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sante prophètesse. » « La malplaisante Alecton. » | règle ou d'ordre. La piété mal réglée devient suEt en parlant de Caron :

Il ne fut jamais créature

De plus malplaisante structure.

Il (Polypheme) s'en venait vers le rivage,
Le très-malplaisant personnage,
Gros, mal bâti, sale, velu.

D'où l'Académie a-t-elle appris que malplaisant
se dit plus ordinairement des choses que des
personnes?

Ensuite, l'effet produit par les choses ou les personnes malplaisantes dépend surtout de leur forme, de la manière dont elles sont faites, si bien que ce mot serait déplacé au figuré et en parlant d'abstractions. Jean-Jacques a dit : « Nos sensations nous sont agréables ou déplaisantes. » Et : « Les occupations déplaisantes ont besoin de délassement. » L'Académie : « Il est déplaisant de toujours perdre au jeu. » Bourdaloue: « Cela me remplit d'idées tristes et déplaisantes. » SaintSimon « Des maximes très-déplaisantes à la France.» Dans ces phrases et autres semblables malplaisant ne conviendrait pas. Ce qui est déplaisant déplaît; ce mot ne se rapporte qu'au fait abstrait ce qui est malplaisant est mal bâti, mal conformé, ou se présente mal. Montaigne a parfaitement senti et rendu cette opposition dans le passage suivant. « C'est une déplaisante coutume, et injurieuse aux dames, d'avoir à prêter leurs lèvres à quiconque a trois valets à sa suite, pour malplaisant qu'il soit. »— ailleurs de la « tranquillité et sérénité de l'âme, Il parle déchargée de toute passion, pensée et occupation tendue ou déplaisante; » et dans un autre endroit il dit : « Si j'ai un cor qui me presse l'orteil, me voilà renfrogné, malplaisant et inaccessible. » MAL PLACE, DÉPLACÉ. Mis dans une place qui ne convient pas, hors de propos.

Mal placé exprime un défaut relatif, et déplacé un défaut absolu : ce qui est déplacé est tout à fait mal place.

Laharpe examinant la tragédie d'Alzire, critique ainsi ce vers :

Rends du monde aujourd'hui les bornes éclairées. « Les participes éclairé, connu, etc., sont mal placés avec le verbe rendre. » Et, à quelques lignes de là, ayant cité une tirade, il ajoute : << Cela est mauvais de tout point, en philosophie comme en poésie, et souverainement déplacé dans la situation d'Alzire. »

On voit aussi par ce double exemple que mal placé indique plutôt un défaut de forme, de taxe, grammatical, et déplacé un défaut essentiel, synqui a rapport aux idées ou au fond. « Tout au plus trouvera-t-on dans le discours de cet orateur quelque construction peu exacte, quelque chose d'irrégulier, de faible et mal place.» FÉN. Un discours dans lequel il y a quelque chose de déplacé pèche davantage et d'une autre manière, il est inconvenant.

On distinguerait de même mal réglé et déréglé, mal ordonné et désordonné. La chose mal réglée ou mal ordonnée laisse quelque chose à désirer dans la manière dont elle est réglée ou ordonnée : la chose déréglée ou désordonnée n'est point du tout réglée ou ordonnée, n'a point du tout de

perstition; et déréglée, fanatisme.

PREFIXES MAL ET DIS.

Malfame, diffamé. Halgracieux, disgracieux.
Malproportionné, disproportionné.

MALFAMÉ, DIFFAMÉ. Qui ne jouit pas d'une

bonne réputation.

tion; l'homme diffamé est perdu de réputation. L'homme malfame n'a pas une bonne réputaDiffamé est une qualification plus positive, plus directe, plus rigoureuse, plus décidée, plus tranchante; il y a comme une séparation nette entre la bonne réputation et l'homme diffamé. On évite la société ou l'alliance de l'homme malfamé; on rougirait d'avoir le moindre rapport avec l'homme diffamé.

verbe comme à diffamé, et c'est pourquoi celuiEnsuite, à malfamé ne correspond point un là n'implique point comme celui-ci un fait particulier qui a déshonoré, un éclat qui a perdu tout d'un coup dans l'esprit du public. Celui qui est malfamé est ainsi, a telle manière d'être: on en parle mal; c'est un effet qui a sa cause en lui, dans ses principes ou dans sa conduite. Celui qui est diffamé a été diffamé; son état résulte d'une diffamation juste ou non méritée.

famé. C'est qu'on peut être diffamé sans cesser Et de là le troisième caractère de l'adjectif difqui arrive quand on a été la victime d'une diffad'avoir droit et part à l'estime des hommes; ce mation injuste et calomnieuse. Mais malfamé, quoique plus faible et plus vague, annonce toujours une réputation effectivement mauvaise.

