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De tous les corps ensemble on ne saurait tirer la moindre pensée : cela est impossible, et d'un autre ordre. Tous les corps et les esprits ensemble ne sauraient produire un mouvement de vraie charité : cela est impossible, et d'un autre ordre tout surnaturel.

II.

Jésus-Christ a été dans une obscurité (selon ce que le monde appelle obscurité) telle, que les historiens, qui n'écrivent que les choses importantes, l'ont à peine aperçu.

III.

Quel homme eut jamais plus d'éclat que JésusChrist? Le peuple juif tout entier le prédit avant sa venue. Le peuple gentil l'adore après qu'il est venu. Les deux peuples gentil et juif le regardent comme leur centre. Et cependant quel homme jouit jamais moins de tout cet éclat? De trentetrois ans, il en vit trente sans paraître. Dans les trois autres, il passe pour un imposteur; les prêtres et les principaux de sa nation le rejettent; ses amis et ses proches le méprisent. Enfin il meurt d'une mort honteuse, trahi par un des siens, renié par l'autre, et abandonné de tous. Quelle part a-t-il donc à cet éclat? Jamais homme n'a eu tant d'éclat; jamais homme n'a eu plus d'ignominie. Tout cet éclat n'a servi qu'à nous, pour nous le rendre reconnaissable; et il n'en a rien eu pour lui.

IV.

Jésus-Christ parle des plus grandes choses si simplement, qu'il semble qu'il n'y a pas pensé; et si nettement néanmoins, qu'on voit bien ce qu'il en pensait. Cette clarté, jointe à cette naïveté, est admirable.

Qui a appris aux évangélistes les qualités d'une áme véritablement héroïque, pour la peindre si parfaitement en Jésus-Christ? Pourquoi le font-ils faible dans son agonie? Ne savent-ils pas peindre une mort constante? Oui, sans doute; car le même saint Luc peint celle de saint Étienne plus forte que celle de JésusChrist. Ils le font donc capable de crainte avant que la nécessité de mourir soit arrivée, et ensuite tout fort. Mais quand ils le font troublé, c'est quand il se trouble lui-même ; et quand les hommes le troublent, il est tout fort.

L'Église s'est vue obligée de montrer que Jésus-Christ était homme, contre ceux qui le niaient, aussi bien que de montrer qu'il était

Dieu; et les apparences étaient aussi grandes contre l'un et contre l'autre.

Jésus-Christ est un Dieu dont on s'approche sans orgueil, et sous lequel on s'abaisse sans désespoir.

V.

La conversion des païens était réservée à la grâce du Messie. Les Juifs ou n'y ont point travaillé, ou l'ont fait sans succès: tout ce qu'en ont dit Salomon et les prophètes a été inutile. Les sages, comme Platon et Socrate, n'ont pu leur persuader de n'adorer que le vrai Dieu.

L'Évangile ne parle de la virginité de la Vierge que jusqu'à la naissance de Jésus-Christ; tout par rapport à Jésus-Christ.

Les deux Testaments regardent Jésus-Christ, l'Ancien comme son attente, le Nouveau comme son modèle; tous deux comme leur centre.

Les prophètes ont prédit, et n'ont pas été mais prédits. Les saints ensuite sont prédits, non prédisants. Jésus-Christ est prédit et prédisant.

Jésus-Christ pour tous, Moïse pour un peuple. Les Juifs bénis en Abraham. Je bénirai ceux qui te béniront (Gen., XII, 3). Mais toutes na tions bénies en sa semence (Gen., XVIII, 18).

Lumen ad revelationem gentium (Luc, 11, 32). Non fecit taliter omni nalioni (Ps. CXLVII, 20), disait David en parlant de la loi. Mais en parlant de Jésus-Christ, il faut dire : Fecit taliter omni nationi.

Aussi c'est à Jésus-Christ d'être universel.

L'Église même n'offre le sacrifice que pour les fidèles: Jésus-Christ a offert celui de la croix pour tous.

ARTICLE XI.

Preuves de Jésus-Christ par les prophéties. I.

