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«En dépit de ces entraves, il continuera son œuvre de ténèbres; son prestige grandira de toute l'oppression qu'il semblera subir.

« Il ne suffit pas de lui imposer l'observation des lois faites pour le contenir; il faut encore abolir celles qui protègent son enseignement et ses pratiques.

« Hé quoi! un citoyen ne pourra, sans commettre le délit « d'offense à un des cultes reconnus » ou à la « morale religieuse », attaquer les doctrines, les institutions et les pratiques du papisme!

« Qu'on nous donne enfin la liberté de la pensée et ses inséparables compagnes, la liberté de la parole et la liberté de réunion, sans laquelle la parole ne peut se faire entendre.

« Gouvernement, sénateurs, députés, qui voulez vaincre le cléricalisme, livrez à la discussion le fatras de sottises qu'il propage sous le nom de religion. Laissez la science, le bon sens, la satire les percer à jour. Faites que partout, dans la presse, au théâtre, dans les conférences, on puisse le discuter et le combattre.

« Laissez qui le voudra élever chaire contre chaire, autel contre autel. Comme le disait Pierre Leroux en 1848: Mettez la vérité au concours, et vous verrez les syllabusiens effarés fuir l'atmosphère de lumière et de liberté que vous aurez faite autour d'eux. »

PHILOSOPHISCHE MONATSHEFTE

SOMMAIRE DU NUMÉRO 3.

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Étude de Stanley Jevons sur J. Stuart Mill, par le professeur Imelmann; Le droit considéré dans son but, de R. Ihering; examiné par le professeur Lasson; Le moteur immobile et la réalité essentielle ou absolue de l'espace, de A. Weisner; examiné par le docteur Weis; La Critique de la raison pure, de Kant, et le criticisme de Kant dans la première et la seconde édition de la Critique de la raison pure, de B. Erdmann; examiné par Fr. Hoffmann; Histoire de la terminologie philosophique, de R. Eucken; - L'idée moderne du droit en Allemagne, en Angleterre et en France, de A. Fouillée; examiné par le docteur Jodl; Lucien et les Cyniques, de J. Bernays; - Nouvelles études de K. Rosenkrantz; - Lexique d'histoire de la philosophie, de L. Noack; - Bibliographie.

REVUE PHILOSophique de la FRANCE ET DE L'ÉTRANGER.

SOMMAIRE DU NUMÉRO D'AVRIL 1879.

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La loi physique de la conscience, par A. Herzen; - Fragments inédits sur le socialisme (fin), par Stuart Mill; Le nouveau livre de Hartmann sur la morale (12 article), par Th. Reinach; Le problème physiologique de la vie (fin), par Dastre; Etudes de philosophie indienne, par P. Regnaud; - Analyses et comptes rendus; Notices bibliographiques; - Revue des périodiques étrangers.

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LA CRITIQUE PHILOSOPHIQUE

POLITIQUE, SCIENTIFIQUE, LITTÉRAIRE

LE CAS DE BLANQUI EST EXCEPTIONNEL.

Le droit présidentiel de grâce est devenu en fait, pour trois mois, en vertu d'une loi, un droit d'amnistie. Nous croyons et nous avons dit que le gouvernement aurait dû tout d'abord exercer ce droit en faveur de M. Blanqui, à cause du caractère et des circonstances de la journée du 31 Octobre. Il nous est impossible de ne pas voir une différence énorme entre la tentative de renverser le gouvernement du 4 Septembre et une insurrection contre l'Assemblée nationale de 1871, telle que celle du 18 Mars. L'Assemblée de 1871, élue en un jour de malheur sans doute, mais librement élue par le suffrage universel, était la représentation régulière du pays, l'autorité légitime, la seule autorité légitime. Le gouvernement du 4 Septembre, sorti d'une révolution, était un pouvoir de fait, sans mandat national, qui s'était donné le tort d'ajourner les élections, c'est-à-dire la production d'un pouvoir de droit. Cette différence, c'est le pricipe démocratique et électif, c'est la politique légaliste qui l'établit elle est indépendante de la comparaison que l'on peut faire entre les intentions du gouvernement du 4 Septembre et celles de l'Assemblée de 1871.