MALGRACIEUX, DISGRACIEUX. Qui n'est pas

gracieux.

laisse beaucoup à désirer, et le disgracieux n'est
En fait de grâces, le malgracieux est mal,
rien. Celui-ci dit donc plus que celui-là: il énonce
fait entendre que par un détour, et en atténuant.
directement et positivement ce que le premier ne

gracieux, c'est la manière dont il est, sa forme,
De plus, ce qu'on considère dans l'objet mal-
son air, et l'adjectif ne convient que par rapport
aux objets envisagés sous ce point de vue. La qua-
lité qui fait traiter de disgracieux peut être in-
trinsèque et abstraite. « Aventure disgracieuse.
Cela est bien disgracieux. » ACAD. « Douleur et
qui fait souffrir. » GIR.
mal marquent une sorte de sensation disgracieuse

Elle avait pris en cet homme un époux
«Votre père, le plus malgracieux des hommes, m'a
Malgracieux, incommode et jaloux. LAF.
chassé dehors malgré moi, et j'ai couru risque
d'être battu.» MOL. (L'Avare, Laflèche à Cléante).
pèche par défaut de proportion.
MALPROPORTIONNÉ, DISPROPORTIONNÉ. Qui

Le premier se dit d'un seul objet dans lequel arrangées, et l'autre en suppose au moins deux on considère la manière dont ses parties sont (is, deux fois, de dúo, deux) qu'on compare l'un à l'autre et qu'on trouve séparés par de grandes inégalités.

qu'on considère en soi et dans sa totalité. « Un Malproportionné s'applique à une seule chose

corps, un homme malproportionné. » ACAD. « Si | cessoire que le sujet est plus profondément affecté l'homme était un quadrupède, toutes ses parties et qu'il éprouve du dépit on du ressentiment. réunies eussent fait un animal malproportionné et En second lieu, et conformément à la première marchant peu commodėment. »J.J.-Dispropor- distinction, mécontent suppose de la part du sujet tionné s'emploie en parlant de plusieurs choses, ou chagrin prononcé et disposition active à réclamer d'une seule relativement à une autre ou à d'au- la réparation d'un tort réel ou prétendu, et de la tres; ce qui fait qu'on dit bien disproportionné à, et part de la personne qui excite ce sentiment, refus non malproportionné à. Morale disproportionnée ou violation de ce qui est juste, ou de ce qu'on à l'âge des enfants (J. J.); exemple dispropor- croit juste; au lieu que malcontent n'emporte que tionné à notre état (PASc.); pratique dispropor- la privation de ce qu'on espérait. « L'ambassadeur, tionnée à nos mœurs (Boss.); comparaisons dis- M. de Laverdin, rendit tous ces gens-là malconproportionnées à la nature divine (ID.). Conditions tents de ses manières, de sa mauvaise chère, de disproportionnées (COND.), c'est-à-dire l'une à son peu d'apparat. » DELAF. -Je suis mécontent l'autre ou les unes aux autres; un oiseau porte d'un domestique qui ne fait pas ce qu'il doit, un bec disproportionné (BUFF.), c'est-à-dire au et malcontent de celui qui ne fait pas ce qu'il reste du corps. doit comme je le voudrais il y a de la part du premier mauvaise volonté, négligence ou paresse, et de celle du second simplement inexpéMal-rience ou incapacité. On a droit d'être mécontent; on a quelque sujet d'être malcontent, ou bien même on l'est sans trop savoir pourquoi. « Mademoiselle n'allait point à la cour, parce qu'elle était fort mécontente du roi sur le sujet de M. de Lauzun.» DELAF. « Le prince de Montpensier était malcontent de tout ce qui était arrivé, sans qu'il en pût dire le sujet. » ID.-Ou encore, on est mécontent pour un motif très-grave, parce qu'on a reçu une injure; et malcontent pour une raison légère, pour un manque de complaisance, par exemple. « On exhorta en vain Louis XII à punir quelqu'un dont il avait été mécontent avant que de monter sur le trône.» ROLL. « Bayard, voyant que son refus affligeait son hôtesse, et ne voulant pas la laisser malcontente de lui, consentit à recevoir son présent. » ID.

