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Si Dieu par les bontez n'eût aidé mes foibleffes.

MON

C'est lui qui dans mon cœur vient combattre au- TREUIL.

jourd'hui

Votre humeur, vos difcours, vos foins & vos ten

dreffes:

Vous ne voudriez pas l'emporter deffus lui,

RABUTIN.

RABUTIN.

R

OGER DE RABUTIN, Comte de Bussy, originaire de Bourgogne, nâquit le 5 Avril 1622. & prit le parti des armes en 1634. Il étoit Mestre de Camp de la Cavalerie légere, Lieutenant Général des Armées du Roi, & l'un des Quarante de l'Académie Françoife, où il avoit été reçu en 1663. Son Hiftoire amoureuse des Gaules le brouilla avec la Cour. Elle fut dénoncée à Lours XIV, qui envoya le Comte de Bussy à la Bastille, d'où il ne fortit au bout de huit mois, que pour aller en exil dans fes Terres. Il y demeura dix-fept ans. Rappellé enfin à la Cour,

i

Cette Hiftoire et une peinture des intrigues de pluheurs Dames du premier rang. Elle devint publique par l'indifcretion d'une perfonne à qui l'Auteur en avoit conhé le manufcrit. Au refte il n'y a que la malignité qui ait pû donner tant de cours à cet Ouvrage, qui n'est qu'e es foible imitation de Pétrône,

il s'y trouva fi neuf & fi embarraffé, qu'il jugea à propos de s'en exiler de lui-même RABUTINA" peu de tems après fon rappel. Il fe retira

C

en Bourgogne, & mourut à Autun le 9 Avril 1693. âgé de 75 ans. Le Comte de Bussy étoit un des hommes de France qui avoit le plus d'efprit, & qui poffedoit le mieux notre Langue, Ses Mémoires feront toujours lûs de toute la France, foit par curiofité pour les faits hiftoriques, foit par goût pour l'élégance de la diction. On n'eftime de toutes fes Pocfies qu'un très petit nombre d'Epigrammes imitées de Martial.

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EPIGRAMMES

IMITE'ES DE MARTIAL.

1.

Vous avez bien de la beauté,
Vous êtes en la fleur de l'âge;

Son Epitaphe en profc, inferée dans l'Hiftoire de l'Académie Françoife, (Tom. II. pag. 298.) mérite fort d'être lûë. 2. Bella

es a

novimus ¿ & puella, &c, L. 1, Epig. 65.

RABUTIN,

Mais vous gâtez cet avantage

Par un excès de vanité.

Tant que vous vous croirez des Beautez le modèle,
Vous ne ferez jeune, ni belle,

II.

I EN Damon tout est mistere,
De tout il fait des fecrets:

Il dit tout bas que le Soleil éclaire,
Que le tems eft chaud, qu'il eft frais.
Cette manie eft fans pareille,

Il en fait fon unique emploi:

Il trouve tant de goût à parler à l'oreille,
Qu'il feroit à l'oreille un éloge du Roi.

III.

2 QU'AVEZ-VOUS donc fait à Verfaille?
Me difoit Cloris l'autre jour;
Car enfin quatre mois de Cour
Ne vous ont paş valu la maille.
Hé mon Dieu! lui dis-je, Cloris,
J'ai plus gagné que l'on ne penfe:
On ne peut estimer le prix

De quatre mois de votre abfence.
IV.

Tu ne vantes les gens que des fiécles passez :

1 Garris in aurem femper omnibus, &c. Lib. 1. Ep. 90.
2 Quid mihi reddat ager quæris, &c. Lib. 2. Ep, 38.
3 Miraris veteres, Vacerra, folos. L. 8. Ep. 65.
Maynard, qui a imité auffi cette Epigramine de Martial,
Pardonne

RABUTIN

Pardonne mon aveu fincere & légitime;

Je ne t'eftime pas affez,

Pour vouloir par ma mort mériter ton estime.

V.

1 MON fils, écoute, je te prie,
Ce qui fait une heureuse vie.
Point de chagrin, point de procès,
Un feu qu'on n'éteigne jamais,
Affez de biens acquis fans peine,
Un air aifé, point de Climene,~
Des amis égaux, le corps fain;
Etre prudent fans être fin ;

Peu de devoirs, point de querelles,
Peu de viandes, mais naturelles ;
Une femme de bonne humeur,
Mais au fond pleine de pudeur;
Etre complaifant & facile,

a donné un tour plus obligeant à la fienne, Je ne dois pas encore attendre Que tu fois un de mes lecteurs ;. les Auteurs

Tu n'approuves que

Dont la tombe garde la cendre.
Ton puiffant efprit m'a charmé,
Et l'honneur d'en être eftimé
Eft le plus grand que je demande :
Mais, GUYET, pour me l'acquérir,
Ma vanité n'eft pas fi grande,
Que je me hâte de mourir.

Vitam que faciunt beatiorem,

Jucundiffime Martialis, hac funt... L. 15.

Ep. 47.

Tome II.

LI

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