La gazelle déjà nous a-t-elle oubliés 1? S'écrie, et dit: Ah! si j'étois Apprendre au moins quelle contrée, Notre compagne au pied léger; Car, à l'égard du cœur, il en faut mieux juger 2. Il aperçoit de loin l'imprudente gazelle Prise au piége et se tourmentant. Il retourne avertir les autres à l'instant; Et perdre en vains discours cet utile moment, Il avoit trop de jugement. Le corbeau donc vole et revole. Aux lieux où la gazelle est prise. 1 La gazelle déjà nous a-t-elle oubliés? Vers plein de sentiment. 2 Il en faut mieux juger. Trait charmant. 3 A tire-d'aile. Expression adverbiale: voler aussi rapidement qu'il est possible. Tire-d'aile, substantif masculin: battement d'aile prompt et vigoureux que fait un oiseau quand il vole. ▲ Comme eût fait un maître d'école. (V. suprà, l'Enfant et le Maitre d'école, I, 17, p. 48 et s., et l'Écolier, le Pédant et le Maître d'un jardin, IX, 5, p. 420 et s.) L'autre, dit le corbeau, gardera le logis: Ces mots à peine dits, ils s'en vont secourir Pauvre chevrette de montagne. La voilà comme eux en campagne, Rongemaille (le rat eut à bon droit ce nom) De n'en avoir nulle nouvelle, Aperçoit la tortue, et retient son courroux. Je veux qu'à mon souper celle-ci me défraie. Celle-ci, quittant sa retraite, Contrefait la boiteuse, et vient se présenter. Tout ce qui lui pesoit : si bien que Rongemaille 1 Quand arriveroit-elle? On devine bien qu'il s'agit ici de la tortue; c'est par délicatesse que le corbeau ne la nomme point. 2 Chevrette. Diminutif gracieux. Qu'il délivre encor l'autre sœur, Sur qui s'étoit fondé le souper du chasseur. Pilpay conte qu'ainsi la chose s'est passée. Rongemaille feroit le principal héros, Quoique à vrai dire ici chacun soit nécessaire. Office d'espion, et puis de messager. S'entremet, agit, et travaille. A qui donner le prix? Au cœur, si l'on m'en croit. 1 L'Iliade ou l'Odyssée. Poëmes épiques dans le premier, Homère chante la colère d'Achille; dans le second, il raconte les voyages d'Ulysse. 2 Porte-maison. — Plus haut Rongemaille. Ces deux appellations sont de l'invention du poëte. FABLE XIV. La Forêt et le Bûcheron. Cff. PHÆDRI. Appendix fabular., f. 5. YSOPET, I, f. 1. (V. suprà, le Cerf et la Vigne, V, 15, p. 215 et s.) Un bûcheron venoit de rompre ou d'égarer De lui laisser tout doucement Emporter une unique branche, Afin de faire un autre manche : 1 Il iroit employer ailleurs son gagne-pain; Qu'à dépouiller sa bienfaitrice. De ses principaux ornements. 1 L'homme enfin la prie humblement. Pourquoi cette prière si humble? Pourquoi n'arrachait-il pas une branche? Cela n'est pas motivé. Elle gémit à tous moments; Son propre don fait son supplice. Voilà le train du monde et de ses sectateurs : Qui ne se plaindroit là-dessus? Hélas! j'ai beau crier et me rendre incommode, N'en seront pas moins à la mode. 1 Elle gémit à tous moments. « Les arbres même semblent gémir aux offenses, »dit MONTAIGNE. |