PREFIXES MAL ET MÉ. Malcontent, mécontent. Malaise, mésaise. séant, messéant. Malvendu, mévendu. Mal interpréter, mésinterpréter.

Ces deux particules changent en mauvaise part le sens des mots devant lesquels elles se mettent, et leur font exprimer quelque chose de fâcheux. Mais la modification apportée par mal semble moins essentielle, moins intime, moins décidément mauvaise; elle s'arrête, pour ainsi dire, à la forme, à la superficie.

MALCONTENT, MÉCONTENT. Qui n'est pas satisfait, pour qui ce qui est ne convient pas ou ne se passe pas comme il le voudrait.

Mécontent dit quelque chose de plus. « On est malcontent, dit Roubaud, quand on ne l'est guère, ou qu'on n'est nullement satisfait; et mécontent, quand, loin d'être satisfait, on est fâché et très-fâché. » Suivant Condillac, on est mécontent quand on est malcontent au point de se soulever: les mécontents ont pris les armes. Une preuve de la supériorité de force du sentiment pénible signifié par mécontent, c'est qu'on fait de ce mot, comme en général de tous ceux qui se distinguent par leur énergie, un usage bien plus fréquent que de son synonyme. D'ailleurs, il s'emploie seul d'une manière absolue et sans complément, seul il a un substantif correspondant pour désigner d'une manière nette et positive le sentiment dont il s'agit. Le malcontent éprouve un sentiment d'humeur dont son âme est à peine effleurée.

Thérèse est malcontente, et gronde.

LAF.

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α

Toutes les fois qu'il y a une injustice de commise, passe-droit, inexécution volontaire d'une obligation, on ne peut être que mécontent. On est malcontent de son état, de sa fortune, du tour que prennent les affaires, quand ils ne sont pas comme on désirerait qu'ils fussent. « Les gens du monde, avec tous leurs biens, tous leurs plaisirs, sont presque toujours malcontents et se plaignent de leur sort. » BOURD.

MALAISE, MÉSAISE. Ils désignent un état ou une situation légèrement pénible.

Malaise exprime plutôt l'état où l'on se trouve, et mésaise le sentiment qu'on éprouve. Dans le malaise on n'est pas commodément; l'âme est désagréablement affectée dans le mésaise.

Ce que malaise exprime de fâcheux se rapporte A la rigueur même, malcontent n'exclut pas à l'extérieur, à la position, ou aux entours : le tout à fait le contentement, mais il ne fait que le malaise se fait sentir à une personne qui est mal à représenter comme incomplet, comme n'étant l'aise, mal assise, mal couchée, ou gênée dans ses pas sans trouble, sans inquiétude, sans mélange. rapports avec les autres. « Les premiers mobiles du C'est ce que Pascal exprime très-bien dans le pas- monde furent le besoin, l'inquiétude du malaise, sage suivant: « La propre volonté ne se satisfe- et l'espérance d'un meilleur sort. » MARM. « On rait jamais, quand elle aurait tout ce qu'elle sou- sentait la contrainte du duc de Bourgogne avec haite; mais on est satisfait dès l'instant qu'on y Monseigneur, encore plus avec Mlle Choin, et le renonce. Avec elle on ne peut être que malcon- malaise avec tout cet intérieur de Meudon. » S. S. tent; sans elle on ne peut être que content. » Il en Le mot mésaise, plus particulièrement subest du mécontentement comme du mépris et de la jectif, indique un état général de déplaisir mefiance; c'est moins une négation, une restric-dans lequel on désire vaguement d'être mieux. tion qu'un sentiment positif dont l'âme est comme « Le plaisir est notre but; car qui écouterait pénétrée. Un esprit chagrin et mécontent. » celui qui, pour sa fin, établirait notre peine et BOURD. Hécontent ajoute à malcontent l'idée ac-mésaise ?» MONTAIGN. «Le désir est une espèce de

mésaise que le goût du bien met en nous. » VAUV. | vaise action considérée intrinsèquement comme violant une loi, et en elle-même digne de punition. D'ailleurs, ou plutôt en conséquence, le malfait est un simple délit, et le méfait un crime.

« Notre mal est la vaine curiosité de notre esprit qui ne peut ni sortir de son ignorance ni la supporter; c'est ce mésaise et cette rêverie de malade que nous appelons une noble recherche de la vérité. » FÉN.

