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plusieurs classes les synonymes provenant de la | rieure qui n'oblige point à porter l'attention sur comparaison de l'adverbe avec son explication.

La phrase adverbiale se compose toujours d'une préposition et d'un substantif. Mais ce substantif n'est pas toujours du même genre. Tantôt c'est un substantif abstrait (sagement, avec sagesse; littéralement, à la lettre; abondamment, en abondance; forcément, de ou par force); tantôt c'est un adjectif pris substantivement (aveuglément, à Pareugle; vainement, en vain); et tantôt c'est un substantif qualificatif (sottement, en sot; héroïquement, en héros, etc.).

Or, la nature du substantif, contenu dans la phrase adverbiale, paraît être la seule chose importante à considérer du côté de celle-ci, pour en déterminer l'opposition avec l'adverbe. Donc, puisqu'il peut entrer dans la phrase adverbiale trois différentes sortes de substantifs, il faut, dans trois articles séparés, mettre l'adverbe en rapport avec chacune des trois espèces de phrases adverbiales que ces substantifs servent à composer. Adverbe et phrase adverbiale substantive; adverbe et phrase adverbiale adjective; adverbe et phrase adverbiale substantive-qualificative; voilà les trois titres sous lesquels le sujet doit être successivement examiné.

eux-mêmes. Cet écrivain dit encore, au sujet de J. B. Rousseau : « Il pense hautement: il peint bien et avec force. » Voltaire a dit de même : « Cet avocat me paraît un homme de mérite qui pense sagement et qui agit avec noblesse. »

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En conséquence, on devra dire plutôt aimer (ACAD.), aspirer ou soupirer (J.J.), désirer (FÉN.), demander (ID.), vouloir (ID.), ardemment, et courir (Boss.), chasser (FÉN.), suivre quelqu'un (ID.), chercher quelque chose (D'AG.), disputer (S. S.) ou se battre avec ardeur : là le sujet seul est en scène avec ses sentiments intimes; ici on en considère les actions, la conduite extérieure. - «Il doit, au fond de son cœur, désirer ardemment l'expulsion de ses durs maîtres. » J. J. « Je cours, je monte avec ardeur, je m'élance sur les rochers, etc. ID. — « Je désire ardemment, ô mon Dieu, de jouir de vous et de vous voir.... O moment heureux où!... Courons-y avec ardeur. » Boss.

Même différence entre passionnément et avec passion. L'adverbe arrête les regards sur le sujet seul la phrase adverbiale, au contraire. « Les sauvages de l'Afrique aiment passionnément la danse et les instruments de musique. » MONTESQ. C'est une qualité envisagée dans le sujet. « Si j'ai faim, je cherche avec passion la nourriture nécessaire. » Boss. Il s'agit ici d'une affection con

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aimer (MONTESQ., Boss., FÉN.), désirer (ROLL.), souhaiter (Boss., LES.) passionnément, et agir (Boss., PASc.) ou parler (FÉN.) avec passion.

On a mis beaucoup de soin à faire ce qui est soigneusement fait; ce qui est fait avec soin est soigné d'une part, la pensée se tourne vers le sujet; de l'autre, elle se porte vers l'objet. « Elle me conjura que le secret fût soigneusement gardé. » J. J. « Ces vins n'ont d'autre façon que d'être recueillis avec soin. » ID. On est soigneur de garder ce qu'on garde soigneusement; ce qu'on garde avec soin ne reçoit pas de dommage.