La plus grande des preuves de Jésus-Christ, ce sont les prophéties. C'est aussi à quoi Dieu a le plus pourvu; car l'événement qui les a remplies est un miracle subsistant depuis la naissance de l'Église jusqu'à la fin. Ainsi Dieu a suscité des prophètes durant seize cents ans; et, pendant quatre cents ans après, il a dispersé toutes ces prophéties, avec tous les Juifs qui les portaient, dans tous les lieux du monde. Voilà quelle a été la préparation à la naissance de Jésus-Christ, dont l'Évangile devant être cru par tout le monde, il a fallu non-seulement qu'il y ait eu

des prophéties pour le faire croire, mais encore que ces prophéties fussent répandues par tout le monde, pour le faire embrasser par tout le monde. Quand un seul homme aurait fait un livre des prédictions de Jésus-Christ pour le temps et pour la manière, et que Jésus-Christ serait venu conformément à ces prophéties, ce serait une force infinie. Mais il y a bien plus ici. C'est une suite d'hommes durant quatre mille ans qui, constamment et sans variation, viennent l'un ensuite de l'autre prédire ce même avénement. C'est un peuple tout entier qui l'annonce, et qui subsiste pendant quatre mille années pour rendre encore témoignage des assurances qu'ils en ont, et dont ils ne peuvent être détournés par quelques menaces et quelque persécution qu'on leur fasse : ceci est tout autrement considérable.

II.

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Le temps est prédit par l'état du peuple juif, par l'état du peuple païen, par l'état du temple, par le nombre des années.

Les prophètes ayant donné diverses marques qui devaient toutes arriver à l'avénement du Messie, il fallait que toutes ces marques arrivassent en même temps; et ainsi il fallait que la quatrième monarchie fût venue lorsque les septante semaines de Daniel seraient accomplies; que le sceptre fût ôté de Juda, et qu'alors le Messie arrivât. Et Jésus-Christ est arrivé alors, qui s'est dit le Messie.

force secrète le persuade à cent milliers d'hommes ignorants, par la vertu de peu de paroles.

Qu'est-ce que tout cela? C'est ce qui a été prédit si longtemps auparavant: Effundam spiritum meum super omnem carnem (JOEL, II, 28). Tous les peuples étaient dans l'infidélité et dans la concupiscence : toute la terre devient ardente de charité; les princes renoncent à leurs grandeurs; les riches quittent leurs biens; les filles souffrent le martyre; les enfants abandonnent la maison de leurs pères pour aller vivre dans les déserts. D'où vient cette force? C'est que le Messie est arrivé. Voilà l'effet et les marques de

sa venue.

Depuis deux mille ans, le Dieu des Juifs était demeuré inconnu parmi l'infinie multitude des nations païennes et dans le temps prédit, les païens adorent en foule cet unique Dieu; les temples sont détruits; les rois mêmes se soumettent à la croix. Qu'est-ce que tout cela? C'est l'esprit de Dieu qui est répandu sur la terre.

Il est prédit que le Messie viendrait établir une nouvelle alliance, qui ferait oublier la sortie d'Égypte (JÉRÉM., XXIII, 7); qu'il mettrait sa loi, non dans l'extérieur, mais dans les cœurs (Is., LI, 7); qu'il mettrait sa crainte, qui n'avait été qu'au dehors, dans le milieu du cœur (JÉRÉM., XXXI, 33, et XXXII, 40).

Que les Juifs réprouveraient Jésus-Christ, et qu'ils seraient réprouvés de Dieu, parce que la viIl est prédit que dans la quatrième monarchie, gne élue ne donnerait que du verjus (Is., v, 2, 3, avant la destruction du second temple, avant que 4, etc.). Que le peuple choisi serait infidèle, ingrat la domination des Juifs fût ôtée, et en la septan-tradicentem (Is., LXV, 2). Que Dieu les frapperait et incrédule: Populum non credentem et contième semaine de Daniel, les païens seraient instruits et amenés à la connaissance du Dieu adoré d'aveuglement, et qu'ils tâtonneraient en plein par les Juifs; que ceux qui l'aiment seraient dé-midi comme des aveugles (Deut., XXVIII, 28, 29). livrés de leurs ennemis, et remplis de sa crainte et de son amour.

Et il est arrivé qu'en la quatrième monarchie, avant la destruction du second temple, etc., les païens en foule adorent Dieu, et mènent une vie angélique; les filles consacrent à Dieu leur virginité et leur vie; les hommes renoncent à tout plaisir. Ce que Platon n'a pu persuader à quelque peu d'hommes choisis et si instruits, une

'Les quatre mille ans dont l'auteur vient de parler dans la phrase précédente forment bien l'espace compris depuis la création jusqu'à l'avénement de Jésus-Christ; mais dans celleci il n'est question que du peuple juif, dont Abraham est la souche. Alors ce ne serait qu'environ deux mille ans depuis ce patriarche jusqu'à Jésus-Christ. Si, comme la suite semble l'indiquer, l'auteur a entendu compter depuis Abraham jusqu'à nos jours, il faudrait lire, et qui subsiste depuis quatre mille ans.

