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sentement. En dehors de cela, le gouvernement central n'a aucun autre représentant dans la commune que sa police.

L'arrondissement n'a qu'une importance secondaire dans l'organisation administrative, et cela uniquement sous le rapport policier.

Le département est confié à un préfet nommé par le gouvernement et qui est assisté par une institution autonome: le conseil départemental. Ce dernier correspond au conseil général en France. Le conseil départemental est élu par la population du département et joue le rôle du conseil communal dans la commune. Lui seul est compétent pour tout ce qui a un caractère local dans le département. Il choisit parmi ses membres une commission permanente correspondant au maire de la commune, chargée de l'exécution des décisions prises aux sessions périodiques. Le préfet exerce un contrôle sur l'activité des institutions autonomes et représente les intérêts généraux du gouvernement central.

Comme on le voit, la Bulgariea presque copié le système administratif de la France, qu'elle a un peu modifié dans un sens plus favorable à l'autonomie communale. L'historien Ireux constate dans son Histoire des Bulgares que ceux-ci se sont distingés, dès les premières années de leur arrivée dans les Balkans par leur excellent esprit organisateur. L'histoire de la Bulgarie moderne confirme l'opinion du savant historien. En très peu d'années, les Bulgares ont organisé le pays, sous tous les rapports, d'une manière presque parfaite. Toutes les institutions sont au complet; leur indépendance est justement tempérée par le contrôle indispensable et utile du gouvernement central. La machine de l'État est montée admirablement. Quel dommage seulement que l'art de gouverner soit plus difficile que celui d'organiser!

(4 continuer.)

NOTICE.

LA JURIDICTION CONSULAIRE. QUELQUES NOTES.

Au premier rang des instruments dont se sert l'État moderne pour établir son droit de domination, figurent les cours de justice. Sans doute, le service militaire personnel brise les distinctions de classes et détruit ce qui survit des clans et des tribus; l'impôt applique la notion égalitaire; plus forte et plus fertile en résultats est l'action incessante des tribunaux statuant au criminel et au civil, punissant la transgression des lois, tranchant les différends des citoyens, faisant prévaloir en tout la règle de droit.

Il y a un vif intérêt dans l'histoire des cours de justice qui ont été créées sur le sol européen à partir du xir et du XIe siècle de notre ère. Au fur et à mesure qu'il acquérait des territoires, le gouvernement central, dirigé par des princes ou confié à des assemblées, établissait des tribunaux ou, transformant les institutions judiciaires existantes, il les faisait servir à sa politique. Fréquemment, le but immédiat était blâmable : il s'agissait de réduire à l'obéissance les races vaincues; mais le programme n'était pas rien qu'utilitaire; des vues élevées l'inspiraient, parmi lesquelles était la réalisation de l'unité nationale.

Il fallait davantage que la création des cours de justice et que leur ténacité à accomplir leur tâche. Des principes généraux prévalurent dans le droit lui-même; ils tendirent principalement à réserver le droit de juridiction aux cours de justice nationales et à contester toute raison. d'être aux institutions formées sur le territoire sans l'autorisation et sans la coopération de la puissance souveraine. A la rigueur, l'État tolérait l'application d'un droit étranger, mais c'était à la condition. que ses tribunaux fussent chargés de prononcer la sentence. En d'autres termes, la juridiction de l'État, c'est-à-dire le pouvoir de soumettre à ses tribunaux des personnes et des choses, s'exerçait sur toute l'étendue du territoire; elle s'y exerçait exclusivement;

d'ailleurs, elle s'arrêtait aux frontières: l'État ne faisait pas appliquer ses lois sur le territoire d'un autre État par ses propres juges.

En tout cela, une conséquence actuelle de ces principes nous intéresse surtout. A l'intérieur de ses frontières, le droit de juridiction de l'État est exclusif: celui-ci n'admet l'exercice de la juridiction d'aucun autre État. Au point de vue géographique, l'État moderne s'est attaché à faire supprimer toutes les enclaves; au point de vue juridique, il a travaillé de toutes ses forces à faire disparaître les exceptions nombreuses qui étaient faites à son privilège d'appliquer les règles de droit. « De l'idée et de la nature de l'État, dit un auteur, ressort pour lui le droit de considérer la partie de la surface terrestre habitée par ses sujets comme le domaine exclusif de son pouvoir; il exige que ce droit soit respecté par les autres États et par tout individu se trouvant sur son territoire. L'État repousse absolument toute action du dehors et règne positivement dans l'intérieur de ses limites. On a cherché à exprimer ces principes par la parémie : Quidquid est in territorio est de territorio. Le droit territorial, jus territoriale, signifie que l'État règne souverainement sur toute l'étendue de son territoire et que, partant, ses sujets sont soumis exclusivement à l'exercice de son pouvoir suprême (1). D

II

Au civil, des systèmes différents s'imposèrent. Régime des lois personnelles, règne du droit territorial, application des lois personnelles en certaines matières, telles furent les grandes manifestations; mais la tendance ne cessa d'être la même : l'exclusion de toute autorité étrangère dès qu'il s'agissait de l'exercice de la juridiction. Au criminel, les écoles invoquèrent pour justifier le droit de punir des motifs multiples : vindicte publique, idée de contrat social, système utilitaire, légitime défense de la communauté politique, préservation et réparation, idée de justice. En fait, l'État moderne s'est emparé de ce droit; il a enlevé le droit pénal au domaine du droit privé, il l'a fait rentrer dans le droit politique. Il n'a pas distingué entre nationaux et étrangers; il a châtié l'auteur de toute infraction commise sur son territoire. Il réprime même les actes accomplis hors de son territoire; toutefois, il le fait au moyen des tribunaux qu'il a établis sur son propre territoire; il ne substitue

(1) A. DE HEYKING, L'exterritorialité, 1889, p. 1.

pas ses institutions judiciaires aux institutions judiciaires de l'étranger; tout au plus, dans la théorie la plus récente, applique-t-il la loi pénale étrangère si elle est plus douce que la loi nationale.

