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Le pharmacien qui a des remèdes propres à guérir toutes sortes de maux, vous donne le remède propre pour guérir votre mal. La guerre est né cessaire au militaire comme l'ouvrage à l'ouvrier; la guerre est nécessaire pour le militaire qui veut avancer en se distinguant par des actions d'éclat. A généralise, et pour spécialise le sens de l'adjectif d'une troisième manière fort importante. Avec à l'adjectif désigne une aptitude vague, éloignée, peu prochaine, peu prononcée; et avec pour, au contraire, une aptitude toute particulière, immédiate, qui peut se réaliser à l'instant; à n'emporte que l'idée d'une simple tendance vers un but placé dans l'éloigne ment, et pour donne celle d'une fin qu'on atteint sur-le-champ. En conséquence, on est propre à un emploi quand on a des talents relatifs à cet emploi, quand, au besoin, on peut le remplir convenablement et encore moyennant quelques instructions, le temps et la pratique; on est propre pour un emploi quand on a le talent même de cet emploi, quand on y est spécialement propre, destiné, préparé, de manière à pouvoir commencer sans retard de l'exercer. La même différence sépare propre à de propre pour, quand, au lieu de se dire des personnes, cet adjectif se dit des choses, comme bon, utile, nécessaire. De même. être prêt à rendre service indique une disposition moins décidée qu'être prêt pour rendre tel service. - Une quatrième nuance distinctive dépend de la précédente, et est contenue comme elle dans l'opposition de la généralité à la spécialité; elle consiste en ce que pour, qui détermine davantage l'aptitude, la détermine quelquefois au point de la rendre non-seulement dominante dans le sujet, mais encore exclusive. On est propre à plusieurs choses à la fois, et propre pour une seule : un cheval peut être propre à la guerre et au labour, mais non pas propre pour la guerre et le travail des champs.- Cinquièmement, dire que à est général et pour spécial, c'est dire que le premier exprime le constant, l'habituel, le naturel, et pour l'accidentel, le particulier. Je suis toujours prêt à vous servir; me voilà prêt pour vous rendre tel service, par tel moyen. Le cheval est propre à la guerre, c'est chez lui une disposition naturelle, un état habituel, une qualité constante: tel cheval est propre pour la guerre, annonce, dans le cheval, une disposition acquise, une qualité accidentelle, résultant de l'exercice et comme ajoutée à sa nature. Les peuples, dit Montesquieu, par la nature et par l'éducation sont plus ou moins propres pour la guerre. » Otez de cette phrase par Teducation, et rien n'y justifiera l'emploi de pour. Une plante bienfaisante de sa nature est utile et bonne à la santé; une plante vénéneuse peut, entre les mains d'un pharmacien, devenir utile et bonne pour la santé. - Sixièmement, et conséquemment encore au caractère de généralité de à et au caractère de spécialité de pour, à désigne plutôt une disposition d'esprit abstraite, idéale. morale, et pour une disposition physique. C'est ce qui fait qu'il n'y a pas identité entre étre prêt à la mort et prêt pour la mort, tout prêt pour le départ. — Enfin, à convient mieux à

l'égard des choses, et pour à l'égard des personnes vous êtes indifférent aux avances d'une personne pour qui vous êtes indifférent.

Après les verbes, à et pour remplissent le même rôle, avec les mêmes nuances caractéristiques, qu'après les adjectifs, et ce rôle peut s'exprimer de la même manière à généralise la signification du mot précédent, et pour la spécialise. Mais cette opposition n'étant ni simple ni facile à comprendre dans toute son étendue, des développements redeviennent nécessaires; d'autant plus que les différences entre à et pour, à la suite des adjectifs, ne sont pas les seules qui distinguent à et pour à la suite des verbes; d'autant plus aussi que ces différences ne se réalisent pas toutes à la fois à propos de chaque verbe, mais les unes uniquement ou principalement avec certains verbes, les autres avec d'autres, suivant le sens particulier des uns et des autres.

