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printemps (orge et avoine); 3° année prairies artificielles (notamment trèfle et ray-grass); 4ean

née: blé.

Depuis, on a assez généralement ajouté une année à la rotation en laissant les prairies artificielles occuper la terre pendant deux ans, ce qui rend l'assolement quinquennal. Ainsi, sur une terre de 70 hectares, par exemple, 30 seraient en prairies permanentes, 8 en pommes de terre et navets, 8 en orge et avoine, 8 en prairie artificielle de première année, 8 en prairie artificielle de seconde année, et 8 en blé. Dans les parties du pays les plus favorables à la végétation herbacée, la proportion des prairies est encore accrue, et celle du blé réduite; dans celles qui ne se prêtent pas autant à la végétation des racines et des prés, on substitue aux turneps les féveroles, et on étend les soles de céréales aux dépens des autres récoltes, mais dans l'ensemble, ces exceptions se compensent à peu près, au moins pour la Grande-Bretagne; en Irlande, tout est différent.

En somme,

déduction faite des 11 millions d'hectares incultes que renferment les îles britanniques, les 20 millions d'hectares cultivés se décomposent à peu près ainsi :

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En France, nous avons aussi 11 millions d'hectares incultes sur 53; les 42 millions restants se décomposent

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De la comparaison entre ces deux tableaux ressort toute la différence des deux agricultures.

Il semble au premier abord que la France ait l'avantage sur le Royaume-Uni pour la proportion des terres incultes aux terres cultivées; mais les terres délaissées par nos voisins sont pour la plupart incultivables, elles se trouvent presque toutes dans la haute Écosse, le nord de l'Irlande et le pays de Galles, tout ce qui ailleurs était susceptible d'être défriché l'a été, tandis que, chez nous, la plupart des terres en friche seraient susceptibles de culture. Nous avons en outre beaucoup plus de bois que nos voisins; et en ajoutant nos terrains forestiers aux terres incultes, nous trouvons 19 millions d'hectares sur 53 soustraits en France à la culture proprement dite, ou à peu près la même proportion. Grâce à leurs mines de charbon, qui leur fournissent en abondance un combustible excellent et à bon marché, les Anglais ont pu se défaire des grands bois qui couvraient autrefois leur île, et racheter ainsi leur infériorité sous d'autres

rapports; il ne reste plus aujourd'hui des anciennes forêts que quelques vestiges, tous les jours menacés de destruction.

Le véritable domaine agricole se compose donc, d'une part, de 19 millions d'hectares, et de l'autre, de 34. Nous trouvons à première vue que, sur les 19 millions d'hectares anglais, 15 sont consacrés à la nourriture des animaux, et 4 tout au plus à la nourriture de l'homme; en France, le nombre des hectares consacrés aux cultures améliorantes est de 9 millions, tandis que les cultures épuisantes en couvrent le double; le domaine des jachères est encore énorme, et dans leur état actuel elles ne peuvent être que d'une faible ressource pour renouveler la fertilité de la terre. L'examen des détails ne fera que confirmer ce que fait pressentir ce premier aperçu.

D'abord s'offrent les prairies naturelles, représentées chez nous par 4 millions d'hectares et dans les îles britanniques par 8. Ici moins du huitième, là presque la moitié du sol cultivé; il est vrai que, dans les prés anglais, figurent surtout des pâturages, mais ces pâturages valent pour le produit nos prairies fauchées.

C'est à coup sûr une des plus frappantes originalités de la culture britannique, du moins jusqu'ici, que cette extension du pâturage. On fait peu de foin en Angleterre, la nourriture d'hiver des animaux est surtout demandée aux prairies artificielles, aux racines, et même aux céréales. Depuis quelque temps, des systèmes nouveaux dont je parlerai ailleurs tendent à substituer la stabulation, même en été, à l'antique tradition

nationale; ces tentatives ne sont encore et n'étaient surtout il y a cinq ans que des exceptions. L'usage à peu près universel est de n'enfermer le bétail que le moins possible. Les trois quarts des prés anglais sont pâturés, et comme la moitié des prairies artificielles le sont aussi, surtout dans la seconde année, comme les turneps euxmêmes sont en grande partie consommés sur place par les moutons, comme enfin les terres incultes ne peuvent être utilisées que par le parcours, les deux tiers du sol total sont livrés au bétail. De là le charme particulier des campagnes britanniques. Hors de la Normandie et de quelques autres provinces où le même usage s'est conservé, notre territoire présente rarement le spectacle riant qu'offre partout l'Angleterre avec ses vertes pelouses peuplées d'animaux en liberté.

L'attrait de ce paysage s'accroît par l'effet pittoresque des haies vives, souvent plantées d'arbres, qui entourent chaque champ. L'existence de ces haies est aujourd'hui fort attaquée. Jusqu'ici elles ont été considérées comme un accessoire obligé du système général de culture. Chaque pièce de terre étant pâturée à son tour, il est commode de pouvoir y parquer en quelque sorte les animaux et les y laisser sans gardien. Avec nos habitudes nationales, il nous paraît étrange de voir des bestiaux, surtout des moutons, complétement livrés à eux-mêmes dans les pâturages et quelquefois assez loin des habitations. Il faut se rappeler que les Anglais ont détruit les loups dans leur ile, qu'ils ont, par des lois terribles sur la police rurale, défendu la propriété contre les déprédations humaines, et qu'enfin

ils ont eu soin de clore exactement tous leurs champs, pour comprendre cette sécurité générale. Ces belles haies apparaissent alors comme une défense utile aussi bien que comme une riche parure, on s'étonne qu'il puisse être question de les supprimer.

La pratique du pâturage a, aux yeux du très-grand nombre des cultivateurs anglais, plusieurs avantages; elle épargne la main-d'œuvre, ce qui n'est pas pour eux une petite considération; elle est favorable, ils le croient du moins, à la santé des herbivores; elle permet de tirer parti de terrains qui ne seraient autrement que d'un faible produit et qui s'améliorent à la longue par le séjour du bétail; elle fournit une nourriture toujours renaissante et dont la somme finit par être égale, sinon supérieure, à celle qui aurait été obtenue par la faux. En conséquence, ils attachent un grand prix à avoir dans chaque ferme une étendue suffisante de bonnes pâtures; même dans les prés qu'ils fauchent, ils intercalent souvent une année de pâturage entre deux années de fenaison. Quand nos pâturages sont en général négligés, les leurs sont, au contraire, soignés admirablement, et quiconque a un peu étudié ce genre de culture, le plus attrayant de tous, sait quelle immense distance peut exister entre un pâturage inculte et sauvage et un pâturage cultivé.

On peut affirmer hardiment que les 8 millions d'hectares de prés anglais donnent trois fois autant de nourriture pour les animaux que nos 4 millions d'hectares de prés et nos 5 millions d'hectares de jachères. La preuve en est dans le prix vénal de ces différentes espè

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