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Tous mes ambaffadeurs, irrités et confus,
Trop fouvent de la reine ont fubi les refus.
Voifin de fes Etats faibles dans leur naissance,
Je croyais que Didon, redoutant ma vengeance,
Se réfoudrait fans peine à l'hymen glorieux
D'un monarque puiffant, fils du maître des Dieux.
Je contiens cependant la fureur qui m'anime;
Et déguifant encor mon dépit légitime,

Pour la dernière fois, en proie à fes hauteurs,
Je viens fous le faux nom de mes ambassadeurs,
Au milieu de la cour d'une reine étrangère,
D'un refus obftiné pénétrer le mystère;

Que fais-je.... n'écouter qu'un tranfport amoureux.

Des ambaffadeurs ne fubiffent point des refus; on effuie, on reçoit des refus.

Si tous fes ambaffadeurs irrités et confus ont fubi des refus, comment ce Farbe pouvait-il croire que Didon se foumettrait fans peine à cet hymen glorieux? Farbe d'ailleurs a-t-il envoyé tous fes ambassadeurs enfemble, ou l'un après l'autre ?

Il contient cependant la fureur qui l'anime, et il déguise encore fon dépit légitime. S'il déguise ce dépit légitime, et s'il eft fi furieux, il ne croit donc pas que Didon l'époufera fans peine. Epoufer quelqu'un fans peine, et déguiser fon dépit légitime, ne font pas des expreffions bien nobles, bien tragiques, bien élégantes.

Il vient fous le faux nom de fes ambaffadeurs, être en proie à des hauteurs! Comment vient-on fous le faux nom de fes ambaffadeurs ? on peut venir fous le nom d'un autre, mais on ne vient point fous le nom de plufieurs perfonnes. De plus, fi on vient fous le nom de quelqu'un, on vient à la vérité fous un faux nom, puifqu'on prend un nom qui n'eft pas le fien, mais on ne prend pas le faux nom d'un ambaffadeur quand on prend le véritable nom de cet ambaffadeur même.

Il veut pénétrer le mystère d'un refus obftiné. Qu'est-ce que le mystère d'un refus fi net et déclaré avec tant de hauteur? Il peut y avoir du myftère dans des délais, dans des réponses équivoques, dans des promeffes mal tenues; mais quand on a déclaré avec des hauteurs à tous vos ambassadeurs qu'on ne veut point de vous, il n'y a certainement là aucun mystère.

Que fais-je ?.. n'écouter qu'un transport amoureux. Que fait-il? il n'écoutera qu'un transport, il fera terrible dans le tête à tête.

Le grand malheur de tant d'auteurs eft de n'employer prefque jamais le mot propre; ils font contens pourvu qu'ils riment, mais les connaiffeurs ne font pas contens.

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Zoraïde était une tragédie africaine du même auteur. Les comédiens le prièrent de leur faire une feconde lecture pour y corriger quelque chofe: il leur écrivit cette lettre.

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Je fuis fort furpris, Meffieurs, que vous exigiez une feconde lecture d'une tragédie telle que Zoraïde. Si vous ne vous connaiffez pas en mérite, je me connais en pro. cédés, et je me souviendrai affez long-temps des vôtres, ,, pour ne plus m'occuper d'un théâtre où l'on diftingue fi peu les perfonnes et les talens. Je fuis, Meffieurs, ,, autant que vous méritez que je le fois, votre, &c.

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"

Quinaut Denèle était dans ce temps-là une affez bonne comédienne, pour qui principalement Zoraïde avait été faite. Les noms qui fuivent font les noms des comédiens de ce temps-là.

(4)

Greffet doué du double privilége.

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Greffet, auteur du petit poëme de Vert-Vert, d'autres ouvrages dans ce goût, et de quelques comédies. Il y a des vers très-heureux dans tout ce qu'il a fait. Il était jéfuite quand il fit imprimer fon Vert-Vert. Le contrafte de fon état et des termes de b. . . . . et f. . . . . qu'on voyait dans ce petit poëme, fit un très-grand éclat dans le monde, et donna à l'auteur une grande réputation. Ce poëme n'était fondé à la vérité que fur des plaifanteries de couvent, mais il promettait beaucoup; l'auteur fut obligé de fortir des jéfuites. Il donna la comédie du Méchant, pièce un peu froide, mais dans laquelle il y a des fcènes extrêmement bien écrites. Revenu depuis à la dévotion, il fit imprimer une lettre dans laquelle il avertiffait le public qu'il ne donnerait plus de comédies, de peur de fe dainner. 11 pouvait ceffer de travailler pour le théâtre fans le dire. Si tous ceux qui ne font point de comédies en avertissaient tout le monde, il y aurait trop d'avertiffemens imprimés.

