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pressé de jouir : sans doute qu'une sévère économie auroit fait mettre en réserve des fonds trop légèrement dissipés et qui, dans les momens du revers, auroient fourni aux émigrés une ressource contre la misère et le désespoir.

Je termine ici mes réflexions sur l'émigration et sur ses résultats pendant l'assemblée nationale constituante. Nous verrons à quel sort sont destinés les émigrés sous les législatures suivantes.

Ici finit aussi le récit de ce qui s'est passé de plus remarquable sous le règne de cette première législature d'abord séante à Versailles, puis transférée à Paris. Nous avons vu la série de ses opérations, toutes attentatoires à la religion, au trône, à la morale et au bien du royaume. Je vais tâcher, en suivant la même marche, de développer l'esprit et les causes qui ont accéléré la convocation de la seconde législature, et les ressorts qui l'ont fait mouvoir.

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

SOUS LA SECONDE LÉGISLATURE.

UN nouveau champ d'impiété et de forfaits va s'ouvrir sous les yeux du lecteur : le burin de l'histoire ne trouve point dans les siècles antérieurs d'événemens qui puissent se comparer aux tableaux affligeans qui nous restent à exposer. Une nation constamment attachée à la foi de ses pères, et depuis plus de quinze cents ans se glorifioit de sa religion; une nation célèbre et justement renommée, qui, depuis plus de treize cents ans existoit avec gloire sous le sceptre de ses rois, se métamorphosa tout à coup d'une manière si étrange, que non contente d'avoir avili les ministres du culte catholique et dégradé la majesté du trône, elle franchit avec le délire de la licence toutes les bornes divines et humaines pour saper les fondemens de la catholicité et de la monarchie. Tel est en peu de mots le résultat des opérations qui ont signalé les onze mois qu'a duré la seconde législature. L'assemblée constituante avoit ouvert la barrière de la route qui conduit à tous les crimes: la seconde législature s'y est pré

cipitée sans aucune retenue; elle y a produit une race de scélérats qui semble avoir épuisé dans la convention nationale tous les genres d'impiété, de ces profanations et de ces atrocités qui n'appartiennent qu'à la révolution française.

Comme notre but est de faire connoître l'esprit qui a enfanté, augmenté et prolongé les crimes de la révolution, nous ne nous appesantirons point sur la masse énorme de lois et de décrets qui ont été le fruit des travaux de cette seconde législature; on en trouve la suite fastidieuse dans les archives des communes où ils ont été envoyés. Nous continuerons le même plan que pour l'assemblée constituante nous classerons les événemens dans des cadres séparés sans nous astreindre à l'ordre chronologique. Ce seront autant de tableaux séparés dont la suite, graduée sous différens titres, présentera d'une manière plus circonstanciée et plus frappante, tout ce qui s'est passé de plus remarquable sous cette seconde législature : 10 la formation de cette assemblée; 20 ses persécutions contre les ministres du culte catholique; 3o ses attentats contre la personne du roi et la royauté; 40 l'épuisement des finances employées à la propagation de tous les désordres; 50 sa déclaration de guerre contre les puissances protectrices des émigrés;

60 les suites de cette guerre jusqu'à la convention nationale. On trouvera dans ces tableaux les portraits des personnages qui se sont fait remarquer pendant cette législature par leur haine active contre la religion, le trône et la morale publique.

I.

Formation de la deuxième Législature.

L'ASSEMBLÉE nationale constituante avoit décrété que le pouvoir législatif seroit renouvelé tous les deux ans. Deux ans et demi s'étoient écoulés lorsque cette assemblée, usurpatrice de tous les pouvoirs, ayant à ses ordres toutes les autorités qu'elle avoit constituées, résolut de se dissoudre et de convoquer les assemblées primaires pour la nomination des députés à la seconde législature. Son but étoit rempli; elle avoit changé la face du royaume, dépouillé le clergé, détruit la noblesse. Après avoir ébranlé les bases de la religion et de la royauté, elle avoit facilité les voies aux progrès de l'irréligion, de l'anarchie et de la licence la plus effrénée. Sa démocratie royale lui fit illusion. Comment ne la vit-elle pas posée sur des bases qui devoient infailliblement s'écrouler? Quoi qu'il en soit, le grand mouvement

qu'elle avoit occasionné mit toutes les têtes en effervescence : toutes les matières combustibles étoient alors réunies pour amener les malheureuses explosions dont nous allons donner les tristes détails.

Les jacobins n'avoient encore fait que l'essai de leurs forces. La démocratie royale à laquelle ils souscrivirent n'étoit qu'un voile pour faire arriver insensiblement au règne de l'anarchie qu'ils vouloient établir. Malgré leur influence dans l'assemblée constituante, malgré leur domination dans tous les clubs et toutes les sociétés populaires du royaume, ils n'avoient pas encore osé manifester l'atrocité de leurs principes. La minorité et le côté droit servirent de digue au débordement des crimes dont le jacobinisme devoit inonder la France. La convocation des assemblées primaires pour la nomination des députés à la seconde législature, parut aux jacobins le moment le plus favorable pour se créer un plus grand nombre de prosélytes et de partisans, afin de ne plus trouver d'obstacles dans l'exécution de leurs projets.

Les têtes du peuple, exaltées par les idées gigantesques de la liberté, n'étoient pas encore assez travaillées et assez désorganisées pour les porter à tous les excès de l'irréligion et de la licence; il falloit qu'une seconde législature graduât encore

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