COURS. Mouvement de ce qui court. Course signifie l'action de celui qui court: à la course, c'est-à-dire en courant. Le cours est une course réglée, assignée. L'un n'est relatif qu'au mouvement et à sa vitesse, l'autre l'est aussi à sa direction et à sa régularité. Le soleil achève sa course en peu de temps, et il suit toujours un cours uniforme. On dit bien, course vagabonde, et non pas, cours vagabond. On peut attribuer une course aux nuages, aux torrents :

Mais qui peut dans sa course arrêter ce torrent ?

RAC.

Mais on dira, en parlant des astres, des fleuves, des saisons, qu'ils ont un cours; voyage au long cours, suivant le cours naturel des choses. « L'Euphrate était droit dans son cours, et jamais ne se débordait. » Boss. Il y a près des villes

des lieux particulièrement destinés aux promenades à cheval ou en voiture; on les appelle des cours.

DÉPENSES, DÉPENS. Ce qu'on dépense, la quantité d'argent qu'on est obligé de donner.

Les dépenses comprennent tout l'argent dépensé : les dépens sont l'argent qu'on doit dépenser conformément à la loi ou à la sentence qui en a déterminé le montant; c'est un argent qui reçoit une destination précise et réglée. Ou bien dépens sert à spécifier la personne à la charge de laquelle est une dépense. «Quand les souverains font beaucoup de dépense, c'est aux dépens de leurs sujets. COND.

JUPE, JUPON. La partie de l'habillement des femmes qui descend depuis la ceinture jusqu'aux pieds.

Jupe exprime le genre, et jupon une espèce: le jupon est une jupe courte; c'est le diminutif et pour ainsi dire l'enfant de la jupe. « Les jeunes filles de la campagne, en Egypte, vont presque nues, ne portent qu'un petit jupon très-court. » BUFF. Les femmes qui savaient filer au fuseau faisaient de cette façon des bandes en forme de jupons fort courts. » LES. « La taille de Marthon est leste, et son petit jupon laisse entrevoir sa jambe blanche et fine.» VOLT. Suivant l'usage actuel des deux mots, le jupon est effectivement une espèce de jupe courte que les femmes mettent sous l'autre ou sous les autres jupes. Dans la Foire Saint-Germain de Regnard, le marchand, que la coquette ne veut pas payer, lui prend l'écharpe, le manteau, la jupe, et elle demeure en corset et en jupon de Marseille. - D'autre part, jupon, apparemment parce qu'il est masculin, signifie aussi un vêtement d'homme qui ressemble à une jupe, qui est une sorte ou une espèce de jupe. « Le chevalier don Alonze portait ce nœud de rubans à son jupon en forme d'ordre. » LES.

Vous pourriez bien ici sur votre noir jupon,
Monsieur l'huissier à verge, attirer le baton.

(Damis á M. Loyal dans le Tartufe.) Dans Lafontaine, le berger devenu le favori d'un roi, et accusé d'avoir amassé des trésors, ouvre un coffre et y montre

L'habit d'un gardeur de troupeau Petit chapeau, jupon, houlette. LIMACE, LIMAÇON. Mollusque rampant. Le limaçon est une espèce de limace; c'est la limace renfermée dans une coquille qui la borne et la détermine. « Les uns disent que ce sont les limaces simples, que j'appelle incoques, qui reprennent une tête (quand on les a décapitées); les autres disent que ce sont les escargots, les limaçons à coquille. » VOLT.

FORTERESSE, FORT. Lieux où l'on est en sûreté contre les attaques de l'ennemi.

