Page images
PDF
EPUB

fixe; au lieu que le langage, comme la corporation, est quelque chose qui aspire à être ce qui est marqué par le radical, c'est-à-dire ici une sorte, une façon ou une manière de langue. « Je commence à m'apercevoir que le langage du pays (de Valence) est un langage mêlé d'espagnol et d'italien, deux langues que j'entends assez bien. » RAC. BANDE, BANDAGE. La bande et le bandage servent à envelopper certaines parties du corps et à les contenir dans un certain état.

D'autre part, le sens étymologique de rive n'é- | chose de constitué, de reconnu, qui a une forme tant pas altéré comme celui de rivage, par une terminaison significative, et d'ailleurs la rive étant étroite de sa nature, une ligne mathématique, pour ainsi dire, ce mot s'applique plutôt aux rivières et aux ruisseaux, au lieu que rivage s'emploie de préférence en parlant de la mer. « Tous les rois des Amorrhéens qui habitaient la rive occidentale du Jourdain, et tous les rois cananéens qui possédaient les rivages de la grande mer (Méditerranée), ayant appris que le Seigneur avait séché le Jourdain, eurent le cœur dissous. >> VOLT.

COQUILLE, COQUILLAGE. Enveloppe dure et calcaire des mollusques testacés, tels que les limaçons et les moules.

La coquille est simple; le coquillage, artistement travaillé, a une forme plus variée. Montaigne aime à voir Scipion < nonchalamment et pué rilement baguenaudant à amasser et choisir des coquilles. » « Ce que nous voyons de plus ingénieux parmi les animaux sont les réservoirs des fourmis, les coquillages des limaçons, etc. » Boss. Coquillage est un terme pittoresque.

Des coquilles se considèrent par rapport à leur nombre; elles se comptent. « Je crois voir un enfant sur le rivage, amassant des coquilles, jusqu'à ce qu'accablé de leur multitude, il finisse par tout jeter. » J. J. Des coquillages sont toutes sortes de coquilles, des coquilles de toute gran- | deur, de toute couleur et de toute forme. « Les sauvages se parent de plumes et de coquillages.» J. J. Une couche de glaise parsemée de coquillages formait le lit des ruisseaux. » ID.

α

La bande est simple, le bandage compliqué et fait avec art; en telle sorte que la bande entre dans la composition du bandage. Bande appartient à la langue commune; bandage est plutôt un terme de l'art chirurgical.

- α

« Les Egyptiens enveloppent le corps (mort) avec des bandes faites de fin lin. » BUFF. « Bacchus avait une couronne d'or composée de pampres et ornée de certaines bandes blanches qui l'environnaient de tous côtés. » ROLL. « Des chaussures anciennes avaient une ou plusieurs semelles au-dessous du pied, et des bandes qui liaient le pied nu par-dessus. » ID. — « A peine l'enfant est-il sorti du sein de la mère, qu'il est entouré de linges et de bandages de toute espèce. » BUFF. « A la Chine, quand une fille a passé l'âge de trois ans, on lui casse le pied, et on l'enveloppe de plusieurs bandages jusqu'à ce qu'il ait pris son pli. » ID. « Alexandre, ôtant le bandage et l'appareil de sa plaie, fit voir sa jambe sans tėmoigner la grandeur de son mal. ROLL.

TRICOT, TRICOTAGE. Sorte de tissu fait en mailles.

Tricot n'y ajoute aucune idée accessoire et ne fait considérer la chose que par rapport à ses qualités intrinsèques. Tricotage rappelle l'action de tricoter, l'habileté du tricoteur, et les qualités du tissu qui résultent de la main-d'œuvre. Un tricot est de laine ou de coton, et le tricotage en

LANGUE, LANGAGE. Système de signes à l'aide desquels on exprime ses pensées et ses sentiments. Le langage est plus compréhensif que la langue : il y a le langage des yeux, celui des gestes ou le langage par signes; le langage se sert de tout pour exprimer les pensées. La langue est le langage oral, elle n'emploie que la parole. « Le lan-est lâche ou mal fait. En un mot, le tricot diffère gage, dit Condillac, d'accord avec Beauzée sur ce point, est l'art de communiquer ses pensées; le langage des sons articulés se nomme langue. » Le langage comprend, pour ainsi dire, toutes sortes de langues.

