Page images
PDF
EPUB

- Enfin M. Chamillard en est si proche, que s'il y a des degrés pour descendre dans le néant, cette grâce suffisante est maintenant au plus proche.

-

Plaisant d'être hérétique pour cela! (Barré.)

- Combien y a-t-il, mon père, que c'est un article de foi? Ce n'est tout au plus que depuis les mots de pouvoir prochain; et je crois qu'en naissant il a fait cette hérésie et qu'il n'est né que pour ce seul dessein. La censure défend seulement de parler ainsi de saint Pierre, et rien plus. (Barré.)

Les enluminures m'ont fait tort.

Une proposition est bonne dans un auteur et méchante dans un autre. Oui; mais il y a donc d'autres mauvaises propositions.

- Il y a des gens qui défèrent à la censure; d'autres aux raisons, et tous aux raisons. Je m'étonne que vous n'ayez donc pas la voie générale au lieu de la particulière; ou du moins que vous ne l'y avez jointe. Que je suis soulagé! nul François bon catholique.

-Saint Augustin en a le plus à cause des divisions de ses ennemis. Outre une chose qu'on peut considérer comme une tradition sans interruption de douze mille papes, conciles, etc. (Barré.)

Il faut donc que M. Arnauld ait bien des mauvais sentimens pour infecter ceux qu'il embrasse.

La censure ne leur fait ce bien que quand on les censurera; ils la combattront en disant qu'ils imitent les jansénistes.

Il est permis de ne point donner les bénéfices qui n'ont pas charge d'âmes aux plus dignes'. » Le concile de Trente semble dire le contraire; mais voici comme il le prouve : « Car si cela étoit, tous les prélats seroient en état de damnation, car ils en usent tous de la sorte. »>

«Le roi et le pape ne sont pas obligés de choisir les plus dignes. Si cela étoit, le pape et les rois auroient une terrible charge. »

Et ailleurs: Si cette opinion n'étoit pas vraie, les pénitens et les confesseurs auroient bien des affaires, et c'est pourquoi j'estime qu'il faut la suivre dans la pratique.»

Et en un autre endroit, où il met les conditions nécessaires pour. qu'un péché soit mortel, il y met tant de circonstances, qu'à peine pèche-t-on mortellement; et après l'avoir établi, il s'écrié : « O que le joug du Seigneur est doux et léger!»

Et ailleurs : « L'on n'est pas obligé de donner l'aumône de son superflu, dans les communes nécessités des pauvres si le contraire étoit vrai, il faudroit condamner la plupart des riches et de leurs confesseurs.» Ces raisons-là m'impatientoient lorsque je dis au père : « Mais qui empêche de dire qu'ils le sont? C'est ce qu'il a prévu aussi en ce lieu, me répondit-il, où après avoir dit : « Si cela étoit vrai les plus riches << seroient damnés,» il ajoute : « A cela Arragonius répond qu'ils le sont « aussi; » et Baunez ajoute de plus que leurs confesseurs le sont de même; mais je réponds avec Valentia, autre jésuite, et d'autres auteurs, qu'il y a plusieurs raisons pour excuser ces riches et leurs confesseurs.» J'étois ravi de ce raisonnement, quand il en finit par celui-ci :

« Si cette opinion étoit vraie pour la restitution, ô qu'il y auroit de restitutions à faire!

O mon père, lui dis-je, la bonne raison!-O! me dit le père, que voilà un homme commode! O mon père, répondis-je, sans vos ca

1

4. Les phrases guillemetées dans tous ces articles sont des extraits de Diana.

suistes qu'il y auroit de monde damné! ô que vous rendez large la voie qui mène au ciel! ô qu'il y a de gens qui la trouvent ! »

Qu'avez-vous gagné en m'accusant de railler des choses saintes ? Vous ne gagnerez pas plus en m'accusant d'imposture. (Barré.)

Je ne suis point hérétique; je n'ai point soutenu les cinq propositions. Vous le dites et ne le prouvez pas. Je dis que vous avez dit cela, et je le prouve.

Je dis que vous êtes des imposteurs. Je vous le prouve; et que vous ne le cachez pas, et que vous l'autorisez insolemment. Brisacier, Minier, d'Alby.

