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Thucyd. 1.4,

garda jusqu'au lendemain. Alors les Athéniens ayant dressé is un trophée et rendu aux Lacédémoniens leurs morts, s'embarquèrent pour le départ, après avoir distribué les prisonniers dans les vaisseaux, et en avoir confié la garde aux capitaines des galères.

Il mourut dans le combat cent vingt-huit Lacédémoniens, de quatre cent vingt qu'ils étoient; ainsi il en resta un peu moins de trois cents, dont il y avoit six vingts Spartiates, c'est-à-dire habitans de Sparte même. Le siege de l'île, à compter dès le commencement, y compris le temps de la trève, avoit duré soixante-douze jours. Chacun se retira de devant Pyle, et la promesse de Cléon, toute vaine et téméraire qu'elle étoit, se trouva accomplie à la lettre. Mais ce qui surprit le plus fut l'accord même qui venoit de se faire; car on croyoit que les Lacédémoniens, au lieu de rendre les armes, mourroient tous l épée à la main.

Lorsqu'ils furent arrivés à Athènes, on ordonna qu'ils demeureroient prisonniers jusqu'à la paix, pourvu que les Lacédémoniens n'entrassent point dans le pays; mais que, s'ils y entroient, on les feroit tous mourir. On laissa garnison dans Pyle. Les Messéniens de Naupacte, qui l'avoient possédée autrefois, y envoyèrent de leur plus brave jeunesse, laquelle incommoda fort par ses courses les Lacedémoniens; et comme ces Messéniens parloient le langage du pays, ils attirèrent dans leur parti un grand nombre d'esclaves. Les Lacédémoniens, dans la crainte d'un plus grand mal, députèrent plusieurs fois à Athènes, sans pouvoir jamais rien obtenir de la prospérité orgueilleuse des Athéniens, à qui un si grand succès donnoit de plus hautes esperances.

La septième année de la guerre du Péloponèse, Arp. 285-286. taxerxe envoya aux Lacédémoniens un ambassadeur nommé Artapherne, chargé d'une lettre de sa part écrite en assyrien, où il leur marquoit qu'il lui étoit venu plusieurs ambassadeurs de leur part qui lui avoient exposé des choses si différentes, qu'il ne comprenoit point du tout ce qu'ils souhaitoient de lui; que, dans cette incertitude, il avoit

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pris le parti de leur envoyer ce Persan pour leur faire savoir que, s'ils avoient quelque chose à lui proposer, ils n'avoient qu'à faire partir avec lui un homme de confiance qui pût l'informer précisément de ce qu'ils désiroient. Cet ambassadeur, en arrivant à Eïone, sur la rivière de Strymon, dans la Thrace, y fut pris, vers la fin de cette année, par un des amiraux de la flotte athénienne, qui l'envoya à Athènes. Il y fut traité avec toutes les honnêtetés et tout le respect possibles, parce que les Athéniens cherchoient à se remettre dans les bonnes grâces du roi son maître.

L'année suivante, dès que la saison permit de se mettre en mer, ils le renvoyèrent dans un vaisseau de l'état aux dépens du public, et nommèrent quelques-uns de leurs citoyens pour aller avec lui à la cour de Perse en qualité d'ambassadeurs. En débarquant à Éphèse, ils apprirent la mort d'Artaxerxe. Les ambassadeurs, ne jugeant pas à propos d'aller plus loin après cette nouvelle, prirent congé d'Artapherne, et s'en retournèrent à Athènes.

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LIVRE HUITIÈME.

E

HISTOIRE

DES PERSES ET DES GRECS.

Ce livre renferme, dans les chapitres I et II, l'histoire de la guerre du Péloponèse depuis la septième année jusqu'à la vingt-septième, qui en est la dernière : cet espace est de vingt et un an, sous les règnes de Xerxès II, de Sogdien, de Darius Nothus, depuis l'an du monde 3579 jusqu'à l'an 3600. La Grèce et la Sicile furent le théâtre de cette funeste guerre, dans laquelle les Grecs, vainqueurs des barbares, tournèrent leurs armes les uns contre les autres. Du côté des Athéniens, Périclès, Nicias, Démosthène, Alcibiade; de celui des Lacédémoniens, Brasidas, Gylippe, Lysander, s'y distingnèrent d'une manière particulière. On voit, après la déroute des Athéniens dans la Sicile, le retour glorieux d'Alcibiade à Athènes, les exploits de Lysander et de Callicratidas, Lacédémonien; la prise d'Athènes, qui termina la guerre du Péloponèse; et la mort de Darius Nothus.

CHAPITRE PREMIER.

CE chapitre renferme l'histoire de treize années de la guerre du Péloponèse jusqu'à la dix-neuvième inclusi

vement.

