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fils d'Agamemnon, & monta fans difficulté fur le thrône de Mycènes.

dit

Mais les Furies vengereffes, c'eftà-dire les remords qui tourmentent les coupables par de noirs accès de mélancolie, commencerent à le perfécuter fi cruellement, qu'elles ne lui laifferent, ni le jour, ni la nuit, âucun moment de relâche. Il chercha envain à s'en délivrer par des facrifices expiatoires, & fe rendit enfuite à Athènes, pour y être jugé par le févère Tribunal de l'Aréopage. Sa caufe y fut long-tems difcutée ; & les voix s'étant trouvées égales, on que Minerve, pour départager les juges, donna fon fuffrage en faveur d'Orefte en conféquence il fut renvoyé abfous; mais il ne retrouva pas le calme qu'il cherchoit ; & pour derniére reffource, ikconfulta l'Oracle de Delphes, dont la réponse fut qu'il falloit qu'il allât dans la Cherfonnèse Taurique enlever la statue de Diane, du temple qu'elle avoit à Taures capitale de ce Royaume.Pylade qui ne l'avoit point quitté depuis qu'il avoit eu fes premiers accès de fureur & de mélancolie, vou

lut l'accompagner dans ce dangereux voyage, au rifque de périr pour lui, ou avec lui.

A leur débarquement ils furent arrêtés & menés à Thoas, Roi du pays. Il étoit ordonné par une loi expreffe & irrévocable, de facrifier à Diane tous les étrangers qui aborderoient dans la Taurique, & cette fonction regardoit Iphigénie, fille d'Agamemnon, que Diane avoit enlevée, comme on l'a vû, dans le moment qu'on l'immoloit, en lui fubftituant une biche, & en la dérobant aux regards de fon pere & de tous les affiftans,

Thoas lui fit remettre fur le champ les deux étrangers; & quelque haine qu'elle eût conçue contre les Grecs, elle ne put s'empêcher, en voyant les deux captifs, d'être touchée de quelques fentimens de pitié. Depuis qu'elle avoit été préposée à ces barbares facrifices, on ne lui avoit point encore amené de Grecs; elle réfolut de fauver l'un des deux, pour le charger d'inftruire fa famille de fon fort; & foit hafard, foit mouyement de la nature, Orefte fut ce

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lui à qui elle offrit la vie, à condition qu'il s'engageroit par ferment à porter une lettre aux parens qu'elle avoit à Mycènes. Orefte lui repréfente que cette faveur ne peut le regarder, qu'il eft la victime que demandent les Dieux depuis longtems irrités contre lui; mais que fon ami qui n'a rien fait pour encourir leur haine, fe chargera de la commiffion, & l'exécutera fidélement. Iphigénie ne peut refuser fon admiration à un fentiment fi généreux : elle va chercher la lettre, & ordonne les apprêts du facrifice.

Cependant Pylade fait à Orefte les plus tendres reproches fur la préférence qu'il a demandée pour être facrifié ; il lui déclare que s'étant attaché inféparablement à fa fortune il ne peut fe réfoudre à s'en retourner feul, & que s'il n'eft plus poffible de lui conferver la vie, il veut au moins être immolé avec lui. Orefte emploie les plus fortes raisons pour le diffuader, & perfifte dans la réfolution de mourir.

Pendant ce mémorable combat, Iphigénie arrive avec une lettre à la

main; elle veut la remettre à Pylade; mais comme elle craint qu'elle ne fe perde par quelque accident, elle croit devoir l'inftruire de ce qu'elle contient. Cette explication améne la reconnoiffance d'Oreste & de fa foeur. On conçoit aifément quelle fut leur furprise & leur joie ; mais après les premiers embraffemens, ils fentirent que les momens étoient précieux, & s'occuperent, fans tarder, des moyens de fe fauver tous, & d'enlever la ftatue de Diane.

Iphigénie feignit que les deux étrangers chargés de crimes, avoient fouillé, par leur préfence, le temple & la ftatue de la Déeffe; qu'avant que de les immoler, il falloit les purifier dans la mer, & que la ftatue avoit le même befoin d'être purifiée. Qu'au furplus, il ne devoit y avoir à cette cérémonie qu'un petit nombre de témoins, & qu'elle fe contenteroit de quelques gardes, pour veiller fur les deux étrangers. Elle s'avança vers le côté du rivage où étoit le vaiffeau qui avoit amené Orefte & Pylade. L'équipa

ge qui en étoit nombreux, eut bientôt écarté les gardes. Orefte & Pylade embarquent Iphigénie & la ftatue; ils montent enfuite fur le vaiffeau, coupent les cables & gagnent la haute mer.

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Thoas informé de leur évafion, veut faire courir après eux; mais Minerve l'arrête, & lui défend de les pourfuivre. Orefte eft venu à Taures, lui dit-elle, par ordre d'Apollon, pour fe délivrer des Furies qui le tourmentoient, & » pour enlever fa foeur & la ftatue de » Diane; Neptune qui le protége s'eft chargé de le reconduire dans fa patrie, & l'on feroit pour l'atteindre, d'inutiles efforts. »

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Oreste arrive à Mycènes, & fon premier foin fut de reconnoître les bienfaits d'Electre fa foeur, en lui faifant épouser Pylade; mais il apprend qu'Hermione, fille de Ménélas & d'Héléne, qui lui avoit été folemnellement promife, avoit été donnée à Pyrrhus. Il forme fur le champ le deffein de l'enlever à fon rival; & fur l'avis qu'on lui donnę que Pyrrhus eft allé à Delphes, pour fléchir

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