Quand vous croyiez M. Puys ennemi de la Société, il étoit indigne pasteur de son Eglise, ignorant, hérétique, de mauvaise foi et mœurs. Depuis, il est digne pasteur, de bonne foi et mœurs.

Puisque vous n'avez touché que cela, c'est approuver tout le reste. Calomnier, hæc est magna cæcitas cordis; n'en pas voir le mal, hæc est major cæcitas cordis; le défendre au lieu de s'en confesser comme d'un péché, hæc tunc hominem concludit profunditas iniquitatis, etc. Les grands seigneurs se divisent dans les guerres civiles, et ainsi vous dans la guerre civile des hommes.

Je veux vous le dire à vous-même afin que cela ait plus de force. (Barré.)

Ceux qui examinent les livres, je suis sûr de leur approbation. Mais ceux qui ne lisent que les titres, et ceux-là sont le plus grand nombre, ceux-là pourroient croire sur votre parole, ne supposant pas que des religieux fussent des imposteurs. (Barré.)

Les saints subtilisent pour se trouver criminels, et accusent leurs meilleures actions. Et ceux-ci subtilisent pour excuser les plus mé

chantes.

Un bâtiment beau par dehors, mais sur un mauvais fondement, les païens sages le bâtissoient; et le diable trompe les hommes par cette ressemblance apparente fondée sur le fondement le plus différent.

Jamais homme n'a eu si bonne cause que moi; et jamais d'autres n'ont donné si belle prise que vous.

--

Les gens du monde ne croient pas être dans les bonnes voies. Ne prétendez pas que ceci se passe en dispute: on fera imprimer vos ouvrages entiers et en françois, et on en fera tout le monde juge. Je prie qu'on me fasse la justice de ne plus les croire sur leur parole. Plus ils marquent de foiblesse en ma personne, plus ils autorisent

ma cause.

Vous dites que je suis hérétique. Cela est-il permis? Et si vous ne craignez pas que les hommes ne rendent justice, ne craignez-vous pas que Dieu ne là rende?

Vous sentirez la force de la vérité et vous lui céderez.

Il faudroit obliger le monde à vous croire, sous peine de péché

mortel.

[ocr errors]

C'est un péché de croire témérairement les médisances. (Non credebitur (sic) temere calumniatori. S. Aug.) (Fecitque cadenda undique me cadere, par la maxime de la médisance.)

-

Il y a quelque chose de surnaturel en un tel aveuglement. Digna

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Je suis seul contre trente mille? Point. Gardez vous la cour, vous l'imposture; moi la vérité : c'est toute ma force; si je la perds je suis perdu. Je ne manquerai pas d'accusations et de persécutions. Mais j'ai la vérité et nous verrons qui l'emportera.

Je ne mérite pas de défendre la religion, mais vous ne méritez pas de défendre l'erreur et l'injustice. Que Dieu par sa miséricorde. n'ayant pas égard au mal qui est en moi et ayant égard au bien qui est en vous, nous fasse à tous la grâce que là vérité ne succombe pas entre mes mains et que le mensonge ne....

- M. Arnauld et ses amis protestent qu'il les condamne en ellesmêmes et en quelque lieu où elles se trouvent: que si elles sont dans Jansenius il les y condamne; que quand même qu'elles n'y soient pas, si le sens hérétique de ces propositions que le pape a condamnées sé trouve dans Jansenius, qu'il condamne Jansénius.

Mais vous n'êtes pas satisfaits de ces protestations: vous voulez qu'il assure que ces propositions sont mot à mot dans Jansenius. Il a répondu qu'il ne peut l'assurer, ne sachant pas si cela est; qu'il les y a cherchées et une infinité d'autres sans jamais les y trouver. Ils vous ont priés vous et tous les vôtres de citer en quelles pages elles sont; jamais personne ne l'a fait. Et vous voulez néanmoins le retrancher de l'Eglise sur ce refus, quoiqu'il condamne tout ce qu'elle condamne, par cette seule raison qu'il n'assure pas que des paroles ou un sens est dans un livre où il ne l'a jamais trouvé, et où personne ne le lui veut montrer. En vérité, mon père, ce prétexte est si vain qu'il n'y eut peut-être jamais dans l'Eglise de procédé si étrange, si înjuste et si téméraire que....

Vous croyez vos desseins si honnêtes, que vous en faites matière de vœu.