A généralise, et pour spécialise l'action du verbe. C'est pourquoi on dira: telle somme ne peut suffire à mes dépenses, et d'une manière particulière : telle somme ne peut suffire pour un voyage, pour cette emplette. Si la raison suffit à vous conduire, elle suffira toujours pour vous faire éviter des fautes dans l'occasion. A la tête d'un chapitre de Montaigne on lit : « Des mauvais moyens employés à bonne fin, » et dans le cours du chapitre : « La faiblesse de notre condition nous pousse souvent à cette nécessité de nous servir de mauvais moyens pour une bonne fin. »

A est plus vague et suppose un but plus éloigné. On se prépare et l'on se dispose à une guerre éventuelle et possible, et pour la guerre qui va avoir lieu. On est porté à une chose par un penchant peu décidé, et pour une chose, quand le penchant est fort. De même, destiner, réserver, déterminer, employer à n'annoncent pas commedestiner, etc., pour, une destination, une fin prochaine, fixe, précise et bien arrêtée.

A s'emploie plutôt dans le sens abstrait, idéal, et pour dans le sens physique et rigoureux. Un prince est destiné à instruire la terre, et un salon est destiné pour la musique ou pour la comédie (VOLT.). On est disposé à la mort, et disposé pour un voyage: disposé au combat, animé, plein d'ardeur; disposé pour le combat, n'ayant plus de préparatifs à faire. Se préparer à un voyage, c'est y disposer son esprit, et presque simplement y songer; se préparer pour un voyage suppose qu'on fait des préparatifs effectifs, réels. Sacrifier quelque chose à quelqu'un, se dit, dans un sens affaibli et peu rigoureux, en parlant de choses idéales, les intérêts, le repos, le ressentiment; et sacrifier quelque chose pour quelqu'un annonce un sacrifice positif, considérable, comme celui de la vie, et dans une circonstance particulière.

L'une des manières dont se manifeste la spécialité propre à pour, consiste en ce qu'il indique un emploi ou une destination exclusive. Ce qu'on destine, réserve, détermine, dispose, prépare pour quelqu'un est mis de côté pour lui ètre appliqué à lui seul de préférence aux autres. « Le ciel nous a destinés l'un pour l'autre. » LES. L'argent qu'on emploie pour bâtir n'aura pas

d'autre destination. Concourir pour une place, Dans les locutions adverbiales, en apparence c'est aspirer à posséder cette place seul, à l'exclu- équivalentes, qui admettent, l'une à l'autre sion des autres; au lieu que l'effet qu'on concourt à produire sera rapporté à tous ceux qui auront concouru à sa production. On est absolument porté à une chose pour laquelle on a de l'inclination, et relativement plus porté pour une chose que pour une autre. On s'intéresse à quelqu'un sans que cet intérêt nuise à celui qu'on porte à d'autres; mais dans une affaire où des concurrents sont en présence, vous vous intéressez pour celui-ci ou pour celui-là.

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pour, ces deux prépositions produisent toujours le même effet qu'après les substantifs et les verbes. Rapporter un discours mot à mot, c'est le rapporter à peu près tel qu'on l'a tenu. « Je vais vous rapporter sa réponse presque mot à mot. » J. J. « J'ai rendu les scènes anglaises presque mot à mot, malgré la difficulté de la rime. >> DEST. Rapporter un discours mot pour mot marque plus de précision et de rigueur : c'est, nonseulement n'y rien changer d'essentiel, le rendre par des termes équivalents, mais pousser la fidélité jusqu'à rapporter les propres termes dont s'est servie la personne qui a parlé. « Le chancelier me dit mot pour mot ce que j'avais dit à la Chapelle; je convins qu'il n'y avait pas un mot de changé. » S. S. « La mémoire des mots consiste à réciter fidèlement et à rendre mot pour mot ce qu'on a appris par cœur. » ROLL. On rend bien ce qu'on rapporte mot à mot; on reproduit d'une manière parfaitement exacte ce qu'on rapporte mot pour mot. On traduit mot à mot (Boss., VOLT.); une traduction n'est jamais qu'une copie plus ou moins approchante: mais apprendre par cœur, c'est apprendre mot pour mot (ROLL., FÉN.), et citer un passage, c'est le transcrire mot pour mot (VOLT.).