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§ I. Adverbe et phrase adverbiale substantive. 1° La phrase adverbiale étant composée d'un substan-sidérée hors du sujet, dans ses actions. On dit tif abstrait et de la préposition avec. Sagement, avec sagesse; hautement, avec hauteur; modérément, avec moderation; fortement, avec force; noblement, avee noblesse; ardemment, avec ardeur; passionnement, avec passion; soigneusement, avec soin; attentivement, avec attention; certainement, avec certitude. D'abord la règle de distinction indiquée cidessus comme pouvant être employée dans tous les cas où il est question de mettre une différence entre un adverbe et une phrase adverbiale quelle qu'elle soit, trouve ici son application naturelle et conduit à un résultat aussi clair que certain. L'adverbe est pour le verbe ce qu'est l'adjectif pour le substantif. Il s'y ajoute et le qualifie. De cette concomitance habituelle nait pour l'adverbe, relativement au verbe, une certaine analogie de signification : c'est d'ordinaire un caractère de subjectivité par lequel l'adverbe se rapporte toujours en quelque manière au sujet de l'action. La phrase adverbiale, au contraire, est de sa nature objective, c'est-à-dire relative à la chose et modificative de la chose.

Ainsi, pour nous faire comprendre immédiatement par un exemple, un plan sagement combiné donne une haute idée du mérite de son auteur; un plan combiné avec sagesse fait entendre que les moyens y sont bien adaptés aux fins. Vous avez sagement fait de quitter cette société; je vous en loue: ses mesures étaient prises avec sagesse; l'ennemi ne pouvait guère échapper. Fénelon a bien senti cette différence dans le passage suivant: « On a donné souvent aux Romains un discours trop fastueux: ils pensaient hautement, mais ils parlaient avec modération. » Modérément formerait un contre-sens, car il s'agit ici des Romains considérés objectivement, dans leurs discours, par rapport à une qualité exté

Le rapport est le même entre attentivement et avec attention: celui qui écoute ou examine attentivement est attentif; celui qui écoute ou examine avec attention ne perd rien; rien ne lui échappe.-« Je prêtai l'oreille attentivement. » J. J. << Prêter l'oreille au dedans, c'est écouter attentivement. » Boss. - « Je demande en grâce qu'on me relise avec attention. » J. J. « Vous le comprendrez aisément, si vous considérez avec attention comme Dieu parle différemment dans son Écriture. » Boss.

Qu'on rapproche l'adverbe certainement de la locution adverbiale synonyme avec certitude, on trouvera sans difficulté de l'un à l'autre la même différence. La subjectivité frappe tout d'abord dans certainement; c'est un terme affirmatif par lequel le sujet expose sa conviction, et l'autorité qu'il veut donner à son discours par son témoignage, plutôt que les raisons qu'il peut avoir d'assurer ou d'affirmer; avec certitude, au contraire, est tout objectif, il se rapporte aux raisons qu'on a de croire et de dire une chose comme certaine. A la rigueur même, il n'y a pas de synonymie entre les deux expressions: l'une est toute relative au sujet, et signifie assurément;

l'autre regarde uniquement les motifs de la con- Mais l'adverbe ne se distingue pas seulement viction, et ne s'emploie guère qu'avec connaître par sa subjectivité de la phrase adverbiale subet savoir. Aussi ne pourrait-on substituer avec stantive. Pour découvrir toutes ses nuances cacertitude à certainement dans ce vers du Misan-ractéristiques, il ne suffit pas de considérer son thrope:

rôle dans le discours, il faut de plus consulter son origine. Or, l'adverbe est formé de l'adjectif. et souvent il n'en diffère que par sa terminaison : tels sont proprement et sensément par rapport à propre et à sensé. En conséquence de cette dérivation, l'adverbe tient quelque chose de l'adjectif. Il correspond bien au substantif qui sert à l'expliquer dans la phrase adverbiale substantive: mais, en passant par l'adjectif, sa valeur fondamentale s'est altérée, et d'ordinaire elle a perdu de sa force, elle s'est atténuée.