Toutefois, dans une acception dérivée, ce mot, à la différence de celui de langue, se prend pour une espèce ou manière de parler, de se servir de la langue votre langage me déplaît; voilà un singulier langage. « Les Bedas ne parlent pas la langue de Ceylan, et leur langage n'a aucun rapport avec toutes les langues des Indes. >> BUFF. Ducerceau a mêlé à la langue épurée de son siècle le langage marotique, qui énerve la poésie par sa malheureuse facilité. » VOLT. C'est qu'alors, bien qu'à base purement nominale, langage se rapporte à celui qui parle, à l'ouvrier qui se sert de la langue et à la forme qu'il donne au discours. C'est une nuance que nous avons déjà trouvée aux mots herbage, laitage, pâturage et coquillage, quoique leur base ne soit pas non plus verbale, excepté celle de pâturage.

De cette seconde différence en découle une troisième comme le corps, la langue est quelque

du tricotage de même que le tissu de la tissure.

Pareillement, la grille, outre qu'elle est plus simple ou moins compliquée que le grillage, ne se rapporte pas comme lui à l'art ou à l'industrie de l'ouvrier qui l'a faite, mais uniquement à sa destination.

Entre treille et treillage la différence est encore plus marquée : la treille est, dans un berceau de ceps de vignes, ce qui est donné ou fourni par la nature, et treillage désigne proprement la partie qui est due à l'art humain, à l'industrie du treillageur. « Les beaux treillages bien sculptés! » J. J. « Des treillages façonnés en corbeilles et en berceaux. » MARM.

CAHOT, CAHOTAGE. Espèce de saut que fait une voiture en roulant sur un chemin pierreux ou mal uni.

Le cahotage est une suite ou une répétition de cahots; c'est un mouvement fréquent qui se fait par cahots ou qui est causé par les cahots. Le cahot produit une seule secousse, le cahotage en produit de continuelles : l'un fait verser, l'autre fatigue.

En outre, celui-là est pour l'idée, celui-ci pour le fait je n'aime pas le cahot des voitures;

le cahotage de cette voiture m'a brisé. C'est toujours la difference d'aboi à aboiement; d'acte à action, etc.

CAQUET, CAQUETAGE. Babil, grande abondance de paroles inutiles.

Caquet est absolu, et caquetage relatif à l'action de caqueter. Dire qu'un homme n'a que du coquet, c'est le caractériser en lui-même; dire qu'il n'a que du caquetage, c'est faire songer au bruit qu'il fait en parlant, à l'effet qu'il produit sur les autres. On a le caquet bien affilé, on rabat le caquet de quelqu'un; et dans ces locutions caquetage serait impropre, parce qu'il n'exprime rien de constant, d'absolu, parce qu'il est pour le fait et non pour l'idée. - « L'idée d'admettre un tiers dans les secrets caquetages de deux femmes ne t'a pas révoltée. » J. J. « Y at-il de la politesse à étourdir tout le monde d'un vain coquet?» ID. Lorsque les perroquets soat rassasies, ils font un caquetage continuel et bruyant. BUFF. Linnæus compare le ramage du lagopède à un caquet babillard et à un rire moqueur. ID.

DÉBÂCLE, DÉBÂCLAGE. Ils donnent l'idée d'un embarras ôté, surtout en parlant d'un port qu'encombraient des bateaux.

Dans débâcle le fait est présenté en lui-même : la débâcle permet de se mouvoir librement; dans débâclage il est considéré par rapport à l'action : des règlements prescrivent le débâclage à certaines époques, et l'on donne tant aux ouvriers pour cette opération. Le débâclage a tellement pour caractère l'activité, qu'il est toujours le fait volontaire de l'homme; au lieu que la debacle est souvent involontaire, fatale, inattendue : telle est la débâcle d'une rivière couverte de glace. — La différence revient donc à celle de treille et de treillage.

LABOUR, LABOURAGE. Tous deux donnent l'idée du remuement de la terre fait pour la rendre fertile.