L'idée de la forteresse est beaucoup plus étendue que celle du fort; elle représente à l'esprit un édifice avec des tours garnies de soldats, de canons, de meurtrières, de bastions, et avec un fossé profond qui en défend l'approche; c'est un assemblage de forts. Le fort n'est qu'une tour élevée isolément ou bien dans la forteresse, à l'égard de laquelle il est comme le mont à l'égard de la montagne, comme le roc à l'égard de la roche. De sa nature

la forteresse est grande, et le fort petit. La Hollande ayant été inondée par la rupture des digues en 1672, « Amsterdam fut comme une vaste forteresse au milieu des eaux.» VOLT. « L'île de Cabrera est une île déserte, où il y a un petit fort gardé alors par cinq ou six soldats.» LES. Une ville a une forteresse, c'est-à-dire une citadelle qui la domine et la protége, et plusieurs forts qui l'entourent et sont propres à la défendre en détail. «Tite tira tout autour de Jérusalem une muraille munie de quantité de forts. » Boss.

CERVELLE, CERVEAU. Viscère qui a son siége dans la tête.

Cervelle le fait considérer d'une manière vague, par rapport à sa masse et à sa nature; cerveau le présente toujours comme un organe particulier et qui remplit une fonction spéciale. « Le cerveau, qu'on a dit être le siége des sensations, n'est pas le centre du sentiment, puisqu'on peut au contraire le blesser, l'entamer, sans que la mort s'ensuive, et qu'on a l'expérience qu'après avoir enlevé une portion considérable de la cervelle, l'animal n'a pas cessé de vivre, de se mouvoir, et de sentir dans toutes ses parties. » Buff. Aussi, quand ce viscère est hors de son contenant et à l'état de désorganisation, on ne l'appelle plus que cervelle: les cuisiniers accommodent des cervelles et non des cerveaux. « Des cervelles étaient répandues sur la terre à côté de bras et de jambes coupés.» VOLT.« Regardez ces cervelles sanglantes, et tous ces membres épars. » ID. La chimie fait l'analyse de la cervelle; la physiologie et la psychologie étudient les fonctions du cerveau.

etc.

La même distinction se montre au figuré, c'està-dire quand les deux mots se disent de l'esprit. Cervelle signifie alors une matière qu'il faut avoir en certaine quantité et d'une certaine qualité pour bien penser: une tête sans cervelle, un homme de peu de cervelle, une cervelle légère, évaporée, Cerveau exprime plutôt un organe renfermé dans un espace déterminé, un instrument qui travaille, produit des résultats plus ou moins bons et est susceptible de se déranger: son cerveau travaille; cerveau faible, débile; avoir le cerveau dérangé, être affaibli du cerveau; cerveau timbré, fêlé, etc.

ESCABELLE, ESCABEAU. Siége de bois sans bras ni dossier, et qu'on saisit par un trou pratiqué à la planche supérieure.

Escabelle signifie un escabeau à plusieurs personnes, une sorte de banc. Il paraîtrait même qu'autrefois on comprenait sous le mot d'escabelle tout ce qui sert de siége dans une maison, car on disait, remuer ses escabelles, pour déménager. Il semble aussi qu'escabelle désigne un siége plus élevé. Les chantres, devant le lutrin, sont assis sur des escabelles, et les enfants de chœur sur des escabeaux. Dans les maisons pauvres des campagnes, tous les membres de la famille s'asseyent sur des escabelles, et les enfants ont des escabeaux. On peut encore appeler escabeau, mais non pas escabelle, cette sorte de carreau ou de petit banc, qui sert aux femmes à poser leurs pieds, et sur lequel aussi on fait asseoir les petits enfants. Cela est conforme au sens le plus général du mot. On s'assied sur l'escabelle c'est le meuble qui a précédé la chaise. « Il était

ridicule d'imaginer que Thésée fût éternellement | aujourd'hui par tonneaux de liqueur. » MONTESQ. assis sur une escabelle.» VOLT. « Je fis asseoir le misérable sur une vieille escabelle réservée à ces sortes de gens.» LES. On pose les pieds sur l'escabeau, et l'Académie a plus raison qu'elle ne pense de définir par escabeau un marchepied. «La terre est appelée dans l'Ecriture l'escabeau des pieds de Dieu.» BOURD. « Les six degrés, par où on montait au trône, et les escabeaux, où posaient les pieds, étaient d'or. » Boss. « Vous avez fait de vos ennemis l'escabeau de vos pieds. » VOLT. CHARRETTE, CHARIOT. Voitures communes employées à transporter diverses choses.

