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rappeler toutes les raisons qui vous érposent; car ce dernier pas, qui vient de vous mettre sur le sopha de la présidence, vous rapproche de l'échafaud, où vous verriez cette canaille qui vous encense, vous cracher au visage comme elle a fait à ceux que vous avez jugés. Egalité, dit d'Orléans, vous en fournit l'exemples ainsi, puisque vous êtes parvenu à vous former ici un trésor suffisant pour exister long-tems, ainsi que les personnes pour qui j'en ai reçu de vous, je vais vous attendre avec grande impatience, pour rire avec vous du rôle que vous avez joué dans le trouble d'une nation aussi crédule qu'a vide de nouveautés... Prenez votre parti d'après nos arrangemens ».

Travaillé par l'espoir de régner, tiraillé par la crainte d'échouer et la peur du sup+ plice, ne sachant quel parti prendre, on voit que le lâche n'étoit pas homme à brû ler ses vaisseaux pour se mettré dans la nécessité de vaincre. C'est au milieu de cette incertitude et de cette fluctuation qui, devoient le perdre, que le 8 thermidor ar tiva. Mais avant que d'en venir aux détails précieus

précieux de cette journée, il est bon dé dire un mot des comités de gouvernement et de la convention.

Dans cette circonstance, la position des comités de gouvernement étoit très-gênante pour eux; sans doute ils n'étoient pas instruits à fond de toute la noirceur, de toute l'étendue du projet de Robes pierre, mais la scission que ce dernier n'avoit pas craint de faire ouvertement avec eux, les gênoit étrangement, à cause de son immense popularité, et ils ne doutoient pas qu'il n'eût des projets de s'élever à leurs dépens, de s'élever seul sur leurs ruines et celles de la représentation nationale. Comment faire pour perdre Robes pierre sans se perdre aussi? cela étoit impossible. Les comités ne pouvoient l'anéan tir, sans rejeter sur lui toutes les horreurs auxquelles il étoit trop notoire qu'ils avoient eux-mêmes grandement participé, et, du moment que les comités, se servant de la

Convention pour perdre le tyran

rendoient à la convention son énergie, il étoit clair que la convention ne se dessaisiroir plus de Gette énergie recouvrée, et qu'elle sien

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serviroit aussi contre les comités qui, conjointement avec Robespierre, l'avoient mutilée, avilie, septembrisée. C'étoit là toute la frayeur des comités de gouvernement, ils ne pouvoient pas perdre Rober pierre, Robespierre ne pouvoit pas être frappé, sans que l'assemblée convention nelle ne sortit de sa stupeur avec la rapi dité de l'éclair, et elle ne pouvoit sortir de cette stupeur, sans ravir aux comités l'autorité énorme qu'ils ne vouloient pas perdre et qu'ils ne pouvoient perdre sans être aussitôt anéantis. Si Robespierre eût pu frapper toute la convention, et les comités frapper ensuite Robespierre, il n'est pas douteux que ces autorités, com posées de brigands sans pudeur, n'eussent laissé commettre le crime à l'incorruptible, pour en recueillir ensuite le fruit; mais, cela ne pouvoit être, car Robespierre, en égorgeant, au Panthéon, la représenta tion nationale n'eût pas manqué d'inglo ber dans le massacre, les membres des comités qui n'étoient pas de son bord. La position de ces comités étoit donc terrible: d'un côté, Robespierre s'élevant, les anéan

tissoit; de l'autre, Robespierre étant anéanti, la convention reprenoit sa puissance et écrasoit les comités assassins; de cette lutte devoit naître nécessairement leur destruction, et c'est ce qui arriva. Cependant, en attendant cet instant décisif qu'ils s'effor çoient de reculer, ils se tenoient sur la défensive. Billaud de Varennes et Collotd'Herbois, tous deux membres du comité de salut public, n'avoient pour eux que la puissance comitoriale, dont ils se gardoient bien d'abandonner les rênes un seul instant. Leur collègue Barrère, astucieux et fourbe comme son ordinaire, flottoir indécis entre les deux écueils, et attendoit le succès, pour se déclarer et se ranger du côté du parti victorieux.

à

Quant à la convention, elle ignoroit l'immensité de l'abîme où un seul coup alloit la plonger, elle ignoroit que des carrières étoient creusées pour engloutir les cadavres de ses membres; elle ignoroit que la fête prochaine du héros Viala étoit le jour marqué pour éclairer ses funérailles ;mais les horreurs passées, des propos Indiscrets, certains fairs et plusieurs circons

tances lui donnoient clairement à entendre qu'elle penchoit vers sa chûte, et sans prévoir précisément le terme marqué pour son anéantissement, son extermination, elle savoit qu'elle étoit menacée des plus grands dangers.

En effet, jamais tyran, si farouche qu'il ait été, ne poussa plus loin l'espionnage, qu'il le fut, à cette époque, par Robespierre et les comités de gouvernement, contre les malheureux députés. On conpoissoit toutes leurs démarches, les plus innocentes comme les plus secrètes ; les comités et Robespierre étoient si bien servis par leurs délateurs, qu'ils savoient ou Thuriot, Legendre, Tallien, Bourdon de l'Oise Gaston, Fouché et Bréard avoient passé la nuit, ce qu'ils avoient dit, avec qui ils avoient parlé, les maisons ou ils étoient allés, combien d'heures et de minutes ils y étoient restés; si, dans la rue, en rencontrant un de leurs collègues qu une personne étrangère à la convention, ils avoient eu l'air riant ou triste. Le moindre geste d'un député étoit rendu fidèlement aux tyrans. Les députés se

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