Enfin, de la généralité inhérente à à et de la spécialité qui caractérise pour résulte, pour les locutions verbales synonymiques dans lesquelles ils entrent comme seul élément de différence, un trait de grande importance. Pour rend l'action du verbe remarquable par l'effort, l'application, le soin, l'attention qu'il exprime de la part du sujet. Conspirer, concourir à conviennent même en parlant de l'action des choses inanimées; il n'en est pas ainsi de conspirer et de concourir pour. On travaille quelquefois à sa propre perte sans le vouloir, même sans le savoir, sans s'en douter; on ne travaille que pour un but qu'on se propose et qu'on s'efforce d'atteindre. Dans tous les cas, travailler à n'est que spontané et ne suppose qu'une application modérée : c'est ainsi qu'un bon fonctionnaire travaille au bien-être de son pays, tout en ne songeant peut-être qu'à ses propres intérêts. Travailler pour est toujours volontaire et marque beaucoup de soin et d'effort. Il en est de même de s'appliquer pour par rapport à s'appliquer à. On emploie une partie de son temps à faire telle ou telle chose, et tous ses efforts pour arriver au but de ses désirs. « S'affectionner à, dit Marmontel, c'est s'attacher; s'affectionner pour, s'intéresser vivement, se passionner. L'un consiste en un certain laisser-aller de sympathie, l'autre en une affection active. S'intéresser à, c'est n'être pas indifférent, se trouver touché en entendant un récit ou en voyant un spectacle; impression purement passive quand on s'intéresse pour, on déploie de l'activité, on se porte à des démarches. S'empres-« ser pour faire une chose marque bien plus d'empressement, de zèle ou d'ardeur que s'empresser à ou de la faire. (Voy. p. 60). « La fille d'un pauvre laboureur était belle comme le jour. Toute la jeunesse de son voisinage s'empressait pour la voir, et chaque jeune homme eût cru assurer le bonheur de sa vie en l'épousant. » FÉN. « Ces ambassadeurs athéniens, les philosophes Carnéade, Diogène et Critolaus, furent extraordinairement accueillis à Rome. Ils parurent des hommes merveilleux, et les jeunes gens s'empres-là. La première est l'expression ordinaire, cousèrent pour les entendre. » COND.

A n'est donc plus qu'indicatif du but lointain auquel tend l'action: il est tout objectif. Pour, au contraire, est subjectif: il appelle l'attention vers l'agent, il fait remarquer la part considérable que celui-ci prend à l'action pour arriver à un but prochain et précis. C'est pourquoi à est plutôt suivi d'un substantif significatif du but à atteindre, et pour, d'un infinitif marquant une action précise, à faire à l'instant.

Le rapport est le même entre à jamais et pour jamais. A jamais est indéfini, vague, hyperbolique: pour jamais est précis et positif : le premier permet encore, dans un avenir indéterminé, l'espérance d'un retour qu'exclut rigoureusement le second. C'est, d'une part, une expression qui convient au langage passionné, et qui peut recevoir des augmentatifs à tout jamais, au grand jamais; c'est, de l'autre, une expression d'une valeur pleine et entière, laquelle appartient au langage froid et exact de la philosophie. « Exemple mémorable à jamais. » J. J. a Jour à jamais malheureux! » BARTH. « Sésostris laissa l'Egypte riche à jamais. » Boss.

:

Moi, parler pour Valère ? il faudrait être folle. Que plutôt à jamais je perde la parole! REGN. Le traité de Westphalie sera peut-être à jamais parmi nous la base du système politique. » J. J. J'ai cru que cette nuit serait sa nuit dernière, Et que je fermerais pour jamais sa paupière. REGN. « Elle n'est plus. Mes yeux ont vu fermer les siens pour jamais. » J. J. « En sortant de ce monde, je tombe pour jamais dans le néant ou dans les mains d'un Dieu irrité. » PASC.