La charrette est presque informe en comparaison du chariot. Aussi est-ce exclusivement à la campagne qu'on s'en sert, et on s'en sert pour voiturer toute sorte de choses. Le chariot se distingue par sa façon il est fait moins simplement et moins grossièrement; il a quatre roues; et de plus, il a une destination qui lui est propre et qu'on indique presque toujours quand on fait usage de ce mot: chariot de bagage, chariots d'ambulance, d'artillerie, de vivres, etc. D'ailleurs, le chariot est plus petit : les enfants s'amusent à traîner des chariots. « Il y avait un homme à Paris qui avait fait pour chef-d'œuvre un petit chariot traîné par des puces. » SÉv. « Il y avait force petits chariots à un ou à deux chevaux toujours prêts pour les dames et les vieillards qui voulaient se prome

α

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d'êtres vivants.

Une troupe est une agrégation d'animaux ou d'hommes quelconques : troupe d'oiseaux, de loups, de tigres; une troupe de séditieux, de forcenés, parcourait la ville. Troupeau est plus spécial, plus déterminé; il ne se dit que des animaux et encore des animaux domestiques utiles à l'homme, qui les nourrit et les élève ensemble.

BANDE, BANDEAU. Longue pièce d'étoffe qu'on met autour de quelque partie du corps.

a La bande, dit Laveaux, d'après l'Académie, serre ou est destinée à serrer quelque objet que ce soit; le bandeau ne se met qu'autour de la tête, autour du front. » Il a raison de dire, serre ou est destinée à serrer, car c'est encore une chose à remarquer que le bandeau a actuellement son usage, tandis que la bande peut simplement avoir le sien.

BARRE, BARREAU. Pièce de bois, de fer, etc., étroite et longue.

Barre, tout morceau de fer ou d'autre métal allongé. Le barreau est une barre ayant une certaine forme, et appliquée à un usage spécial: c'est une barre de fer mise en dehors des fenêtres et aux ouvertures des prisons.

TONNE, TONNEAU. Vaisseaux de bois formés de planches appelées douves, contenues par des cercles, et ordinairement destinés à recevoir des li

queurs.

On dit un vaisseau de tant de tonneaux pour donner idée de sa force et de sa grandeur, parce que, dans cette locution comme dans toute autre, tonneau a une signification précise; il indique un poids de deux mille livres, ou l'espace de quarante pieds cubes. Tonne n'a jamais été employé dans ce sens, à cause de son indétermination. Ensuite la capacité de la tonne étant illimitée est par cela même très-grande au prix de celle du tonneau le tonneau a la tonne pour mère, en quelque sorte. « L'abbé de Citeaux a les meilleures vignes de Bourgogne et la plus grosse tonne. » VOLT. Sachez que dans ce temple on a mis deux tonneaux: L'un est vaste et profond; la tonne de Citeaux N'est qu'une pinte auprès.... Il est petit.... L'autre tonneau, ma sœur, est celui de l'amour;

POUSSIÈRE, POUSSIER. Matière réduite en poudre fine.

Poussière se dit de tout ce qui est réduit en parcelles ténues, par exemple, de tout ce que e vent enlève de la surface du sol. Le poussier est seulement cette poussière qui s'amasse fond d'un sac à charbon; c'est aussi la poussière dans un petit endroit, comme, par exemple, au qui a un usage, une destination spéciale, par opposition à la poussière ordinaire, qui n'en a aucune le poussier de mottes sert à faire du feu.

VAPEUR (f.), VAPEUR (m.). L'usage ne paraît pas avoir encore décidé s'il faut dire la vapeur ou le vapeur, en parlant d'un bateau à vapeur. Il n'y a cependant pas à hésiter, il faut évidemment, pour que le mot devienne précis dans cette acception particulière, qu'il reçoive le genre masculin. Prendre le vapeur s'entend sans peine; prendre la vapeur serait une expression vague, indéterminée, équivoque. D'ailleurs, n'a-t-on pas déjà fait passer le mot foudre du féminin au masculin, quand on s'en est servi pour désigner en particulier un héros et un grand orateur: un foudre de guerre, un foudre d'éloquence.