Sagement vient de sage, qui signifie, conforme à la sagesse, ayant rapport à la sagesse, qui tient de la sagesse; de sorte que se conduire sagement, ce n'est pas toujours précisément se conduire avec sagesse, mais d'une manière qui a rapport à la sagesse, qui approche de la sagesse, et c'est pourquoi au lieu de définir sagement par, avec sagesse, il vaut mieux et on préfère quelquefois lui donner pour équivalent, d'une manière sage; et de même d'un grand nombre d'adverbes. Toutes les acceptions détournées, métaphoriques, approximatives que reçoit l'idée radicale dans l'adjectif se réfléchissent dans l'adverbe. Il ne saurait dès lors y avoir parité entre lui et une locution dans laquelle cette

Voilà certainement des douceurs que j'admire. Mais si la subjectivité de l'adverbe et l'objectivité de la phrase adverbiale mettent souvent entre eux une telle distance, que leur confusion soit véritablement impossible, quelquefois aussi certainement se prend dans le sens d'avec certitude et accompagne également les verbes connaître et savoir. Dans ce cas, il se distingue toujours par la même circonstance; il conserve un reste de subjectivité et se considère in ordine ad nos, au lieu que avec certitude se considère in ordine ad se ou ad res savoir certainement, c'est savoir de manière à être certain, à ne pouvoir douter; savoir avec certitude, c'est savoir de manière que les choses sues soient certaines, inébranlables et dégagées de toute obscurité. « Si j'étais dans une ville, dit Pascal, où il y eût douze fontaines, et que je susse certainement qu'il y en eût une empoisonnée, etc. » Certainement, c'est-à-dire de manière à en être sûr ou pleinement convaincu. Ailleurs il dit : « Quand l'Ecriture même nous présente quelque passage dont le premier sens littéral se trouve contraire à ce que le sens ou la raison reconnaissent avec certitude, il ne faut pas entreprendre de les dés-même idée a conservé toute sa valeur primitive. avouer. » Avec certitude, c'est-à-dire, de ma- Ainsi furieusement ne signifie pas avec fureur, nière à n'avoir plus besoin de preuves, et à ne mais beaucoup, énormément, de même que l'adpas redouter les contradictions. « On voyait jectif furieux dans un furieux menteur, une fuLuther parler si certainement de la ruine pro-rieuse dépense. Passionnément et affectueusement chaine de la papauté, que les siens n'en doutaient plus. » Boss. Si certainement, c'est-à-dire d'une manière si convaincue. « Ce qui intéresse le plus Orosmane, c'est de savoir avec certitude si Zaïre est coupable ou non. » LAH. Avec certi- | tude, c'est-à-dire d'après des rapports ou des renseignements convaincants. On dit croire cer- | tainement (FEN.), et voir ou discerner avec certitude (ID.), la croyance étant tout intérieure et considérée dans le sujet seul, au lieu que la vue et le discernement nous supposent en rapport avec les objets et dépendent des objets. C'est pourquoi on dira aussi plutôt connaître avec évidence (NIC.) que connaître évidemment : l'évi- | dence est une qualité des choses, et non un état de l'esprit.

n'équivalent point à avec passion, avec affection; passionnément, c'est-à-dire en homme passionné, tout particulièrement possédé par une passion; affectueusement, c'est-à-dire en homme affectueux, plein d'affection, et de cette affection qui se marque par de petits soins, conformément à la valeur de l'adjectif.

Telles sont, à notre avis, les deux seules différences qui se puissent trouver entre l'adverbe et sa définition. Cependant Beauzée et Roubaud en ont proposé une autre, que nous avions nousmême adoptée dans la première édition de cet ouvrage, moins par conviction que par déférence. De nouvelles réflexions nous y font renoncer absolument.

Suivant ces deux philologues, l'adverbe expri Au reste, la subjectivité de l'adverbe est si ma- merait une modification du verbe ou de l'action, nifeste et si incontestable, que plusieurs philo- qu'il signifie, habituelle, constante, générale, logues, Ménage, Beauzée, Court de Gébelin et au lieu que la phrase adverbiale désignerait cette Roubaud, n'ont pas hésité à faire dériver la ter- même modification dans un seul cas. Ainsi se minaison de l'adverbe du latin mente, ablatif de conduire sagement, par exemple, se dirait pour mens, esprit, âme, pensée, intention; en sorte caractériser toute la conduite d'un homme, et se que sagement, ardemment, attentivement, par conduire avec sagesse n'en ferait connaître qu'une exemple, reviendraient à sapienti mente, ardenti particularité, un fait, une seule action. mente, attenta mente, c'est-à-dire avec une âme Nous pensons, au contraire, que l'adverbe n'est ou une disposition intérieure sage, ardente, at-point du tout propre de sa nature à marquer la tentive. Ovide dit forti menti; Stace, honestá mente; Tibulle, tacità mente, etc. Les Espagnols terminent de même leurs adverbes, et quand ils en ont deux à mettre de suite, ils n'appliqnent qu'au dernier la désinence mente, segura y libremente, sûrement et librement.