Mais le labour se considère absolument, en soi, par rapport à la terre seule et indépendamment de l'action effective de labourer. On donne à une terre un ou deux labours; un labour est léger, superficiel, profond. « La terre de Labrador est On appelle caquets, au pluriel, des discours ainsi nommée, parce que le labour y est ingrat.>> futiles, des propos malins sur le compte d'au-VOLT. « Souvent les grains de fer se montrent par trui: et, dans ce sens, caquetage est un nom le labour à quelques pouces de profondeur. collectif qui équivaut à caquets, toujours avec BUFF. « Est-il bien prouvé que vingt-cinq mille cette difference que les caquets se qualifient hommes vigoureux soient plus utiles avec deux en eux-mêmes ou par rapport à leur nature, et sceaux qu'ils ne le seraient au labour? » BEAUM. le caquetage par rapport au fait, au bruit, à la manifestation, à l'éclat.

BARAGOUIN, BARAGOUINAGE. Langage corrompu et inintelligible.

D

Labourage, au contraire, fait penser à l'action de labourer, à l'opération, à la peine, au salaire de l'ouvrier qui laboure, à la saison où on laboure; en un mot, à tout ce qui concerne l'art du labourage et sa pratique. L'art, le temps, les instru

Le baragouin est en quelque sorte une langue: on parle baragouin. Baragouinage en désigne l'ex-ments du labourage; s'occuper de labourage; surpression. Toute langue étrangère est un baragouin pour qui ne la connaît pas; notre propre langue peut devenir un baragouinage dans la bouche de celui qui, en parlant, confond ou embrouille les mots. Le baragouin, c'est le fond, c'est la chose; le baragouinage, c'est le fait de sa manifestation: on ne comprend rien au baragouin d'un homme dont on écoute le baragouinage, ou dont le baragournage étourdit, fatigue, impatiente.

PART, PARTAGE. Portion d'un tout qui échoit àquelqu'un.

Partage (partem agere) est le résultat de l'action de partager: il suppose une distribution: on a et on prend part, et non partage, à quelque chose; mais on a, on reçoit en partage, une chose tombe en pariage. La part se considère par rapport à la chose, et partage par rapport à l'évenement qui la fait échoir à tel ou tel.

veiller, payer le labourage de ses terres. « Le labourage mis en honneur a adouci les peuples farouches. FÉN. « La promenade se dirigea vers le coteau, d'où nous jouîmes du spectacle du labourage. MARM. « Dans un dialogue qui a pour titre Hiéron, Xénophon montre quel avantage ce serait pour un Etat si le prince était attentif à récompenser ceux qui excelleraient dans le labourage et dans la culture des terres. » ROLL.

[ocr errors]

COEUR, COURAGE. Disposition de l'âme opposée à la crainte.

Le premier de ces mots sert à caractériser un sujet en soi, intrinsèquement, et le second à le faire connaître extérieurement, comme ouvrier, par ses actions.

C'est ainsi que Girard les distingue: « Le cœur, dit-il, bannit la crainte et la surmonte; il ne permet pas de reculer et tient ferme dans l'occasion: En parlant d'un objet qui me revient, je dirai le courage est impatient d'attaquer; il ne s'emegalement voilà une belle part, et voilà un barrasse pas de la difficulté, et entreprend harbean partage; la première expression sera rela-diment. Le cœur soutient dans l'action; le coutive à l'objet, et la seconde au sort, à l'accident rage fait avancer. » qui me l'assigne exclusivement à tout autre. D'un tout on fait deux, trois, six parts, et chacune devient le partage de quelqu'un.

On a du cœur ou on en manque: on signale son courage, on combat avec courage. « Nos pères croyaient que celui qui ne se venge pas n'a point Part se rapporte davantage, non-seulement à de cœur; ils ne faisaient pas attention que c'était la chose, mais aussi au tout auquel tenait la faire un usage pernicieux du courage que de part, et partage se rapporte, non-seulement au l'employer à la destruction du genre humain. » fart. mais encore à la personne qui reçoit la part | VAUV. L'homme de cœur se conduit avec courage, distribuée : la témérité est le partage de la jeu-se distingue par des traits de courage. OEUVRE, OUVRAGE. Ce qui résulte d'un travail.

Desse.

françaises, et de là vient que les synonymes qu'elles servent à former expriment des actions communes, des opérations manuelles : ce sont des termes la plupart en usage dans les arts et métiers. Cependant ce dernier caractère convient plus particulièrement encore aux mots terminés en age, et c'est par là principalement qu'ils se distinguent de leurs synonymes.