à la différence des genres masculin et féminin se Il est à remarquer que dans toutes les langues, tion. En italien, fiasca (f.) désigne un grand vase trouve attachée la même différence de significade forme peu déterminée, une espèce de damejeanne, et fiasco (m.), un flacon, c'est-à-dire un vase plus petit, qui a une forme bien caractérides petits oiseaux de toutes les espèces, et sée. Pareillement en grec, otpoutía () signifie (), la ville de Delphes, et Iufov (ó), le serpent στρουθός (ό), le passereau ou le moineau; Πυθών le cèdre, et xéopos (6), le fruit de cet arbre; Python, ou Apollon qui le vainquit; xéòpos (ú), uros (n), le joug, et ¿uyòs (ó), le fléau de la balance, ou la balance elle-même; xápak (†), un échalas, et xápa (6), un échalas travaillé ou faconné, un pieu dont on fait des palissades ou

des retranchements.

QUE PAR L'ARTICLE.

Tonne est le terme générique; il se dit pour SYNONYMIE DES SUBSTANTIFS QUI NE DIFFÈRENT désigner toutes sortes de barriques. Le tonneau est une espèce par rapport à la tonne; c'est une tonne dont l'usage et la capacité sont réglés suivant les pays. « La capacité des vaisseaux, qui se mesurait autrefois par muids de blé, se mesure

De cour, de la cour. Ouvrage d'esprit, ouvrage de l'esprit. Demander raison, demander la raison. Par force, par la force. On, l'on. A vrai

L'article se met devant les noms communs.

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dire ou à dire vrai, à dire le vrai. Entendre | fiée; dans de la cour, cour conserve sasignification raillerie, entendre la raillerie. Avoir intention, primitive dans toute sa restriction, et bien délidessein, envie; avoir l'intention, le dessein, mitée. Un homme de cour est un homme qui, l'encie. Condamner à mort, condamner à la sans avoir été peut-être jamais à la cour, ressemble mort. Etc.-Avoir peine, pitié, horreur, honte; aux courtisans, qui a les mœurs, les habitudes, avoir de la peine, de la pitié, de l'horreur, les idées à peu près telles que les ont la plupart de la honte. Etc. Fournir le sel, de sel et du de ceux qui hantent les cours. Or, comme, sous sel. Avoir nouvelle, avoir des nouvelles. - Faire ces divers rapports, les courtisans ne jouissent affront ou injure, faire un affront ou une in- pas d'une bonne réputation, un homme de cour jure. Etc.- La naïveté, une naïveté. Le champ, est un homme adroit, artificieux, et, en général, de cour se prend en mauvaise part: promesun champ. Le roi sage, un roi sage. ses de cour, eau bénite de cour, amis de cour; aussi faux qu'un homme de cour (J. J.). Racine dit, dans la préface de Britannicus, qu'il a choisi Burrhus, pour opposer un honnête homme aux confidents de Néron, cette peste de cour. Un homme de la cour fait partie de la cour, y a un emploi, est attaché auprès du prince sous un titre quelconque; c'est un courtisan. « Saint Francois de Paule fut appelé à la cour de nos rois, il y vécut; en ce sens, ç'a été un homme de la cour.» BOURD. Tous les hommes de cour ne se trouvent à la cour, et il serait injuste de prendre pour hommes de cour tous les hommes de la cour. Le qualificatif de la cour n'entraîne par lui-même aucune idée défavorable; il marque avec la cour un rapport direct, réel, concret, d'appartenance ou de dépendance, et non un rapport éloigné de ressemblance. « L'esprit d'une femme de la cour est plus remué et plus actif que celui d'une paysanne.» NIC. « Les femmes de la ville sont moins naturelles que celles de la cour. » LABR.