MALSÉANT, MESSÉANT. Contraire à la bienséance.

Mais l'un signifie une inconvenance de forme, l'autre une inconvenance intrinsèque, essentielle. C'est apparemment à quoi se réduit la distinction suivante de Condillac. « Il me semble que le premier se dit des choses qui ne conviennent pas à l'état, à l'âge ou à la profession d'une personne, et que le second se dit de tout ce qui ne sied pas. » Une barbe d'artiste terminant la figure d'un prêtre ou d'un magistrat serait malséante; il est messéant que la femme commande au mari et que le valet en remontre à son maître. L'air dissipé est malséant, et l'inattention est messéante pour un magistrat. Une posture malséante ne messied qu'eu égard aux usages tout extérieurs et formels de la civilité; une posture messéante messied réellement, blesse l'honnêteté, va jusqu'à l'indé

cence.

Jean-Jacques écrit à Diderot : « Vous avez un malheureux penchant à mésinterpréter les discours et les actions de vos amis. » Voilà un mot excellent, qui n'est pas usité, au moins à en croire l'Académie, et qui mériterait de l'être, concurremment avec mal interpréter; car ces deux verbes ne signifient pas tout à fait la même chose. Mal interpréter, c'est seulement supposer un sens qui n'est pas le véritable, attribuer une intention qu'on n'a pas eue, une intention mauvaise, mais rien de plus. Mésinterpréter, c'est imputer une intention criminelle, des desseins noirs et funestes, partant d'un fonds de méchanceté, et, comme le dit Jean-Jacques lui-même dans l'endroit cité, des horreurs.

PRÉFIXE IN.

Cette particule est primitivement une préposition latine, traduite en français par en, et qui a deux significations différentes. Elle marque le plus souvent un rapport de contenance, elle exprime qu'une chose est ou va dans une autre; alors elle répond au grec év, siç; d'autres fois elle peut se rendre par à, vers, sur, contre, et rappelle le grec avà. Mais dans les mots composés dont elle forme la syllabe initiale, outre ces deux idées, elle en désigne fréquemment une troisième,

« On doit donner largement aux femmes de quoi maintenir leur état, d'autant que l'indigence est beaucoup plus malséante et malaisée à supporter à elles qu'aux mâles. » MONTAIGN. « Les petits verres sont les miens favoris, et me plaît de les vider, ce que d'autres évitent comme chose malséante.» ID.- Aux canonnades, il est messéant de s'ébranler pour la menace du coup. » ID. « Le vice de mentir apparaît toujours très-celle de négation ou d'absence, auquel cas elle messéant à un homme bien né, quelque visage qu'on lui donne. » ID. MALVENDU, MÉVENDU. Qui n'a pas été bien vendu.

Le premier de ces mots implique un blâme relativement à la manière dont la vente s'est faite. Quand on a vendu par petites portions, au lieu de vendre par parties considérables, à crédit et non comptant, ou bien à des débiteurs peu solides, dans ces différents cas on a mal vendu, ou la marchandise a été mal vendue. Mais à mévendu s'attache l'idée d'une faute moins relative à la forme qu'au fond, au mode de la vente qu'au dommage éprouvé en conséquence d'une vente désavantageuse: on mévend ce qu'on vend audessous de son prix réel. On emploie bien aussi mal vendre ou vendre mal dans ce sens; mais alors on parle avec moins de précision, et on a tort de ne pas préférer une expression qui dit la même chose d'une manière toute spéciale et exclusive.

Une observation bien simple sert à prouver que mé l'emporte sur mal, dans le sens défavorable où ils se prennent l'un et l'autre. C'est que mal vendre ou vendre mal signifie quelquefois vendre peu: cette marchandise s'est mal vendue sur tel marché, se vend mal dans telle saison. Au lieu que le substantif mévente signifie non-vente, cessation de vente. En allemand, Uebelthat, mot à mot, un malfait, désigne une mauvaise action sous le rapport tout extérieur du mal qu'elle cause à autrui, et Missethat, méfait, une mau

reproduit tout à fait l'& privatif des Grecs. Les autres particules de, dis, mal, employées quelquefois dans le sens négatif, ne sont pas aussi spécialement destinées à nier, ne nient pas d'une manière aussi complète et absolue, ou elles ajoutent chacune à cette idée un accessoire particulier.

