GODE AU

Lien des peuples écartez,

Champ de la paix & de la guerre,

Mer, fais bénir ton Maître à tes flots redoutez..

Moins de beautez & de merveilles,

Terreftres animaux., béniffez fon pouvoir.

Félicité des miférables,

Dont les charmes délicieux,

Malgré le fort capricieux,

Rendent tous les hommes femblables;
Enchanteur des foucis cuifans,
Pere des menfonges plaifans,
Mort qui nous conserves la vie,
Sommeil, qui vois à tes pavots:

Toute la Nature affervie,

D'un Dieu toujours veillant adore le repos.

Vous, que la loi de la naiflance

Eleve au trône paternel

Vous, dont le choix de l'Eternel
Fait la fouveraine puiffance;
Portraits de la Divinité,

Rois, de qui le bras irrité

Lance un redoutable tonnerre,

Révérez au pied des autels

Celui qui fait trembler la Terre,

Et n'oubliez jamais qu'il vous a faits mortels.

Vierges, dont les yeux pleins de flamme
Lancent un funefte poison,

Et dérobent à la raison

Le jufte hommage de nos ames;

Ne nous vantez plus des

appas

Que le tems n'exemptera pas

De fon injurieux empire;

Louez l'Auteur de vos attraits,

Et que votre étude n'aspire

Qu'à conferver un zéle égal à fes bienfaits.

GODEAU.

GODEAU. Et lui feul

Car fans lui vos forces font vaines, peut étendre ou racourcir vos jours.

Qu'il foit votre attente derniere,
Vieillards, de qui les aus legers,
Au milieu de tant de dangers
Ont conduit leur longue carriere;
Troncs féchez, fépulchres mouvans,
Qui n'êtes ni morts, ni vivans,
Plaintives ombres de vous-mêmes,
Rendez graces, d'un cœur ardent,
Au Dieu dont les bontez fuprêmes
Ont fi loin du matin marqué votre occident.

Ames, qui parmi la licence,

Et fous cet air contagieux
Qui fe répand en tant de lieux,
Vous confervez dans l'innocence;
Pour qui les fentiers des vertus,
Quoique rudes & peu battus,
Sont pleins d'immortelles délices;
Louez ce Dieu qui vous conduit,
Qui vous fait triompher des vices,
Et vous fert de Soleil au milieu de la nuit.

Mais nous qu'il couronne de gloire-
Nous qu'il préferve de ces feux,
A qui dans ce combat fameux,

1

Il fait remporter la victoire ;
Nous dont il a brifé les fers,

Nous qu'il retire des enfers,

Nous dont la caufe arme les anges;
Célébrons fon nom à jamais,

Faisons retentir fes louanges,

Et quand nous parlerons, parlons de fes bienfaits

Rencontre des cœurs immobiles;

Leurs efforts ne font plus mortels,
Et les rofeaux les plus fragiles,

En colonnes changez, foutiennent les autels.

DU CANTIQUE DE ZACHARIE

1 Benedictus Dominus Deus Ifraël.....

ENFIN je vois fur l'horifon
Venir cette heureuse journée,

1 Après la naiffance & la circoncifion de S. Jean, Za→ charie fon pere, infpiré du Saint-Efprit, chanta ce Cantique, pour célébrer la venue du MESSIE, dont il fçavoit que S. Jean étoit le Précurfeur. S. Luc. Chap. I.

GODEAU.

Qui bornant d'Ifraël la trifte deftinée, GODEAU. Lui doit de tous les maux donner la guérifon.

Un aftre, brillant de fplendeur,

Diffipe la nuit où nous fommes;

Et Dieu prêtant l'oreille à la plainte des hommes,
Pour brifer leurs liens, abaiffe fa grandeur.

Peuples, il n'en faut plus douter,

La maison de ce grand Prophete,

Dont en un fceptre d'or Dieu changea la hou lette,

Nous préfente celui qui nous doit racheter..

Nous avons foupiré long tems

Après l'effet de tes Oracles :)

Mais, ô Dieu de Jacob! en ce jour de miracles,
Tous nos maux font guéris, & tous nos vœux

contens.

Tu fais grace à tous les humains,
Tu finis nos longues miferes;:

Et le bien qu'en efprit tu fis voir à nos peres,
Eft le bien qu'aujourdhui nous tenons dans nos
mains..

O gloire! ô bonheur fans pareil!
Cher enfant qui me dois la vie,

Ah! qui n'auroit fujet de te porter envie,
En te voyant fervir d'aurore à ton Soleil !

Tu