les

pas

Cette distinction a été parfaitement indiquée par Beaumarchais dans la préface du Mariage de Fi

pour annoncer qu'ils sont pris dans un sens précis et déterminé, qu'ils désignent un genre, une espèce ou un individu en particulier. Il circonscrit l'idée ou la chose exprimée par le nom qu'il précède; il la signale à l'attention, en la tirant du vague et en la débarrassant de toute ambiguité. Sans l'article, le substantif a une valeur indéterminée; il réveille d'une manière indécise l'idée dont il est le signe : ainsi, dans les phrases, parler en homme, traiter avec honneur, mots, homme et honneur, laissent l'esprit dans le vague et l'incertitude relativement à l'étendue de leur sens. Avec l'article, le même mot a une valeur fixe et précise: l'homme est mortel, détermination générique; l'homme à prétention, détermination spécifique; l'homme de tantôt est revenu me voir, détermination individuelle. Le genre, l'espèce, l'individu se trouvent indiqués dans ces trois phrases, de manière à rendre toute confusion impossible. Telle sera donc, pour les synonymes dont il s'agit ici, la règle générale de distinction: le substantif avec l'article a un sens bien arrêté, certain, précis; le même sub-garo. « L'homme de la cour, dit-il, peint seulement un noble état; il s'entend de l'homme de qualité stantif, sans Farticle, a une valeur vague et mal vivant avec la noblesse et l'éclat que son rang lui déterminée. Le premier, fixant mieux l'esprit sur l'idée ou la chose particulière, la lui fait mieux impose: si cet homme de la cour aime le bien par goût, sans intérêt; si, loin de jamais nuire à perremarquer; l'autre, au contraire, se trouve ordinairement faire partie d'une locution générale, sonne, il se fait estimer de ses maîtres, aimer de ses égaux et respecter des autres, alors cette acMais un dans laquelle sa valeur primitive s'obscurcit et ception reçoit un nouveau lustre. devient peu saillante. homme de cour, en bon français, est moins l'énoncé d'un état que le résumé d'un caractère adroit, liant, mais réservé, pressant la main de tout le monde en glissant chemin à travers; menant finement son intrigue avec l'air de toujours servir; ne se faisant point d'ennemis, mais donnant, près d'un fossé, dans l'occasion, de l'épaule au meilleur ami, pour assurer sa chute et le remplacer sur la crête; laissant à part tout préjugé qui pourrait ralentir sa marche; souriant à ce qui selon lui déplaît, et critiquant ce qu'il approuve, les hommes qui l'écoutent, etc. D

§ I. Article défini le, la, les.

Tout ce qui vient d'être dit sur le rôle de l'article en général s'applique particulièrement bien à l'article défini, dont le nom seul le représente dejà comme un déterminatif. C'est ce qui résulte aussi de son étymologie; il vient de ille, illa, celui-ci, celle-ci, et voilà pourquoi il est propre à indiquer, parmi les choses ou les personnes, celle-ci ou celle-là, telle ou telle en particulier, de manière qu'on ne puisse pas s'y méprendre.

4° Synonymie des noms sans article avec ces mêmes
noms précédés de l'article simple le, la, les.
Les derniers, outre qu'ils sont plus précis et
plus déterminés, ont tantôt plus et tantôt moins
de généralité que les premiers.

DE COUR, DE LA COUR. Ces deux expressions servent à qualifier par rapport à la cour.

Mais la valeur du mot cour est vague dans l'une, précise dans l'autre. De cour forme un véritable adjectif, un qualificatif abstrait qui présente l'idée de la cour d'une manière très-générale et modi

1

D'ailleurs de cour n'indique pas plus une cour qu'une autre, une seule cour que plusieurs; de la cour indique spécialement la cour du pays où se trouve celui qui parle. En employant l'expression poisson de mer, on ne songe pas à telle ou telle mer en particulier; mais poisson de la mer se dit, dans une localité, du poisson qui vient de la mer déterminée dont est proche cette localité.

OUVRAGE D'ESPRIT, OUVRAGE DE L'ESPRIT. Ouvrage auquel l'esprit a part.

Dans la première expression, esprit désigne quelque chose de vague, de mal connu, dont la

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