(Note de l'édit. de 1822.)

Que l'Église serait petite en son commencement, et croîtrait ensuite (ÉZÉCH., XLVII, 1 et suiv.).

Il est prédit qu'alors l'idolâtrie serait renversée; que ce Messie abattrait toutes les idoles, et

ferait entrer les hommes dans le culte du vrai Dieu (ÉZÉCH., XXX, 13).

Que les temples des idoles seraient abattus, et que, parmi toutes les nations et en tous les lieux du monde, on lui offrirait une hostie pure, et non pas des animaux (MALACH., I, 11).

Qu'il enseignerait aux hommes la voie parfaite (Is., II, 3; MICH., IV, 2, etc.).

Qu'il serait roi des Juifs et des Gentils (Ps. II, 6 et 8; LXXI, 8 et 11, etc.).

Et jamais il n'est venu, ni devant, ni après, aucun homme qui ait rien enseigné approchant de cela.

Après tant de gens qui ont prédit cet événement, Jésus-Christ est enfin venu dire: Me voici, et voici le temps. Il est venu dire aux hommes qu'ils n'ont point d'autres ennemis qu'eux-mêmes; que ce sont leurs passions qui les séparent de Dieu; qu'il vient pour les en délivrer, et pour leur donner sa grâce, afin de former de tous les hommes une Église sainte; qu'il vient ramener dans cette Église les païens et les Juifs, qu'il vient détruire les idoles des uns et la superstition des autres.

Ce que les prophètes, leur a-t-il dit, ont prédit devoir arriver, je vous dis que mes apôtres vont le faire. Les Juifs vont être rebutés; Jérusalem sera bientôt détruite; les païens vont entrer dans la connaissance de Dieu; et mes apôtres vont les y faire entrer, après que vous aurez tué l'héritier de la vigne.

Ensuite les apôtres ont dit aux Juifs: Vous allez être maudits; et aux païens: Vous allez entrer dans la connaissance de Dieu.

A cela s'opposent tous les hommes, par l'opposition naturelle de leur concupiscence. Ce roi des Juifs et des Gentils est opprimé par les uns et par les autres qui conspirent sa mort. Tout ce qu'il y a de grand dans le monde s'unit contre cette religion naissante; les savants, les sages, les rois. Les uns écrivent, les autres condamnent, les autres tuent. Et malgré toutes ces oppositions, voilà Jésus-Christ, en peu de temps, régnant sur les uns et les autres, et détruisant, et le culte judaïque dans Jérusalem, qui en était le centre, et dont il fait sa première Église, et le culte des idoles dans Rome, qui en était le centre, et dont il a fait sa principale Église.

Des gens simples et sans force, comme les apôtres et les premiers chrétiens, résistent à toutes les puissances de la terre, se soumettent les rois, les savants et les sages, et détruisent l'idolâtrie si établie. Et tout cela se fait par la seule force de cette parole qui l'avait prédit.

Les Juifs, en tuant Jésus-Christ pour ne pas le recevoir pour Messie, lui ont donné la dernière marque de Messie. En continuant à le méconnaître, ils se sont rendus témoins irréprochables; et en le tuant et continuant à le renier, ils ont accompli les prophéties.

Qui ne reconnaîtrait Jésus-Christ à tant de circonstances particulières qui en ont été prédites? Car il est dit :

Qu'il aura un précurseur (MALACH., III, 1);
Qu'il naîtra enfant (Is., 1x, 6);

Qu'il naîtra dans la ville de Bethléem (MICH.,

v, 2); qu'il sortira de la famille de Juda (Gen., XLIX, 8 et suiv.), et de la postérité de David (II, Rois, VII, 12 et suiv.; Is., VII, 13 et suiv.); qu'il paraîtra principalement dans Jérusalem (MAL., III, 1. AGG., II, 10);

Qu'il doit aveugler les sages et les savants (Is., VI, 10), et annoncer l'Évangile aux pauvres et aux petits (Is., LXI, 1); ouvrir les yeux des aveugles, et rendre la santé aux infirmes (Is., xxxv, 5 et 6), et mener à la lumière ceux qui languissent dans les ténèbres (Is., XLII, 16);