constance et l'habitude. Platon et Aristote, ces grands maîtres en matière de langage comme en beaucoup d'autres choses, ont réduit toutes les parties du discours à deux mots, seuls essentiels, le substantif et le verbe, désignant, l'un les choses permanentes ou qui demeurent, l'autre

les choses fluentes ou qui passent. Rien de plus constant que ce caractère du verbe, d'indiquer des faits, des phénomènes, des accidents, quelque chose de contingent et de passager. Comment se pourrait-il donc que l'adverbe, qui tient incontestablement du verbe, portât un caractère oppose? Il n'y a à cela nulle apparence.

de l'adjectif, d'où il dérive. On doit s'attendre, par conséquent, à trouver d'ordinaire dans l'adverbe subjectivité et dans la phrase adverbiale objectivité; de plus, il arrivera souvent que l'idée exprimée avec toute sa force ou toute sa valeur primitive par le substantif de la phrase adverbiale sera modifiée dans l'adverbe de la même manière que dans l'adjectif d'où l'adverbe a été formé. LITTÉRALEMENT, À LA LETTRE. Selon la lettre, selon la valeur des paroles ou des mots. Dans cet exemple la différence de l'adverbe et de la phrase adverbiale dépend du sens de l'ad

Se conduire sagement veut-il dire montrer par sa conduite qu'on est sage, qu'on possède toujours la sagesse? Non, mais montrer par une action qu'on est sage en tant que faisant cette action, et rien de plus. En effet, n'est-ce pas par allusion à une seule action qu'on dit à quelqu'un :jectif qui a servi à former l'adverbe. LittéraleVous avez fait sagement (ACAD.)?

Je me tais.

Vous ferez sagement.

MOL.

ment, d'une manière littérale, signifie, en conséquence de la terminaison adjective al, d'une manière qui a rapport à la lettre, mais quant à la

Clovis rendit ce pays à Gondebaud. Il fit sage-forme, sous le point de vue extérieur ou gramment. » COND. Ils ont sagement compris que.... » | matical. A la lettre veut dire, au contraire, conVOLT. Mais avec sagesse se rapportera plutôt à formément à la valeur du discours considéré intoute la conduite. « La république de Marseille trinsèquement, quant à l'esprit ou à l'idée. « Il n'éprouva jamais ces grands passages de l'abaissement à la grandeur; aussi se gouverna-t-elle toujours avec sagesse. » MONTESQ. « La puissance mitigée que les évêques de Rome exercent aujourd'hui avec sagesse.» VOLT.

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ne faut pas prendre littéralement ce qui ne se dit que par métaphore; il ne faut pas prendre à la lettre ce qui ne se dit qu'en plaisantant. » ROUB. Prendre, entendre, expliquer, traduire quelque chose littéralement ne regarde que l'interprétation logique et grammaticale; prendre, entendre,

Il le reçut froidement (ACAD.), il m'a répondu froidement (ACAD.), se disent bien dans l'oc-accomplir, exécuter quelque chose à la lettre recasion. Tu as raison, répondit froidement la mouche. » FÉN. Avec froideur conviendra mieux s'il est question de quelque chose d'habituel. « Un grand homme qui verrait tous les jugements qu'on fait de lui s'apercevrait que plusieurs regardent ses belles qualités avec froideur. » NIC. « Un jour que le parlement tenait une assemblée, le roi, Henri II, s'y rendit. Deux conseillers recommandèrent éloquemment la réforme des mœurs et la tolérance des religions. » VOLT. • Il est beau de parler avec éloquence et de toucher le cœur. ID.