Il y a deux ans que leur hérésie étoit la bulle; l'année passée c'étoit intérieur; il y a six mois que c'étoit totidem'; à présent c'est le

sens.

- Vous êtes bien ridicules de faire du bruit pour les propositions. Ce n'est rien.

Il faut qu'on l'entende.

Ou il sait que oui, ou que non, ou il doute; ou pécheur ou hérétique.

Cette même lumière qui découvre les vérités surnaturelles, les découvre sans erreur, au lieu que....

On ouvriroit tous les troncs de Saint-Merri sans que vous en fussiez moins innocens. (Barré.)

- Quelle raison en avez-vous? vous dites que je suis janséniste: que le P. R. soutient les cinq propositions et qu'ainsi je les soutiens. Trois mensonges.

Et je vous prie de ne venir pas me dire que ce n'est pas vous qui faites agir tout cela. Epargnez-moi la réponse: je vous répondrois des choses qui ne plairoient ni à vous ni à d'autres. (Barré.)

Le pape n'a pas condamné deux choses. Il n'a condamné que le sens des propositions. Direz-vous qu'il ne l'a pas condamné? Mais le sens de Jansenius y est enfermé, dit le pape. Je vois bien que le pape le pense à cause de vos totidem. Mais il ne l'a pas dit sur peine d'excom

munication.

4. Le sens littéral, le mot à mot.

Comment ne l'eût-il pas cru et les évêques de France aussi? Vous le disiez totidem, et ils ne savoient pas que vous êtes en pouvoir de le dire encore que cela ne fût pas. Imposteurs, on n'avoit pas vu ma quinzième lettre.

Comment le sens de Jansenius seroit-il dans des propositions qui ne sont point de lui?

Ou cela est dans Jansenius, ou non. Si cela y est, le voilà condamné en cela; sinon, pourquoi le voulez-vous faire condamner?

Que l'on condamne seulement une de vos propositions du P. Escobar, j'irai porter d'une main Escobar, de l'autre là censure, et j'en ferai un argument en forme.

II.

VINGTIEME LETTRE'.

Qui a couru sous le titre de Lettre d'un avocat au parlement à un de ses amis, touchant l'inquisition qu'on veut établir en France à l'occasion de la nouvelle bulle du pape Alexandre VII.

Monsieur,

Du 1er juin 1657.

Vous croyez que toutes vos affaires vont bien, parce que votre procès ne va pas mal; mais vous allez bien apprendre que vous ne savez guère ce qui se passe. Vous êtes bien heureux de voir les affaires de loin. Nous nous sommes trouvés à la veille d'une inquisition qu'on vouloit établir en France, et dont nous ne sommes pas tout à fait dehors. Les agens de la cour de Rome, et quelques évêques qui dominoient dans l'assemblée, ont travaillé de concert à cet établissement, dont ils ont pris pour fondement la bulle du pape Alexandre VII sur les cinq propositions. Ils l'ont fait recevoir au clergé, et avec des suites propres à leur dessein; car il a été arrêté dans l'assemblée, qu'elle seroit souscrite? par tous les ecclésiastiques du royaume sans exception, et qu'il seroit procédé contre ceux qui refuseroient de la signer, par toutes les peines ordonnées contre les hérétiques, c'est-à-dire par la perte de leurs bénéfices, et par bien d'autres violences, comme tout le monde le sait.

Vous voyez bien ce que cela veut dire et que l'inquisition est établie, si le parlement ne s'y oppose. Cependant on parle d'y envoyer cette bulle; de sorte que, si elle y est reçue, voilà la France assujettie et bridée comme les autres peuples.

Je pense souvent à tout ceci, et je n'y trouve rien de bon. Le monde ne sait pas où cela va, ni quelles en sont les conséquences. Ce n'est point ici une affaire de religion, mais de politique; et je suis trompé si le jansénisme, qui semble en être le sujet, en est autre chose en effet que l'occasion et le prétexte; car, pendant qu'on nous amuse de l'espérance de le voir abolir, on nous asservit insensiblement à l'inquisition, qui nous opprimera avant que nous nous en soyons aperçus.

