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» sorti de la main des hommes, puisque l'évangile » n'en est pas, n'iroit pas, &c. ». Nous pourrions tapporter d'autres passages aussi formels de ses ouvrages. Enfin il n'a jamais négligé de relever ce genre de mérite dans les académiciens dont il a fait l'éloge; et s'il ne disoit pas toujours tout ce qu'il pensoit, on sait combien il étoit éloigné de dire ce qu'il ne pensoit pas.

Il avoit peu de patrimoine, mais il jouissoit d'assez grosses pensions. Il en avoit une entre autres sur la cassette du Roi, dont il a fait passer la moitié à M. le Bovier de Saint-Gervais, mousquetaire du Roi, son parent, et le seul héritier de son nom. Il a disposé du reste de sa fortune, qu'une longue et sage économie avoit rendue considérable, en faveur de madame de Montigny et des deux demoiselles de Marsilly, ses nièces, et de madame de Forgeville, qu'il a instituées ses héritières, chacune pour un quart.sy, so ro

Sa mort a été honorée des regrets de tous ceux qui l'ont connu, et elle a déja été célébrée par plusieurs ouvrages publics mais quelques honneurs qu'on lui décerne, c'en sera toujours moins que n'en mérite la mémoire d'un homme qui, avec aussi peu de défauts, avoit autant de belles qualités, et qui a rendu de si grands services et fait tant d'honneur aux lettres, aux sciences et à la nation, arvog это

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ARTICLE DE FONTENELLE

PAR L'ABBÉ TRUBLET,

Pouvant faire suite à cet éloge.

MALGRÉ un tempérament peu robuste en appa

rence, Fontenelle, qui n'avoit jamais eu de maladie considérable, pas même la petite - vérole joui d'une santé constante jusques vers la fin de sa vie. S'il avoit quelquefois la goutte, elle n'étoit pas pas douloureuse. Il n'eut donc de la vieillesse q que des privations. A surdité, succéda l'affoiblisse menr de la vue. Dans ses deux ou trois dernières années, il devint sujet à d'assez fréquentes for blesses, et même à des évanouissemens; mais il en revenoit bientôt, et se portoit ensuite aussi bien qu'auparavant. Il en eut une le samedi matin 8 janvier 1757, n'en revint qu'imparfaitement, et mourut le lendemain sur les cinq heures du soir. Le samedi précédent, premier jour de l'an, sans se trouver plus mal qu'à l'ordinaire, il avoit de mandé lui-même les sacremens, et les avoit reçus avec une parfaite connoissance earn) sh

Fontenelle dit à M. le curé de Saint-Roch lorsqu'il s'approcha de son lit : « Monsieur, vous » m'entendrez mieux que je ne vous entendrois, Je sais mon devoir et le vôtre dans la circons

»tance présente. Je vous déclare donc que j'ai » vécu et veux mourir dans la foi de l'église catholique, apostolique et romaine ».

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M. le curé de Saint-Roch avoit été le voir quel

ques jours auparavant.

Depuis plusieurs années, Fontenelle voyoit souvent le père Bernard d'Arras, capucin, auteur de divers ouvrages de théologie et de piété.

Les facultés de son ame, à la mémoire près, s'étoient encore mieux soutenues que celles de son corps. Il y eut toujours de la finesse dans ses pensées, du tour dans ses expressions, de la vivacité dans ses reparties, de la justesse et même de la profondeur dans ses raisonnemens; et s'il paroissoit quelquefois affoibli et tombé, ce n'étoit que dans les occasions où l'esprit a besoin, pour opérer, du se cours de la mémoire.

Son caractère, en faisant son bonheur, a sans doute beaucoup contribué à sa bonne santé et à sa longue vie. Il faut être heureux pour vivre sain et long-temps. Fontenelle joignoit la gaieté à la sagesse. Sa gaieté ajoutoit à ses plaisirs, et dimi nuoit les peines que sa sagesse n'avoit pu écarter.

La fortune lui fut aussi favorable que la nature. Né presque sans bien, il devint riche, pour un homme de lettres, par les du Roi, et par une économie sans avarice.

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Il plaisoit trop dans la société pour ne s'y pas

du

plaire. Il y portoit toutes les qualités aimables et agréables, de la douceur et de l'enjouement, et autant de politesse que d'esprit. Les personnes plus haut rang l'admettoient dans leur familiarité. Aucun homme de lettres n'a joui de plus de considération dans le monde; et il la devoit à la sagesse de sa conduite et à la décence de ses mœurs, autant qu'à la réputation que ses ouvrages lui avoient acquise.

Il fut encore heureux comme Auteur; car ces ouvrages, qui lui ont procuré une gloire si flatteuse et à laquelle il n'étoit pas insensible, ne lui avoient point coûté de pénibles efforts, de longues et laborieuses veilles. Il travailloit avec facilité, quoiqu'avec beaucoup de soin; et, grace à une santé très-égale, cette facilité étoit à-peu-près la même tous les jours. Delà naissoit l'égalité qui règne dans ses écrits, et qui fait un de leurs principaux caractères. On peut y trouver des défauts; mais on n'y trouve point d'endroits foibles par la foiblesse de l'Auteur, ou par sa négligence.

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Autre source du bonheur de Fontenelle, et nouvelle preuve de sa sagesse; il n'avoit point été marié, et n'avoit jamais eu la plus légère envie de se marier.no i

EXTRAIT

DU DICTIONNAIRE HISTORIQUE.

FONTENE

ONTENELLE (Bernard le Bovier de), naquit en 1657, à Rouen, d'un père avocat, et d'une mère sœur du grand Corneille. Cet enfant, destiné à vivre près d'un siècle (dir l'abbé Trublet), pensa mourir de foiblesse le jour même de sa naissance. Le jeune Fontenelle fit ses études à Rouen chez les Jésuites, qu'il a toujours aimés. En rhétorique à treize ans, il composa, pour le prix des Palinods, une pièce en vers latins, qui fut jugée digne d'être imprimée, mais non d'être couronnée. Fontenelle passoit dès-lors pour un jeune homme accompli: il l'étoit, et du côté du cœur, et du côté de l'esprit. Après sa physique, il fit son droit, fut reçu avocat, plaida une cause, la perdit, et promit de ne plus plaider. Il renonça au barreau pour la littérature et la philosophie, entre lesquelles il partagea sa vie. En 1674, à dix-sept ans, il vint à Paris; son nom, déja célèbre, l'y avoit précédé. Plusieurs pièces de vers, insérée dans le Mercure Galant, annoncerent à la France un poëte aussi délicat que Voiture, mais plus châtié et plus pur. Fontenelle avoit à peine vingt ans, lorsqu'il fit une grande partie des opéra de Psyché et de Bellerophon, qui parurent en 1678 et 1679, sous le nom de Thomas Cor

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