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toit aucune foi à fes prédictions; & ce fut, dit-on, une punition d'A pollon lui-même, qu'elle avoit trom, pé par de fauffes promeffes,

Hector le plus vaillant des Troyens, mais auffi fage que vaillant, fut, tant qu'il vécut, le plus ferme appui du thrône de fon pere. Il avoit épousé Andromaque, dont les Poëtes ont célébré à l'envi le courage, la fageffe, & le tendre attachement qu'elle eut toujours pour fon mari. Elle étoit fille d'Eëtion, Roi de Thébes dans la Cilicie,

Déiphobe étoit après Hector, le plus brave des enfans de Priam. Hélénus fe rendit célébre par la fcience de la divination; mais Paris fut le fléau de fa famille & de fa patrie. Hécube étant groffe de lui, fongea qu'elle mettoit au monde un flambeau ardent. Les interprétes des fonges furent confultés, & dirent que l'enfant qui naîtroit,causeroit un jour la ruine de Troye & de l'empire de Priam. Le pere épouvanté de ce funefte préfage, remit l'enfant, dès qu'il fut né, entre les mains d'un efclave pour être expofé; mais

Hécube, cédant à la tendreffe maternelle, & touchée d'ailleurs de la beauté de l'enfant, gagna l'efclave, & obtint qu'il le porteroit fur le mont Ida, pour y être nourri fecrettement par des bergers. Sa beauté, fa bonne mine, & fon adresse dans les combats que fe livroient les bergers, dans les joursdeftinés aux réjouiffances, lui acquirent parmi eux une grande confidération, & fa condition de berger n'avoit point étouffé en lui les fentimens qu'infpire une haute naissance. Il fe diftingua furtout par un efprit de justice, dans les différends qui furvenoient entre les bergers, & dont on lui remettoit ordinairement la décifion. Ce fut cette réputation de juftice & d'intégrité qui détermina Jupiter à l'établir juge des trois Déeffes, Junon, Minerve & Vénus, qui fe difputoient le prix de la beauté. Mercure fut chargé de les conduire fur le mont Ida, & lorfqu'elles furent devant leur juge, elles employerent, pour le gagner, tous les artifices qu'elles purent imaginer. Junon qui difpofoit des empires & des richefles, fit briller

à

à fes yeux les couronnes & d'immenfes tréfors; Minerve lui promit la fageffe & la vertu, dont la poffeffion eft préférable aux tréfors & aux couronnes; mais il fut ébloui par l'offre que lui fit Vénus, de le rendre poffeffeur de la plus belle femme qui fût fur la terre, & il lui adjugea la pomme. Dès ce moment-là, Junon & Minerve jurerent la perte, non-feulement de Paris, mais de Priam, & de toute fa famille. Paris avoit alors environ trente ans ; & comme il s'étoit rendu habile dans tous les exercices du corps, il vint à Troye pour affifter à une fête folemnelle qu'on y célébroit, & fut vainqueur dans tous les jeux qui accompagnoient la fête. On dit qu'Hector en fut piqué, & que lui ayant cherché querelle, il alloit le percer de fon épée, lorfqu'il fe fit connoître pour ce qu'il étoit, & en donna pour preuve, les ornemens & les bijoux qu'Hécube avoit fait remettre au berger qui l'avoit nourri. Il pouvoit d'ailleurs avoir été inftruit de fa naiffance par none, jeune Nymphe du mont Nn

II. Partie,

Ida, qu'il aimoit, & qui avoit la fcience de la divination.

Priam le reconnut avec joie, & oublia en le voyant, ce que les interprétes des fonges lui avoient annoncé fur les maux qu'il devoit caufer à fa patrie. Il le jugea même, à cause de fa beauté, beaucoup plus propre qu'aucun de fes freres, à l'exécution d'un deffein qu'il méditoit. Depuis qu'Héfione fa foeur avoit été enlevée par Hercule, il l'avoit redemandée plufieurs fois à Télamon, mais n'avoit pû l'obtenir ; il crut ne pouvoir tirer raison de ces refus continuels qu'en faifant enlever quelque Princeffe de la Gréce, avec qui on pût échanger fa foeur. Il fit équiper vingt vailleaux, fous prétexte d'envoyer dans la Gréce une ambaffade folemnelle, pour la réclamer une derniére fois, & Paris en eut le commandement. Vénus qui le favorifoit, & qui vouloit, en exécution de fa promeffe, le rendre poffeffeur de la plus belle femme qui fût au monde, le conduifit à Sparte où regnoit Ménélas, époux de la belle Héléne. Cette Princeffe avoit été recherchée, pour

fon extrême beauté, par tous les Princes de la Gréce, & tous s'étoient tendus auprès de Tyndare,fon pere, pour fe la difputer. On pouvoit craindre que leurs prétentions réciproques n'allumaffent la guerre entre eux; & pour la prévenir, Tyndare, avant que de déclarer fon choix, les fit jurer, par le confeil d'Ulyffe, qu'ils défendroient envers & contre tous, celui qu'il auroit déclaré. Après ce ferment, il choifit pour fon gendre Ménélas, frere d'Agamemnon, qui avoit époufé Clytemneftre foeur aînée d'Héléne. Ménélas vivoit tranquille avec fa femme, & en avoit eu une fille nommée Her mione. Lorfque Paris vint à fa cour, il fut reçû avec toute la diftinction que méritoit un Prince de fon rang; & cachant foigneufement le deffein qui l'amenoit, il employa ouvertement les moyens de gagner la confiance & l'amitié de Ménétas, pendant qu'il travailloit fourdement à s'infinuer dans les bonnes graces d'Héléne, dans l'intention de la faire confentir à fe laiffer enlever. Pendant ce tems-là, Ménélas fut obligé

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