Dans les joncs, dans les roseaux, Sans oser de long-temps regarder au visage De qui la gavité fit peur à la première Elle approcha, mais en tremblant. Et leur troupe à la fin se rendit familière Le bon sire le souffre, et se tient toujours coi.1 Donnez-nous, dit ce peuple, un roi qui se remue! Qui les gobe à son plaisir; Et Jupin de leur dire: Eh quoi! votre désir Vous avez dû premièrement Garder votre gouvernement; Mais, ne l'ayant pas fait, il vous devait suffire FABLE V. LE RENARD ET LE BOUC. CAPITAINE renard allait de compagnie (1) Tranquille; en repos. (2) Oiseau de passage, qui vit sur le bord des étangs.—(3) Qui a des cornes. Celui-ci ne voyait pas plus loin que son nez, Après qu'abondamment tous deux en eurent pris, Puis sur tes cornes m'élevant, Par ma barbe! dit l'autre, il est bon; et je loue Je n'aurais jamais, quant à moi. Le renard sort du puits, laisse son compagnon, Pour l'exhorter à patience. Si le ciel t'eût, dit-il, donné par excellence Autant de jugement que de barbe au menton, Tu n'aurais pas, à la légère,2 Descendu dans ce puits. Or, adieu; j'en suis hors: Qui ne me permet pas d'arrêter en chemin. FABLE VI. L'AIGLE, LA LAIE ET LA CHATTE. L'AIGLE avait ses petits au haut d'un arbre creux, La laie 4 au pied, la chatte entre les deux; (1) C'était un grand trompeur. (2) Imprudemment. — (3) De m'arrêter. (4) Femelle du sanglier. Et sans s'incommoder, moyennant ce partage, Voyez-vous à nos pieds fouir incessamment 3 S'il m'en restait un seul, j'adoucirais ma plainte. A l'endroit Où la laie était en gésine.4 Ma bonne amie et ma voisine, Son courroux tomberait sur moi. A demeurer chez soi l'une et l'autre s'obstine, La laie, en cas d'irruption.` La faim détruisit tout; il ne resta personne (1) Fourbe pour fourberie. —(2) Possible, adverbe, n'est plus usité. (3) Sans cesse, continuellement. (4) Venait de faire ses petits. — (5) Pour dans. — (6) Nation, race. Qui n'allât de vie à trépas: Grand renfort pour messieurs les chats. Que ne sait point ourdir une langue traîtresse Des malheurs qui sont sortis Celui qu'à meilleur droit tout l'univers abhorre, FABLE VII. L'IVROGNE ET SA FEMME. CHACUN a son défaut, où toujours il revient : Sur ce propos d'un conte il me souvient : 3 De quelque exemple. Un suppôt de Bacchus 4 Telles gens n'ont pas fait la moitié de leur course Un jour que celui-ci, plein du jus de la treille, Cuvèrent à loisir. A son réveil il treuve 5 Oh! dit-il, qu'est ceci? Ma femme est-elle veuve? (1) Grande augmentation de provisions.—(2) Statue faite et animée par Vulcain. Jupiter l'envoya sur la terre avec une boîte où tous les maux étaient renfermés.- (3) Impersonnellement pour je me souviens. (4) Un ivrogne. (5) Treuve pour trouve.(6) Une des trois furies.—(7) Bouillon chaud (8) Un des dieux des Enfers. L'époux alors ne doute en aucune manière Quelle personne es-tu? dit-il à ce fantôme. De Satan, reprit-elle; et je porte à manger FABLE VIII. LA GOUTTE ET L'ARAIGNÉE. QUAND l'enfer eut produit la goutte et l'araignée, Or, avisons aux lieux qu'il vous faut habiter. Et ces palais si grands, si beaux, si bien dorés? Il n'est rien, dit l'aragne, 5 aux cases qui me plaise. Ne crut pas y pouvoir demeurer à son aise. L'aragne cependant se campe en un lambris, (1) Celle qui prend soin de la dépense de bouche. - (2) Race, famille. (3) Cabanes, chaumières. (4) Pour étroites. (5) Pour araignée. (6) Célèbre médecin grec. |