et de ce qui l'imite, il n'y a point de véritables démonstrations; tout l'art en est renfermé dans les seuls préceptes que nous avons dits; ils suffisent seuls, ils prouvent seuls; toutes les autres règles sont inutiles ou nuisibles. Voilà ce que je sais par une longue expé– rience de toutes sortes de livres et de personnes. Et sur cela, je fais le même jugement de ceux qui disent que les géomètres ne leur donnent rien de nouveau par ces règles, parce qu'ils les avaient en effet, mais confondues parmi une multitude d'autres inutiles ou fausses dont ils ne pouvaient pas les discerner, que de ceux qui, cherchant un diamant de grand prix parmi un grand nombre de faux, mais qu'ils ne sauraient pas en distinguer, se vanteraient, en les tenant tous ensemble, de posséder le véritable; aussi bien que celui qui, sans s'arrêter à ce vil amas, porte la main sur la pierre choisie que l'on recherche, et pour laquelle on ne jetait pas tout le reste. Le défaut d'un raisonnement faux est une maladie qui se guérit par les deux remèdes indiqués. On en a composé un autre d'une infinité d'herbes inutiles, où les bonnes se trouvent enveloppées, et où elles demeurent sans effet par les mauvaises qualités de ce mélange. Pour découvrir tous les sophismes et toutes les équivoques des raisonnemens captieux, les logiciens ont inventé des noms barbares, qui étonnent ceux qui les entendent; et, au lieu qu'on ne peut débrouiller tous les replis de ce nœud si embarrassé qu'en tirant les deux bouts que les géomètres assignent, ils en ont marqué un nombre étrange d'autres où ceux-là se trouvent compris, sans qu'ils sachent lequel est le bon. Et ainsi, en nous montrant un nombre de chemins différens, qu'ils disent nous conduire où nous tendons, quoiqu'il n'y en ait que deux qui y mènent, et qu'il faut savoir marquer en particulier, on prétendra que la géométrie, qui les assigne certainement, ne donne que ce qu'on tenait déjà d'eux, parce qu'ils donnaient en effet la même chose, et davantage, sans prendre garde que ce présent perdait son prix par son abondance, et qu'il ôtait en ajoutant. Rien n'est plus commun que les bonnes choses, il n'est question que de les discerner; et il est certain qu'elles sont toutes naturelles et à notre portée, et même connues de tout le monde. Mais on ne sait pas les distinguer. Ceci est universel. Ce n'est pas dans les choses extraordinaires et bizarres que se trouve l'excellence de quelque genre que ce soit. On s'élève pour y arriver, et on s'en éloigne. Il faut le plus souvent s'abaisser. Les meilleurs livres sont ceux que chaque lecteur croit qu'il aurait pu faire; la nature, qui seule est bonne, est toute familière et commune. Je ne fais donc pas de doute que ces règles étant les véritables, ne doivent être simples, naïves, naturelles, comme elles le sont. Ce n'est pas Barbara et Baralipton qui forment le raisonnement. Il ne faut pas guinder l'esprit; les manières tendues et pénibles le remplissent d'une sotte présomption, par une élévation étrangère et par une enflure vaine et ridicule, au lieu d'une nourriture solide et vigoureuse. L'une des raisons principales qui éloignent le plus ceux qui entrent dans ces connaissances du véritable chemin qu'ils doivent suivre, est l'imagination qu'on prend d'abord que les bonnes choses sont inaccessibles, en leur donnant le nom de grandes, hautes, élevées, sublimes: cela perd tout. Je voudrais les nommer basses, communes, familières ces noms-là leur conviennent mieux; je hais les mots d'enflure. FIN DU TOME SECOND ET DERNIER. -- Princi- Dans quel sens nous prenons le mot philosophie. - II LEÇON. - De la nature de l'idée. - Importance du sujet. - Divisions des philosophes sur la na- - Pages. 19 III LEÇON. Des origines et des causes de nos idées. 39 Les philosophes ne sont pas moins divisés sur l'origine de nos - - idées que sur leur nature. Du mot sentir. Les idées IVa Leçon. — Les diverses origines de nos idées ne peuvent Pages. Les philosophes n'ayant pas remarqué les différentes ma- - -- -- V LEÇON. - ÉCLAIRCISSEMENS SUr la nature des idées. La question de l'origine des idées avait été ramenée à une - L'idée est un jugement d'une espèce particulière. — En quoi consiste la perfection des idées. 59 79 |