Je veux que ce soit un louable dessein de faire croire que ces cinq propositions soient de Jansénius; mais le moyen ne m'en plaît nulle

4. Cette lettre est de Le Maistre, avocat célèbre, frère de Le Maistre de Sacy, et neveu d'Arnauld.

2. Ce formulaire a été formé et souscrit dans toute la France; quelquefois avec plus, quelquefois avec moins de rigueur, selon le caractère des évêques.

ment. Je trouve que cette manière de priver les gens de leurs bénéfices est une nouveauté de mauvais exemple, et qui touche tel qui n'y pense pas: car croyez-vous, monsieur, que nous n'y ayons point d'intérêt, parce que nous ne sommes pas ecclésiastiques? Ne nous abusons pas, cela nous regarde tous tant que nous sommes, sinon pour nous-mêmes, au moins pour nos parens, pour nos amis, pour nos enfans. Monsieur votre fils, qui étudie maintenant en Sorbonne, ne peut-il pas avoir les bénéfices de son oncle? et mon fils le prieur n'y est-il pas intéressé pour lui-même ? Vous me direz qu'ils n'ont qu'à signer pour se mettre en assurance. J'en demeure d'accord. Mais qu'avons-nous affaire que leur assurance dépende de là? Quoi! si mon fils se va mettre dans la tête que ces propositions ne sont point de Jansenius, comme j'ai peur qu'il le fasse; car il voit souvent son cousin le docteur, qui dit qu'il ne les y a jamais pu trouver, et qu'ainsi, ne croyant pas qu'elles y soient, il ne peut signer qu'il croit qu'elles y sont, parce qu'il dit que ce seroit mentir, et qu'il aime mieux tout perdre que d'offenser Dieu. Si donc mon fils se met tout cela dans la fantaisie, adieu mes bénéfices que j'ai tant eu de peine à lui procurer.

Vous voyez donc bien que tel qui n'y a point d'intérêt aujourd'hui peut y en avoir demain, et que tout cela ne vaut guère. Que ne cherchent-ils d'autres voies pour montrer que ces propositions sont dans ce livre, sans inquiéter tout un royaume? Voilà bien de quoi faire tant de vacarme! Quand ils ne faisoient que disputer par livres, je les laissois dire sans m'en mêler. Mais c'est une plaisante manière de vider leurs différends, que de venir troubler tant de familles qui n'ont point de part à leurs disputes, et de nous planter en France une nouvelle inquisition qui nous mèneroit beau train. Car Dieu sait combien elle croîtra en peu de temps, si peu qu'elle puisse prendre racine: nous verrons, en moins de rien, qu'il n'y aura personne qui puisse être en sûreté chez soi, puisqu'il ne faudra qu'avoir de puissans ennemis, qui vous défèrent et vous accusent d'être jansénistes, sur ce que vous aurez de leurs livres dans votre cabinet, ou sur un discours un peu libre touchant ces nouvelles bulles, comme vous savez que nous autres avocats' en faisons assez souvent; sur quoi on mettra votre bien en compromis. Et quand on ne vous feroit par là qu'un procès, n'est-ce pas toujours un assez grand mal? Or il n'y a rien de si facile que d'en faire, et à ceux qui en sont les moins suspects. Nous en avons déjà des exemples. Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'ils méditent ce dessein; ils se sont appris à tourmenter les gens sur la bulle et sur les brefs d'Innocent X, sur le sujet desquels Vous savez combien les chanoines de Beauvais ont été inquiétés, quand on les voulut forcer à y souscrire, à peine de perdre leurs prébendes, dont ils seroient peut-être dépossédés aujourd'hui, sans l'appel comme d'abus qu'ils en firent au parlement; ce qui a ruiné tous ces desseins.

Car il n'y a rien si bon contre l'inquisition que les appels comme d'abus. Aussi ils le savent bien, et ils ne manquent pas de fermer cette porte quand ils veulent tyranniser quelqu'un à leur aise. C'est ainsi qu'ils en ont usé contre le curé de Libourne en Guyenne, qu'ils firent accuser de jansénisme par des récollets, et le citèrent devant des commissaires qu'ils lui firent donner par les gens du conseil de M. l'archevêque de Bordeaux. Mais, comme ils n'étoient pas ses juges naturels, et

1. Les avocats ont bien fait voir dans tous les temps qu'ils exerçaient une profession libre. Dès qu'ils ne disaient rien qui attaquât la religion et les puissances, ou même quand il n'y avait dans leurs mémoires aucun excès condamnable, ils jouissaient d'une grande liberté.

« PreviousContinue »