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prendra-t-il? Il voit tous fes Guerriers convertis en ftatues, & il leur demanderoit envain du fecours; il craint que fes regards ne rencontrent la tête de Mědufe, & tendant les bras à Perfée: « Je vous céde la victoire, lui dit-il, jouiffez en paix de votre conquête, je ne » vous demande que la vie. O le plus » lâche des hommes ! lui répond » Perfée; ce que tu demandes est » pour un cœur comme le tien, le plus précieux des biens. Ne crains point que je fouille mes mains dans ton fang; tu demeureras dans » le palais de mon beau-pere, pour » y être un monument digne d'attirer les regards de la poftérité ; & Androméde en voyant ta ftatue pourra fe confoler d'avoir été privée d'un époux tel que toi. Il dit & préfente à Phinée la Gorgone; fa tête fe roidit, & fes yeux fe pétrifient; il conferve fur fon vifage & dans fes yeux, les marques de fa lâcheté ; il demeure dans l'attitude d'un fuppliant, les bras étendus comme un homme qui demande la vie. Après cette victoire, Per

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fée retourne avec Androméde dans fa patrie. Il s'arrête en paffant dans l'Ile de Sériphe. Il fçavoit que Polydecte avoit époufé Danaé fa me

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& confervoit dans fon coeur une haine implacable contre lui; qu'il cherchoit même les occafions de rabaiffer fa gloire, & parloit de la mort de Médule comme d'un triomphe chimérique. « Je vais, dit Perfée, » te donner des preuves que tu ne. » pourras démentir; » & dans l'inftant le convertit en rocher. Il fe rendit enfuite avec Androméde & fa mere, dans la ville d'Argos. Proetus avoit eu la guerre contre Acrifius fon frere, & ayeul de Perfée : il avoit été battu d'abord, & obligé de se retirer dans la Lycie; mais étant revenu avec de nouvelles troupes que lui avoit données Jobate, dont il avoit époufé la fille, il s'empara du thrône d'Argos: Perfée y rétablit Acrifius; mais peu de tems après, il le tua, fans le vouloir, d'un coup de palet, dans les jeux qu'on célébroit en l'honneur de Polyde&te. Ainfi fut accompli l'oracle qui avoit tant allarmé Acrifius, & lui avoit

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fait prendre la cruelle réfolution de faire périr fon petit-fils. Perfée se vit au comble de la gloire, & n'eut plus d'ennemis pendant le refte de fa vie; mais le féjour d'Argos lui étoit devenu odieux, depuis le malheur qu'il avoit eu d'y tuer fon ayeul. Il bâtit la ville de Mycènes, & alla y établir fa demeure: il y fut honoré après fa mort comme un demi-Dieu. On le plaça parmi les conftellations, ainsi qu'Androméde, Céphée & Caffiopée. Le monftre dont il avoit délivré Androméde, fut auffi tranfporté dans le Ciel, & devint une conftellation qu'on appelle aujourd'hui la Baleine.

ARTICLE V.

BELLE ROPHON.

BELLEROPHON étoit fils de Glaucus, Roi d'Ephyre, depuis nommée Corinthe, & petit-fils de Sifyphe. Il s'appelloit d'abord Hipponomus; mais ayant tué Bellérus, l'un des principaux habitans de Corinthe, if prit le nom de Bellerophon, qui fignifie

le meurtrier de Bellérus. Il fut oblige pour ce meurtre, de fe réfugier dans la ville d'Argos. Proetus y regnoit alors, après en avoir chaffé Acrifius fon frere, & fit à Bellérophon l'accueil le plus favorable. Les Dieux avoient donné à ce jeune Héros, avec une grande valeur, beaucoup de fageffe, & toutes les graces qui font le charme de la fociété. Il vivoit heureux & tranquille, lorfqu'Antée, femme de Proetus, qu'on nommoit auffi Sténobée, conçut pour lui une paffion criminelle; mais n'ayant pu le corrompre, elle forma le deffein de le perdre, en l'accufant à fon mari d'avoir voulu lui faire le

plus fanglant outrage. Le trop crédule Proetus fut tranfporté de colère; mais il craignit de violer les droits de l'hospitalité, en trempant lui-même fes mains dans le fang de Bellérophon, & il prit le parti de l'envoyer à fon beau-pere Jobate, Roi de Lycie, avec des lettres de recommandation, conçues en termes équivoques, & dont Jobate comprit bientôt le véritable fens. Bellérophon part, mais les Dieux protecteurs de

l'innocence, l'accompagnent dans fon voyage. Il arrive dans la Lycie fur les bords du Xanthe ; & fuivant l'usage, on le traite pendant neuf jours, avant que de se questionner fur le fujet de fon voyage; le dixiéme jour, il remit à Jobate la lettre de Proetus. Ce Prince imagina d'abord pour le perdre, de lui propofer d'aller combattre la Chimère: ce monftre qui étoit de race divine, palloit pour invincible. Elle avoit la tête d'un lion, le milieu du corps d'une chèvre, le refte d'un dragon, & il fortoit de fa gueule & de fes narines des torrens de flammes. Bellérophon eût fans doute fuccombé dans cette entreprise, fi Minerve ne l'eût fecouru. Le Cheval Pégafe né du fang de Médufe, après avoir fervi de monture à Perfée, s'envola, dit-on, fur le Parnaffe fur le Parnaffe, où d'un Coup de pied, il fit fortir la fontaine Hippocrène. Il quitta enfuite la terre, & alla dans le féjour des Immortels, où Jupiter voulut qu'il partageât avec l'aigle, la noble fonction de porter fes foudres & fes éclairs. Minerve l'ayant faifi, prit elle-mê

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