Une différence semblable a lieu aussi entre alors et pour lors, expressions synonymiques, comme signifiant, l'une et l'autre, en ce temps

rante, usuelle; elle rappelle une époque étendue, pendant laquelle se faisait tout un genre ou toute une suite d'actions: elle s'emploie surtout avec un verbe à l'imparfait. « On pensait alors (au temps des rois de Rome) dans les républiques d'Italie, que les traités qu'elles avaient faits avec un roi ne les obligeaient point envers son successeur. » MONTESQ. « Les forces du Nord étaient toutes en Orient, en Egypte, Ionie, Grèce, seuls pays où il y eût alors (lors des empires d'Orient et d'Oc

De même, croire à n'équivaut pas, tant s'en faut, à croire en. Celui-ci marque une croyance plus intime, et accompagnée d'une grande confiance, d'une sorte d'abnégation: croire en Dieu, croire en J. C. « Il n'y a nulle raison de croire à l'Antechrist qui ne soit à croire en J. C.; mais il y en a à croire en J. C. qui ne sont point à croire à l'Antechrist. » PASC. Bossuet a bien visiblement observé lá même distinction entre espérer à et espérer en dans l'exemple qui suit. « Il est bon d'espérer en Dieu, et non pas d'espérer aux hommes, parce que l'espérance que l'on a aux hommes ne nous montre que de fort loin la possession; et, au contraire, l'espérance que l'on met en Dieu est un commencement de la jouissance. »

cident) quelque commerce. » ID. « La correspon- | feraient des miracles, ils n'induiraient point en dance de Voltaire avec le prince royal de Prusse erreur;» et l'ayant prouvé, il conclut donc le faisait du bruit alors. » J. J. « Durant les ter- miracle d'un schismatique ne peut induire à l'erribles chaleurs qu'il faisait alors. » ID. « Les reur. » Comme si, fort de sa démonstration, il guerres qu'il y avait alors en Asie. » FÉN.« Solon voulait dire qu'un tel miracle ne peut pas même divisa les citoyens en trois différents ordres, causer indirectement l'erreur, y acheminer, y selon les biens dont chaque particulier était alors conduire. en possession. » ID. Pour lors est l'expression remarquable, de choix, celle qu'on préfère pour mdiquer l'époque courte et précise à laquelle un événement particulier, unique, s'est passé elle convient surtout dans le récit d'un fait avec le parfait défini.« Tout est changé, dit pour lors an homme qui.... » MONTESQ. « Et comment, lui dis-je pour lors?... ID. « L'histoire moderne nous fournit un exemple de ce qui arriva pour lors (aprés la mort de Lucrèce) à Rome. » ID. < Je fis pour lors si peu d'attention à son langage que.... » J. J. « Pour lors il n'y eut plus moyen de m'en dédire. » ID. « Cette femme pour lors mourante.» ID. Platon avait quarante ans pour lors (lors de son premier voyage en Sicile). » FÉN. < Heureusement pour Platon, Annicéris de Cyrène s'étant trouvé pour lors dans le pays, il l'acheta au prix de vingt mines. » ID. Montesquieu a parfaitement observé cette distinction dans le passage suivant des Lettres persanes : « Monsieur, dit pour lors un ecclésiastique, vous parlez là du temps le plus miraculeux de notre invincible monarque: y a-t-il rien de si grand que ce qu'il faisait alors pour détruire l'hérésie? D

AU MOINS, POUR LE MOINS. En mettant les choses au plus bas, au minimum, pour ne pas dire plus.

Pour le moins est plus précis et suppose une estimation rigoureuse. « Apprenez qu'il y a seize ans pour le moins que l'homme dont vous nous parlez périt sur mer. » MOL. Au moins se dit approximativement, sans qu'on soit bien sûr de son calcul. « Un tel livre doit donner au moins vingt mille francs de profit au libraire. » J. J.

5° A, EN.

