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XXVII. Il y a une belle fierté, celle qui ne sait pas fléchir sur un noble engagement pris avec le public, ou seulement avec soimême.

XXVIII. En perdant une grande place, voulez-vous ne pas déchoir? rattachez-vous davantage à votre dignité personnelle.

XXIX. Un grand, qui a l'âme haute, ou seulement une habile politique, stipule, avant tout, pour ses amis et serviteurs. C'est ce que fit le grand Condé, chez les Espagnols.

Xxx. Les grands doivent en tout de nobles exemples. Le public s'avilit lui-même de sa condescendance à leurs indignités.

XXXI. La générosité est le droit domestique des grandes maisons.

xxxii. Sans la générosité, les grands n'ont point de contre-poids à l'arrogance naturelle d'une position supérieure.

XXXIII. Mettez le sordide intérêt dans l'insultante hauteur; et vous aurez des gens qui marcheront entre le mépris et la haine.

XXXIV. Avec la générosité, les grands seraient toujours les guides et les chefs du peuple, parce qu'ils n'en voudraient être que les nobles serviteurs.

xxxv. Tout périt et tout change. La dignité, comme la sagesse, est à savoir porter la mutation des fortunes, à savoir marcher dans des voies nouvelles.

XXXVI. Tout périt et tout change; excepté la justice, sans laquelle rien ne peut s'asseoir; excepté la bonté, qui en est le complément; excepté la magnanimité, qui affermit la victoire, en la faisant pardonner.

XXXVII. Celui-là n'a pas la conduite d'un vainqueur, mais d'un làche tyran, qui écrase les grandeurs, sans respect; et pille les moindres victimes, sans pudeur; qui reprend par cupidité, ce qu'il avait laissé par politique; qui dépouille les orphelins, recueillis par lui, dans l'héritage des rois.

Sur le caractère.

1. La nature a doué certaines âmes de quelque chose de constant dans les idées, dans les sentimens, et d'intrépide dans les résolutions.

En leur faisant tout vouloir fortement, la nature les conduit à des succès ou des revers, toujours pleins.

Tels sont les signes, les droits et les destins du caractère.

11. Il peut se mêler à toutes les passions; et il n'y laisse rien de médiocre.

III. Le monde appartient à ceux qui ont reçu ce don en partage : ils y font toutes les révolutions, en bien et en mal.

IV. Ce sont les circonstances qui l'exercent et le fortifient, en lui fournissant les entreprises qui lui sont propres.

v. Il dépend beaucoup de nous aussi de le cultiver dans notre âme le de nos : genre études, de nos travaux, favorise son essor; les desseins que nous conservons le déterminent; et c'est là l'éducation que les hommes supérieurs ne reçoivent que d'euxmêmes.

VI. La force naissante d'un grand caractère s'annonce, ou par une impétuosité, ou par une opiniâtreté, que l'on ne peut dompter.

VII. Il n'y a qu'un homme qui puisse un jour les diriger; et c'est lui-même.

VIII. Il reste quelque chose de dur et de farouche dans un grand caractère, quand une passion douce n'est pas venue assouplir cette première roideur, qui est un excès, un danger, un écart.

IX. La sagesse de l'homme doit être fondée sur la nature humaine; qu'il laisse donc attendrir son coeur; qu'il y éprouve des combats, des douleurs, des faiblesses; il faut qu'il en triomphe; mais il faut aussi qu'il les ait connues.

x. Il est des vertus, que l'amour seul peut donner aux grands caractères.

XI. Quel triomphe pour la beauté de régner sur ces nobles courages, d'entrer pour quelque chose dans leurs pensées et leurs desseins; et de mettre sa faiblesse sous la protection de tant de fierté, de puissance et de gloire !

XII. Examinez l'histoire des grands hommes; vous verrez que presque tous ont eu un véritable amour pour les lettres.

XIII. Ils sentent qu'ils ont besoin d'éclairer, par de hautes méditations, cette conduite extraordinaire, qu'ils veulent tenir.

XIV. Élevés au-dessus des frivoles amusemens, le génie seul a des droits sur leurs loisirs.

xv. Le génie, en les entretenant de ses hautes pensées, ajoute sans cesse à l'élévation de leurs âmes.

XVI. Tandis que les autres hommes ne font qu'amuser leur imagination par la lecture, ceux-ci y cherchent des alimens pour leur vertu, des modèles pour leurs actions; et voilà, ce me semble, la plus belle gloire pour les lettres.

XVII. La vertu ne transige jamais avec le vice, quand elle est soutenue par un ca

ractère.

XVIII. Ces amis-là n'ont point de caractère, qui, dans la cause d'un homme qu'ils aiment, le conseillent par son danger, lorsqu'il s'agit de son honneur.

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