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Fleur de fanté, doux loifir, jours fereins;

Vous avez tout, c'eft-là votre partage.
Moi, je parais un être infortuné,

De la nature enfant abandonné,

Et n'avoir rien, femble mon apanage;

Mais vous m'aimez, les Dieux m'ont tout donné

XLII.

Vers de M. de Formont à M. de Voltaire.

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J'eus beau vouloir vous contrefaire,

De lui je n'ai rien obtenu.

Je vois trop que c'eft temps perdu,
Et qu'il ne répond qu'à Voltaire.

Réponse.

ON m'a conté (l'on m'a menti peut-être)
Qu'Apelle un jour vint entre cinq et fix,
Confabuler chez fon ami Zeuxis;

Mais ne trouvant perfonne en fon taudis,

Fit, fans billet, fa vifite connaître.

Sur un tableau par Zeuxis commencé,
Un fimple trait fut hardiment tracé.
Zeuxis revint: puis en voyant paraître
Ce trait léger et pourtant achevé,
Il reconnut fon maître et fon modèle.
Ne fuis Zeuxis, mais chez moi j'ai trouvé
Des traits formés de la main d'un Apelle.

XLIII.

DEVISE POUR MADAME DU CHATELET.

Du repos, des riens, de l'étude,

Peu de livres, point d'ennuyeux,
Un ami dans la folitude;

Voilà mon fort; il est heureux.

XLIV.

COUPLETS

Chantés par Polichinelle dans une fête à Sceaux.

POLICHINELLE de grand cœur,
Prince (*), vous remercie :
En me fefant beaucoup d'honneur,

Vous faites mon envie.

(*) M. le comte de Clermont.

Vous poffédez tous les talens,

Je n'ai qu'un caractère.
J'amufe pour quelques momens,
Vous favez toujours plaire.

On fait que vous faites mouvoir
De plus belles machines :
Vous fites fentir leur pouvoir
A Bruxelle, à Malines.
Les Anglais fe virent traiter
En vrais polichinelles ;

Et vous avez de quoi dompter

Les

remparts et les belles.

XLV.

A M. DE LA FAYE. (9)

PARDON, beaux vers, la Faye et Polymnie :
Las! je deviens profateur ennuyeux.

Non, ce n'était qu'en langage des Dieux
Qu'il eût fallu parler de l'harmonie.
Donnez-le-moi cet aimable génie,

Cet art charmant de favoir enfermer

Un fens précis dans des rimes heureuses,

(9) Ces vers paraiffent avoir été faits à l'occafion de la belle ode de M. de la Faye en faveur de la poëfie, contre le fentiment de la Motte-Houdart que M. de Voltaire n'avait combattu qu'en profe dans les lettres qui fe trouvent à la fuite de la tragédie d'Oedipe.

Joindre aux raisons, des grâces lumineuses;
En inftruifant, favoir fe faire aimer;
A la difpute, autrefois fi cauftique,
Oter fon air pédantesque et jaloux ;
Etre à la fois jufte, fincère et doux,
Ami, rival, et poëte et critique :

A ce grand art vainement je m'applique,
Heureux la Faye, il n'est donné qu'à vous.

XLVI.

SUR L'ESTAMPE

Du R. P. Girard et de la Cadière.

CETTE belle voit Dieu; Girard voit cette belle : Ah! Girard eft plus heureux qu'elle !

XLVII.

EPIGRAM ME.

On dit que notre ami Coypel
Imite Horace et Raphaël.

A les furpaffer il s'efforce;

Et nous n'avons point aujourd'hui
De rimeur peignant de fa force,
Ni peintre rimant comme lui.

XLVIII.

IMPROMPTU

Ecrit chez madame du Deffant.

1732.

Qui vous voit et qui vous entend
Perd bientôt fa philofophie;

Et tout fage avec du Deffant
Voudrait en fou paffer fa vie.

XLIX.

A MADAME DU CHATELET,

En lui envoyant l'Hiftoire de Charles XII.

LE Voici ce héros fi fameux tour à tour

Par fa défaite et fa victoire.

S'il eût pu vous entendre et vous voir à fa cour,
Il n'aurait jamais joint, et vous pouvez m'en croire,
A toutes les vertus qui l'ont comblé de gloire,

Le défaut d'ignorer l'amour.

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