PRÉFIXES IN ET RE.

Improuver, réprouver. IMPROUVER, RÉPROUVER. Faire le contraire d'approuver: trouver mauvais et le dire. Dans le premier de ces mots in est agressif, il signifie contre, il marque opposition: improuver, c'est être contre, blâmer. Dans le second ré est adversatif et répulsif; il marque une opposition violente, par laquelle on rejette, on fait reculer loin de soi, sans pitié, ni rémission: réprouver, c'est s'élever contre, proscrire avec hostilité et mépris.

« On improuve ce qu'on trouve mauvais, repréhensible, vicieux; on réprouve ce qu'on juge odieux, détestable, intolérable. On improuve une opinion dangereuse, une action blåmable; Dieu réprouve les méchants; les infidèles. On improure par des discours, des raisonnements, des impugnations, des attaques; on réprouve par le décri, les condamnations, la proscription. La raison improuve, elle a droit d'éclairer; l'autorité réprouve, elle a droit de proscrire. » ROUB.

« Il y a déjà longtemps, dit Labruyère, que

l'on improure les médecins et que l'on s'en sert. » On se garderait de les employer, si on les réproutait. « La religion des Juifs consistait seulement en l'amour de Dieu, et Dieu réprouvait toutes les autres choses. » PASC. « Il est prédit que les Juifs réprouveraient Jésus-Christ et qu'ils seraient réprouvés de Dieu.» ID. « On est sûr de plaire au peuple par des sentiments que la morale avoue; on est sûr de le choquer par ceux qu'elle réprouve. MONTESQ. « Les armées ne regardèrent ces députés du sénat envoyés par Tibère que comme les plus lâches esclaves d'un maître qu'elles avaient déjà réprouvé. » ID.

PREFIXES IN et CON. ·

Impliqué, compliqué.

IMPLIQUÉ, COMPLIQUÉ. Mêlé.

unies l'une avec l'autre; les choses ou les parties entre lesquelles il y a adhérence, sont simplement jointes ou unies l'une à l'autre. C'est-à-dire qu'il y a connexion entre les premières, elles forment un tout; et liaison seulement, jonction entre les dernières, elles ne sont qu'attachées l'une à l'autre, elles ne se touchent pas par tous les points, mais par un seul, C'est pourquoi toutes choses égales d'ailleurs, l'union étant réciproque, complète, ayant lieu sous tous les rapports, là où il y a cohérence, elle est plus forte que là où il y a simple adhérence. « La ferme cohérence des pierres.» BUFF. « La faible adhérence des parties intégrantes de l'eau. » ID.

PREFIXES IN ET DE.

Irraisonnable, déraisonnable. Improuver, désapprouver.

IRRAISONNABLE, DÉRAISONNABLE. Sans rai

son.

Impliqué, mêlé dans; compliqué, mêlé avec. Implique ne se dit que des personnes qui se trouvent mêlées dans des affaires criminelles ou fâcheuses; compliqué ne se dit que des choses In nie la raison d'une manière complète, absomêlées les unes avec les autres, mélangées, en-lue; il marque absence de raison, à la rigueur, trelacées, confondues. La personne impliquée dans une affaire n'y est pas étrangère, elle y trempe: la chose compliquée n'est pas simple, mais mixte, multiple ou embarrassée. On implique quelqu'un dans une conspiration, en l'y enveloppant, en lui en attribuant une part; on complique une affaire en l'entremêlant d'une foule de circonstances vagues ou inutiles qui l'embrouil

lent.

Impliqué est relatif et veut toujours qu'on indique expressément la personne impliquée et ce dans quoi elle est impliquée impliqué dans. Compliqué est absolu et se dit bien seul : une question compliquée. Pascal a commis une faute contre la justesse du langage, en disant : « Les preuves de Dieu métaphysiques sont si éloignées du raisonnement des hommes et si impliquées qu'elles frappent peu. »

PREFIXES IN, CON et AD.

Inhérence, cohérence, adhérence. INHÉRENCE, COHÉRENCE, ADHÉRENCE. État de choses qui se tiennent et ne peuvent qu'avec peine être séparées.

Inhérence exprime quelque chose d'abstrait, le rapport ou l'union d'une qualité à une substance, et non, comme ses synonymes, le rapport ou l'union de plusieurs substances ou des parties d'une substance entre elles. D'ailleurs, à la différence encore des deux autres mots, celui-ci est beaucoup moins usité que l'adjectif correspondant: la pesanteur est inhérente à la matière, la faiblesse à notre nature.