L'opinion de nos deux devanciers nous paraît donc plus fausse que vraie, et M. Guizot a fait sagement de ne la point admettre dans sa compilation. D'ailleurs, ne fût-elle qu'incertaine, nous devrions encore la retirer d'une théorie où nous croyons n'avoir rien avancé que d'incontestable.

**La phrase adverbiale étant composée d'un substantif abstrait et de la préposition à avec ou sans l'article. Littéralement, à la lettre; rigoureusement, à la rigueur; unanimement, à l'unanimité; follement, à la folie; excessivement, à l'excès; etc.

Le changement de préposition ne fait pas varier d'une manière notable le rapport de l'adverbe à la phrase adverbiale. Quelquefois même celle-ci commence indifféremment, ou peu s'en faut, par à ou par avec: rigoureusement, à la rigueur ou are rigueur; follement, à la folie ou avec folie; excessivement, à l'excès ou avec excès. La présence ou l'absence de l'article est aussi une circonstance trop accessoire pour mériter attention. Devant les grands éléments de différence les petits disparaissent. Pour arriver à des éclaircissements considérables en même temps que certains, il faut encore s'attacher à l'adverbe et voir la double influence qu'il subit, et de la part du verbe, dont il est comme le satellite grammatical, et de la part

garde l'interprétation et la signification des mots fondamentales, essentielles. Les écoliers et les commentateurs sont exposés à entendre les textes trop littéralement; les domestiques auxquels on donne des commissions ou des instructions, les gens prévenus ou qu'on complimente sont exposés à entendre trop à la lettre ce qu'on leur dit. La haute poésie demande souvent à n'être pas rendue littéralement; si vous êtes chargé pour quelqu'un d'ordres importants, il faut les rendre à la lettre. En un mot, littéralement est pour le sens formel, et à la lettre pour le sens intrinsèque.

D'un autre côté, littéralement marque plutôt une action et rappelle un agent, au lieu que souvent à la lettre s'emploie en parlant d'un état. Un traducteur traduit littéralement un texte, et ce texte porte telle ou telle chose à la lettre (D'AL.). RIGOUREUSEMENT, À LA RIGUEUR. Avec beaucoup de sévérité, sans faire aucune grâce.

Rigoureusement se considère relativement, et à la rigueur absolument, en soi. Rigoureusement exprime la manière d'agir en rapport avec le sujet dont il rappelle la qualité et les sentiments: celui qui punit rigoureusement punit en homme rigoureux. A la rigueur fait abstraction de l'agent; il ne le présente ni sous un jour favorable, ni sous un jour défavorable. Vous ferez à quelqu'un un mérite ou un tort d'avoir agi rigoureusement; vous vous en prendrez à son caractère; celui qui agit à la rigueur va jusqu'où la règle lui permet d'aller. De là vient qu'on se sert plutôt de rigoureusement avec les verbes traiter, punir, pour déterminer et caractériser la conduite qu'on tient envers les autres, et de à la rigueur quand il est question d'actions abstraites, spéculatives: observer ou expliquer une loi, juger une opinion à la rigueur.

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D'ailleurs, rigoureusement dit plus, parce que l'adjectif rigoureux signifie plein de rigueur, qui beaucoup de rigueur. Une vé

rité rigoureusement démontrée l'est en toute ri- | cela. » SÉv. « Se hair mortellement comme enfant

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d'Adam. » MAL. « Nous craignons mortellement et nous évitons de nous connaître. » BOURD.

FONCIÈREMENT, À FOND. Connaître une chose foncièrement ou à fond, c'est la connaître parfaitement, de manière à saisir ce qu'elle offre à l'esprit de plus difficile et de plus obscur.