OEuvre est abstrait et formel; ouvrage, con- | tat de cette action. L'une et l'autre sont toutes cret et matériel. OEuvre s'emploie surtout en morale, parce qu'on y considère le mérite intrinsèque des actes, eu égard à l'intention seulement et indépendamment des effets réels, des conséquences extérieures des actions. L'ouvrage est l'œuvre matérialisée ou la matière mise en œuvre; c'est quelque chose de réel, un produit, au lieu que l'œuvre est quelque chose d'idéal, une production. La création est l'œuvre de la Toute-Puissance; le monde sorti des mains du Créateur, dans six jours d'exécution, est son ouvrage. On donnera le nom d'œuvres de Dieu aux œuvres de la grâce, comme on dit, travailler à l'œuvre de son salut, faire de bonnes œuvres; les ouvrages de Dieu sont le monde et toutes les parties de la création. Voltaire dit, en parlant des miracles : « Les œuvres de Dieu ne doivent ressembler en rien aux œuvres des hommes.... Dieu, qui ne descend plus sur la terre, y descendait souvent, au temps des patriarches, pour voir lui-même ses ouvrages. » On se met à l'œuvre quand on se met à travailler; on se met à l'ouvrage quand on commence à donner, par son travail, des formes à la matière. Les sciences et la littérature sont les œuvres de l'es-exemple, des pièces de toiles qui sortent des prit, et on appellera ouvrages de l'esprit les traités de logique, de mathématiques, les poëmes, les discours, etc., ou bien les livres qui les contiennent.

En un mot, œuvre signifie absolument, en soi, ce qui est fait; ouvrage donne l'idée de telle matière ayant reçu d'un ouvrier, dans l'espace, ou, tout au moins, dans le temps, telle forme ou telle façon. On dit bien d'une manière entièrement générale à l'œuvre on connaît l'ouvrier; mais si on spécifie, si on descend aux réalités, si on se représente quelque chose comme sorti des mains d'un ouvrier, comme subsistant, il faudra se servir du mot ouvrage.

On dit bien aussi, en parlant des productions de l'esprit, mais au pluriel et d'une manière tout idéale, tout abstraite, œuvres mêlées, œuvres complètes, œuvres posthumes, œuvres morales; mais, dès qu'on spécifie, l'esprit se représente une chose comme un résultat, comme le produit de l'action d'ouvrer, et alors il faut préférer le mot ouvrage. Il y a dans les OEuvres de Boileau un petit ouvrage bien précieux.

[ocr errors]

Ainsi lavement et lavage signifient également l'action de laver; mais en ce sens lavement a plus de noblesse et ne s'emploie que dans des locutions qui appartiennent au langage de l'Église : le lavement des pieds, le lavement des autels. « Le lavement du baptême est la figure de la régénėration spirituelle. » P. R. - De même arrosement est plus noble qu'arrosage et se prend plus volontiers dans le sens figuré. « L'aridité dans les âmes regarde la privation de la grâce et de l'arrosement céleste, où l'âme tombe par son péché. » Boss. Blanchiment et blanchissage expriment tous deux l'action de blanchir et le résultat de cette action. Mais le premier se dit en parlant de choses moins communes et moins basses, et, par

mains du tisserand, de la monnaie d'argent et de
la cire: non pas que ces choses soient sales comme
celles qu'on met au blanchissage; c'est une pré-
paration qu'on leur fait subir pour qu'elles per-
dent une couleur qu'elles ne doivent point avoir.
- Rapatriage est encore plus commun, plus fa-
milier que rapatriment. Sosie dit à Cléanthis dans
l'Amphitryon de Molière :

Hé bien tu vois, Cléanthis, ce ménage.
Veux-tu qu'à leur exemple ici
Nous fassions entre nous un peu de paix aussi,
Quelque petit rapatriage? MOL.

De même babillement appartient au langage de la médecine, au lieu que babillage est un mot familier et de la conversation.