Il est vrai que M. Blanqui ne l'admettrait pas et qu'il n'en a jamais eu cure. Lorsque, dans son journal la Patrie en danger, il signalait éloquemment les fautes du gouvernement du 4 Septembre, il était fort éloigné de mettre au nombre de ces fautes l'ajournement des élections; et, le 31 octobre, ce n'était pas pour faire les élections, pour appeler la nation à se prononcer sur la paix ou la guerre, qu'il envahissait l'Hôtel de ville. Nous savons bien, au reste, que, le 15 mai 1848, il n'a pas montré plus de respect pour l'Assemblée constituante de la seconde République que, le 31 octobre 1870, pour le gouvernement provisoire de la troisième; et l'on peut supposer que, s'il eût été libre, le 18 mars 1871, le principe démocratique et électif ne l'eût pas empêché de prendre parti pour la Commune. Mais il nous semble que le gouvernement de M. Grévy, appelé à juger le cas de M. Blanqui, en vertu du droit de grâce que la Constitution lui a conféré et du droit d'amnistie que les deux Chambres ont temporairement joint au droit de grâce, doit décider sur le fait qui a motivé la condamnation du vieux révolutionnaire, non sur les idées et les senti

CRIT. PHILOS.

VIII

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ments qu'on est fondé à lui attribuer. Nous l'avons dit, quelque jugement que l'on porte sur le rôle historique de M. Blanqui après la Révolution du 4 Septembre, l'attentat du 31 Octobre, le seul pour lequel il ait pu être incriminé, le seyl pour lequel il ait été condamné, doit être considéré en lui-même. On ne saurait étendre sa responsabilité pénale par des suppositions. On n'a pas à arguer de ses tendances, de ses dispositions mentales, pour lui enlever le bénéfice de la distinction qu'il convient de faire, sous le rapport de la légitimité d'origine, entre le gouvernement du 4 Septembre et l'Assemblée de 1871, et, sous le rapport de la criminalité politique, entre l'attentat du 31 Octobre et l'insurrection du 18 Mars,

Cette distinction simplifie et spécialise la question Blanqui. Le gouvernement peut très bien rendre demain à M. Blanqui la liberté et l'éligibilité, sans abandonner le terrain sur lequel il a cru devoir se placer, à tort ou à raison, dans la question de l'amnistie générale. Un grand nombre d'esprits modérés, partisans résolus de la politique légaliste, estiment que M. Blanqui n'aurait pas dû être condamné, qu'il n'aurait pas même dû être poursuivi. Il est clair que, d'après les considérations sur lesquelles ils s'appuient, disons d'après le droit républicain, M. Blanqui aurait dû être amnistié avant les condamnés de la Commune, quels qu'ils fussent. Bien plus, lors même que, pour l'insurrection du 18 Mars, on aurait cru devoir s'en tenir au système des grâces, l'attentat du 31 octobre aurait pu et dû être l'objet d'une amnistie. Les raisons qui commandaient hier, qui commandent aujourd'hui d'amnistier M. Blanqui, sont indépendantes de celles qui ont fait voter une loi de clémence pour le plus grand nombre des insurgés communalistes; elles sont indépendantes des principes, malheureusement peu compris, de politique élevée et de justice supérieure qui appelaient, selon nous, après le 30 janvier, une loi d'effacement et d'oubli pour tous les crimes et délits politiques du passé. Le cas de M. Blanqui ne peut causer d'embarras sérieux à nos ministres, s'ils veulent bien le voir tel qu'il est, c'est-à-dire spécial et exceptionnel. Le décret qui gracierait aujourd'hui le prisonnier de Clairvaux, et qui, postérieur à l'élection du 20 juin, ne lui permettrait de siéger à la Chambre des députés qu'aprés une nouvelle élection, régulière et valide, - ce décret, motivé par les circonstances et l'issue du mouvement du 31 Octobre, inspiré par l'esprit démocratique et légaliste, très digne de M. le Président Grévy, très conforme, logiquement, à son opinion sur la dictature du 4 Septembre et sur les dictatures révolutionnaires en général, ne pourrait rien préjuger en faveur des membres de la Commune dont on a craint le retour, et en vue desquels la proposition d'amnistie générale a été écartée. En un mot, on pouvait et l'on peut amnistier M. Blanqui, sans se croire engagé par là à rendre à M. Jules Vallès et à M. Félix Pyat leurs droits politiques. F. PILLON.

IDÉALISME ET CRITICISME.

« Si la sensation est objective, c'est qu'en dehors de nous, les phéno«mènes sont des faits de conscience. On arrivera, de la sorte, à un « système plus ou moins semblable au néo-criticisme, au phénoménisme « idéaliste de M. Renouvier. » Ainsi s'exprime, au sujet des doctrines criticistes, M. Dereux, non pas dans un article consacré à la philosophie critique, mais à la suite d'une très exacte exposition, je pourrais presque dire d'une reproduction abrégée de La Philosophie de M. André Lefèvre. (Cf. Revue philosophique, 4° année, no 4, p. 457.)

