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Vous finiriez par devenir stérile;

Au lieu qu'en vous faisant répandre quelques pleurs, Je vous rends beaucoup plus fertile,

Et de Bacchus sur vous j'attire les faveurs. »

C'est à vous, jeunes gens, que ma fable s'adresse :
Connaissez à ces traits l'amour et la sagesse
De ceux qui veillent sur vos mœurs.

S'ils vous font quelquefois éprouver leurs rigueurs,
Ce n'est pas que pour vous ils manquent de tendresse ;
Ils cherchent seulement à vous rendre meilleurs.

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T

que

EAN-JOSEPH Boisard, qu'il ne faut pas confondre avec son neveu, J. F. Boisard, fabuliste lui aussi, est le plus fécond des imitateurs de La Fontaine ; mais malgré les éloges

lui décernèrent Voltaire et Grimm, nous trouvons qu'il a trop sacrifié la qualité à la quantité. Le public fut de notre avis, à en juger par cet aveu de l'auteur que nous rencontrons dans la préface des Mille et une Fables:

J'écris beaucoup et mon salaire est mince,
Il se réduit à rien; les Muses de province
Ne font pas fortune à Paris.

L'ENFANT ET LE MOINEAU.

F

ANFAN courait tout désolé :

Son moineau s'était envolé.
Dans le fond d'un sombre bocage
Il suivit son ami volage,

Et lui chanta cette chanson,
Qui se perdit comme un vain son:
<< Reviens dans ta maison déserte,
Reviens becqueter, dans ma main
A tes besoins toujours ouverte,
Le millet choisi grain à grain.
Cher moineau, quitte ces demeures
Où te poursuit mon amitié ;
Loin de toi je compte les heures.

Ah! cède au moins à la pitié!

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E baron du Tremblay était parent de La Fontaine et s'en faisait gloire, << mais parent éloigné» ajoute finement Saint-Marc Girar

din. Loin de le porter à écrire des Fables, ce souvenir de famille eût dû en effet lui en ôter l'envie. Arnault, qui avait infiniment d'esprit, vante la simplicité naïve des apologues de du Tremblay, qualité qui fait peut-être défaut aux siens. Mais la simplicité seule ne fait ni un poète, ni un fabuliste.

JUPITER ET LA BREBIS.

L

A brebis au maître des dieux

Fit un jour cette remontrance:

<< Il ne m'appartient pas d'importuner les cieux :
Pourquoi priseraient-ils ma chétive existence?
Mais mon sort, Jupiter, est un sort bien affreux.
En ton courroux, certes je pris naissance.
Contre les méchants, sans défense,

Ils m'oppriment à qui mieux mieux.>>
Jupiter répondit d'un air fort gracieux,

<< Animal si bon, si paisible,

On t'opprime! Ah leurs cœurs sont donc bien vicieux!
Le destin ne veut pas que tu sois invincible,

Tu leur rendras, du moins, tout le mal qu'ils te font:
Des cornes du taureau, je vais orner ton front.

Forte, valeureuse et terrible,

Malheur à tous tes ennemis!

Grand Jupiter! s'écria la brebis, On me craindra, je serai donc nuisible! Reprends tes dons, je n'en veux profiter Tu me formas douce et sensible Faire du mal me serait trop pénible J'aime bien mieux le supporter. »

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