III

A l'exercice de la juridiction territoriale a existé et existe encore une exception; il s'agit de la juridiction des consuls. Autrefois l'exception se présentait sur le sol du continent européen aussi bien que dans une partie de l'Asie et de l'Afrique; au XIXe siècle, des traités conclus avec des gouvernements asiatiques ont considérablement agrandi la zone d'application; à la fin du XIX siècle, de nombreux territoires sont rentrés sous la règle du régime exclusif de la juridiction territoriale; il nous suffit de montrer les immenses possessions acquises par les États civilisés et de rappeler qu'en 1899 le Japon a reconquis l'exercice intégral de ses droits souverains.

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IV

Diverses théories sont exposées touchant l'origine de l'institution des consuls. Des publicistes rattachent le consul à l'« hôte public », au <proxène, dont une cité grecque faisait choix dans une ville étrangère et qui assistait les marchands et les marins de son influence et de son crédit. Selon d'autres écrivains, il suffit de remonter à l'acquisition de quartiers et de comptoirs que les républiques italiennes firent dans l'Orient latin et où elles établirent les bailes, les vicomtes » investis de l'autorité par la métropole elle-même. D'après la plupart des auteurs, le consulat se rattache à l'organisation de la société médiévale le système des groupes sociaux qui apparaissait dans le travail et dans la vie municipale s'appliquait quand des membres de la communauté allaient s'établir dans les pays lointains. « Par un effet des mêmes idées, écrit René de Maulde-la-Clavière, les étrangers d'une même natio. nalité ont cherché partout à se grouper en corps et à avoir des magistrats chargés de présider à l'administration de leur communauté et d'y rendre intérieurement la justice; ils ont cherché à faire reconnaître par le gouvernement local ces magistrats et à obtenir pour le corps moral tout entier une somme plus ou moins grande de privilèges. Pour consacrer leur union, les étrangers habitent autant que possible une même

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rue, un même quartier, et forment volontiers une ville à part dans la ville (1). Dans le sud de l'Europe, le « consul », le baile », dans le nord, l' alderman», le « maître étaient généralement les représentants non de leur gouvernement, mais de leurs concitoyens.

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La question de la juridiction est d'une grande importance pour le négoce. Déjà, à une époque éloignée, une disposition permet aux marchands d'outre-mer d'être jugés par leurs juges et d'après leur droit. Elle figure dans la Lex antiqua, fragment d'un recueil de lois visigothiques qui est attribué à Reccared I, et date probablement du dernier quart du vr siècle de notre ère. «Quand les marchands d'outre-mer, est-il dit, auront entre eux des procès, que leurs propres magistrats rendent la justice suivant les lois de leur pays, sans qu'il soit permis aux juges de nos tribunaux d'intervenir. »

Des concessions d'avantages matériels et d'autonomie sont faites, dès le 1x et le x° siècle, par les empereurs byzantins aux Varègues de Scandinavie; elles comprennent l'emploi de quais leur appartenant en propre, le droit de faire le commerce et l'autorisation de s'administrer eux-mêmes. Mais Byzance fait payer chèrement ses concessions; confinés dans des emplacements déterminés des villes, les marchands étrangers sont soumis à d'innombrables mesures de police; le chiffre de leurs acquisitions est limité; ils ne peuvent acheter que certaines marchandises.

Plus tard, en vertu soit de concessions, soit de conventions, une situation spéciale est faite, dans les royaumes et dans les principautés de l'Orient latin et dans les sultanats de l'Afrique septentrionale, aux républiques et aux villes d'Italie, de France et d'Espagne (2).

Souvent ceux qui accordent le privilège agissent par contrainte. Au sujet de l'autonomie que les Vénitiens obtinrent dans l'empire byzantin, Pardessus observe que la force l'arracha aux Grecs (3). En Syrie, les républiques italiennes se firent attribuer des quartiers de villes comme récompense de l'appui qu'elles prêtaient aux croisés, assistance telle que sans leur flotte, on ne pouvait s'emparer des ports (*).

(1) R. DE MAULDE-LA-CLAVIÈRE, La diplomatie au temps de Machiavel, t. III, p. 294. (2) E. REY, Les colonies franques de Syrie aux XIIe et XIIIe siècles, p. 43.

(3) J.-M. PARDESSUS, Collection des lois maritimes antérieures au XVe siècle, t. II, Introduction, p. 126.

(4) W. HEYD, Histoire du commerce du Levant au moyen age. Édition française publiée par FURCY RAYNAUD, t I, p. 135.

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