Mais ici l'adverbe, au lieu de diminuer et d'atténuer comme à l'ordinaire et comme on vient de le voir dans les trois exemples qui précèdent immédiatement celui-ci, est plutôt augmentatif, comme il nous a déjà paru l'être dans rigoureusement. Cela tient, non pas à la nature de l'adverbe, mais à la signification toute particulière que doit à sa terminaison l'adjectif foncier, d'où foncièrement tire son origine. Connaître foncièrement, c'est connaître en homme foncier, ainsi qu'on disait autrefois, c'est-à-dire en homme habile dans toute une science, dans tout un art. Connaître à fond marque peut-être plus de profondeur, parce qu'il signifie précisément la profondeur, mais il

A l'unanimité représente absolument et en soi cette circonstance du fait; unanimement la représente en rapport avec les sentiments dont sont animés ceux qui donnent leurs suffrages. Toutes les fois qu'un parti de coalition vote à l'unanimité, il ne vote pas unanimement, tant s'en faut. L'unanimité d'unanimement suppose union et harmonie de tous les sentiments, de toutes les opinions; à l'unanimité suppose seulement rencontre de toutes les voix. « Tout le genre humain conspire unanimement à attester telle chose. » D'AG. Il est rare qu'une décision soit prise à l'unanimité. FOLLEMENT, À LA FOLIE. Aimer follement ou à la folie une personne ou une chose, c'est l'aimer beaucoup, extraordinairement. Follement signifie cette manière d'aimer en rap-marque moins d'étendue. On possède une science port avec le sujet qu'elle représente comme fou ou comme un fou; c'est à son égard une qualification vitupérative à la folie la désigne en soi, objectivement, comme forte, comme extrême, et rien de plus. Ensuite follement, d'une manière folle, qui tient de la folie, est une expression moins stricte et moins rigoureuse; l'idée radicale s'y trouve affaiblie comme dans l'adjectif correspondant.

EXCESSIVEMENT, À L'EXCÈS. Outre mesure. Excessivement est comme furieusement, horriblement, terriblement, prodigieusement, infiniment, un de ces mots hyperboliques qui ont bien perdu de leur valeur originelle à cause de leur dérivation adjective. A l'excès se prend, au contraire, à la rigueur; il dégage, il met à nu l'idée commune et la fait sentir dans toute sa force. C'est au point que excessivement ne signifie plus guère que beaucoup; au lieu que à l'excès marque l'excès ou le trop d'une manière nette et positive. << On dit que la reine pleura excessivement en disant adieu au roi.» SEV. « Voilà les extrémités où vont quelquefois des âmes timides à l'excès ou trop inquiètes. >> BOURD.

MORTELLEMENT, À MORT, À LA MORT. Blessé, frappé mortellement, à mort ou à la mort, c'est-à-dire de manière que mort s'ensuive.

foncièrement; on s'instruit à fond sur un point de droit ou de fait, sur un point de chronologie, d'histoire ou de théologie. Examiner une affaire foncièrement suppose qu'on l'examine dans toutes ses parties, en long et en large, pour ainsi dire; l'examiner à fond, c'est pénétrer jusqu'au fond et ne pas s'arrêter à la superficie.

Ensuite foncièrement montre l'homme, et le montre avec une qualité qui constitue en quelque sorte son métier ou sa profession; à fond montre | la chose, et la montre débrouillée et éclaircie. AISEMENT, À L'AISE.

:

L'un est pour l'action, l'autre pour l'état on fait quelque chose aisément; on repose à l'aise dans un fauteuil.

Et quand même tous deux se disent en parlant des actions, l'adverbe a seul un caractère de subjectivité toujours facile à reconnaître. Si une porte ne s'ouvre pas aisément, ceux qui entrent sont obligés de la pousser avec effort; si elle ne s'ouvre pas à l'aise, elle est mal faite, mal posée ou arrêtée par un obstacle. Où vous marchez aisément, vous marchez sans peine; où vous marchez à l'aise ne se trouve rien qui vous embarrasse ou vous gêne. « Aplanir le chemin du ciel et y faire marcher à l'aise les âmes lâches.» Bourd.