A conserve son caractère de généralité et de vague par rapport à en dans les expressions synonymiques induire à erreur et induire en erreur, déterminer la croyance à quelque chose de faux. Induire en erreur désigne une action doublement remarquable, et par la part qu'y prend le sujet, car elle est toujours volontaire, et par ce qu'elle a de précis, de décidé, de complet, car induire en erreur, c'est mettre, établir dans l'erreur. « M. l'intendant ne saurait se justifier d'avoir manqué de parole à l'Académie, et de l'avoir induite en erreur par de fausses promesses. » MONTESQ. Induire d'erreur peut signifier une action qui n'est pas volontaire, et, dans tous les cas, il signifie seulement l'action de mettre sur la voie de l'erreur, de manière à n'être que la cause éloignée de l'erreur. « Durant les temps d'ignorance, ce que l'âme connaissait de sa dignité et de son immortalité l'induisait le plus souvent à erreur. » Boss. Il y a bien de la différence, dit Pascal, entre tenter et induire en erreur. Dieu tente, mais n'induit point en erreur. » Tenter, n'est-ce pas au moins induire à erreur ? Le même écrivain prétend que, « quand même les schismatiques

Enfin Bourdaloue, en employant à avec se fier et en avec se confier, dorme à entendre que la différence entre à et en est analogue ou conforme à celle de se fier et se confier, comme cela est effectivement. Voy. se fier, se confer. « Fionsnous à la parole des saints, ou plutôt confionsnous en la parole de notre Dieu.»

A raison de, et en raison de, forment deux locutions prépositives entre lesquelles les dictionnaires ne mettent pas de différence. Il y en a une pourtant, et c'est la suivante. A raison est plus vague ou moins rigoureux et se dit plutôt par rapport à la qualité que par rapport à la quantité. « Il y a des gens capables d'adopter cette critique à raison de sa commodité. » J. J. En raison de, au contraire, est une expression plus stricte, plus exacte et presque toujours relative à la quantité. « L'imposition doit être faite en raison des biens des contribuables. » J. J. On paya cet ouvrier à raison de l'ouvrage qu'il avait fait (ACAD.), suppose qu'on a voulu récompenser la qualité aussi bien que la quantité de l'ouvrage. Mais il faudra dire: on paya cet ouvrier en raison du temps qu'il avait mis à cet ouvrage (ACAD.), le temps ne pouvant être considéré que sous le rapport de la quantité. Cette distinction est si vraie, qu'en raison de est seul usité en termes de science où il est besoin d'une grande exactitude, et que dans cette locution le mot raison peut recevoir des déterminatifs : en raison directe, inverse, réciproque. Toutefois, à raison de se dit aussi, comme en raison de, en parlant de quantité ou de nombre. Alors s'il n'est pas plus vague, il est plus général qu'en raison de : il suppose une estimation, non pas spéciale et pour la circonstance, mais faite pour tous les cas : Il lui doit le change de dix mille francs, à raison de tant pour cent (ACAD.). On dirait bien, d'un autre côté : vous aurez part aux bénéfices en raison de votre mise.

Même différence entre à proportion de et en proportion de. A proportion de est plus vague et implique une simple approximation, une mesure peu rigoureuse. « Je suis sensible au boatés de

M. de Buffon à proportion du respect et de l'es- | une circonstance particulière, il prend les armes time que j'ai pour lui. » J. J. « Les professions pour le renverser; mais un peuple, sans cesse ne paraissent ridicules qu'à proportion du sérieux inquiet et remuant, qui n'obéit qu'avec peine, est qu'on y met. » MONTESQ. « Un de nos amis que rebelle à son roi; les hérétiques sont rebelles à vous aimez à proportion des soins qu'il a de moi. » Dieu (MONTESQ.). « Quiconque ne résiste pas SEV. En proportion de signifie suivant telle me- à ses volontés, il est injuste au prochain, insure exacte, et a rapport uniquement à la quan- commode au monde et outrageux à Dieu. » Boss. tité. Il ne dépense pas en proportion de son re- << Henri IV était indulgent à ses amis, à ses servenu (et non pas à proportion de son revenu, viteurs, à ses maîtresses. » VOLT. « Le chien se comme le dit à tort l'Académie). « La critique pique d'être soigneux et fidèle à son maître. » LAF. exige du talent en proportion de ce qu'il peut. 7° A, VERS.