D'autre part, la cohérence exprime d'abord une adhérence entre les parties d'un même tout; et l'adhérence, la jonction d'une chose à une autre. Mais ensuite, les deux mots se disent également, en parlant de choses différentes ou des parties d'une même chose. Ils diffèrent alors comme avec et à en vertu du sens de leurs préfies, cum et ad. Les choses ou les parties, entre lesquelles il y a cohérence, sont jointes ou

SYN. FRANG.

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si bien que l'être irraisonnable en est totalement dépourvu. « Tous les philosophes ont distingué en l'homme deux parties, l'une raisonnable qu'ils appellent vous, mens; l'autre qu'ils appellent sensitive et irraisonnable. » Boss. « J. C. naît dans une crèche, pour se montrer la pâture même des animaux irraisonnables. » ID. Lafontaine, parlant de notre ressemblance aux bêtes, dit : « Nous sommes l'abrégé de ce qu'il y a de bon et de mauvais dans les créatures irraisonnables. »

Dé exprime déchet, perte partielle, suspension momentanée de raison par suite d'un écart, d'un déréglement de celui qui en est doué et qui en mésuse. « Un homme ne serait pas moins déraisonnable, s'il me voulait obliger de croire quelque événement, par cette seule raison que cela n'est pas impossible. » P. R. « Le pasteur est pour son troupeau; et il n'est personne d'assez déraisonnable pour prétendre que le troupeau soit pour le pasteur. » ROLL. « Rien n'est plus déraisonnable que de vouloir que tous les sentiments aient une expression également marquée. » LAH. Déraison ne signifie pas, à la lettre, manque de raison, mais extravagance, faute contre la raison.

Les animaux toute leur vie, les enfants avant un certain âge, tous les hommes pendant le sommeil, et les imbéciles tout le temps de leur maladie, sont irraisonnables; l'homme est déraisonnable toutes les fois que, dans sa conduite, il agit contrairement à la raison, il use mal de sa raison.

IMPROUVER, DÉSAPPROUVER. Ne pas approuver, trouver mauvais, sans pourtant aller jusqu'à réprouver, c'est-à-dire jusqu'à rejeter avec aversion et à proscrire comme détestable.

Improuver est plus près de réprouver. On improuve une mauvaise action; on désapprouve quelque chose de peu sensé. Improuver est agressif, c'est être contre, blâmer; désapprouver n'est que restrictif, c'est retrancher de l'approbation, lui faire perdre quelque chose on désapprouve en jugeant qu'une chose n'est pas bonne, convenable.

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Mais une autre différence consiste en ce que désapprouver est décisif, ouvert, explicite, a un air de sentence qui manque à improuver. Celui qui désapprouve, juge, prononce, déclare hautement, solennellement qu'une chose n'est pas bonne. Improuver, c'est trouver à redire, mais plutôt intérieurement, indirectement. Celui qui improuve condamne dans son cœur.

<< Cliton est l'arbitre des bons morceaux, et il n'est guère permis d'avoir du goût pour ce qu'il désapprouve. LABR. « Quand je désapprouve l'usage du vin, je ne condamne pas de même ces boissons qui égayent la raison. » MONTESQ. « La majeure et plus saine partie du gouvernement a désapprouvé assez hautement ce coup fourré. » J. J. - « Des représentations de quelques membres de la bourgeoisie suffisaient pour marquer qu'elle improuvait la procédure. » ID. « La bourgeoisie a le droit de faire des représentations dans toutes les occasions où elle improuve la conduite des magistrats. » ID. « Le libertinage n'est plus un bon air dès que votre conduite l'improuve. » MASS. (Sur les vertus des grands).

Ce caractère de désapprouver lui vient, ou de ce que de est la particule déterminative par excellence, ou de ce que le verbe composé latin approbare, en cela différent du simple probare, signifie non seulement approuver, mais aussi témoigner son assentiment par des démonstrations.

PREFIXES IN ET EX.

Inciter, exciter. Incursion, excursion. INCITER, EXCITER. Disposer quelqu'un à faire quelque chose en le stimulant, en l'échauffant. Inciter, incitare, citare, ciere in, mouvoir vers. Exciter, excitare, citare, ciere ex, faire sortir de son état, émouvoir, remuer. Inciter a essentiellement rapport au but; aussi dit-on toujours inciter à, et jamais, d'une manière absolue, inciter simplement, comme on dit exciter: il n'a pas besoin qu'on l'excite. De son côté, exciter a essentiellement rapport à la force on à l'énergie provocante et provoquée; on dit exciter l'ardeur (Boss.), le zèle (ACAD.).