Qu'il doit enseigner la voie parfaite (Is., xxx, 21), et être le précepteur des Gentils (Is., Lv, 4), Qu'il doit être la victime pour les péchés du monde (Is., LIII, 5);

Qu'il doit être la pierre fondamentale et précieuse (Is., XXVIII, 16);

Qu'il doit être la pierre d'achoppement et de scandale (Is., VIII, 14);

Que Jérusalem doit heurter contre cette pierre (Is., VIII, 15);

Que les édifiants' doivent rejeter cette pierre (Ps. CXVII, 22);

Que Dieu doit faire de cette pierre le chef du coin (Ibid.);

Et que cette pierre doit croître en une montagne immense, et remplir toute la terre (DAN., II, 35);

Qu'ainsi il doit être rejeté (Ps. cxvii, 22), méconnu (Is., LIII, 2 et 3), trahi (Ps. XL, 10), vendu (ZACH., XI, 12), souffleté (Is., L, 6), moqué (Is., xxxiv, 16), affligé en une infinité de manières (Ps. LXVIII, 27), abreuvé de fiel (Ps. LXVIII, 22); qu'il aurait les pieds et les mains percés (Ps. XXI, 17); qu'on lui cracherait au visage (Is., L, 6); qu'il serait tué (DAN., IX, 26), et ses habits jetés au sort (Ps. XXI, 19); Qu'il ressusciterait le troisième jour (Ps. xv, 10; Osée, vi, 3);

Qu'il monterait au ciel (Ps. XLVI, 6, et LXVII, 19), pour s'asseoir à la droite de Dieu (Ps. cix, 1); Que les rois s'armeraient contre lui (Ps. 11, 2); Qu'étant à la droite du Père, il sera victorieux de ses ennemis (Ps. cix, 5);

Que les rois de la terre et tous les peuples l'adoreraient ( Ps. LXXI, 11);

Que les Juifs subsisteront en nation (JÉRÉM., XXXI, 36);

I

Qu'ils seront errants (Aмos, IX, 9), sans rois,

Edificantes, ceux qui travaillent à l'édifice du temple spirituel où Dieu veut habiter.

2 C'est-à-dire de l'angle qui doit réunir les deux peuples, le juif et le gentil, dans l'adoration du même Dieu.

sans sacrifices, sans autel, etc. (OSÉE, III, 4), sans prophètes (Ps. LXXIII, 9), attendant le salut, et ne le trouvant point (Is., LIX, 9. JÉRÉM., VIII, 15).

III.

Le Messie devait lui seul produire un grand peuple, élu, saint et choisi; le conduire, le nourrir, l'introduire dans le lieu de repos et de sainteté; le rendre saint à Dieu, en faire le temple de Dieu, le réconcilier à Dieu, le sauver de la colère de Dieu, le délivrer de la servitude du péché, qui règne visiblement dans l'homme; donner des lois à ce peuple, graver ces lois dans leur cœur, s'offrir à Dieu pour eux, se sacrifier pour eux, être une hostie sans tache, et luimême sacrificateur : il devait s'offrir lui-même, et offrir son corps et son sang, et néanmoins offrir pain et vin à Dieu. Jésus-Christ a fait tout cela.

Il est prédit qu'il devait venir un libérateur qui écraserait la tête au démon, qui devait délivrer son peuple de ses péchés, ex omnibus iniquitatibus (Ps., CXXIX, 8); qu'il devait y avoir un Nouveau Testament qui serait éternel; qu'il devait y avoir une autre prêtrise selon l'ordre de Melchisedech; que celle-là serait éternelle; que le Christ devait être glorieux, puissant, fort, et néanmoins si misérable, qu'il ne serait pas reconnu; qu'on ne le prendrait pas pour ce qu'il est; qu'on le rejetterait, qu'on le tuerait; que son peuple, qui l'aurait renié, ne serait plus son peuple; que les idolâtres le recevraient, et auraient recours à lui; qu'il quitterait Sion pour régner au centre de l'idolâtrie; que néanmoins les Juifs subsisteraient toujours; qu'il devait sortir de Juda, et quand il n'y aurait plus de rois.