LAH.

«

On a dit à comparaison avant de dire en comparaison : c'est une preuve entre mille que les langues deviennent de plus en plus précises. << La hauteur d'un puits et d'une tour est fort petite à comparaison du diamètre de la terre. » DESC. On disait aussi autrefois au même temps pour en même temps. 6° A, ENVERS.

Que la préposition à ait pour caractère ordinaire la généralité, le vague et l'indétermination, c'est ce que démontre tout ce qui a été dit jusqu'ici dans ce chapitre. Toutefois, ce caractère ne lui convient que quand, élevée au plus haut degré de l'abstraction, elle s'emploie comme une sorte d'auxiliaire à la suite des verbes et des adjectifs qu'elle joint à leur régime. Hors de là, considérée quant à sa valeur origi

INGRAT, REBELLE, INJUSTE, INDULGENT, nelle et relativement au rapport qu'elle exprime FIDÈLE, etc., à et envers.

proprement, elle a un sens précis, et c'est par cette précision même qu'elle se distingue d'autres prépositions, de vers, par exemple.

A et vers servent également à distinguer l'endroit où est une chose ou bien où aboutit une

Chacun de ces adjectifs avec à marque une manière d'être ou une disposition vague, générale, habituelle ou peu remarquable. Aussi est-ce toujours à qu'ils prennent avec les noms de choses, c'est-à-dire quand il s'agit de désigner les senti-action; mais vers ne le désigne qu'à peu près. ments qu'on éprouve, ou d'exprimer comme on Cette étoile est située vers le nord signifie qu'elle est à l'égard des choses. Ingrat à des bontés est plutôt dans cette partie du ciel que dans une (FÉN., VOLT.), à des faveurs (MASS.), à un bien- autre, qu'elle est aux environs du nord. Quand fait (Boss.). Rebelle aux lois (J. J.), à la justice, on dit qu'elle est située au nord, le nord est aux ordres ou à la volonté de quelqu'un (ACAD.). considéré, non plus comme une grande division << Cela montre combien la réforme était indul- du ciel, mais comme un point fixe tout près dugente à ces pieux assassinats. » Boss. Fidèle à quel est l'étoile en question. Viens vers moi, veut sa vocation (BOURD.), à sa parole ou à l'amitié dire seulement viens de mon côté, et ne va pas (ACAD.). Les mêmes adjectifs s'emploient avec d'un autre, approche-toi de moi. Viens à moi, envers pour annoncer quelque chose de plus spé-indique la personne qui parle comme un terme cial, de plus significatif, de plus extraordinaire, ou un point précis sur lequel elle commande de et, par exemple, pour montrer de quelle manière se diriger. on est disposé, non plus à l'égard des choses, mais à l'égard des personnes. Ingrat envers son bienfaiteur (ACAD.), envers Dieu (PASC., BOURD., FEN.). Rebelle envers son roi légitime (VOLT.). La nature envers vous me semble bien injuste. (Le Chêne au Roseau). LAF.

Ces deux prépositions appliquées au temps diffèrent de même. Les historiens font remonter sa naissance vers l'année 1500, c'est-à-dire à peu près à cette année, environ l'année 1500, comme on disait autrefois. A notre heure dernière, indique un moment trop court et trop bien déter« De cette façon l'Église a cru être assez indul-miné pour qu'on puisse y substituer, dans aucun gente envers les homicides. » PASC. « Il ne suffisait pas que Dieu parût fidèle envers lui (S. Ignace de Loyola). » BOURD. « La charité nous rend fidèles envers tout le monde. » Nic.

cas, vers notre heure dernière.