Inciter, c'est donc donner l'idée d'un but et y pousser doucement, en dedans, en secret, faire qu'on y incline; exciter, c'est réveiller, pousser

fortement et avec vivacité.

Inciter marque bien aussi l'impulsion, mais faiblement; son idée propre est l'indication du but. « C'est par le plaisir et la douleur que Dieu pousse et incite les animaux aux fins qu'il s'est proposées. » Boss. « La solennité de cette église, et je ne sais quel mouvement de mon cœur m'incite à parler du nom de Jésus. » ID. « Incité par le plaisir que j'avais senti, je cueillis un second et un troisième fruit. » BUFF.

Exciter peut bien aussi marquer le but, mais ce n'est pas toujours ni aussi expressément; son idée propre est la force de la stimulation. « Les sens excitent l'âme, ils la réveillent, ils l'avertissent de certains effets. » Boss. « Ce sera un motif pressant qui me réveillera, qui m'excitera, qui m'encouragera à tout entreprendre. » BOURD.

On a besoin d'incitation pour s'aviser de faire, et d'excitation pour avoir la force de faire. INCURSION, EXCURSION. Course d'hommes ou d'animaux de leur pays en un autre.

L'un vient de in currere, courir dans, sur ou vers; l'autre de ex currere, courir hors de. On dit faire une incursion dans le Péloponnèse (COND.), en Sicile (VOLT.), sur Bénévent (COND.), et faire une excursion hors de son pays : « Mes travaux me permettront cette excursion hors de ma douce retraite. » VOLT.

Pour incursion l'idée caractéristique est celle du but, du lieu où l'on se porte; pour excursion c'est celle du point de départ, du lieu que l'on quitte. Un pays est exposé aux incursions ou à l'abri des incursions. La garnison d'une ville doit faire de rares et de courtes excursions, de peur de surprise. Des peuples nomades qui n'ont pas de séjour fixe ne peuvent faire que des incursions.

Toutes les fois qu'on a présent à l'esprit le lieu d'où le mouvement part, on doit se servir du mot excursion. Des peuples, des hommes, des oiseaux (BUFF.) sédentaires, ou qui trouvent chez eux tout ce qui est nécessaire à leurs besoins, ne font pas d'excursions. Au contraire, incursion sera le mot propre, si l'attention se porte nécessairement sur le lieu où le mouvement aboutit. Dans l'antiquité, les peuples barbares, attirés en certains pays par l'appât du butin, y faisaient des incur

sions.

Excursion est le seul de ces deux mots qui se prenne dans le sens de digression, parce qu'il est le seul qui marque un rapport au lieu d'où on s'éloigne.

On dira dans un sens analogue, la connaissance incursions des savants dans tels pays; et, ce bode tels monuments, de telles plantes est due aux taniste ne se borne pas à étudier les fleurs du lieu qu'il habite, il fait de fréquentes excursions. précipiter dans ou sur; et éruption, celle de sortir C'est ainsi que irruption signifie l'action de se de, de s'élancer hors de.

PREFIXES IN ET DIS.

Infamant, diffamant. Informe, difforme. Inconvenance, disconvenance. ou ternit la réputation. INFAMANT, DIFFAMANT. Qui produit l'infamie

Le premier a une plénitude de sens qui manque au second. In nie la réputation, la bonne renommée d'une manière absolue et positive. Dis marque une séparation inachevée, en train de se faire, et peint l'effort avec lequel on l'opère: il n'est pas plus négatif et rigoureux que de dans déraisonnable. Ce qui est infamant porte infamie, rend infâme, et c'est parce que ce mot marque un effet plus complet qu'il se dit des actes de justice peine (LABR., ROLL., COND., MARM.), amende (VOLT.), note (Boss.) infamante; supplice (VOLT-), arrêt (LAH.) infamant. Ce qui est diffamant expose à perdre ou fait perdre peu à peu la réputation fait descendre, ou plutôt tend, cherche à faire descendre du rang qu'on occupe dans l'opinion publique. Il faut distinguer la satire personnelle et diffamante de la satire générale (MARM.).

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