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DE SCU-
DERY.

LE SOUFFLET.

On fuppofe que c'est lui qui parle à la Dame
à qui il est envoyé.

AUTREFOIS en Zéphir je volois par les plaines,
Et fentois les ardeurs des amoureuses peines :
Maintenant en foufflet je me vois transformé,
Et ne puis plus courir après l'objet aimé.

Flore
pour me punir me changea de la forte :
Pour un zéphir d'hiver, j'ai Phaleine affez forte;
Et je vous fervirai jufqu'au mois des amours,
Où l'aimable Printems ramene les beaux jours.
Ce fut moi, malheureux! (oferai-je le dire?
Ah! quand j'y pense encor, mon trifte cœur four
pire),

Qui badinant un jour avec de jeunes fleurs,
Ternis infolemment leurs plus vives couleurs,
Sans fçavoir que SAPHO, votre chere conquête
Vouloit vous les donner le jour de votre fête.
Lors elle s'en plaignit, Flore s'en courrouça,
Et pour la contenter, me bannit, me chaffa,
M'interdit les jardins de toute la nature,
Et me fit prendre enfin cette trifte figure:
Mais fi je puis paffer l'hiver auprès de vous,
De nul autre zéphir je ne ferai jaloux.

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LA FAUVETTE A SAPHO,

En arrivant à fon petit bois fuivant sa coutume,

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Mademoiselle Defcartes, a célébré la Fauvette dans le Madrigal fuivant, adreflé à Mademoiselle DE SCUDERY. Voici quel eft mon compliment

Pour la plus belle des fauvettes,

Quand elle revient où vous êtes.

Ah! m'écriai-je alors, avec étonnement,

N'en déplaife à mon oncle, elle a du jugement. On a prouvé, contte le fyftême de M. Defcartes, que les bêtes ne font point de pures machines, & qu'elles ont quelque principe de fentiment & de connoiffance qui les diftingue d'une montre.... La plus petite guenon, dit Mademoiselle DE SCUDERY dans fa converfation de l'incerti-tude, détruit par fon induftrie & par fon intelligence toutes les machines de cet excellent Homme, qui ne laiffe pas d'être très-digne de notre admiration pour avoir fçû don ner de l'ordre & de la vraisemblance à cette efpece de Philofophie qu'il appelloit quelquefois lui-même fon Roman Philofophique.

2 Le Doge de Gennes, accompagné de quatre Sénateurs, vint en France en 168. faire hommage à LOUIS LE GRAND au nom de la République.

DE SCU

DERY.

TE SCU-
PERY.

Quoi, lui dis-je, entrer en France,.
Et vous montrer en ces lieux !
Oui, dit-il, par la clémence
Du plus grand des demi-Dieux.

Son cœur toujours magnanime,
Ne pouvant fe démentir,
Veut oublier notre crime,
Voyant notre repentir.

Dieux quel bonheur eft le vôtre,
D'aller recevoir fa loi !

Je n'en voudrois jamais d'autre,
Mais ce bien n'est pas pour moi.

C'est affez que ma maîtresse

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Comparaison de la beauté, de l'efprit & de la

vertu.

La fleur que vous avez vû naître,
Et qui va bien-tôt difparoître,

C'eft la beauté qu'on vante tant:
L'une brille quelques journées,
L'autre dure quelques années,
Et diminue à chaque inftant.

L'efprit dure un peu davantage,
Mais à la fin il s'affoiblit;
Et s'il fe forme d'âge en âge,
Il brille moins plus il mûrit.

La vertu, feul bien véritable,
Nous fuit au-delà du trépas ;
Mais ce bien folide & durable,
Hélas! on ne le cherche pas.

STANCES

Sur la Réfurrection.

TOMBEAU de mon Sauveur, où mon espoir fe

fonde,

N'aurez-vous point pitié des peines que je fens ?
Ouvrez-vous, ouvrez-vous à mes triftes accens,

Ou

pour me recevoir, ou pour le rendre au monde.

Grand-Dieu, plein de bonté, quel malheur eft

le nôtre !

En venant nous fauver vous recevez la mort :
Je renonce à mon bien, s'il vous fait tant de tort;
Verfez tout notre fang, & reprenez le vôtre.

DE SCU

DERY.

Je ne vous comprends point, adorable Sagesse: DE SCU- Quoi? le pere du jour a perdu la clarté ! Comment joindre la mort avec l'éternité, Et le Dieu tout-puissant avec tant de foiblesse !

DERY.

Je vous entends, Seigneur. La grotte s'eft

verte

Ou

Qui vous cachoit à moi dans ces obscurités :
Vous mourez, mon Sauveur; mais vous reffuf-

citez:

La mort, en vous perdant, n'a trouvé que fa perte.

Quel bien, & quelle gloire en merveilles fé

conde !

Venez avecque nous; chantez, Anges, chantez :
Vous mourez, Tout-puissant, mais vous refsus-

citez

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Et cette courte mort est le falut du Monde.

Que la Terre commence, & quele Ciel réponde: Ouvrez-vous, cieux des cieux; chantez, aftres, chantez :

Yous moureż, Tout-puiffant, mais vous reffuscitez ;

Et cette courte mort est le falut du Monde.

Fin du fecond Volume

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