Que signifie le terme idéalisme? Dans le principe, on opposait idéalisme à matérialisme; aujourd'hui on rencontre des philosophes qui se déclarent partisans d'un matérialisme idéaliste. V. Cousin voyait dans l'idéalisme l'antidote du sensualisme, et composait ou prétendait composer son système de doses à peu près égales de sensualisme et d'idéalisme. Aujourd'hui, on s'accorde à reconnaître que Stuart Mill est un idéaliste. Mais Stuart Mill est disciple continuateur de Hume, et l'on sait que, dans les traîtés classiques, la philosophie de Hume reçoit l'épithète de sensualiste. Si tous les termes philosophiques avaient cette prodigieuse variété de sens, il faudrait renoncer à écrire on resterait seul à se comprendre.

Cette facilité d'un terme à recevoir les acceptions les plus opposées, démontre (car le terme idéalisme n'est pas seul à jouir de ce privilège) la nécessité pour tous les philosophes de s'entendre, non pas sur une doctrine, mais tout au moins sur un dictionnaire.

Supposons, toutefois, qu'on ait souci de définir exactement les systèmes, et demandons-nous quelle doctrine méritera la définition d'idéaliste. D'abord, cette doctrine essaiera de résoudre tous les problèmes dans le sens de l'idéalisme, sous peine d'inconséquence, comme les matérialismes tentent de tout expliquer par les propriétés de ce qu'ils nomment matière. Ceci posé, à ne considérer que le sens littéral, le mot idéalisme ne s'applique-t-il pas fort bien à toute doctrine (et non pas à d'autre) qui résout en idées l'objet de la connaissance? Or, ou le terme idée n'a point de sens, ou il ne peut avoir que le sens autorisé par l'expérience la plus vulgaire; ce terme exprimera donc un produit de l'activité mentale. Nous arriverions ainsi à poser la thèse fondamentale du vrai idéalisme en ces termes; Toute connaissance a pour raison suffisante l'activité de l'entendement, agissant spontanément sans le secours d'aucun stimulus extérieur. L'entendement produirait alors toutes ses idées : il serait l'unique auteur de la matière, comme il l'est de la forme de la connaissance.

Poussons les conséquences à l'extrême, et nous voyons l'idéalisme aboutir à une sorte d'égoïsme métaphysique. Rien n'existe que le moi et

ses représentations: les phénomènes attribués au monde extérieur ne sont encore que nos phénomènes, c'est en nous qu'ils prennent leur source. Un idéaliste logique niera ce qu'on appelle assez improprement la réalité objective de ses semblables, des animaux, des corps, etc.; tout cela existe pour lui, mais c'est tout. En se dépouillant de l'existence, il accomplirait une sorte de suicide cosmique, car il dépouillerait du même coup le monde extérieur de la faculté d'être senti ou pensé par lui. L'entendement de l'idéaliste, voilà le seul fond capable de supporter l'existence des choses du monde extérieur; voilà, si l'on peut ainsi parler, la substance du monde extérieur.

Si tel est l'idéalisme, il faut bien convenir que rien n'en est plus éloigné que le criticisme. Comme l'idéalisme, il rejette le substantialisme matérialiste, qui pose une étendue en soi; il le rejette, parce que « la loi du nombre » lui en fait une nécessité logique, et que le principe de contradiction lui interdit d'admettre l'existence d'un nombre infini actuellement réalisé. Il considère que l'idée de matière est une donnée complexe, décomposable en une pluralité de notions, de phénomènes représentés à l'entendement, et pour cette raison doués de réalité objective.

Le propre du criticisme est d'admettre que les phénomènes de ce genre sont en connexion avec d'autres, et que partout où il y a un représenté, ce représenté doit exister non seulement pour nous, mais encore pour lui. La même raison qui nous détermine à croire à l'existence de nos semblables, en tant qu'êtres libres et conscients, nous oblige à poser les phénomènes d'étendue et de mouvement en relation avec d'autres phénomènes plus ou moins analogues à ceux que nous savons, par l'expérience personnelle, constituer le fait même de la représentation d'un sujet à lui-même.

Dans ces conditions, il est clair que la suppression de l'entendement humain n'entraîne nullement celle des êtres de l'univers extérieur, qui n'en continuent pas moins d'exister pour soi à titre de sujets.

Il est tout aussi clair que, si la doctrine criticiste se résout dans le phénoménisme, ce phénoménisme auquel elle aboutit n'est rien moins qu'idéaliste. S'il fallait lui donner un nom, on l'appellerait fort bien un phénoménisme-réaliste, attendu que, si l'on supprime les êtres en soi, on n'en reconnaît pas moins aux phénomènes le plus haut degré de réalité. LIONEL DAURIAC.

LES ÉQUIVOQUES DE LA QUESTION PHILOSOPHIQUE DU
MONDE EXTÉRIEUR.

(Voyez le n° 4 de la Critique philosophique.)

Les philosophes de différentes écoles paraissent aujourd'hui aussi peu disposés les uns que les autres à traiter l'existence du monde extérieur de vérité certaine, si l'on doit entendre par certain cela seulement qui

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