L'impitoyable Tisiphone Ajoute un peu de bois, voilà l'eau qui bouillonne, Le fond du pot devient brûlant. L'auteur soulève un pied, puis l'autre au même instant; Vaincu par la douleur extrême, Veut-il se plaindre, à chaque mot, La furie ajoute un fagot; Tant qu'à la fin il s'emporte, il blasphème, Le feu depuis longtemps éteint sous le voleur. Tandis que ce fripon prend un bain de santé! Des dieux, puis qu'il en est, où donc est la justice? >> Lorsque Alecton, pour venger cette injure, Elle parle, et l'auteur, muet à son aspect, Pour tes crimes passés te punit aujourd'hui? Mais le nombre des tiens croit et se multiplie Qui vont, de siècle en siècle, égarer les esprits. Et le soleil jamais ne rouvre sa carrière Sans éclairer encor mille crimes nouveaux, Fruits tardifs, mais constants, de tes affreux travaux. A tes contemporains trop dangereux exemple, Le fauteur tour à tour et l'ennemi des dieux, On te vit au théâtre être religieux, Et profanateur dans le temple, Tu remplis l'univers du germe des forfaits Souffre donc, malheureux, les tourments des enfers! Au fond de l'eau bouillante, et de son bras puissant L'AMITIÉ DES CHIENS. AUX rayons du soleil, deux chiens de bonne mine. Reposaient amicalement Et discouraient, au lieu d'aboyer au passant. Nos compagnons médisaient des humains A qui mieux mieux ; parlaient du sort des chiens, De certains maîtres sans pitié, Du bien, du mal, enfin de l'amitié; << Il n'est point, disait l'un, de mal que n'adoucisse Le bonheur est doublé, la peine est partagée; Et mon emploi me semblerait léger, I. On reconnaît à ce juste jugement porté sur Voltaire, le frère de l'immortel auteur des Soirées de Saint-Pétersbourg. Affables l'un pour l'autre, empressés, généreux, Qu'en penses-tu, Barbet? — Mais j'y songe moi-même, Soyons amis, Briffaut, c'est moi qui t'en convie; De battre de la queue et de se caresser. La trêve est expirée; adieu les bons propos, Il ne s'agit plus d'embrassade; Nos deux amis jouent des dents. Avec peine un sceau d'eau calme les combattants. D'une telle amitié l'exemple, chez les hommes, Leur amitié sincère en proverbe est passée; Mais jetez-leur un os, vous verrez leur pensée; ... Es fables de M. Arnault ne ressemblent pas à d'autres; il les conçoit à sa manière et en invente les sujets; il ne songe point à imi ter La Fontaine, il songe à se satisfaire et à rendre d'une manière vive un résultat de son observation propre; il obéit à son tour d'esprit, à son jet d'expression, et on ne peut s'étonner si, comme luimême l'avoue, l'apologue a pris peut-être, sous sa plume, un caractère épigrammatique...... << Nommé à l'Académie française en 1829, il y fut reçu par M. Villemain. Cet ingénieux panégyriste loua M. Arnault de tout ce qui était à louer en lui et, jouant avec les mêmes armes, lui fit sentir la pointe de l'épigramme même en le châtouillant. Parlant de ses fables et rappelant le nom inévitable de La Fontaine: «Vous avez trouvé à cueillir, lui disait-il, dans un champ moissonné. Là où nulle comparaison n'est possible, une part d'originalité vous est acquise. Vos fables ont un caractère à vous. Elles sont, j'en conviens, quelque peu satiriques; en les lisant, on ne s'écriera pas à chaque page: Le bonhomme!» et ici une suspension avec sourire, une pause malicieuse. laissa place aux applaudissements. «Mais on dira, reprit M. Villemain d'un ton sérieux et convaincu, on dira toujours L'honnête homme, dont l'âme est généreuse et droite, lors même que son esprit se blesse et s'irrite.» SAINTE-BEUVE. L SA LE COLIMAÇON. * ANS ami, comme sans famille, Se retirer dans sa coquille Au signal du moindre danger; Et celle du colimaçon. LE CHÊNE ET LE BUISSON. E vent s'élève, un gland tombe dans la poussière, Chêne, cet avorton qu'un souffle fait trembler, Ce fêtu près de qui la plus humble bruyère Je ne m'en dédis pas, docteur; cet avorton, Ce fêtu, c'est un chêne, un vrai chêne, tout comme Quoi de plus naturel, d'ailleurs, que vos propos? Sur mon chêne, avant vous, n'aient dit en d'autres mots: A nos pieds végète, enterré Dans la poussière et dans la fange? |