Ensuite, le substantif en ment exprime plutôt encore une action qu'un résultat; pour le substantif en age, c'est le contraire. Frottement et frottage rappellent l'idée exprimée par le verbe frotter. Mais, outre que frottage est seul un terme de métier et désigne seul ce que fait un frotteur, il exprime moins l'action elle-même que son résultat, c'est-à-dire, l'ouvrage du frotteur, ce Vous trouverez quantité de locutions et de pro- pour quoi on le paye. C'est, au contraire, l'action verbes où entre le mot œuvre et où celui d'ou-que désigne frottement: on électrise un corps par vrage ne conviendrait pas; c'est, encore une fois, le frottement. - Il en est de même des mots équarque le premier est absolu, idéal, général, ab- rissement et équarrissage, dont le premier apparstrait; tandis que le second, concret et particu-tient au langage commun et le second est un lier, ne se dit que d'un objet travaillé ou façonné, d'une certaine matière qui a reçu d'un ouvrier une certaine forme.

[blocks in formation]

terme technique de charpenterie; l'un signifie plutôt l'action, l'autre le résultat : une poutre qui a subi l'équarrissement a tant de pieds d'équarrissage.

Enfin, à la terminaison age s'attache toujours une idée d'ensemble, de totalité, d'action plus étendue. Ainsi l'arrosement se dit en parlant d'une seule plante ou d'une chambre; l'arrosage est l'arrosement en grand, ou l'action d'arroser des terres, des prairies entières au moyen d'eau qu'on fait venir d'une rivière ou d'un ruisseau. Une plante a besoin d'arrosement, et une prairie d'arrosage (ACAD.). On dit l'arrosement d'un oi

seau (BUFF.), des vaisseaux lymphatiques (VOLT.), | phore qui exprime la qualité du style boursouflé et l'arrosage des places publiques et des rues d'une manière détournée et affaiblie, au lieu (BEAUM.). Le dégraissement, le nettoiement, que boursouflage n'ayant que le sens figuré, est, le débâclement, à l'égard du dégraissage, du net- pour qualifier le même style, le mot propre, cetoyage et du débâclage, non-seulement se disent en lui qui le caractérise de la manière la plus nette parlant de choses plus nobles, et ont plus de rapport et la plus forte. à l'action qu'au résultat, mais encore expriment une action simple, un fait particulier, et non pas une opération étendue qui constitue une profession ou un métier. On dira donc plutôt, par exemple, le nettoiement d'un peigne ou d'une glace, et le nettoyage des rues.

[blocks in formation]

1

Aussi l'Académie définit parfaitement l'engrenure et l'engrenage, qui sont deux termes de mécanique : l'engrenure est la position respective de deux roues dont l'une engrène dans l'autre ; et l'engrenage est la disposition de plusieurs roues qui engrènent les unes dans les autres. » Boursouflage et boursouflure se disent tous deux de l'enflure du style. Mais le premier de ces mots semble signifier plus que le second. Boursouflure s'emploie au propre ainsi qu'au figuré, et au propre il exprime, comme enflure, comme brûlure, quelque chose de local et de restreint. Il doit en être de même au figuré; tandis que boursouflage est plus général, plus étendu. Un] style plein de boursouflure est boursouflé dans plusieurs endroits; un style plein de boursouflage lest partout. On ne dirait pas qu'un discours, dans lequel il y a de la boursouflure, n'est que boursouflure, pas plus qu'on ne dit qu'un corps brûlé n'est que brûlure; mais on dit bien qu'un discours n'est que boursouflage.

TERMINAISON TÉ (OSITÉ).

Sommet, sommité. Efficace, efficacité. (Cal, callosité).

La terminaison té, en latin tas, et en grec the (acidité, aciditas, atis, bútηs, ntos; légèreté, levitas, xovpótng), désigne les qualités abstraites et indépendantes de tout ce qui les accompagne dans les objets.

SOMMET, SOMMITÉ. Ces deux mots signifient le haut de certaines choses, telles que les montagnes, les rochers, les tours, les toits.

