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Louis, au comble des grandeurs,
Ténoit vos récompenses prêtes;
Et du trône des Empereurs-
Il vous partageoit les conquêtes..

Les moindres rayons de fes yeux
Chaffoient la trifteffe importune;
Les Graces fuivoient en tous lieux,
Menant la Gloire & la Fortune.

Moi-même au milieu des beaux Arts
Je vis, ou crus voir mon image,
Briller de l'un de fes regards,
Au fortir d'un affreux nuage.

Le vois-tu ce Roi, ce Héros?
Me dit la Déeffe obligeante :
Lui feul doit faire le repos,
L'honneur & le deftin d'Acante.

Hâte-toi, vole à Saint Germain:
Que cet heureux jour de Dimanche,
Pour toi, comme pour un Romain
* Soit marqué d'une pierre blanche.

Si quelque jour nous te faifons
L'un des grands Fourriers de la Gloire,

1 Allufion à la craye. Les Romains marquoient d'une

pierre blanche les jours heureux.

PELISSON.

PELISSON.

Pour aller marquer les beaux noms
Au fameux Temple de Mémoire ;

Ces deux jeunes enfans de Mars
Y feront en gros caractere,
Un peu plus haut que les Céfars,
Mais un peu plus bas que leur pere.

Dialogue d'Acante & de Pégafe. *

ACANTE.

A mon fecours, Pégafe, en ce befoin extrême Il me manque un cheval, il faut fuivre le Roi.

PEGASE.

Le fuivre & quel moyen je ne le puis moi

même,

?

Non plus que ton bider, ou ton grand palefroi.

ACANTE.

Tu fuivis toutefois le diligent Achille
Dans le cours glorieux de fes hardis exploits.

PEGASE.

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D'accord: mais en dix ans il prenoit une Ville:
En prit-il jamais quatre en la moitié d'un mois?

I M. PELISSON, qui étoit de tous les voyages du Roi, manqua un jour de cheval; ce qui lui fit naître l'idée de cette ingénieufe fiction. Il feroit difficile de prendre dir tour plus fin & plus délicat pour louer un grand Prince, & ce jeu d'efprit vaut un panégyrique dans les formes,

A CANT Е.

Et le fameux Céfar, qui prefque fans combattre,
Venoit, voyoit, vainquoit, ne le fuivois-tu pas ?
PEGASE.

Jamais il n'eût quitté la belle Cléopatre,
Pour venir prendre Dole un jour de Mardi-gras.

A CANTE.

Mais Alexandre enfin, vîte comme un tonnerre,
Toujours à fes côtez te voyoit galopper.

PEGASÉ.

Je le perdois fouvent, il alloit tant que terre:
Mais quand il s'enyvroit on pouvoit l'attraper.
ACANTE.

Je t'entends; rien ne fuit un Roi que rien n'arrête,
Ni plaifirs, ni douleurs, ni brouillards, ni beaux

jours;

Ni calme décevant, ni terrible tempête;

Nile froid des hivers, ni le feu des amours.
Comme toi je l'admire, & ne m'en fçaurois taire :
Sur un fi grand fujet on ne peut

achever.

Mais adieu, pour ce coup tu n'es pas mon affaire;
Je veux un vrai cheval, que je puisse crever.

STANCES.

Sur le retour du Printems.

Vous revenez, aimables fleurs,

PELISSON.

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PELISSON

Vous trouviez la courfe bornée.
Je vis fous une dure loi,

Et voici la feconde année

Qu'il n'eft plus de printems pour moi.

La même Sageffe profonde
Qui vous ôte & vous rend au monde,
Me cache en cet obfcur tombeau ;
Et peut, en dépit de l'envie,
Remettre en un éclat nouveau
Ma fombre & languiffante vie.

Adorons ce Dieu fouverain:
Comme vous la puiffante main
Me forma de poudre & de bouë:
Cent maux peuvent m'environner :
Mais quoi ? Je l'aime & je le louë;
Il ne me
peut abandonner.

Au Soleil.

Je te voi, Soleil, je te voi
Marcher avec l'éclat d'un Roi;
Mais quand ma vûë en eft bleffée,
Un autre objet, plus grand que toi,
Occupe toute ma pensée.

Je le fens, il eft dans mon cœur;
Il ternit ton éclat trompeur :

Près de fes merveilles fans nombre,

Ta flamme eft moins qu'une vapeur,
Et ta lumiere moins qu'une ombre.

Pár lui tu vis, par lui tu cours,
Et formes les nuits & les jours:
Va, Soleil, où fa voix t'appelle;
Je n'ai ni regards, ni difcours,
Que pour la lumiere immortelle.

EPITRE

A MONSIEUR CONKAR T.

La vaine gloire,

l'amour des richesses, double

fource de nos plus grands maux.

Le Ciel qui voit la Terre au vice abandonnée,
Les monftres adorés, la Vertu détrônée,
Jufqu'au piel des autels régner l'impiété,
Et parmi les humains tant d'inhumanité,
Les condamne ici-bas à vieillir pour leurs crimes,
De la gloire ou de l'or miférables victimes.
Quelques uns feulement, fes plus chers favoris,
Bons citoyens, bons fils, bons freres, bons maris,
Comme toi, cher CONRART, exempts de toute
envie,

Ont loifir de goûter les vrais bien de la vie.

Les beaux jours du Printems, l'Automne avec fes

fruits,

PELISSON

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