3o La phrase adverbiale étant composée d'un substantif abstrait et de la préposition en. Abondamment en abondance; effectivement, en effet; réellement. en réalité, totalement, en totalite; conséquemment, en consequence; etc.

A mort a plus de précision et implique plus de certitude; il signifie proprement, de sorte que la mort s'ensuivra. « Il est advenu à plusieurs d'entre les gladiateurs, étant blessés à mort de force plaies, d'envoyer demander au peuple s'il était content de leur devoir. » MONTAIGN. Mortellement, Il faut d'abord répéter ici la remarque faite au d'une manière mortelle, qui a rapport à la mort, commencement de l'article précédent, c'est que qui est capable de la donner, emporte seulement le changement de préposition dans la phrase adque la mort pourra s'ensuivre, paraît devoir s'en-verbiale substantive n'en produit aucun de bien suivre. On dit plutôt malade mortellement que malade à mort, parce que la mort n'est guère jamais que l'effet probable et éloigné de la maladie. Au figuré, mortellement et à mort sont synonymes comme ayant tous deux le sens d'excessivement: hair mortellement ou à mort; mais mortellement est plus vague et moins énergique. « Je hais mortellement à vous parler de tout

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sensible dans le rapport de cette phrase explicative avec l'adverbe qu'elle sert d'ordinaire à définir. Ainsi, en rigueur, à la rigueur et avec rigueur paraissent différer de rigoureusement à peu près de la même manière; ainsi, qu'on dise verser des pleurs en abondance ou avec abondance, cela revient au même, ou peu s'en faut, par rapport à verser des pleurs abondamment. Il ne peut

donc encore y avoir ici entre l'adverbe et son explication d'autres différences que celles qui tiennent au double caractère verbal et adjectif de l'adverbe. On ne se prive d'aucune lumière en ne tenant point de compte du sens particulier de la preposition en.

et en abondance; mais en abondance présente distributivement, et comme on le ferait pour les parties d'un tout, les pleurs sur lesquels abondamment n'appelle pas ainsi l'attention. L'adverbe a le sens de beaucoup, sans détail; il énonce le fait, mais ne décrit pas la chose; c'est par rapport ABONDAMMENT, EN ABONDANCE. Beaucoup. à celle-ci une expression vague, abstraite, idéaliAbondant, d'où vient abondamment, n'est sée, par cela même qu'elle en détourne l'esprit point un adjectif qui se distingue et s'éloigne par pour le fixer sur le sujet qui agit ou sur son acsa terminaison du substantif abondance; il a, au tion. Ce n'est pas que abondamment soit impropre contraire, sous tous les rapports, la plus grande à marquer la succession et l'étendue, mais il la ressemblance avec lui. Leur valeur primitive se marque dans le fait et non dans la chose; il a trouve donc aussi pure, aussi entière dans l'ad- plus de rapport au temps et à la force qu'à l'esjectif, et par conséquent dans l'adverbe, que dans pace et au nombre. Il pleut abondamment, quand le substantif. Il s'ensuit que toute la différence il pleut longtemps et d'une manière forte, remarqu'il peut y avoir encore entre l'adverbe abon-quable; la pluie est tombée en abondance, quand damment et la phrase adverbiale substantive en abondance est celle qui se tire du rôle grammatical de l'adverbe, de sen intimité avec le verbe, celle de l'accident à l'être, du subjectif à l'objectif. L'adverbe convient mieux en parlant de ce qui arrive boire (LES.), suer (Sev.) abondamment. La phrase adverbiale se dit seule en parlant de ce qui est : les mets étaient en abondance sur la Mais effectivement se dit dans l'ordre des faits, table (LES.); et en effet dans l'ordre des idées. Effectivement Je prétends que chez moi tout soit en abondance. DEST. ajoute ou oppose la réalité, ce qui arrive, se L'adverbe se rapporte au phénoménal essentiel-passe ou a lieu dans le monde des phénomènes; lement marqué par le verbe; la phrase adverbiale se rapporte à l'être essentiellement exprimé par le substantif.

