Il en est de même du complément indirect quand il n'est pas précédé de la préposition qui le régit. Mais ce secret courroux, Cette oisive vertu, vous en contentez-vous? RACINE. 247. L'emploi des pronoms le et en devant certains verbes donne à ces verbes un sens spécial en formant des expressions indécomposables, des gallicismes. Nous verrons qui de nous l'emportera. Il ne le cède à personne pour la valeur, Cet homme m'en a imposé, je ne le croirai plus. EMPLOI DES AUXILIAIRES 248. Les verbes avoir et être employés comme auxiliaires perdent leur sens propre et direct, le premier de posséder, le second d'exister, pour marquer un simple rapport entre l'attribut et le sujet. J'ai perdu ma bourse = le fait d'avoir perdu ma bourse m'est propre. Charles s'est coupé le doigt Charles est ayant coupé le doigt à lui. Dans certaines locutions, comme j'ai faim, j'eus froid, j'avais sommeil, le verbe avoir, tout en conservant son indépendance, n'a déjà plus sa signification directe. : 249. Avoir est l'auxiliaire des verbes d'action il forme les temps composés : 1o Des verbes actifs : J'ai écrit une lettre. Vous avez craint de me rencontrer. 2o Du plus grand nombre des verbes neutres: Vous avez dormi longtemps. Ce discours m'a déply. 3o Des verbes essentiellement impersonnels: Il a fallu que je parte. Il a gelé cette nuit. 250. Être est l'auxiliaire des verbes d'état : il entre dans la conjugaison : 1o Des verbes passifs dont il forme tous les temps: Je suis troublé par cette nouvelle. Cette maison sera vendue par expropriation. Le Lion et le Moucheron « Va-t'en, chétif insecte, excrément de la terre! » Parlait un jour au moucheron. << Penses-tu, lui dit-il, que ton titre de roi Un bœuf est plus puissant que toi; Le quadrupède écume, et son œil étincelle; Est l'ouvrage d'un moucheron. Un avorton de mouche en cent lieux le harcelle; La rage alors se trouve à son faîte montée. Fait résonner sa queue à l'entour de ses flancs, Il y rencontre aussi sa fin. Quelle chose par là nous peut être enseignée? (1) Dans le sens de sa racine latine magis, plus. 22 Des verbes réfléchis, tant essentiels qu'accidentels : Je me suis repenti de ma faute. Tu t'es blessé à la main. 3o D'un petit nombre de verbes neutres : Le courrier est arrivé. Les hirondelles sont revenues. 251. Les verbes neutres qui prennent être sont au nombre de douze : Il faut y joindre leurs composés : déchoir, repartir, souvenir, etc., sauf contrevenir et subvenir qui prennent toujours l'auxiliaire avoir. 252. Quelques verbes neutres se conjuguent tantôt avec avoir, tantôt avec être, selon que l'on a en vue l'action avec ses circonstances, ou l'état résultant de l'action accomplie; tels sont: monter, descendre; vieillir, rajeunir; cesser, disparaître, dégénérer, accourir, etc. Ex.: J'ai monté hier sur ce plateau. Depuis qu'il est monté, je ne l'ai pas revu. 253. Un changement de signification exige pour certains verbes un changement d'auxiliaire. Rester et demeurer, dans le sens d'habiter, se conjuguent avec avoir: Nous avons demeuré deux ans à Londres; dans tout autre sens, ils se conjuguent avec être : Il est resté court; vous n'êtes pas restés fidèles à vos principes. Convenir prend avoir dans le sens de plaire, d'agréer : Ces étoffes m'ont convenu. — Il prend être dans le sens d'être d'accord: Nous sommes convenus de nous voir tous les jours. Expirer, avec avoir, se dit d'une personne qui vient de mourir : Mon ami a expiré entre mes bras. Avec être, il signifie simplement qu'une chose a pris fin: La trêve est expirée. C'est l'usage qui apprendra les nuances que donne à l'expression le changement d'auxiliaire. EMPLOI DES AUXILIAIRES 139 L'élève relèvera dans une colonne tous les verbes qui sont à un temps composé. Il indiquera le temps et le mode et rendra compte de l'emploi du v. avoir ou du v. être dans les verbes neutres. Séjour de J.