Page images
PDF
EPUB

porte le produit total à 5 milliards et demi; d'autres, comme M. Spackman, à 250 millions sterling ou plus de 6 milliards; j'ai pris l'estimation la plus basse, et elle doit encore être réduite, à cause de la différence des prix. On a vu que, pour le lait, les prix anglais étaient doubles des nôtres; pour la viande, la différence était de 25 à 30 pour 100; pour les céréales, de 20. En Écosse et en Irlande, ces différences diminuaient, puisque les deux pays vendaient à l'Angleterre. Dans l'ensemble, pour établir une comparaison exacte et ramener les prix du Royaume-Uni au prix des denrées similaires en France, il faut réduire les 5 milliards d'un cinquième. On se trouve alors en présence d'un total de 4 milliards, qui paraît représenter bien réellement la valeur de la production britannique comparée à la nôtre. Ce résultat, encore si énorme en comparaison, est obtenu avec des produits très peu variés: voici comment il se divise:

PRODUITS ANIMAUX

Viande (1,700 millions de kil. à 80 c.).... 1,360 millions. Laines, peaux, suifs, abats...

Lait (2 milliards de litres à 10 c.)............. 300,000 chevaux de 3 ans, à 400 fr. l'un.. Volailles.....

300

200

120

20

Total des produits animaux... 2 milliards.

PRODUITS VÉGÉTAUX

Froment (45 millions d'hect. à 16 fr.).....
Orge (20 millions d'hect. à 8 fr.)......
Avoine (15 millions d'hect. à 6 fr.)................
Pommes de terre (200 millions d'hect. à 2 fr.).
Foin et avoine pour les chevaux non agricoles.
Lin, chanvre, légumes, fruits........

Bois.....

Total des produits végétaux......

720 millions.

1601

90

400

400

170

60

2 milliards.

1 La production totale de l'orge doit être de 30 millions d'hectolitres, mais les deux tiers seulement servent à la consomma

Voilà, je crois, la vérité, autant du moins qu'on peut l'obtenir au moyen d'évaluations aussi générales.

Le plus grand enseignement que renferment ces chiffres, outre la disproportion des résultats, c'est le rapport des produits végétaux aux produits animaux; tandis qu'en France les produits végétaux forment les quatre sixièmes du total et les produits animaux les deux sixièmes seulement, ce qui révèle au premier abord une culture épuisante, ou tout au moins stationnaire; dans les îles Britanniques, les uns sont égaux aux autres, ce qui annonce une culture améliorante; le plus inférieur des produits ruraux, le bois, figure d'un côté pour 250 millions, et de l'autre pour 60 seulement. Réparti par hectare sur la superficie totale du Royaume-Uni, le total du produit brut ainsi réduit donne les résultats suivants :

[blocks in formation]

Il y a dans le Royaume-Uni, ne l'oublions pas, deux parties qui, pour des motifs différents, offrent des résultats bien inférieurs à ceux de l'Angleterre proprement dite; l'Écosse, à cause de la stérilité irrémédiable de la plus grande partie de son sol; l'Irlande, à cause des circonstances politiques et sociales toutes particution humaine; l'autre tiers est consommé par les animaux. Je n'ai porté aussi pour la consommation humaine que le sixième environ de la production de l'avoine, qui doit approcher de 90 millions d'hectolitres, et la moitié de celle des pommes de terre. Le Cultivateur écossais ne trouve pas ces proportions complètement exactes; il estime à beaucoup moins du tiers la consommation de l'orge par les animaux, et au quart au lieu du sixième celle de l'avoine par les hommes. Ces observations peuvent être fondées pour l'Écosse, mais non pour l'Angleterre.

lières. Je parlerai plus loin avec quelque détail de ces deux fractions; pour le moment, examinons à part l'Angleterre, sans y comprendre le pays de Galles, qui ne vaut guère mieux que l'Écosse, comme sol, et qui a aussi des rapports avec l'Irlande, quant à son histoire. L'Angleterre produit à elle seule les cinq huitièmes de ces 5 milliards, soit 2 milliards 600 millions, divisés ainsi qu'il suit :

[blocks in formation]

Froment (38 millions d'hect.).

Orge (15 millions d'hect. pour l'homme)..

l'omme de terre (65 millions d'hect. ibid.)....