IV.

que Jacob a déclaré que de ses douze enfants, ce serait de Juda qu'il naîtrait; que Moïse et les prophètes sont venus ensuite déclarer le temps et la manière de sa venue; qu'ils ont dit que la loi qu'ils avaient n'était qu'en attendant celle du Messie; que jusque-là elle subsisterait, mais que l'autre durérait éternellement; qu'ainsi leur loi ou celle du Messie, dont elle était la promesse, serait toujours sur la terre; qu'en effet elle a toujours duré; et qu'enfin Jésus-Christ est venu dans toutes les circonstances prédites. Cela est admirable.

Si cela était si clairement prédit aux Juifs, dira-t-on, comment ne l'ont-ils pas cru? ou comment n'ont-ils pas été exterminés pour avoir résisté à une chose si claire? Je réponds que l'un et l'autre a été prédit, et qu'ils ne croiraient point une chose si claire, et qu'ils ne seraient point exterminés. Et rien n'est plus glorieux au Messie; car il ne suffisait pas qu'il y eût des prophètes, il fallait que leurs prophéties fussent conservées sans soupçon. Or, etc.

V.

et

Les prophètes sont mêlés de prophéties particulières, et de celles du Messie, afin que les prophéties du Messie ne fussent pas sans preuves, que les prophéties particulières ne fussent pas sans fruit.

Non habemus regem nisi Cæsarem, disaient les Juifs (JOAN., XIX, 15). Donc Jésus-Christ était le Messie, puisqu'ils n'avaient plus de roi qu'un étranger, et qu'ils n'en voulaient point d'autre.

Les septante semaines de Daniel sont équivoques pour le terme du commencement, à cause des termes de la prophétie; et pour le terme de la fin, à cause des diversités des chronologistes. Mais toute cette différence ne va qu'à deux cents ans'.

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Il y a évidemment faute ici; et il est surprenant que, de tous les éditeurs qui m'ont précédé, celui de 1787 soit le seul qui l'ait fait observer. Pascal, comme on l'a dit, écrivait ses pensées à la háte, sans suite, et comme de simples notes. II y a tout lieu de présumer qu'en voulant mettre 20 ans, il aura, par inadvertance, ajouté un zéro qui a formé 200. Pour justifier cette présomption, je ne puis mieux faire qué de

Qu'on considère que, depuis le commencement du monde, l'attente ou l'adoration du Messie subsiste sans interruption; qu'il a été promis au premier homme aussitôt après sa chute; qu'il s'est trouvé depuis des hommes qui ont dit que Dieu leur avait révélé qu'il devait naître un Rédempteur qui sauverait son peuple'; qu'Abraham est venu ensuite dire qu'il avait eu révélation qu'il naîtrait de lui, par un fils qu'il aurait; dernier ordre donné par Artaxerxès-Longue-Main pour le ré

C'est-à-dire des hommes qui ont transmis, de race en race, depuis Adam jusqu'à Noé, et depuis Noé jusqu'à Abraham, la promesse qui en avait été faite au premier homme. Voyez partie II, art. 4, § 5, où l'auteur entre dans quelques Développements à ce sujet.

rapporter ici la note de l'éditeur de 1787.

« Avant Jésus-Christ, la différence dont il est ici question ne pouvait rouler que sur environ quatre-vingts ans, depuis le premier ordre donné par Cyrus pour renvoyer les Juifs à Jérusalem, vers l'an 536 avant notre ère vulgaire, jusqu'au

tablissement des murs de Jérusalem, vers l'an 454. Depuis Jésus-Christ, la différence ne roule plus que sur environ vingt ans; car les chronologistes conviennent assez que les septante semaines ne peuvent commencer que sous le règne d'Artaxerxès-Longue-Main; mais les uns les prennent de la permission donnée à Esdras par ce prince dans la septième

Les prophéties qui représentent Jésus-Christ pauvre le représentent aussi maître des nations (Is., LIII, 2 et suiv. ZACH., IX, 9 et 10).

Les prophéties qui prédisent le temps ne le prédisent que maître des Gentils et souffrant, et non dans les nues, ni juge; et celles qui le représentent ainsi jugeant les nations, et glorieux, ne marquent point le temps.

Quand il est parlé du Messie comme grand et glorieux, il est visible que c'est pour juger le monde, et non pour le racheter (Is., LXVI, 15, 16).

ARTICLE XII.

Diverses preuves de Jésus-Christ.

I.