-J. Rousseau dans l'île de Saint-Pierre De toutes les habitations où j'ai demeuré (et j'en ai eu de charmantes), aucune ne m'a rendu si véritablement heureux, et ne m'a laissé de si tendres regrets, que l'île de Saint-Pierre, au milieu du lac de Bienne. J'en trouvai le séjour si charmant, j'y menai une vie si convenable à mon humeur que, résolu d'y finir mes jours, je n'avais d'autre inquiétude sinon qu'on ne me laissât exécuter ce projet. Dans les pressentiments qui m'inquiétaient, j'aurais voulu qu'on m'eût fait de cet asile une prison perpétuelle, qu'on m'y eût confiné pour toute ma vie, et qu'en m'ôtant toute puissance et tout espoir d'en sortir, on m'eût interdit toute espèce de communication avec la terre ferme, de sorte qu'ignorant tout ce qui se faisait dans le monde, j'en eusse oublié l'existence et qu'on y eût oublié la mienne aussi. On ne m'a laissé passer guère que deux mois dans cette île; mais j'y aurais passé deux ans, deux siècles et toute l'éternité, sans m'y ennuyer un moment, quoique je n'y eusse d'autre société que celle du receveur, de sa femme et de ses domestiques, qui tous étaient, à la vérité, de très-bonnes gens et rien de plus; mais c'était précisément ce qu'il me fallait. Quel était donc ce bonheur et en quoi consistait sa jouissance? J'entrepris de décrire toutes les plantes de l'île, sans en omettre une seule, et avec un détail suffisant pour m'occuper le reste de mes jours. 140 L'élève rendra compte de l'emploi des auxiliaires dans les verbes du morceau suivant: indiquera l'espèce du verbe, le temps et le mode, enfin les divers compléments. En regard des substantifs et des adjectifs en italiques, il écrira les verbes qui leur correspondent. Le cardinal Mazarin Mazarin avait l'esprit grand, prévoyant, inventif, le sens simple et droit, le caractère plus souple que faible et moins ferme que persévérant. Sa devise était : « Le temps et moi. » Il se conduisait non d'après ses affections ni ses répugnances, mais d'après ses calculs. L'ambition l'avait mis au-dessus de l'amour-propre, et il était d'avis de laisser dire, pourvu qu'on le laissât faire. Aussi était-il EMPLOI DES TEMPS ET DES MODES 1o L'indicatif 254. On emploie le présent pour exprimer soit un fait actuel, soit quelque chose d'habituel ou de permanent. Tu troubles mon sommeil. Jules monte à cheval tous les jours. Les grandes prospérités nous aveuglent, nous transportent, nous égarent. Le présent s'emploie encore: 1° pour un futur très-prochain: Ma mère part ce soir pour la campagne. Je suis de retour dans un moment. 2o Les écrivains l'emploient pour le passé afin de donner au récit plus de rapidité et vie. Ainsi dans le beau récit de la mort d'Hippolyte, Racine dit : J'ai vu, seigneur, j'ai vu votre malheureux fils, 255. L'imparfait s'emploie pour exprimer une action passée que l'on considère dans ses rapports avec d'autres actions. Maître corbeau, sur un arbre perché, Un chat, nommé Rodilardus, Faisait de rats telle déconfiture Que l'on n'en voyait presque plus. LA FONTAINE. On doit se servir du présent et non de l'imparfait quand il s'agit d'exprimer. une vérité incontestable. Ex: Condé tenait pour maxime qu'un habile capitaine peut bien être vaincu, mais qu'il ne lui est pas permis d'être surpris. BOSSUET. |