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SUITE DU CHAPITRE III

DE LA Are PARTIE DE LA 2a DIVISION DE L'ART DÉ PARLER.

4o TEMS DU CONNECTIF D'IDENTITÉ.

Le tems, considéré d'une manière abstraite et générale, est un être métaphysique, lequel n'a de réalité que dans l'imagination; la notion que cette faculté intellectuelle s'en forme, naît de la succession continue de ses idées qui lui représentent les êtres comme successifs dans l'ordre des rapports qui constituent leur existence. La notion du tems comme celle du mouvement naît de la succession des idées ; elle ne s'acquiert point par celle du mouvement dont elle ne dépend aucunement; car soit que les corps se meuvent ou qu'ils soient en repos, nous pouvous concevoir le tems; l'une et l'autre s'acquièrent par la réflexion que nous faisons sur les idées successives que les corps excitent dans notre esprit par leur coexistence successive aux différens êtres qui les environnent. Le tems est donc la succession continue des idées que les êtres occasionnent dans notre esprit par la succession continue de leurs rapports dans l'ordre. Le tems n'est donc qu'un mode, une modification métaphysique que l'esprit attribue aux êtres quand il les considère; il n'a point de réalité hors de nous; il est même indépendant des corps, car l'ame seule par le sentiment intérieur qui l'avertit de son existence, pourrait s'en former la notion, comme elle se forme celle d'unité, de cause, de moyen, d'effet, etc.

L'existence successive des êtres est la seule mesure du tems qui soit à notre portée, comme le tems devient à son tour la mesure de l'existence successive. Pour la me

TOM. II.

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surer, nous la divisons par des points fixes caractérisés par des faits particuliers. Ces points fixes, nous les nommons époques et périodes. L'époque (du grec êñоxŋ, venu de Enxev arrêter) est un instant dont on arrête en quelque manière la rapide mobilité pour en faire comme un lieu de repos d'où l'on observe, pour ainsi dire, ce qui coexiste, ce qui précède et ce qui suit. La période est une continuité d'instans dont le commencement et la fin sont déterminés par des époques de лɛρ circùm, et de odos via; parce qu'une portion du tems bornée de toutes parts est comme un espace autour duquel on peut tourner.

Après ces notions préliminaires, nous dirons que les tems verbaux ou du verbe sont les formes qui expriment les différens rapports d'existence de l'action énoncée par le verbe aux diverses époques que l'on peut envisager dans la durée. D'après cette définition, nous devons considérer deux choses : les rapports d'existence à une époque, et l'époque qui est le terme de comparaison.

PREMIÈRE DIVISION GÉNÉRALE DES TEMS.

«L'existence peut avoir en général trois sortes de rapports à l'époque de comparaison: rapport de simultanéité lorsque l'existence est coïncidente avec l'époque; rapport d'antériorité lorsque l'existence précède l'époque ; et rapport de postériorité lorsque l'existence succède à l'époque; de là trois espèces générales de tems : les présens, les prétérits, les futurs » (Beauzée); dénominations qu'il est plus naturel de désigner par les formes de simultanés, antérieurs, postérieurs, parce qu'elles sont plus conformes au caractère des idées que les tems expriment. Nous exposerons la raison de cette substitution après quelques notions préliminaires qui en vont préparer réponse.

la

Les tems simultanés sont les formes du verbe qui expriment la simultanéité d'existence à l'égard de l'époque de comparaison.

Les antérieurs sont les formes du verbe qui expriment l'antériorité d'existence à l'égard de l'époque de compa

raison.

Les postérieurs sont les formes du verbe qui expriment la postériorité d'existence à l'égard de l'époque de comparaison.

« C'est véritablement du point de vue de l'époque qu'il faut envisager les autres parties de la durée successive pour apprécier l'existence, parce que l'époque est le point d'ohservation » : ce qui coexiste est simultané; ce qui précède est antérieur; ce qui suit est postérieur. « Il n'est pas possible que les tems des verbes expriment autre chose que des rapports d'existence à quelque époque de comparaison; il est également impossible d'imaginer quelque espèce de rapport autre que ceux que l'on vient d'exposer: il ne peut donc, en effet, y en effet, y avoir que trois espèces de tems, et chacune doit être déterminée par l'un de ces trois rapports généraux ». (Beauzée).

Ces trois espèces générales de tems se sous-divisent en plusieurs branches selon les divers points de vue accessoires qui peuvent se combiner avec les idées générales et fondamentales de ces trois espèces primitives.

SECONDE DIVISION GÉNÉRALE DES TEMS.

:

La sous-division la plus générale des tems doit se prendre dans la manière d'envisager l'époque de comparaison pour déterminer les diverses relations de cette époque, il faut la comparer à un point fixe de la durée qui en marque les diverses positions d'une manière invariable pour celui qui parle et pour ceux à qui le discours est transmis soit de vive voix soit par écrit.

Ce point fixe est l'instant même de la production de la parole. « C'est celui qui dans toutes les langues sert de dernier terme à toutes les relations de tems que l'on a besoin d'exprimer, sous quelque forme que l'on veuille les rendre sensibles. On peut donc dire que la position

de l'époque de comparaison est la relation à l'instant même de l'acte de la parole ».

Or le tems, comme nous l'avons dit, est un point de vue, un lieu fictif, où l'esprit place, pour les observer, les instans divers qui se succèdent rapidement dans l'existence des êtres. Pour fixer la position de ces instans qui lui échappent sans cesse, il considère le tems comme partagé en trois périodes déterminées : la période actuelle, qui coïncide avec l'acte de la parole, une période antérieure, qui précède l'acte de la parole, et une période postérieure qui suit l'acte de la parole.

De là, la distinction de trois espèces de périodes: période présente, période passée, et période future. ·

La période présente comprend la série des instans qui fixent l'existence actuelle ou comme simultanée à l'acte de la parole, ou comme antérieure à l'acte de la parole, ou comme postérieure à l'acte de la parole.

La période passée comprend la suite des instans qui out coïncidé avec ou précédé ou suivi une époque passée antérieure à l'acte de la parole.

La période future comprend la suite des instans qui coïncideront avec ou précéderont ou suivront une époque future postérieure à l'acte de la parole.

On peut donc dire qu'il y a dans chaque période une époque de comparaison autour de laquelle se groupent les instans divers de l'existence et qui est le centre où se rapportent toutes les relations possibles des époques de la durée. Or ces trois époques sont exprimées par ces trois formules: je lis, je lisais, je lirai. Je lis (je suis lisant) est l'existence actuelle rapportée à l'acte de la parole. Je lisais (j'étais lisant) est l'existence présente rapportée à la période antérieure à l'acte de la parole dont elle est séparée par un intervalle qui est mesuré par une autre existence antérieure à l'acte de la parole. Je lirai (je serai lisant) est l'existence présente rapportée à la période postérieure à l'acte de la parole dont elle est séparée par un intervalle mesuré par une autre existence postérieure à l'acte de la parole.

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