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des Comédies de caractère qui ne cessaient pas d'être des comédies de mœurs, et qui par conséquent étaient des comédies aussi complètes qu'on puisse en imaginer, et réunissant en elles tous les genres d'intérêt. Dans ces ouvrages, Molière plaçait comme au centre un personnage qui était le caractère particulièrement proposé à l'attention du public et sur lequel tombait toute la lumière; et autour de lui il disposait, soit une famille, soit une société, un groupe humain, dont il faisait un tableau de mœurs, une image représentative des travers du temps. C'est ainsi qu'ont été composés le Misanthrope, l'Avare, le Tartufe, les Femmes savantes. Dans chacune de ces pièces, il y a une comédie de caractère et une comédie de mœurs intimement associées. Chacune est comédie de caractère par le personnage principal: Alceste, Harpagon, Tartufe, Philaminte; comédie de mœurs par ce qui l'entoure: salon de Célimène, maison d'Harpagon, maison d'Orgon, maison de Chrysale. La comédie prit ainsi une ampleur qu'elle n'avait jamais eue, en même temps qu'une précision et une particularité extrêmes.

Ce fut là le trait de génie de Molière, ou plutôt le trait de génie de Molière était d'avoir le génie du théâtre en même temps qu'il était un des plus grands observateurs et un des plus adroits moralistes que l'humanité ait connus. Ces choses, le plus souvent séparées, étaient unies en lui absolument, en telle sorte qu'il ne pouvait pas observer un caractère sans le voir du même coup, transformé en personnage, agir et parler sur la scène, et qu'il ne pouvait point, comme on le voit par l'Impromptu de Versailles, faire son métier d'homme de théâtre et de directeur sans observer en même temps et scruter les caractères. C'était un œil toujours ouvert et un cerveau

mettant sans cesse au point de l'optique théâtrale les

données de la réalité.

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toujours absolue, le style le plus approprié au théâtre, entraînante, une extrême impétuosité dans une clarté Avec tout cela, il avait le don du mouvement, la verve

QUITTANCE PORTANT LA SIGNATURE DE MOLIÈRE.

vif, souple, d'un incroyable relief, peut-être un peu trop oratoire dans les grandes comédies en vers, mais le plus souvent si juste et si naturel qu'il est resté absolument vivant après deux siècles et demi et que l'on peut parler la langue de Molière presque sans le moindre air archaïque, ce qui n'est possible avec la langue d'aucun de ses contemporains.

Sans que son caractère fût à la hauteur de son génie, Molière ne laisse pas d'avoir eu le cœur droit et une conception assez élevée de son office de poète comique. On lui a fait des reproches très cruels qui ne sont pas très mérités. Sans doute, il a attaqué beaucoup plus les travers que les vices et les ridicules que les perversités; mais outre que de vrais vices, comme l'hypocrisie et le libertinage méchant, ont été assez rudement poursuivis par lui, il faut bien se souvenir que la comédie a pour objet de faire rire et, par conséquent, de saisir les ridicules dans les caractères. Or le vice n'est pas ridicule. Il ne fait pas rire, il inspire l'effroi et non la gaieté. Il est du ressort de la satire, du sermon, du réquisitoire et non pas de la comédie. Quand la comédie s'attaque au vice, elle altère donc son propre caractère, et au lieu de rester ce qu'elle est, se transforme en satire, et c'est précisément ce qui est arrivé à Molière dans le Tartufe et un peu dans le Don Juan. Reprocher à Molière d'avoir attaqué les travers plutôt que les vices, c'est donc lui reprocher d'avoir été poète comique, d'avoir très bien connu les limites naturelles et nécessaires de son art et de ne les avoir outrepassées que rarement.

Tout compte fait, et sans demander à Molière une austérité qui, s'il l'avait eue, l'eût empêché de faire du théâtre, il faut reconnaître que l'impression générale que laisse son théâtre est saine. Ce qu'il a détesté le plus,

c'est l'hypocrisie sous toutes ses formes; ce qu'il a le plus aimé, c'est le bon sens, la franchise, l'absence d'affectation, le naturel et la bonne nature. Il y a beaucoup de bon dans ces tendances et dans ces antipathies. Molière est le moins romanesque des hommes, et son œuvre la plus contre-romanesque qui soit. L'éloignement du romanesque est une vertu littéraire et peut-être plus qu'une vertu littéraire.

Racine, dont l'œuvre est beaucoup plus romanesque et beaucoup moins saine, est notre plus grand tragique comme Molière est notre plus grand comique. Je donne du moins les dernières nouvelles; car il y a eu alternance en France entre la gloire de Racine et celle de Corneille et, selon les générations, on préfère l'un et l'on se croit obligé pour cela de mépriser l'autre. Actuellement, la faveur appartient à Racine. Il est incontestable qu'il mérite au moins d'être dit l'un des deux plus grands tragiques français et l'un des quatre ou cinq plus grands tragiques de toute la littérature.

Il parut au théâtre quand Corneille commençait à décliner, et ce fut une lumière nouvelle. Sans parler du style, infiniment pur, d'une correction, d'une propriété et d'une aisance sans « facilité » merveilleuses, et sur lequel, chose à noter, il n'y eut aucune contestation, dès les débuts, Racine apportait au théâtre comme le résultat définitif de tout ce travail psychologique dont nous avons parlé plus haut et qui se prolongeait depuis vingt ans. Il est comme un effet dernier de Pascal, de La Rochefoucauld, de Bossuet, et, ne l'oublions pas, de Molière lui-même, dont il a recherché d'abord les conseils et dont il a été en vérité l'élève pendant quelque temps.

Il apportait au théâtre, dès l'âge de vingt-cinq ans, une

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