A, ad, indique le point, mais le point fixe. précis, circonscrit, où l'on tend. Vers, de versus, tourné du côté de, ou simplement du côté de, Avec les noms de choses, il n'y a point de dif- exprime plutôt la situation où le côté par rapficulté; c'est toujours de la préposition à qu'il port à un autre ou à d'autres côtés qu'il exclut : faut se servir. Mais avec les noms de personnes, ce qui est vers l'orient n'est point du côté de envers n'est pas toujours de rigueur. Quelquefois l'occident, du midi ni du nord, sans plus de on peut et on doit dire, ingrat, rebelle, injuste, détermination. C'est pourquoi vers s'emploie parindulgent, fidèle à quelqu'un plutôt que envers ticulièrement bien quand il s'agit d'un lieu qui quelqu'un. C'est quand on veut indiquer à l'égard dans l'usage ordinaire, est opposé à d'autres : de quelqu'un un sentiment vague, peu marqué, vers l'orient, vers l'occident, etc.; voyez ce pascomme est celui qu'on éprouve pour les choses, sage dans tel livre, vers le commencement, vers ou bien habituel et par cela même peu frappant. le milieu. Vers contient toujours cette idée d'opL'empereur d'Allemagne Henri IV dit haute-position à d'autres côtés ou à d'autres directions. ment que le pape Grégoire VII ne pouvait être et à jamais; celui ci est absolu. Un médecin ou ingrat à son bienfaiteur. » VOLT. « Quand l'allu-un marchand, en concurrence avec d'autres. sion se présente d'elle-même, ce serait être ingrat à la Fortune que de la rejeter. » VAUG. Un sujet est rebelle envers son roi, quand, dans

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dira: Venez vers moi. Mais on dira à un homme qui n'a de secours à attendre d'aucune part : Venez à moi; ce qui ne supposera pas, comme

la même différence trouvée entre à et avec, entre à et pour, entre à et sur, se retrouve entre de et avec, entre de et pour, entre de et sur. Quelques exemples suffiront pour le démontrer. De et avec, comme à et avec, désignent également l'instrument ou la matière dont on se sert pour faire quelque chose. Frapper du pied ou avec le pied, lancer de la main ou avec la main, payer de ses deniers ou avec ses deniers, combler un fossé de pierres ou avec des pierres. De est pour l'ordinaire, l'habituel; avec, pour les cas particuliers, singuliers, remarquables: on frappe du pied la terre, et avec le pied un objet qu'on rencontre, une bête venimeuse, le haut

dans le cas précédent, la défense d'aller d'autre côté. Un vaisseau se dirige vers l'orient, parce qu'ainsi il arrivera plus tôt au terme de sa course que s'il allait vers l'occident, etc. On se dirige à un lieu, par des raisons tirées du terme luimème: un vaisseau va au nord, l'autre au midi, parce qu'ils espèrent tirer de plus grands avantages de leur commerce, l'un avec le nord, l'autre avec le midi. On lève les yeux ou les mains vers le ciel toutes les fois qu'on a quelque raison pour ne pas les abaisser vers la terre; on lève les yeux ou les mains au ciel pour implorer l'assistance de Dieu, pour adresser au ciel quelque prière. Après avoir considéré les divers éléments, pour en tirer des preuves de l'existence de Dieu, Fé-d'une chaise ou d'une table; on comble un fossé nelon continue en disant : « Il est temps de lever nos yeux vers le ciel.» « Tout près de là était un homme qui, élevant les yeux au ciel, disait Dieu bénisse les projets de nos ministres! » MONTESQ. Que de voix plaintives s'élèvent au ciel contre ces hommes!» MASS.

D

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de pierres, de décombres, et quelquefois, pendant la guerre, on comble les fossés avec des cadavres. Ou bien encore on se sert d'avec pour spécifier, dans le genre d'instrument et de matière généralement employés, l'espèce ou l'individu qu'on emploie dans un cas particulier. « S'il avait eu une fronde, le sauvage lancerait-il de la main une pierre avec tant de roideur? » J. J. Nous lançons mieux des pierres avec la main droite qu'avec la main gauche. On paye de ses deniers, et avec les premiers deniers de sa recette. On distingue les choses les unes des autres, comme on les compare les unes aux autres, sans grand effort, sans attention, sans difficulté, à première vue; et on les distingue les unes d'avec les autres expressément, en démêlant, en déterminant, en marquant fortement leurs traits caractéristiques; c'est la différence de l'homme qui voit et représente aux autres ses perceptions, à l'homme qui regarde et rend compte aux autres de ses observations.

