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Approche, augufte fœur du rival d'Alexandre;
Frédéric, de ma lyre eft le digne héritier :

J'y joins un nouveau don que lui feul peut prétendre:
Déjà fon front par Mars fut cinq fois couronné;
Qu'aujourd'hui par ta main il foit encore orné
Du laurier qu'Apollon fit naître de ma cendre.

CXLI.

Sur le départ du roi de Pruffe, de Potsdam pour

Berlin.

Je vais donc vous quitter, ô champêtre féjour,
Retraite du vrai fage et temple du vrai juste!
J'y voyais Horace et Sallufte,

J'étais auprès d'un roi, mais fans être à la cour.
Il va donc étaler des pompes qu'il dédaigne :
D'un peuple qui l'attend contenter les défirs.
Il va donc s'ennuyer pour donner des plaifirs.
Que j'aimais l'homme en lui! pourquoi faut-il qu'il règne?

CXLII.

A MADAME

LA MARQUISE DE BELESTAT,

Qui fe plaignait qu'on lui avait pris deux contrats au jeu, et qui choifit l'auteur pour arbitre; à Plombières.

1754.

Vous vous plaignez à tort, on ne vous a rien pris :
C'est vous qui raviffez des biens d'un plus haut prix ;
Qui fur nos libertés ne ceffez d'entreprendre.
Votre cœur attaqué fait trop bien fe défendre ;
Et la mère des jeux, des grâces et des ris
Vous condamne à le laiffer prendre.

CXLIII.

A MADEMOISELLE DE LA GALAISIERE,

Jouant le rôle de Lucinde, dans l'Oracle.

J'ALLAIS pour vous au Dieu du Pinde,
Et j'en implorais la faveur ;

Il me dit: Pour chanter Lucinde,

11 faut un Dieu plus féducteur.

Contes, Satires, &c.

LI

Je cherchai loin de l'Hypocrène
Ce Dieu fi puiffant et si doux ;
Bientôt je le trouvai fans peine,
Car il était à vos genoux.
Il me dit: Garde-toi de croire
Que de tes vers elle ait befoin.;
De la former j'ai pris le foin,

Je prendrai celui de fa gloire.

CXLIV.

A L'IMPERATRICE DE

RUSSIE,

ELISABETH PETROWNA,

En lui envoyant un exemplaire de la Henriade, qu'elle avait demandé à l'auteur.

SEMIRAMIS du Nord, augufte impératrice,

Et digne fille de Ninus,

Le Ciel me deftinait à peindre les vertus,
Et je dois rendre grâce à fa bonté propice:
Il permet que je vive en ces temps glorieux
Qui t'ont vu commencer ta carrière immortelle.
Au trône de Ruffie il plaça mon modèle;

C'est là que j'élève mes yeux.

CXLV.

A M. LE MARECHAL DE RICHELIEU,

Après la prife du Port-Mahon.

RIVAL du conquérant de l'Inde,
Tu bois, tu plais et tu combats;

Le pampre, le laurier, le myrte fuit tes pas.

Tu prends Chypre et Mahon, mais nous perdons le Pinde.
En vain l'Anglais moqueur lançait de toutes parts
Sur un vaiffeau mufqué les feux et les brocards:
Chez nous l'ambre est ami de la fatale poudre,
Tu femais les bons mots, les fouris et la foudre.
L'ironie à tes pieds tombe avec leurs remparts;
Leurs chanfons t'infultaient; leurs défaites te vantent.
Mais nos rimeurs jaloux profanent tes lauriers.
Veux-tu rendre l'honneur à tes fuccès guerriers?
Viens fiffler tous ceux qui les chantent.

CXLVI.

A MADAME DU BOCAGE,

EN vain Milton, dont vous fuivez les traces,
Peint l'âge d'or comme un fonge effacé ;
Dans vos écrits embellis par les grâces,
On croit revoir un temps trop tôt paffé.

Vivre avec vous dans le temple des mufes,
Lire vos vers, et les voir applaudis,
Malgré l'enfer, le ferpent et fes rufes :
Charmante Eglé, voilà le paradis.

CXLVI I.

EPIGRAMM E

Imitée de l'Anthologie.

L'AUTRE jour, au fond d'un vallon,
Un ferpent piqua Jean Fréron ;
Que penfez-vous qu'il arriva ?
Ce fut le ferpent qui creva.

CXLVIII.

SUR OVIDE, CATULLE ET TIBULLE.

CELUI qui fut puni de fa coquetterie,

Ce maître en l'art d'aimer qui rien ne nous apprit, Prodiguait à Corine avec galanterie,

Beaucoup d'amour et trop d'efprit.

Tibulle auprès de fa Délie,

Par des vers enchanteurs exaltait fes plaifirs;
Et Catulle vantait, plus vif en fes défirs,
Dans fes vers libertins les baifers de Lesbie.

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