Foin et avoine pour les chevaux non agricoles.
Lin, chanvre, légumes, fruits.....
Bois......

Total des produits végétaux.....

600 millions.

120

130

300

85

40

1,275 millions.

Les réflexions naissent en foule à l'aspect de ces lableaux. Pendant que la France, prise dans son ensemble, produit 100 francs par hectare, l'Angleterre proprement dite en produit 200. Les seuls produits animaux d'une ferme anglaise sont égaux au moins à la totalité des produits d'une ferme française de surface égale; tous les végétaux sont en sus. A ne considérer que les trois grandes espèces d'animaux domestiques, les moutons, le gros bétail et les porcs, sans tenir compte des volailles, les Anglais en tirent quatre fois plus que

nous en viande, lait, et laine. Parmi les végétaux, quand le sol français ne rapporte pas tout à fait 1 hectolitre et demi de froment par hectare, le sol anglais en rapporte 3, et il donne en outre cinq fois plus de pommes de terre pour la nourriture humaine. Il ne produit ni seigle, ni maïs, ni sarrazin, mais il prend abondamment sa revanche sur l'orge et l'avoine, et il en a besoin, car, moins heureux que nous, il doit demander à un de ces grains la boisson nationale. «<< Nous sommes forcés, dit Arthur Young, d'avoir recours à nos meilleures terres pour notre bière; le climat des Français leur donne une grande supériorité sous ce rapport, en leur permettant d'utiliser pour la vigne les sols les plus stériles. »

Enfin les produits animaux deviennent sensiblement supérieurs aux produits végétaux; nous retrouverons au moins le même rapport dans le pays de Galles et en Écosse; l'Irlande seule offre, comme la France, la proportion contraire.

Cette supériorité de produits se démontre d'ailleurs par deux faits qui servent à contrôler les chiffres donnés par la statistique: le premier est l'état de la population, le second le prix vénal des terres.

Lors du dénombrement de 1841, la population totale du Royaume-Uni était de 27 millions d'âmes, et celle de la France de 34. Ainsi, quand le RoyaumeUni nourrissait presque 1 tête humaine par hectare, la France en nourrissait 1 seulement par hectare et demi : en supposant la consommation égale des deux parts, ce qui doit être exact dans l'ensemble, car si la population anglaise consomme plus que la population française, la population irlandaise consomme moins, nous retrouvons à peu près le même résultat que par l'examen. comparatif des deux agricultures; la balance penche

même un peu du côté du Royaume-Uni, l'importation des denrées alimentaires rétablit l'équilibre.

Si nous divisons les deux populations par régions, la comparaison nous donnera des résultats de détails qui confirmeront ceux d'ensemble.

L'Angleterre proprement dite, même en y comprenant le pays de Galles, nourrissait, en 1841, 4 têtes humaines sur 3 hectares, ce qui se retrouve en France dans les départements où la production est aussi forte; l'Écosse, prise dans son ensemble, n'avait qu'une tête sur trois hectares, et notre région du centre et de l'est une sur 2; l'Irlande comptait une tête par hectare, et notre région du sud-ouest une sur 2, ce qui indiquerait pour l'Irlande une production double; mais la malheureuse population irlandaise étant moins bien nourrie que la nôtre, le rapport se rétablit.

Quant à la valeur moyenne des terres, qui se proportionne en général à la quantité des produits obtenus, elle était, pour les terrains de l'Angleterre proprement dite, de 1,000 francs l'acre ou 2,500 francs l'hectare, et pour le reste du Royaume-Uni, non compris la haute Écosse, de la moitié environ de ce chiffre, ou 1250 francs. La haute, avec ses terres incultes, valait tout au plus 125 francs l'hectare. En retranchant 20 pour cent de ces prix, on arrive à une moyenne de 2,000 francs pour l'Angleterre, de 100 francs pour la haute Écosse, et de 1,000 francs pour le reste du RoyaumeUni.

En France, les terrains cultivés de la moitié septentrionale doivent valoir en moyenne 1,500 francs l'hectare, et ceux de la moitié méridionale 1,000 francs. En évaluant les 8 millions d'hectares de terres incultes à 125 francs et les 8 millions de terrains forestiers à 600 francs l'hectare, on trouve pour moyenne générale 1,000 francs.

« PreviousContinue »