I. Règnes fort courts de Xerxès et de Sogdien. Darius Nothus leur succède. Il apaise la révolte de l'Égypte et celle de Médie. Il donne à Cyrus, le plus jeune de ses fils, le commandement en chef de toute l'Asie mi

neure.

Av. J.C. 425.

Av. J.C.424.

Artaxerxe mourut vers le commencement de la qua- AN. M. 5579. ante-neuvième année de son règne. Xerxès, qui lui suc- Ctes. cap. 47 éda, étoit le seul fils qu'il eût de la reine sa femme; mais 51. Diod. lib. 12, len avoit dix-sept autres de ses concubines; et entre autres p. 115. Sogdien, que Ctésias appelle Sécondien, Ochus, et Arsite. A. M.3580. Sogdien, de concert avec Pharnacias, un des eunuques le Xerxès, vint un jour surprendre le nouveau roi, qui, après s'être enivré un jour de fête, s'étoit retiré dans sa chambre pour y cuver son vin. Il le tua aisément dans cet état, au bout d'un règne de quarante-cinq jours, et fut déclaré roi à sa place.

A peine étoit-il sur le trône, qu'il fit mourir Bagoraze, le plus fidèle des eunuques de son père : c'étoit cet eunuque qui avoit été chargé des funérailles d'Artaxerxe, et de la reine, mère de Xerxès, morte le même jour que son mari. Après avoir conduit ces deux corps en Perse dans le tombeau ordinaire des rois, il trouva à son retour Sogdien sur le trône, qui le reçut assez mal, à cause de quelques différends qu'ils avoient eus du vivant de son père. Le nouveau roi ne s'en tint pas à ces premières marques de mécontentement: il ne fut pas long-temps sans lui chercher querelle sur je ne sais quoi qui regardoit les funérailles de son père, et il le fit lapider.

Par ces deux meurtres, celui de son frère Xerxès, et celui de Bagoraze, il devint l'horreur de l'armée et de la noblesse; et il ne se crut pas beaucoup eu sûreté sur un trône dont l'acquisition lui avoit coûté de si grands crimes. soupçonna ses frères d'un dessein pareil au sien; et ses soupçons tombèrent principalement sur Ochus, à qui son père avoit laissé le gouvernement d'Hyrcanie. Il le manda, pour se défaire de lui quand il seroit arrivé; mais

Ochus, qui pénétra son dessein, trouva divers prétextes pour se dispenser de ce voyage, et différa tant, qu'enfin, quand il vint, ce fut à la tête d'une bonne armée, dont il déclara ouvertement qu'il se serviroit pour venger la mort de son frère Xerxès. Cette déclaration lui attira quantité de gens de qualité, et plusieurs gouverneurs de provinces que la cruauté et la mauvaise conduite de Sogdien firent passer dans le parti d'Ochus. On lui mit sur la tête la tiare, marque de la royauté, et on le proclama roi. Sogdien, se voyant ainsi abandonné, fit voir autant de lâcheté à défendre sa couronne qu'il avoit montré d'injus tice et de cruauté à l'usurper. Contre l'avis de ses meilleurs amis, et des plus sages de ceux qui demeuroient encore attachés à lui, il entra en traité avec son frère, qui, s'étant rendu maître de sa personne, le fit jeter dans la Val. Max. cendre, où il mourut d'une mort cruelle. C'étoit un suplib. 9, cap. 2. plice particulier à la Perse, et dont on ne se servoit que pour de grands criminels. On remplissoit de cendre jusqu'à une certaine hauteur une tour des plus hautes; du haut de cette tour on jetoit le criminel dedans, la tête la première; et ensuite encore, avec une roue, on remuoit sans cesse cette cendre autour de lui jusqu'à ce qu'enfin elle l'étouffat. Ce fut ainsi que ce prince scélérat perdit la vie avec l'empire, dont il ne jouit que six mois et quinze jours.

II.Machab.

cap. 15.

AN. M. 3581.
Av. J.C.423.

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Par la mort de Sogdien, Ochus se trouva maître de l'empire. Il ne s'y vit pas plus tôt bien établi, qu'il changea son nom d'Ochus en celui de Darius. Pour le distinguer, les historiens y ajoutent l'épithète de Nothus, qui en grec veut dire le bátard. Son règne dura dix-neuf ans.

Arsite, voyant comment Sogdien avoit supplanté Xerxès, et avoit été détrôné lui-même par Ochus, voulut en faire autant à ce dernier. Quoiqu'il fût son frère de mère aussi-bien que de père, il se révolta ouvertement contre lui, et fut soutenu dans sa révolte par Artyphius, fils de Mégabyse. Ochus, que nous ne nommerons plus désormais que Darius, envoya Artasyras, un de ses généraux, contre Artyphius, et marcha en personne, à la tête d'une autre į

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