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Par le fatras d'un éloge burlesque;

Et, sans s'armer d'un courroux pédantesque,
Sait, ménageant un trop faible cerveau
De la raison gouverner le flambeau;
Des passions il excuse l'ivresse ;

Et pardonnant ce qui n'est que faiblesse,
Au vice seul, que sans cesse il poursuit,
Montre avec soin la lumière qui fuit,
Tel un roi juste, ennemi des entraves
Où le tyran fait gémir ses esclaves,
Veut seulement ses sujets vertueux,
Sans oublier qu'il est homme comme eux.
A ses projets ses peuples applaudissent;
D'éloges vrais tous les lieux retentissent;
On le chérit, et son aimable aspect

Dans tous les cœurs joint l'amour au respect.
Tel un ami, compatissant et tendre,
Sait pardonner plus souvent que reprendre;
Toujours heureux, il jouit à son tour
Des droits charmans d'un mutuel amour.

***

LORSQUE dans le malheur un ami nous console,
Tout paraît s'embellir, tout flatte notre espoir;
A sa voix qui conseille, et sait tout émouvoir,
L'espérance renaît, et le chagrin s'envole.

CARDONNE-BASSUEL.

DEUX vrais amis vivaient au Monomotapa;
L'un ne possédait rien qui n'appartînt à l'autre ;
Les amis de ce pays-là

Valent bien, dit-on, ceux du nôtre.

Une nuit que chacun s'occupait au sommeil,
Et mettait à profit l'absence du soleil,
Un de nos deux amis sort du lit en alarme;
Il court chez son intime, éveille les valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L'ami couché s'étonne; il prend sa bourse, il s'arme,
Vient trouver l'autre, et dit: Il vous arrive peu
De courir quand on dort; vous me paraissiez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme:
N'auriez-vous point perdu tout votre argent au jeu?
En voici. S'il vous est venu quelque querelle,
J'ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul? Une esclave assez belle
Etait à mes côtés; voulez-vous qu'on l'appelle?
Non, dit l'ami; ce n'est ni l'un ni l'autre point:
Je vous rends grâce de ce zèle.

Vous m'êtes en dormant un peu triste apparu;
J'ai craint qu'il ne fût vrai; je suis vite accouru.
Ce maudit songe en est la cause.

QU'UN ami véritable est une douce chose!
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur :
Il vous épargne la pudeur

De les lui découvrir vous-même.

Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s'agit de ce qu'il aime.

LA FONTAINE.

EN trouvant un ami vertueux et fidèle,
Crois de la main de Dieu recevoir un trésor;
Crois du siècle de fer passer au siècle d'or;
Crois voir du feu céleste une vive étincelle.

D'ANDILLY.

(Voyez au Tome V, l'Elégie de La Fontaine à Fouquet; au Tome VIII, l'Epître de Saurin à Collé.),

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Et dans les termes les plus doux:
Comptez, dit-il plein de tendresse,
Qu'au besoin ma bourse est à vous.
Le besoin naît, en assurance
Vous demandez son assistance,
Et lui peignez votre embarras;:
De secours, vous n'en aurez pas :
Avec douleur il vous refuse;

Il se dit le plus malheureux,

Et vous apprend, par son excuse,
Que promettre et tenir sont deux (1).

DESMAHIS.

(1) Il est doux de voir ses amis par goût et par estime: il est

QUE je hais entre amis ces protestations,
Cette impétueuse caresse "

Ces bruyans transports de tendresse,
Ces élans, ces baisers et ces contorsions!
Lorsqu'un événement funeste
Livre notre âme à la douleur,
Pour nous marquer sa vive ardeur,
Le bon ami ne fait qu'un geste,
Qui part de la bourse et du cœur.

PANARD.

MÉPRISEZ l'amitié qui n'a, lâche ou timide,
Pour les amis absens qu'un silence perfide,
Qui n'ose en leur faveur s'expliquer à demi,
Et laisse sans réplique un discours ennemi.

pénible de les cultiver par intérêt; c'est solliciter.
LA BRUYÈRE.

Les vrais amis, disait Démétrius de Phalère, attendent qu'on les appelle dans la prospérité. Dans l'adversité, ils se présentent d'eux-mêmes.

Un véritable ami n'attend pas qu'on le prie.

P. CORNEILLE (Othon.)

Comment! vous attendez qu'en toute humilité
Votre ami fasse, aux pieds de votre vanité,
Un aveu qui lui coûte et qui le mortifie!

Vos secours sont bien chers, s'il faut qu'on les mendie.
De quel il peut-on voir la main dont on les tient?

On n'oblige vraiment que celui qu'on prévient.

LA CHAUSSÉE (l'Homme de fortune.)

N'appelez point amis ceux qui, quand on déchire
Un ami malheureux, sont les premiers à dire :
C'est sa faute, il a tort!... Est-ce à vous d'accuser
Celui que l'amitié doit tâcher d'excuser?...
Ne dites point: Jamais il n'a voulu me croire.
Ainsi parle un ami qui follement fait gloire
D'avoir prévu le mal, d'en avoir averti,

Et qui ne rougit pas de l'indigne parti
D'achever par des mots, qu'il fait tout bas entendre,
De décrier celui qu'il aurait dû défendre.
Moins cruels sont les coups que porte un ennemi:
Par là le médisant s'autorise, affermi,

Et détruit d'un seul mot les doutes qui surviennent.
Peut-on douter d'un mal dont les amis conviennent?
L'abbé DE VILLIERS.

LES faux amis s'attachent aux richesses, de même que le feu aux matières combustibles, jusqu'à ce qu'il les ait consumées.

LA BRUYÈRE.

HABILES à prévoir de loin une infortune,
Ils ne paraissent plus dans les temps orageux.
Le calme revient-il, on peut compter sur eux.
LA CHAUSSÉE.

Ainsi que les oiseaux, au retour des frimas,
Délaissent à l'envi les coteaux et les plaines,

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