La distance est si grande entre à et vers dans à la fin et vers la fin, qu'on peut mettre entre deux une autre préposition, sur sur la fin. Quand on est à la fin de quelque chose, on a fini, on n'a plus rien à faire; quand on est ters la fin, on est déjà loin du commencement, on a même passé le milieu, mais rien de plus; quand on est sur la fin, ou va finir, on voit le terme tout près de soi, on y touche, on est presque dessus. Une discussion s'élève vers la fin d'un repas; c'est une vive querelle sur la fin du repas; et, à la fin du repas c'est une rixe, on sort de table pour se battre. « Elle me prie à la fin de son billet de lui renvoyer ce livre, » J. J., implique qu'après cette prière le billet ne contient plus rien. « J'avais fait, vers la fin de l'É- D'un autre côté, de et pour, dans moyen mile, une sortie contre cette cruauté, » J. J., in- de parvenir et moyen pour parvenir, sont entre dique seulement que cette sortie se trouve dans eux comme à et pour, dans les expressions synola dernière partie de l'ouvrage, et non pas dans nymiques ci-dessus examinées. Vous direz d'une la première ni dans celle du milieu. « Vous me manière toute générale il ne néglige aucun reprochez de n'avoir pas fait changer de système moyen de parvenir; et d'une manière particulière: à Wolmar sur la fin du roman, » J. J., c'est-à-c'est là un excellent moyen pour parvenir. On dire au moment ou sur le point de le finir, quand trouve un moyen de parvenir, on cherche un le roman approche du terme. D'ailleurs sur a moyen pour parvenir. Les mêmes nuances peucela de particulier, qu'il désigne, non pas la si-vent servir à distinguer occasion de et occasion tuation comme les deux autres, mais l'approxi-pour, soin de et soin pour le soin que prenmation ou l'action d'approcher : il n'est appli-nent tous les peintres de placer leurs tableaux cable qu'aux choses qui se font et non aux choses qui sont. Ainsi on ne dit pas sur le milieu d'un champ ou du ciel, comme on dit au milieu ou rers le milieu d'un champ ou du ciel. A la fin ou cers la fin d'un livre se trouve telle chose; sur la fin d'un livre, l'auteur fait telle chose, l'action change ou se modifie de telle manière. Il est sur son départ, et non à ou vers son départ, parce qu'il s'agit ici d'une action pure et non d'une chose.

dans un jour avantageux ne contribue pas peu à les faire valoir; Cicéron propose, à l'imitation de l'historien, pour la disposition des faits, « le soin qu'un homme de bon goût prend pour placer de bons tableaux dans un jour avantageux. » FÉN.

En conversation on parle, on discourt de choses et d'autres, de nouvelles, de modes, de voyages: un orateur parle, discourt, sur tel ou tel sujet, un savant sur des matières plus ou moins difficiles. Faire un traité d'horticulture et 8° DE et AVEC, DE et POUR, DE et SUR. un traité sur la culture du dahlia. « Tous ceux Comparativement l'une à l'autre, les deux pré- qui se sont mêlés d'écrire ou de la religion ou de positions à et de sont, celle-ci plus détermina-la philosophie se sont servis d'Homère et de ses tive, celle-là plus générale. Mais à l'égard des livres.» MONTAIGN. Pour bien écrire sur la religion prepositions spécificatives proprement dites, c'est-et sur la philosophie, il faut de longues études, à-dire de toutes les autres, elles ont un sens une rare application et comme une vocation parégalement vague et indéfini. Ainsi, à et de sont ticulière. Une assemblée est instituée pour dans le même rapport relativement à par; et délibérer de telles ou telles choses, ou elle déli

SYN. FRANC.

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