Pour ne pas croire les apôtres, il faut dire qu'ils ont été trompés ou trompeurs. L'un et l'autre est difficile. Car, pour le premier, il n'est pas possible de s'abuser à prendre un homme pour être ressuscité; et pour l'autre, l'hypothèse qu'ils aient été fourbes est étrangement absurde. Qu'on la suive tout au long; qu'on s'imagine ces douze hommes assemblés après la mort de Jésus-Christ, faisant le complot de dire qu'il est ressuscité. Ils attaquent par là toutes les puissances. Le cœur des hommes est étrangement penchant à la légèreté, au changement, aux promesses, aux biens. Si peu qu'un d'eux se fût démenti par tous ces attraits, et, qui plus est, par les prisons, par les tortures et par la mort, ils étaient perdus. Qu'on suive cela.

Tandis que Jésus-Christ était avec eux, il pouvait les soutenir. Mais après cela, s'il ne leur est apparu, qui les a fait agir?

II.

Le style de l'Évangile est admirable en une

année de son règne, et les autres les prennent de la permission donnée à Néhémias par ce même prince, dans la vingtième année: les uns comptent ces années depuis son association à l'empire par son père Xerxès, vers l'an 474 avant notre ère vulgaire, en sorte que la septième année tomberait en 467, qui est l'année de la mort de Xerxès; les autres les comptent depuis la mort de Xerxès, en sorte que la vingtième tomberait en 447, ce qui donne précisément un intervalle de vingt ans, depuis 467 jusqu'à 447. Les uns pensent que les années dont parle Daniel sont des années lunaires; les autres les nent pour des années solaires. Enfin tous varient sur l'époque précise de la septième et de la vingtième année; mais aussi tous s'accordent à mettre ces deux époques dans l'intervalle de ces vingt années, depuis 467 jusqu'à 447. »

pren

Ces faits et les opinions des chronologistes ne pouvaient être ignorés de Pascal : comment pourrait-il donc se faire qu'il eût mis deux cents ans en connaissance de cause, et, par là, affaibli volontairement l'autorité des prophéties? On ne peut raisonnablement le supposer.

(Note de l'édit. de 1822.)

infinité de manières, et entre autres en ce qu'il n'y a aucune invective de la part des historiens contre Judas, ou Pilate, ni contre aucun des ennemis ou des bourreaux de Jésus-Christ.

Si cette modestie des historiens évangéliques avait été affectée, aussi bien que tant d'autres traits d'un si beau caractère, et qu'ils ne l'eussent affectée que pour la faire remarquer; s'ils n'avaient osé la remarquer eux-mêmes, ils n'auraient pas manqué de se procurer des amis, qui eussent fait ces remarques à leur avantage. Mais comme ils ont agi de la sorte sans affectation, et par un mouvement tout désintéressé, ils ne l'ont fait remarquer par personne : je ne sais même si cela a été remarqué jusqu'ici; et c'est ce qui témoigne la naïveté avec laquelle la chose a été faite.

III.

Jésus-Christ a fait des miracles, et les apôtres ensuite, et les premiers saints en ont fait aussi beaucoup; parce que les prophéties n'étant pas encore accomplies, et s'accomplissant par eux, rien ne rendait témoignage que les miracles. Il était prédit que le Messie convertirait les nations. Comment cette prophétie se fût-elle accomplie sans la conversion des nations? Et comment les nations se fussent-elles converties au Messie, ne voyant pas ce dernier effet des prophéties qui le prouvent? Avant donc qu'il fût mort, qu'il fût ressuscité, et que les nations fussent converties, tout n'était pas accompli; et ainsi il a fallu des miracles pendant tout ce temps-là. Maintenant il n'en faut plus pour prouver la vérité de la religion chrétienne; car les prophéties accomplies sont un miracle subsistant.

IV.

L'état où l'on voit les Juifs est encore une grande preuve de la religion. Car c'est une chose étonnante de voir ce peuple subsister depuis tant d'années, et de le voir toujours misérable : étant nécessaire pour la preuve de Jésus-Christ, et qu'ils subsistent pour le prouver, et qu'ils soient misérables puisqu'ils l'ont crucifié : et quoiqu'il soit contraire d'être misérable et de subsister, il subsiste néanmoins toujours malgré sa misère.

Mais n'ont-ils pas été presque au même état au temps de la captivité? Non. Le sceptre ne fut point interrompu par la captivité de Babylone, à cause que le retour était promis et prédit. Quand Nabuchodonosor emmena le peuple, de peur qu'on né crût que le sceptre fût ôté de Juda, il leur fut dit

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