L'un est concret, l'autre abstrait; l'un exprime une partie de la chose, l'autre sa surface la plus élevée, et ce dernier n'emporte absolument d'autre idée que celle de hauteur. Un oiseau s'élève jusqu'à la sommité d'une tour, et s'abat sur son sommet. Quand on dit, l'armée ennemie occupa les sommités des montagnes, ou absolument les sommités, on n'a égard qu'à la position élevée ou supérieure occupée par les ennemis. Mais on dira bien que les ennemis ont dépouillé de leurs forêts les sommets des montagnes. « Une partie des Alpes est couverte d'énormes sommets de glaces qui s'accroissent incessamment. » J. J. « On voit palpiter, dans quelques enfants nouveau-nés, le sommet de la tête à l'endroit de la fontanelle.» BUFF. C'est parce que sommité est seul abstrait et dégagé de toute idée accessoire, qu'il peut seul s'employer au figuré, pour marquer en littérature ce qu'il y a dans les matières qu'on traite de plus superficiel. Cet auteur n'a traité que les sommités de son sujet.

EFFICACE, EFFICACITÉ. Force, vertu de quelque cause pour produire son effet. Ils correspondent aux mots latins, efficacia et efficacitas.

« Le premier, dit Condillac, a été plus usité, le second prévaut aujourd'hui. » De même Voltaire: « Efficace, pris comme substantif, n'est plus d'usage; on dit efficacité. » Ce changement, combattu d'abord par Bouhours, est fondé en raison, car la terminaison té est particulièrement destinée à marquer une propriété.

C'est ici le lieu de déterminer la valeur de la terminaison composée osité, qui contient la différence des deux mots synonymes cal et callo

Il semble aussi que dans le boursouflage il y ait. non-seulement une vaine pompe et une magnificence outrée, comme dans la boursouflure, mais encore de l'embarras, de l'obscurité résul-sité, en latin callus et callositas. Tous deux tant d'une certaine complication.

Enfin, boursouflure s'employant au propre ainsi qu'au figuré, n'est au figuré qu'une méta

4. An propre on dit aussi boursouftement. Mais le boursouflement est un fait, un phénomène, quelque chose qui arrive, qui passe; au lieu que la boursouflare est un effet, un état, quelque chose qui est, qui demeure. « Je ne sais si le grand boursouflement que Falun prend au feu ne doit être attribué qu'à la raréfaction de son eau de cristallisation. » BUFF. Avoir de la boursouflure dans le visage. (ACAD.)

signifient des durillons qu'on a aux pieds ou aux mains, et qui consistent dans une peau plus épaisse et plus forte que dans les autres parties. Le cal est un durillon unique, bien distinct; la callosité est proprement la qualité de ce qui est calleur, ou plein de cals, et par suite une partie des chairs calleuse ou remplie de cals; elle a donc plus d'étendue, sans former un cal aussi déterminé. Il vient des cals aux mains, à force de travailler, et aux pieds, à force de marcher. Buffon dit que le chameau naît avec des callo

sités sur la poitrine et sur les genoux. « Les ba- | une selle?» VOLT. « Dieu a ordonné, pour la conbouins et les guenons ont aussi des callosités au- | nexion de toutes les choses, que les plus grandes dessous de la région des fesses, et cette peau calleuse est même devenue inhérente aux os du derrière. BUFF.

[ocr errors]

Callosité n'exprime pas déterminément un cal, mais une chose de la nature du cal, comme sérosité une chose de la nature du sérum, carnosité une chose de nature charnue; et c'est pourquoi callosité se dit improprement des excroissances de chair solide et sèche qui s'engendrent sur les bords d'un ulcère et ressemblent à des cals.

TERMINAISONS TÉ ET ION.

Connexité, connexion. Variété, variation. Perversité, perversion. Autorité, autorisation. Maturité, maturation. Continuité, continuation. Perpétuité, perpétuation. Humilité, humiliation. Gravité, gravitation.

La désinence té désigne une propriété inhérente aux choses, et la désinence ion une action; l'une est qualificative et tient plus de l'adjectif, l'autre est active et tient plus du verbe. Quand elles terminent deux mots synonymes à radical commun, celui qui est en ion marque, ou bien la réalisation, la présence effective et actuelle de la qualité exprimée par l'autre, ou bien un acheminement, un progrès vers cette qualité, ou du moins, dans tous les cas, l'action d'un verbe correspondant.

CONNEXITÉ, CONNEXION. Ces mots expriment le rapport, la liaison, la dépendance, qui se

trouvent entre certaines choses.

fussent soutenues par les plus petites. » Boss. « Les Pères de l'Eglise avancent sur cette matière des propositions d'une connexion admirable entre elles. » BOURD.