Cependant la différence n'est pas toujours aussi grande, et en abondance se dit aussi, comme abondamment, des choses qui se passent ou arrivent. Mais abondamment les qualifie en rapport avec le sujet, et en abondance les représente en rapport avec l'objet. On pleure abondamment : « Ce n'est pas qu'Achille n'ait pleuré abondamment, et que cela n'arrive aux héros avec bienséance. » LAF. On verse des pleurs en abondance: « Ce vieillard lui fit connaître, par les larmes qu'il versait en abondance, qu'il ressentait une vive douleur. »

LES.

elle est tombée en grande quantité, de manière à inonder les routes et les plaines, à faire déborder les fleuves, à tremper profondément la terre.

EFFECTIVEMENT, EN EFFET. Ces expressions s'emploient pour confirmer ou pour rectifier, pour appuyer ou pour corriger ce qui a été vu, conçu ou avancé.

en effet ajoute ou oppose la vérité, ce qui est, ce qui est en soi ou essentiellement. Ces choses sont effectivement telles qu'elles peuvent ou doivent être; ces choses peuvent ou doivent être en effet telles qu'elles sont. Une chose, dont on n'a pas fait voir encore qu'elle est effectivement, n'existe que dans l'esprit, dans l'imagination, en idée ou en projet; ce n'est qu'une fiction, une promesse, une hypothèse : une chose, dont on n'a pas encore démontré qu'elle est en effet, n'est qu'en apparence, elle n'est pas de droit, légitimement ou véritablement. Effectivement est pour ainsi dire un terme historique dont se sert un homme qui en appelle à l'expérience, à l'existence physique et actuelle; en effet est l'expression logique ou abstraite qu'emploie un homme qui ne regarde qu'à l'idée, à l'essence, aux principes, à ce qui doit être.

On ne peut se servir que d'abondamment quand l'esprit se représente seulement un sujet et non pas un objet, une matière en grande quantité: suer abondamment: il fournit abon- Une grâce effectivement suffisante (PASC.) et damment à tous nos besoins (LES.); Dieu se suf- une grâce suffisante en effet (ID.) suffisent, ne fit abondamment à lui-même (MAL.); pour pro- sont pas suffisantes que de nom, n'ont pas que duire abondamment, il faut être nourri large-l'air d'être suffisantes. Mais la grâce effectivement ment (BUFF.).- En abondance, au contraire, est le mot propre, quand l'idée prédominante est celle de la chose, d'une matière qui est abondante. Le maigre, loin d'échauffer la nourrice, lui fournit du lait en abondance. » J. J. « Nous n'avons qu'à nous tourner vers Dieu, il nous donnera de quoi nous nourrir en abondance. » RAC. A moins d'être abondamment pourvu de certaines choses, on ne peut les donner en abondance. Avoir du vin abondamment, c'est en avoir beaucoup sous le point de vue subjectif, c'est-à-dire à souhait, de quoi satisfaire pleinement son envie de boire: avoir du vin en abondance, c'est en avoir beaucoup sous le point de vue objectif, c'est-à-dire en grande quantité et dans un grand nombre de vaisseaux.

suffisante suffit de fait, il lui arrive de suffire; et la grâce suffisante en effet suffit au fond, en soi, quant à sa valeur essentielle, elle doit suffire. Cette récompense vous est due; vous l'avez effectivement méritée par votre conduite : cet emploi vous est dû; vous en êtes en effet digne par vous-même, par ce que vous êtes (et non par ce que vous avez fait), par votre capacité, par vos qualités.

« Cela est arrivé effectivement. » ACAD. « Une preuve qu'il y a d'autres sujets de poëme que la colère d'Achille, c'est que j'en ai trouvé effectivement (Homère). » FÉN. « Diogène condamna cet homme parce qu'il avait effectivement volé ce dont on l'accusait. » ID. « Toutes ces choses se peuvent rencontrer dans les animaux et s'y rencontrent On dit bien ses pleurs coulaient abondamment | effectivement. » MAL. « L'impénétrabilité des corps

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