Que ses enfants gloutons, d'un bec toujours ouvert, Que la tête et les pieds, artisans superflus, L'hirondelle, en passant, emporta toile, et tout, Jupin pour chaque état mit deux tables au monde : A la première ; et les petits 1 Aragne. Vieux mot pour araignée, qu'on trouve encore employé dans Ronsard. Le mot araignée, venu du grec Arachné, semble être la souche du mot hargneux, qui désigne un querelleur. On prononce encore dans bien des provinces araigneux. (BARBAZAN, Diss. sur l'origine de la langue francaise, p. 44.) 2 A la première. La mieux servie. 3 Leur reste. Quand il reste quelque chose, dit Geruzez. 4 Rien n'est plus vrai; mais cela ne suit point de l'exemple de l'araignée et de l'hirondelle; car l'araignée, quoique adroite et vigilante, ne laisse pas de mourir de faim. Ne serait-ce point pour déguiser ce défaut de justesse, que La Fontaine n'oppose que les petits à l'adroit, au vigilant et au fort? Si, au lieu des petits, il eût dit le faible, le négligent et le maladroit, on eût senti que les deux dernières de ces qualités ne convenaient point à l'araignée. (MARMONTEL, Éléments de littérature, vo Fable.) FABLE VIII. La Perdrix et les Coqs. Cff. ESOPE, f. 16, 10. Parmi de certains coqs, incivils, peu galants, Une perdrix étoit nourrie. De la part de ces coqs, sa douceur, sa bonté, Mais, sitôt qu'elle eut vu cette troupe enragée 1 Noise. V. suprà, le Chat et le Renard, (IX, 13), p. 439, n. 2. 2 VARIANTE respect, dans toutes les éditions modernes; mais dans les éditions originales, et même dans celle de 1729, le t se trouve retranché ; et on écrit respec pour la rime et par licence poétique. 3 Ce sont leurs mœurs, dit-elle. Rien de si naturel que ce sentiment et la réflexion qui le suit. C'est ici que la résignation à la nécessité est établie avec les adoucissements qui lui conviennent. La soumission de la perdrix est d'un très-bon exemple, et l'on est souvent dans le cas de dire comme elle : Ce sont leurs mœurs. (CHAMFORT.) Ne les accusons point, plaignons plutôt ces gens. N'a pas formé tous les esprits; Il est des naturels de coqs et de perdrix 1. Le maître de ces lieux en ordonne autrement; Nous loge avec des coqs, et nous coupe les ailes : FABLE IX. Le Chien à qui l'on a coupé les oreilles (a). Qu'ai-je fait, pour me voir ainsi 3 Le bel état où me voici! Devant les autres chiens oserai-je paraître ! 4 ▲ Il est des naturels de coqs et de perdrix. Vers devenu proverbe. 2 Tonnelles. Sorte de filets dont on se sert pour prendre les perdrix. 3 Qu'ai-je fait, etc. Tour vif et animé, qui met d'abord le personnage en scène. On en a déjà rencontré plus d'un exemple. 4 VARIANTE: Parêtre. Ed. 1679 et 1729. V. suprà, les Obsèques de la Lionne (VIII, 13, p. 361, n. 5). (a) Les commentateurs n'indiquent aucune source de cette fable. O rois des animaux, ou plutôt leurs tyrans, 1 Ainsi crioit Mouflar 1, jeune dogue; et les gens, Avec cette partie en cent lieux altérée : Le moins qu'on peut laisser de prise aux dents d'au [trui, C'est le mieux. Quand on n'a qu'un endroit à déOn le munit, de peur d'esclandre. [fendre Témoin maître Mouflar armé d'un gorgerin 5, 1 Mouflar. Ce nom est encore emprunté à Rabelais, t. II, ch. XII. - Le Dictionnaire de l'Académie dit: mouflard, arde, celui, celle qui a le visage gros et rebondi. Populaire. 2 Piller. Cff. suprà : Les deux Rats, le Renard et l'OEuf. (h. l. 1, p. 454, n. 1). 3 Chien hargneux a toujours l'oreille déchirée. Proverbe. 4 Le moins qu'on peut, etc. La moralité contenue dans les six derniers vers, ne découle pas de l'exemple de Mouflar. Il fallait, dit Chamfort, ne pas mettre de moralité du tout, ou bien il fallait laisser là Mouflar, et dire que souvent d'un malheur qui nous a causé bien du chagrin, résultent des avantages inappréciables et imprévus. Souvenons-nous désormais de cette réflexion, dans les accidents qui nous peuvent arriver. 5 Gorgerin. D'un collier de fer à mailles. « Gorgerin, dit Nicot dans son Dictionnaire, est la pièce que l'homme de guerre met autour de sa gorge. » Du reste ayant d'oreille autant que sur ma main; FABLE X. Le Berger et le Roi. Cff. Livre des lumières, ou la conduite des roys, p. 152. Contes et fables indiennes de BIDPAï et de LOKMAN, t. II, p. 214 à 225; et t. III, p. 123. Un roi vit un troupeau qui couvroit tous les champs, Laisse là tes moutons, viens conduire des hommes; Voilà notre berger la balance à la main 3. 1 Par ses soins diligents. Ailleurs le poëte dit : La chose alloit à bien par son soin diligent. (V. suprà, la Laitière et le Pot au lait, VII, 8, p. 296, v. 4.) 2 Pasteur de gens. Imité d'Homère, qui appelle ainsi les rois. Le type de cette belle expression se trouve dans l'Écriture. Bossuet s'en est servi dans l'oraison funèbre de la reine d'Angleterre. « Quand pour réveiller les peuples et les pasteurs, il (Dieu) permit à l'esprit de séduction de tromper les âmes hautaines. >> 3 Balance à la main. La balance est le symbole de la justice. |