Cet avis au public fut plus fifflé que ne l'aurait été une pièce nouvelle; tant le public eft malin.

(i) L'abbé Trublet, auteur de quatre tomes d'effais de littérature. Ce font de ces livres inutiles, où l'on ramaffe de prétendus bons mots qu'on a entendu dire autrefois, des fentences rebattues, des pensées d'autrui délayées dans de longues phrafes, de ces livres enfin dont on pourrait faire douze temes avec le feul fecours du Poliante.

(k)

De ces énergumènes.

Il y avait en effet alors auprès de l'hôtel de la comédie italienne, une maifon où s'affemblaient tous les convulfionnaires, et où ils fefaient des miracles. Ils étaient protégés par un président au parlement, nommé du Bois, après l'avoir été par un Carré de Mongeron, confeiller au même parlement. Cette fecte de convulfionnaires, celle des moraves, des ménoniftes, des piétiftes, font voir comment certaines religions peuvent aifément s'établir dans la populace, et gagner enfuite les claffes fupérieures. Il y avait alors plus de fix mille convulfionnaires à Paris. Plufieurs d'entre eux fefaient des chofes très-extraordinaires. On rôtiffait des filles fans que leur peau fût endommagée; on leur donnait des coups de bûches fur l'eftomac fans les bleffer, et cela s'appelait donner des fecours. 11 y eut des boiteux qui marchèrent droit, et des fourds qui entendirent. Tous ces miracles commençaient par un pfaume qu'on récitait en langue vulgaire; on était faifi du SAINT-ESPRIT, on prophétifait; et quiconque dans l'affemblée fe ferait permis de rire, aurait couru rifque d'être lapidé. Ces farces ont duré vingt ans chez les Velches.

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C'est Abraham Chaumeix, vinaigrier et théologien, dont on a parlé ailleurs.

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(m) Marion de Lorme, courtifane du temps du cardinal de Richelieu, et qui fit une affez grande fortune avec ce miniftre qui était fort généreux..

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La mode était alors de fe promener en carroffe ou à pied fur les boulevarts de Paris, que M. Outrequin avait

foin de faire arrofer tous les jours pendant l'été. Les jeunes gens fe piquaient d'y faire paraître leurs maîtreffes dans les voitures les plus brillantes. On y voyait des filles de l'opéra couvertes de diamans; elles renouaient leurs cheveux avec des peignes, où il y avait autant de diamans que de dents. Les boulevarts étaient bordés de cafés, de boutiques de marionnettes, de joueurs de gobelets, de danfeurs de corde, et de tout ce qui peut amufer la jeuneffe.

(o) Le portier des Chartreux eft un livre qui n'eft pas de la morale la plus auftère. On y trouve un portrait de l'abbé Desfontaines, plus hardi que tous ceux qu'on lit dans Pétrone. Cet ouvrage eft de l'auteur de la petite comédie intitulée le B. L'auteur était d'ailleurs auffi favant dans l'antiquité que dans l'hiftoire des mœurs modernes ; et il a compofé des difcours férieux pour des perfonnages très-graves, qui ne favaient pas les faire eux-mêmes.

.....

LA

QU'AS-TU,

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U'AS-TU, petit bourgeois d'une petite ville; Quel accident étrange, en allumant ta bile,

A fur ton large front répandu la rougeur?

D'où vient que tes gros yeux petillent de fureur?
Réponds donc.-L'univers doit venger mes injures; (a)
L'univers me contemple, et les races futures
Contre mes ennemis dépoferont pour moi.

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L'univers, mon ami, ne pense point à toi, L'avenir encor moins: conduis bien ton ménage, Divertis-toi, bois, dors, fois tranquille, fois fage. De quel nuage épais ton crâne eft offufqué !

Ah! fait
Jai

un difcours, et l'on s'en eft moqué! Des plaifans de Paris j'ai fenti la malice;

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Je vais me plaindre au roi qui me rendra justice;
Sans doute il punira ces ris audacieux.

тэй

Va, le roi n'a point lu ton difcours ennuyeux. Il a trop peu de temps, et trop de foins à prendre, Son peuple à foulager, fes amis à défendre,"

19

n'u

La guerre à foutenir : en un mot les bourgeois

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(+) Un provincial, dans un mémoire, a imprimé ces mots: Il faut que tout l'univers fache que leurs majeftės fe font, occupées de mon difcours. Le roi l'a voulu voir; toute la cour l'a voulu voir. Il dit dans un autre endroit, que fa naissance eft encore au-deffus de fond humilité chrétienne dans les paroles difcours. Un père de la doctrine chrétienne a trouve de ce monheur; jet pour le corriger, il a mis en lumière ces vers chrétiens, applicables à tous ceux qui ont plus de vanité qu'il ne faut. ZIZIO À

Contes, Satires, &c.

P

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