VARIÉTÉ, VARIATION. Ces deux mots donnent l'idée d'une certaine diversité.

Mais la variété signifie la diversité inhérente aux choses variées; et la variation la diversité qui arrive aux choses qui varient. L'une est dans les êtres, suivant le langage de l'Encyclopédie, l'autre dans les actions. Et l'on peut ajouter, en empruntant les exemples de Girard: « Il n'y a point d'espèces dans la nature où l'on ne remarque beaucoup de variétés; et il n'y a point de gouvernement où il n'y ait eu des variations.» La variété des usages indique plusieurs et différents usages; la variation des usages indique plusieurs et différents états par lesquels passent les usages qui changent. L'un est relatif à l'être, l'autre au devenir ou au phénomène. Dans un livre plein de variété il n'y a pas d'uniformité; une mode sujette à variation change, est inconstante.

PERVERSITÉ, PERVERSION. Une idée de corruption est commune à ces deux mots.

Mais, a la perversion, dit Condillac, est le changement qui se fait dans les mœurs, lorsqu'elles se corrompent, et la perversité est l'état de corruption. » L'une est un acheminement, un progrés vers la qualité exprimée par l'autre; l'une indique ce qui se fait, un changement, l'autre ce qui est, une qualité ou un état. La soif des richesses cause la perversion des mœurs. Cet homme ne peut détruire la perversité de son naturel.

AUTORITÉ, AUTORISATION. Pouvoir d'agir. L'autorisation est une part d'autorité concédée, révocable, une simple permission. Au lieu que l'autorité a la permanence et la plénitude d'une qualité inhérente au sujet, l'autorisation n'est qu'accidentelle au sujet et survenue en lui en vertu d'une action, ne lui convient que par communication et en passant. Tant que les enfants, placés par la nature et par les lois sous l'autorité paternelle, ne sont point émancipés, ils ne sauraient faire d'actes authentiques sans

Roubaud les a parfaitement distingués. « La connexité, dit-il, ne dénote qu'un simple rapport qui est dans les choses, et dans la nature même des choses: la connexion énonce une liaison effective qui est établie entre les choses, et fondée sur ce rapport. Par la connexité, les choses sont faites pour être ensemble: par la connexion, elles le sont. La connexité est, pour ainsi dire, en puissance la connexion est de fait. Deux idées ont de la connexité; leur connexion forme un jugement. Par le raisonnement vous établissez la connexion entre des propositions qui n'avaient qu'une connexité. La connexité de l'astronomie avec la navigation est démontrée par la connexion | autorisation. établie, par exemple, entre la connaissance des satellites de Jupiter et la détermination des longitudes. Deux affaires qui ont de la connexité sont, par leur connexion, jointes, examinées, discutées, jugées ensemble. Malgré la connexité du savoir et de la capacité d'enseigner, leur connexion

est assez rare. »

La connexité est en soi, en idée, de droit, essentielle. « Il y a une grande connexité entre la morale et la jurisprudence. » ACAD. « Les péripatéticiens désavouent la connexité et couture indissoluble des vices entre eux. » MONTAIGN. « La force de la pensée enthymématique consiste dans la connexité de la sentence avec sa raison.» MARM. Mais la connexion est effective ou de fait; elle a

MATURITÉ, MATURATION. L'idée de fruits mûrs est commune à ces deux mots.

Mais ils diffèrent absolument de la même manière que les précédents. L'un se dit en parlant de fruits qui sont mûrs, et l'autre en parlant de fruits qui mûrissent. « La maturité, dit l'Académie, est l'état où sont les fruits quand ils sont mûrs, et la maturation est le progrès successif des fruits vers la maturité.»

CONTINUITÉ, CONTINUATION. Ils marquent également une absence d'interruption.

Mais la continuité a lieu entre les choses qui sont continues, et la continuation entre les choses qu'on continue. L'une, suivant l'observation de Girard et de Condillac, se dit des choses qui se été mise entre les choses. « Dis-moi quelle con- touchent et a plus de rapport à l'étendue, l'autre nexion secrète la nature a mise entre une idée et se dit des actions qu'on continue à faire et se

« PreviousContinue »